Kenya: rapport periodique cumulé (8 ème - 11 ème), 2008 - 2014

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INTRODUCTION

Le Gouvernement de la République du Kenya a l’honneur de présenter à la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, ses huitième à onzième rapports périodiques, cumulés en un seul document qui porte sur la période allant de 2008 à septembre 2014, conformément à l’article 62 de Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après désignée la «Charte africaine» ou simplement la «Charte»). Le présent rapport a été préparé dans le cadre de larges consultations entre de hauts responsables gouvernementaux, et les représentants d’organisations de la société civile et des institutions nationales indépendantes des droits de l’homme. Le rapport comprend trois parties :

I. La Partie A décrit le cadre général dans lequel s’inscrit la protection des droits de l’homme reconnus par la Charte dans le pays. II. La Partie B fournit des informations sur chacun de ces droits, devoirs et libertés fondamentales en rapport avec les différents articles de la Charte. III. La Partie C renseigne de manière précise sur la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels tels que décrits dans la Charte. Partie A 1. Le Gouvernement du Kenya a, depuis la présentation de son dernier rapport cumulé, réalisé des progrès considérables dans le domaine de la protection des droits, libertés et devoirs de ses citoyens, tels que consacrés par la Charte. Le fait nouveau le plus important a été la promulgation d'une nouvelle Constitution par référendum en 2010. La Constitution a, pour la première fois codifié, les valeurs et principes nationaux qui doivent sous-tendre l’examen, la formulation et la mise en œuvre des politiques publiques, décisions et procédures administratives, ainsi que l’adoption et l’application des lois. Ces valeurs et principes, qui incluent les droits de l’homme, l’égalité, la non-discrimination, la justice sociale, l’intégration, la protection des groupes marginalisés, la primauté du droit, la démocratie, la participation du public, la dignité humaine, la bonne gouvernance, l’intégrité, le patriotisme, l’unité nationale, le partage et la décentralisation du pouvoir, s’imposent à tous les organes de l’État, tous les fonctionnaires et à toute autre personne.

2. Le quatrième chapitre de la Constitution comporte une Déclaration des droits complète qui offre un cadre juridique, politique et institutionnel renforcé en faveur de la protection et de la promotion des droits civils et politiques garantis par la Charte. Le droit à un procès équitable, la liberté de la presse, la liberté d’expression, de réunion, de culte, le droit d’être à l’abri de la torture, pour n’en citer que quelques uns, font partie des droits que le Gouvernement kenyan, en tant que principal titulaire de droits, est résolu à faire respecter...

3. La Déclaration des droits s’applique à l’ensemble de la législation et s’impose à tous les organes de l’État. L’article 21(1) dispose que l’État est tenu d’observer, de respecter, de protéger, de promouvoir et de réaliser l’ensemble des droits et des libertés fondamentales énoncés dans la Déclaration des droits. Cela signifie qu’à chaque fois que les fonctionnaires et agents s’acquittent de leurs fonctions, ils doivent se conformer aux dispositions de la Déclaration des droits. 6

4. La Constitution du Kenya de 2010 autorise certaines limites à l’exercice des droits, mais s’éloigne des dispositions radicales sur les inconvénients, une des caractéristiques majeures de l’ancienne Constitution. L’article 24 (1) contient une clause générale de limitation de l’exercice des droits, avec des critères clairement définis que toute limite doit respecter avant de pouvoir être considérée raisonnable. Cette clause précise que toute limite d’un droit humain ou d’une liberté fondamentale doit se faire par le biais d’une législation, et seulement dans la mesure où cette limite est raisonnable et justifiée dans une société ouverte et démocratique basée sur la dignité humaine, l'égalité et la liberté, en tenant compte des facteurs pertinents.

5. L'article 58 (6) de la Constitution dispose que toute législation adoptée à la suite d'une déclaration de l'état d'urgence ne peut limiter un droit ou une liberté fondamentale énoncés dans la Déclaration des droits que dans la mesure où la limitation est strictement exigée par la situation d'urgence, et la limitation est conforme aux obligations de l'État en vertu des règles du droit international qui s’appliquent à l'état d'urgence.

6. Les tribunaux ont affirmé leur volonté de faire appliquer les droits en invoquant directement les traités auxquels le Kenya est un État partie. Cette position est désormais renforcée par l'article 2 (6) de la Constitution du Kenya, 2010, qui dispose que tout traité ou convention ratifiés par le Kenya fait partie de son droit interne en vertu de la Constitution. Il existe actuellement une jurisprudence croissante, où les tribunaux nationaux se sont fondés sur les dispositions de divers traités relatifs aux droits de l'homme que le Kenya a ratifiés pour faire respecter des droits fondamentaux. Par exemple, dans Muigai c/ John Bosco Mina Kariuki & Jerioth Wangechi Muigai (2014) eKLR, la Cour d'appel a invoqué les instruments internationaux qui interdisent la discrimination contre les femmes, à savoir, la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels l'homme, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et le Pacte relatif aux droits civils et politiques, pour déclarer que le joug et le fardeau de la discrimination ne doivent plus être portés par le sexe féminin parce que, en vertu de la Constitution, les règles générales du droit international font partie des lois du Kenya.

7. L’article 23 (1) de la Constitution du Kenya 2010 donne à la Haute Cour compétence pour connaitre des requêtes aux fins de réparation pour tout refus, violation ou atteinte, ou menace d'un droit ou d’une liberté fondamentale énoncés dans la Déclaration des droits. L’article 23 (2) charge le Parlement d'adopter une loi donnant compétence en premier ressort aux tribunaux de première instance, le cas échéant, pour accorder des réparations en cas de violations des droits de l'homme. La Commission nationale des droits de l'homme du Kenyan (KNCHR) jouit de pouvoirs quasi-judiciaires pour enquêter sur toute plainte concernant toute question relative aux droits de l'homme dans toute fonction publique ou privée ou institution privée. La Commission de la justice administrative (CAJ) a également le pouvoir d'enquêter et de faire rapport sur tout acte ou omission dans l'administration publique au niveau toute sphère du gouvernement.

8. Tout individu ou groupe dont les droits humains sont violés ou lésés est, en vertu de l'article 22 de la Constitution, fondé à saisir la justice pour obtenir réparation. L’article 23 (3) énumère les types de réparation à la disposition des justiciables. Ce sont, entre autres, un jugement déclaratoire, une injonction, une ordonnance conservatoire, une déclaration de nullité de toute loi qui viole l'un des 7 droits énoncés dans la Déclaration des droits, une ordonnance d'indemnisation, et une ordonnance de contrôle judiciaire.

9. D’autres mesures prises pour sauvegarder les droits civils et politiques comprennent l'élaboration de plusieurs textes de loi et politiques, notamment le projet de loi 2013 sur les personnes privées de liberté, le projet de loi sur les victimes d’infractions, et le projet de loi 2014 sur la prévention de la torture qui sont à différentes étapes de leur processus d’adoption. 10. Conformément aux dispositions constitutionnelles, plusieurs solides institutions ont été créées dans le but de protéger et de défendre les principes de la démocratie et des droits de l’homme. Ces institutions sont les suivantes, la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya (KNCHR), la Commission nationale du genre et de l’égalité (NGEC), la Commission de l’administration de la justice (CAJ), la Commission indépendante chargée des élections et de la délimitation des circonscriptions électorales (IEBC), la Commission de l’éthique et de la lutte contre la corruption (EACC), l’Autorité indépendante de surveillance de la police (IPOA) et le Bureau indépendant du Directeur des poursuites publiques (ODPP).

11. Pour mieux s’assurer que le peuple kenyan jouit de ses droits d'une manière significative, le gouvernement a élaboré le document de session n ° 3 de 2014 sur la Politique nationale et le Plan d’action pour les droits de l’homme, qui donne effet aux dispositions de la Déclaration des droits figurant dans la Constitution. La Politique nationale fournit un cadre global et cohérent qui pose les principes généraux relatifs aux droits humains devant guider le gouvernement et les autres acteurs dans l'exécution des programmes, des stratégies et des plans destinés à améliorer la réalisation et la jouissance des droits par le peuple kenyan.

12. Le Plan national d'action, qui fait partie intégrante de la politique, comprend des objectifs et des indicateurs précis pour mesurer les progrès accomplis concernant la garantie des droits dans le pays. Il clarifie également les responsabilités entre les acteurs étatiques titulaires de devoirs dans le domaine des droits de l'homme.

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