Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique (SRRWA) - 79OS

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RAPPORT D'ACTIVITÉ INTERSESSION

PAR

L’HONORABLE VICE-PRÉSIDENTE JANET RAMATOULIE SALLAH-NJIE
RAPPORTEURE SPÉCIALE SUR LES DROITS DE LA FEMME EN AFRIQUE

PRÉSENTÉ A L’OCCASION DE LA 

79ème SESSION ORDINAIRE DE LA COMMISSION AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES

14 mai - 3 juin 2024
 
Banjul, Gambie

INTRODUCTION

1.Conformément aux Règles 25(3) et 64 du Règlement intérieur (2020) de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission) et à sa Résolution CADHP/res.38 (XXV) 99 du 5 mai 1999, je présente le présent rapport en ma qualité de Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique (SRRWA). Ce rapport rend également compte de mes activités en qualité de Membre de la Commission au cours de la période considérée.

2.Il est organisé en cinq chapitres couvrant, chacun, différents aspects des activités menées au cours de l’intersession consécutive à la 77ème Session ordinaire de la Commission, qui s'est tenue à Arusha, en Tanzanie, du 19 octobre au 9 novembre 2023.

3.Le rapport offre un aperçu complet, structuré en cinq chapitres, de mes engagements et activités au cours de la période sous revue. Il commence en présentant dans le détail mes contributions en tant que Membre de la Commission, puis il met en évidence mon rôle de SRRWA, notamment pour ce qui est de ma participation à des événements importants. Le troisième chapitre s'intéresse aux efforts consentis dans le cadre du suivi par pays, y compris les actions visant à lutter contre les violations des droits de l’homme, et salue les progrès réalisés dans certains pays. Le quatrième chapitre fournit des informations sur la situation des femmes et des filles pendant la période d’intersession. Dans sa conclusion, le rapport fait une présentation succincte des observations et recommandations à examiner.

CHAPITRE UN :     ACTIVITÉS MENÉES EN QUALITÉ DE COMMISSAIRE

A.Réunions avec les Organes délibérants de l’Union africaine

4.En ma qualité de Vice-présidente de la Commission, j’ai participé aux réunions suivantes des organes délibérants de l’UA, tenues entre janvier et février 2024.

47ème Session ordinaire du Comité des Représentants permanents 

5.J'ai participé, du 15 janvier au 13 février 2024, à la 74ème Session ordinaire du Comité des représentants permanents (COREP), qui s’est tenue virtuellement.

44ème Session ordinaire du Conseil exécutif 

6.J'ai pris part, les 14 et 15 février 2024, à la 44ème Session ordinaire du Conseil exécutif, tenue à Addis-Abeba, en Éthiopie.

37ème Session ordinaire de la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement

7.J'ai participé, les 17 et 18 février 2024, à la 37ème Session ordinaire de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement (la Conférence), réunie à Addis-Abeba, en Éthiopie.

B.78ème Session ordinaire virtuelle (privée)

8.J'ai assisté, du 23 février au 8 mars 2024, à la 78ème Session ordinaire (privée) de la Commission qui s’est tenue virtuellement pour examiner les Communications, les rapports en suspens et autres questions.

C. 1er Forum conjoint des Mécanismes spéciaux de la Commission

9.J’ai participé au premier Forum conjoint des Mécanismes spéciaux de la Commission, réuni à Dakar, au Sénégal, du 25 au 27 avril 2024. Cet événement fondateur, organisé par la Commission, avait pour thème : « Faire progresser la protection et la promotion des droits de l’homme en Afrique :  Renforcer les engagements, surmonter les défis et renforcer les opportunités. » Il a offert aux parties prenantes un cadre de concertation sur des questions transversales et de participation à des initiatives conjointes reconnaissant la caractère interdépendant de tous les droits de l’homme. Le Forum avait pour objectif principal d’améliorer l’approche intersectionnelle de la Commission en matière de droits de l'homme, en mettant l’accent sur la nature interconnectée de tous les droits.

CHAPITRE II :     ACTIVITÉS EN QUALITÉ DE RAPPORTEURE SPÉCIALE SUR LES DROITS DE LA FEMME EN AFRIQUE

A.Lancement de l’Observation générale conjointe sur les Mutilations génitales féminines

10.Le 10 novembre 2023, j’ai prononcé l'allocution de bienvenue au lancement de l’Observation générale conjointe du Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant (CAEDBE) et de la Commission, qui a eu lieu à Addis-Abeba, en Éthiopie. Au cours de mon allocution de bienvenue, j’ai souligné l’impact néfaste des mutilations génitales féminines (MGF) sur le bien-être physique et psychologique des femmes et des filles. J’ai insisté sur les violations généralisées des droits humains associées à cette pratique. J’ai également souligné l’importance des efforts de collaboration pour mettre un terme à ces pratiques traditionnelles néfastes, tout en citant, à titre d'exemple, les efforts conjoints du CAEDBE et de la Commission.

B.Sixième Dialogue judiciaire

11.J'ai pris part, du 20 au 22 novembre 2023, au Sixième Dialogue judiciaire, organisé par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples à Alger, en Algérie, événement au cours duquel les échanges ont porté sur les défis et opportunités relatifs à l'application de la jurisprudence régionale et internationale en matière de droits de l’homme par les tribunaux nationaux en Afrique. 

C.Formation visant le renforcement des capacités des OSC en ce qui concerne le statut d’observateur et l’engagement auprès de la Commission: Accent particulier sur les droits des femmes 

12.Le 12 décembre 2023, j’ai participé à la session de formation virtuelle susvisée organisée, en matière de renforcement des capacités, par la Coalition pour la Cour africaine, session au cours de laquelle j’ai animé la formation et présenté un exposé détaillé sur les procédures d’octroi du statut d’observateur et le mandat de la Commission ainsi que sur l’accès des États parties, des particuliers ou des ONG à la Commission. En outre, j’ai donné aux participants des explications sur les efforts consentis par la Commission pour promouvoir les droits des femmes et vulgariser le Protocole de Maputo, en soulignant la nécessité de poursuivre les efforts afin d’instaurer une réelle égalité et d’assurer une mise en œuvre efficace de ses dispositions. 

D.11ème Formation GIMAC sur le plaidoyer des jeunes

13.Le 13 février 2024, j’ai prononcé un discours liminaire lors de l’événement ci-dessus, organisé à Addis-Abeba, en Éthiopie, et axé sur « La transformation inclusive de l'éducation menée par les jeunes pour l'équité de genre et la durabilité ». Dans ce discours, j’ai souligné le rôle central de l’éducation dans la réalisation de l’égalité hommes/femmes en Afrique et mis en évidence l’importance des initiatives menées par les jeunes pour induire un changement transformateur. J’ai également mis en lumière des exemples inspirants de telles initiatives qui ont grandement favorisé l’équité entre les sexes dans l’éducation. 

E.Échanges informels publics

14.Le 16 janvier 2024, j’ai participé à des échanges informels publics sur les mécanismes régionaux des droits de l’homme et les défis associés, organisés à Abu Dhabi, aux Émirats arabes unis, par le Comité permanent des droits de l’homme des Émirats arabes unis.

F.Majlis de la Fraternité humaine

15.Le 4 février 2024, j’ai participé aux célébrations du 5ème anniversaire de la signature du document sur la Fraternité humaine par Son Éminence Ahmed EL-Tayeb, Grand Imam d’Al-Azhar, Président du Conseil musulman des anciens, et Sa Sainteté le Pape François, Chef de l’Eglise catholique, célébrations organisées par le Conseil musulman des anciens à Abu Dhabi, aux Émirats arabes unis. Au cours de cet événement, j’ai prononcé une allocution à l’occasion d’une séance dédiée au leadership féminin et intitulée « Femmes et leadership : Détruire les barrières et construire une société inclusive. » Dans ma contribution, j’ai insisté sur l’impératif du démantèlement des pratiques et normes discriminatoires qui restreignent la participation des femmes dans les espaces publics en les cantonnant aux rôles domestiques traditionnels. 

G.Communiqué de presse pour la Journée internationale de la Femme

16.Le 8 mars 2024, j’ai publié un communiqué de presse sur la Journée internationale de la femme, célébrée autour du thème « Investir en faveur des femmes : Accélérer le rythme. » J’ai exhorté les parties prenantes concernées à collaborer pour éradiquer la violence fondée sur le genre, la discrimination et les pratiques culturelles néfastes afin de favoriser l’investissement dans les femmes. En outre, j’ai souligné l’importance du thème de l’UA pour 2024, « Éduquer un Africain adapté au 21ème Siècle », en mettant l’accent sur l’investissement dans l’éducation des femmes comme une voie cruciale pour le progrès.

H.Débat national sur la Journée internationale des femmes 2024 : Investir dans la sécurité et l’autonomisation des femmes

12.Le 9 mars 2024, j’ai participé en tant que panéliste à un événement organisé, à Banjul, en Gambie, par un consortium d’organisations, parmi lesquelles la Chambre de commerce de Gambie (GCCI), PF-Initiative (PFI) et l’Association des avocates de la Gambie (FLAG). Ma contribution portait sur une meilleure application de la loi afin de protéger la sécurité des femmes dans les espaces publics, la prise en charge des préoccupations spécifiques à la Gambie, la mise en évidence des ressources juridiques accessibles, les initiatives de l’UA et les cadres juridiques visant à assurer la sécurité des femmes dans les domaines public et privé et la formulation de recommandations d’amélioration.

I.68ème Session annuelle de la Commission de la condition de la femme (CSW68)

13.Du 11 au 15 mars 2024, j’ai eu l’honneur de participer à la CSW68 à New York grâce au généreux parrainage de l’IPAS. Mon implication a essentiellement consisté en interventions orales et entretiens avec les médias, toutes ces activités ayant été organisées de main de maître par l'IPAS. J’ai également assisté à d’autres réunions et les sections ci-après donnent un aperçu détaillé des différentes activités auxquelles j’ai participé pendant la CSW68.

Financement de l’avortement médicalisé pour accélérer l’égalité entre les sexes (12 mars 2024)

14.Le 12 mars 2024, j’ai eu le privilège de prononcer une allocution lors de l’événement organisé par l'IPAS au cours de la CSW68. Dans mon discours, j’ai souligné l’importance cruciale de l’article 14 du Protocole de Maputo et de son Observation générale n° 2, en mettant surtout l’accent sur l’article 14.1 a), b), c) et f) ainsi que sur l’article 14.2 a) et c). Ces dispositions jouent un rôle primordial dans la promotion des pratiques d’avortement médicalisé et de la lutte contre la mortalité maternelle. J’ai également traité des défis et possibilités associés à la mise en œuvre de ces dispositions, en soulignant la nécessité d’efforts concertés pour une défense efficace des droits des femmes en Afrique.

Intégration des personnes handicapées dans les SDSR pour atteindre l’égalité des sexes (12 mars 2024)

15. J’ai également participé, le 12 mars 2024, à l’événement susmentionné, organisé par l’IPAS, et j’ai, à cette occasion, fait des interventions sur la prise en charge des personnes handicapées dans les questions relatives aux droits sexuels, à la reproduction et à la santé. J’ai mis un accent particulier sur les défis uniques rencontrés par les personnes handicapées dans la poursuite de leurs droits sexuels et reproductifs. En outre, j’ai appelé à la mise en œuvre de politiques, de programmes et d’initiatives de plaidoyer inclusifs qui donnent la priorité aux besoins et aux droits des personnes souffrant d'un handicap.

Renforcement du pouvoir féministe politique pour l’accès à l’avortement en Afrique francophone
 
16.Le 13 mars 2024, j’ai prononcé un discours liminaire à l’occasion de l’événement organisé par l’IPAS, pour traiter du thème susmentionné. Dans mon discours, j’ai souligné l’importance du militantisme et du plaidoyer féministes pour la mise en place de cadres politiques et juridiques donnant la priorité à l’autonomie des femmes en matière de reproduction et de soins de santé. J’ai également appelé à une action collective pour contester les lois restrictives et les obstacles sociétaux qui entravent l’accès des femmes à des avortements médicalisés, tout en soulignant l’importance de renforcer le pouvoir politique par l'action de mouvements féministes efficaces.

Réunion interne de la Plateforme EDVAW 

17.Le 13 mars 2024, j’ai participé à la réunion interne de la plateforme EDVAW, qui a débattu du thème de la CSW68 pour 2025 et de l’importance de l'implication de la plateforme, entre autres sujets. La réunion a facilité les échanges sur les activités conjointes, les premiers préparatifs des célébrations de Beijing+30 2025 et d’autres questions pertinentes.

Réunion entre la Plateforme EDVAW et le Secrétaire général des Nations Unies 

18.Le 14 mars 2024, j’ai assisté à la réunion des membres de la Plateforme EDVAW et du Secrétaire général des Nations Unies, au cours de laquelle les questions se rapportant à la nécessité d’institutionnaliser la Plateforme EDVAW et d'établir un secrétariat permanent doté de ressources adéquates ont été examinées. La réunion a servi de cadre à un plaidoyer en faveur d’une augmentation des ressources financières et du soutien de l’ONU afin de surmonter ces problèmes de financement et d'établir un secrétariat permanent.

Réunion interne avec la Direction femmes, genre et jeunesse de l’Union africaine

19.Le 14 mars 2024, j’ai eu une réunion interne avec la Direction femmes, genre et jeunesse (WYGD) de l’UA, rencontre au cours de laquelle nous avons examiné des projets de collaboration axés sur la ratification, la transposition dans le droit interne et la mise en œuvre du Protocole de Maputo.

Réunion de planification de la CSW 68 avec la Direction du genre et d’autres organes compétents de l’UA

20. Le 14 mars 2024, j’ai participé à la réunion de planification de la CSW68 et à une réunion de consultation interministérielle sur la position commune africaine pour la CSW68, organisée par le WYGD. Au cours de la réunion, j’ai informé la représentante du caucus des femmes des initiatives prises et débattu des modalités et de la voie à suivre.

Réunion de l’EDVAW avec le représentant permanent de la République des Philippines et le président sortant de la CSW68

21.Le 15 mars 2024, j’ai participé à une réunion entre la plateforme EDVAW et l’ambassadeur Antonio Manuel Lagdameo, représentant permanent de la République des Philippines et président sortant de la CSW. Cette rencontre a débouché sur un accord commun prévoyant l'organisation de réunions de planification entre la plateforme EDVAW et la CSW avant leur réunion annuelle. Ces réunions ont pour finalité de garantir l’inclusivité et de promouvoir les échanges d’idées. La rencontre avait pour objectif principal d’établir un cadre de collaboration et de coordination entre les deux entités, en favorisant une approche plus globale et inclusive permettant d'aborder les problèmes urgents touchant aux violences faites aux femmes.

Réunion de l’EDVAW avec la Directrice exécutive d’ONU Femmes (représentée par la Directrice exécutive adjointe) 

22.Le 15 mars 2024, j’ai participé à la réunion sus-citée, dont l’objectif principal était d’assurer l’alignement des activités menées par différents mécanismes des droits de l’homme au sein de la Plateforme sur les mandats normatifs et programmatiques d’ONU Femmes aux niveaux national, régional et mondial. En outre, d'importants échanges ont eu lieu sur la nécessité urgente d’institutionnaliser la Plateforme EDVAW et d’établir un secrétariat permanent doté des ressources nécessaires. Cette question a reçu l'attention immédiate de l’organisme responsable, qui reconnaissait ainsi l’importance de sa prise en charge diligente.

Réunion de consultation interministérielle pour une position africaine commune

23.Le 15 mars 2024, j’ai eu le privilège d’assister à la réunion interministérielle de consultation sur une position africaine commune et d’y prononcer un discours liminaire. Dans mon discours, j’ai souligné l’importance du respect de l’esprit du Protocole de Maputo, en particulier au regard des droits émergents souvent controversés, tout en soulignant la pertinence continue des efforts collectifs de toutes les parties prenantes pour la sauvegarde des droits des femmes. Cette réunion, à laquelle ont participé les ministres africains chargés du genre et des femmes, a servi de plate-forme pour des échanges de vue et des consultations collectives visant à définir la position africaine commune pour la CSW68, assurant ainsi l'adoption d'une position unifiée et cohérente sur les droits des femmes et l’égalité des sexes.

Entretiens avec les médias

24.Outre ma participation aux réunions susmentionnées convoquées au cours de la CSW68, j’ai eu l’honneur d’être interviewée par les médias suivants :

a.Le 12 mars 2024, j’ai participé à un entretien avec Voice of America afin de discuter de la pertinence de la CSW pour la prise en charge des droits des femmes dans le contexte africain, en particulier concernant les femmes dans les zones de conflit et l’importance de ce thème pour l’Afrique, compte tenu des défis du continent en matière de pauvreté, de conflits et de violations généralisées des droits des femmes. J’ai souligné le rôle de la CADHP en ce qui concerne le traitement des questions revêtant une importance majeure pour le thème.

b.Le 13 mars 2024, j’ai été interviewé par Devex et The Guardian Newspaper UK sur des sujets tels que les mouvements anti-droits, le recul des MGF en Gambie et d'autres défis plus larges en matière de santé et de droits sexuels et de la reproduction. Tout au long de nos échanges, j’ai insisté sur les rôles primordiaux de la CADHP et de la SSRWA dans la prise en charge de ces questions. J’ai souligné la nécessité d’une action collective pour la protection de ces droits fondamentaux.

J.Consultation régionale pour l’Afrique en vue de l’élaboration de l’Observation générale n° 40 de la CEDAW

25.J'ai participé, les 18 et 19 avril 2024, à la Consultation régionale pour l’Afrique, organisée à Addis-Abeba, en Éthiopie, par le Comité de la CEDAW, sur l’élaboration de l'Observation générale n° 40 de la CEDAW visant à assurer une représentation égale et inclusive des femmes dans les systèmes de prise de décision.

K.Réunion du Groupe d’experts sur le projet d’abrogation de la Loi sur les MGF en Gambie

26.Le 15 avril 2024, j’ai assisté à une réunion virtuelle organisée par ONU Femmes concernant le débat parlementaire initié en Gambie dans le but d'abroger la loi criminalisant les MGF et ses implications sur les droits des femmes dans le pays. Cette réunion devrait avoir pour résultat la convocation d'une table ronde, en collaboration avec le CAEDBE et ONU Femmes, pour interpeller les femmes cadres et les décideurs politiques en Gambie sur les implications de la levée de l’interdiction des MGF en Gambie et dans d’autres États membres.

L.Lancement du programme de bourses d’études en matière de justice reproductive

27.Du 6 au 8 mai 2024, IPAS Afrique Francophone m’a invitée à lancer le Programme régional de bourses d’études en matière de justice reproductive destiné aux femmes leaders, qui offre d’importantes possibilités pour une implication active dans le système africain des droits de l'homme. Ce programme vise à renforcer les capacités et connaissances des participants tout en permettant à la société civile francophone d’intervenir plus facilement auprès de la Commission, notamment dans le cadre de son mandat. Il étudie également la manière dont les avocats peuvent utiliser avec efficacité ces mécanismes pour renforcer leur travail au niveau national.

M. Panel sur une Afrique résiliente et inclusive : construire un système d’éducation inclusif pour un accès accru aux communautés discriminées sur le plan du travail et de l’ascendance

28.Le 12 mai 2024, j’ai animé un panel sur le sujet susmentionné, organisé en marge du Forum des ONG, organisé, en prélude à la 79ème Session ordinaire de la Commission, par le Forum mondial des communautés discriminées sur le plan du travail et de l'ascendance.

N.Table ronde sur le projet d’abrogation de la loi sur les MGF en Gambie et la régression des droits des femmes et de l’égalité des sexes

29.En marge de la Session, j’organise une table ronde dans le cadre de la collaboration avec le Rapporteur spécial sur les pratiques néfastes, le CAEDBE et le Rapporteur de pays de la CADHP pour la Gambie, en partenariat avec ONU Femmes. Cette rencontre a pour but d’examiner de manière approfondie les conséquences de l’abrogation de la loi interdisant les MGF en Gambie et l'éventualité de répercussions plus dommageables sur les droits des femmes et l’égalité des sexes. La Table ronde avait pour ambition l’établissement d’une coalition ad hoc composée de personnalités locales influentes, notamment de femmes leaders, de chefs religieux et de chefs traditionnels. Cette coalition s’engagera dans des activités politiques stratégiques et collaborera à l’identification de stratégies et d’actions pour des efforts collectifs au cours des trois prochains mois dans une perspective à long terme.

CHAPITRE III : SUIVI DE PAYS :

A.Soudan

Lettre conjointe d’appel urgent relative à l’escalade de la violence contre les femmes dans la capitale du Soudan, Khartoum

30.Le 28 décembre 2023, en nos qualités de Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique et de Commissaire Rapporteur sur la situation des droits de l’homme en République du Soudan, nous avons conjointement adressé une lettre d’appel urgent à Son Excellence le Général Abdel Fattah al-Burhan. Cette lettre soulignait la fréquence inquiétante des cas de violences basées sur le genre, y compris de violences sexuelles, utilisées comme tactique de guerre à l’effet d’intimider, de terroriser et de punir les femmes et les filles à Khartoum. Sur la base des rapports reçus, nous avons demandé au gouvernement soudanais d’instruire ces allégations de manière diligente, impartiale et efficace, en veillant à ce que les auteurs rendent compte de leurs actes. En outre, nous avons exhorté le gouvernement à défendre, protéger et promouvoir le droit des femmes de vivre à l’abri de toutes les formes de violence fondée sur le sexe.

B.      Sierra Leone

Appel urgent conjoint relatif à la mort présumée de trois filles victimes de MGF et de complications connexes en Sierra Leone

31.Le 5 mars 2024, le Rapporteur de pays pour les droits de l’homme en République de Sierra Leone et moi-même avons adressé une lettre conjointe d’appel urgent à S.E. M. Julius Maada Wonie Bio. Le but de cette lettre était de traiter des informations faisant état du décès de trois filles suite à des pratiques de MGF et à des complications y relatives. Sur la base des informations reçues, nous avons souligné la nécessité, pour le gouvernement de la Sierra-Leone, de prendre des mesures efficaces contre toutes les formes de pratiques traditionnelles néfastes (PTN). Nous avons, en outre, exhorté le gouvernement à accélérer l’adoption de la Loi de 2007 sur les droits de l’enfant, actuellement pendante devant le Parlement, et à mener une enquête approfondie sur les décès présumés des trois filles attribués aux MGF.

C.Namibie

Déclaration de condoléances suite au décès de S.E. le Dr. Hage G. Geingob, Président de la République de Namibie

32.Le 6 février 2024, agissant dans le cadre de mes responsabilités de Rapporteure de pays sur la situation des droits de l’homme en République de Namibie, j’ai transmis mes très sincères condoléances à l’occasion du décès de Son Excellence Monsieur Hage G. Geingob, Président de la Namibie. Dans ma déclaration de condoléances, je me suis appesantie sur les remarquables efforts consentis par le Président Geingob en faveur de la promotion des droits de l’homme en Namibie et, plus particulièrement, sur son dévouement envers la promotion des droits des femmes. J’ai également exprimé ma sincère gratitude au défunt président Geingob, pour le soutien qu’il a apporté aux missions de promotion de la Commission dans son pays.

D.Botswana

Lettre conjointe de félicitations pour la ratification du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique

18.Le 14 décembre 2023, en collaboration avec le Rapporteur de pays pour le Botswana, j’ai adressé une lettre de félicitations à Son Excellence Mokgweetsi Masisi. Cette lettre avait pour objectif d’exprimer notre appréciation et notre reconnaissance pour les importantes mesures prises par le gouvernement du Botswana. Plus précisément, nous avons félicité le président Masisi d’avoir ratifié le Protocole de Maputo le 24 février 2023 et déposé l’instrument de ratification auprès de la Commission de l’UA le 23 octobre 2023. Cette initiative majeure témoigne de son engagement en faveur de la promotion et de la protection des droits de la femme.

19.De plus, dans cette lettre, nous exhortons Son Excellence à se conformer aux obligations en matière d'établissement de rapport énoncées dans la Charte africaine et le Protocole de Maputo. Il s'agissait, notamment, de la présentation, à la Commission, d’un rapport initial, deux ans après la ratification du Protocole de Maputo, ainsi que d’un rapport périodique, conformément aux articles 62 et 26 de la Charte africaine et du Protocole de Maputo, respectivement.

CHAPITRE IV :  BREF APERÇU DE LA SITUATION DES FEMMES ET DES FILLES EN AFRIQUE

33.Au cours de l’intersession, j’ai noté les développements et les préoccupations suivants concernant la situation des femmes sur le continent :

Botswana

34.Conformément au thème de la Journée internationale de la femme pour l’année 2024, qui plaide pour l’investissement en faveur des femmes, il est important d’évaluer l’intégration des femmes et leur égale participation à l’économie. Il est à noter, comme le constate une enquête réalisée en février 2024, que les femmes restent à la traîne pour ce qui est de leur insertion dans le milieu professionnel au Botswana. Il ressort des réponses fournies par 81 % des participants à l’enquête que le nombre de femmes occupant des postes de direction est encore faible dans le pays.[ https://www.grantthornton.co.bw/insights/publications/women-in-business…] J’espère que la ratification du Protocole de Maputo par le Botswana, qui a eu lieu pendant l’intersession, contribuera grandement à améliorer ces statistiques.

Région du Sahel central

35.J’ai noté, avec préoccupation, que la région du Sahel central est en proie à la violence basée sur le genre. La convergence des conflits armés, du changement climatique, de l’insécurité alimentaire et des coups d'État militaires a fait de la région le foyer des violations contre les femmes.[ https://reliefweb.int/report/burkina-faso/addressing-gender-based-viole…] Le Mali, le Niger et le Burkina Faso connaissent des niveaux élevés d’instabilité, ce qui provoque des déplacements forcés et des crises humanitaires, qui touchent de manière disproportionnée les femmes. Cette situation est exacerbée par l’incapacité des organisations de secours à accéder à certaines des régions les plus touchées.[Comme ci-dessus.] Il est également indiqué que les violences sexuelles sont devenues un problème récurrent dans les zones de conflit armé du nord du Burkina Faso. Selon les rapports, dans les régions du pays ravagées par les conflits, les groupes armés continuent de perpétrer des violences sexuelles contre des civils et l’impunité contribue à la répétition de ces violations.[ https://rflgd.org/2024/01/11/sexual-violence-against-women-and-girls-in…] La violence sexuelle, qu’elle soit perpétrée dans des situations de conflit armé ou en temps de paix, a des effets à long terme qui violent les droits physiques, sociaux et psychologiques de nombreuses femmes. 

République démocratique du Congo

36.Je tiens à féliciter la République démocratique du Congo qui vient, pour la première fois, pendant l’intersession, de nommer une femme comme Premier ministre. La participation des femmes aux systèmes de prise de décision est un facteur important si l'on veut que les États africains atteignent l’égalité des sexes. Je note toutefois que malgré ce développement positif, la violence continue de s’intensifier en RDC, ce qui est déconcertant, les femmes étant souvent touchées de manière disproportionnée. [ https://www.africanews.com/2024/04/02/dr-congo-names-first-female-prime…]

Égypte

37.Une tendance inquiétante a été observée en Égypte, où les mères ayant obtenu la garde de leurs enfants à l'issue d'un divorce ont vu ces derniers être enlevés par le père, qui les a ensuite fait sortir du pays. En décembre 2023, une vidéo a circulé montrant deux filles droguées et enlevées par un gang dont le père était un des membres.[ https://ecwronline.org/?p=10003] Pendant cet enlèvement, les victimes avaient subi des sévices physiques, elles avaient aussi été droguées et dévêtues. Il est encore plus troublant que de telles questions soient qualifiées de délits, minimisant ainsi la gravité de l'infraction.

Eswatini 

38.J’ai noté avec préoccupation les allégations de violations commises par les responsables eswatiniens contre Tanele Maseko, veuve du défunt avocat des droits humains, Thulani Maseko. Plusieurs médias et organisations de défense des droits de l’homme ont signalé les cas d’intimidation et de harcèlement subis par Tanele, y compris les restrictions de mouvement, l’emprisonnement et la confiscation de son passeport et de son téléphone portable.[ https://www.movedemocracy.org/democracy-alert-tanele-maseko-prominent-e…https://www.amnesty.org/en/latest/news/2024/03/eswatini-authorities-mus…
https://watermarkonline.com/2024/04/03/eswatini-police-detain-prominent… ] Je condamne fermement les actes d’intimidation et de harcèlement présumés avoir été commis à l’encontre de Tanele, car ils constituent une violation de ses droits fondamentaux et instillent la peur, ce qui fragilise la voix des défenseurs et militants des droits de l’homme.

Éthiopie

39.J’ai noté avec préoccupation le conflit en cours dans la région d’Amhara, en Éthiopie, en particulier les affrontements entre les forces de défense nationale éthiopiennes (ENDF) et la milice Amhara (Fano), qui induisent un important risque de violences sexuelles, voire même de viols. Selon les rapports de la Commission éthiopienne des droits de l’homme (EHRC), rien que depuis le 2 juillet 2023, plus de 200 cas de viol ont été documentés dans divers établissements de santé.[ https://ehrc.org/%E1%8A%A0%E1%88%9B%E1%88%AB-%E1%8A%AD%E1%88%8D%E1%88%8…  ] Cependant, l'EHRC suggère également qu’il est probable que de nombreux autres cas ne soient pas signalés.

40.Cette escalade des violences sexuelles sur fond de conflit est particulièrement alarmante, d’autant plus que le pays ne s’est pas encore complètement remis des atrocités commises pendant le conflit du Nord, qui a touché les régions du Tigré, d’Amhara et d’Afar. L’émergence de telles violences sexuelles liées aux conflits menace donc de compromettre les progrès accomplis et représente un recul significatif, s’agissant des efforts visant à assurer la sécurité, la dignité et les droits des femmes en Éthiopie.

Gambie

41.Je suis consternée par la menace de régression des droits des femmes en Gambie, pour ce qui est de l’interdiction des MGF. La Gambie a été saluée comme faisant partie des pays ayant effectivement transposé le Protocole de Maputo dans sa législation interne. Pourtant, les développements récents ont vu le Parlement débattre de la possibilité de revenir sur l’interdiction des MGF. Il est prouvé depuis longtemps que les MGF constituent une violation flagrante des droits des femmes et des filles et nous devrions, en 2024, être à l’aube d’une interdiction universelle de cette pratique. 
    Kenya

42.J’ai noté, avec préoccupation, le nombre croissant de cas de féminicides au Kenya. Selon les informations recueillies, en janvier 2024, 14 femmes, au moins, ont été tuées dans le pays, ce qui a incité des milliers de femmes à manifester contre les féminicides.[ https://carnegieendowment.org/2024/02/12/kenyan-women-are-pushing-for-a…] L’augmentation du nombre de cas de violences conjugales est inquiétante et révélatrice d'une société dans laquelle la misogynie sévit, ainsi que les inégalités entre les sexes.

      Sierra Leone

43.Les récentes informations sur l’enlèvement et l’initiation forcée des filles dans la Forêt Sande ont soulevé de vives préoccupations. Dans la Forêt Sande, les MGF seraient pratiquées comme une étape obligatoire des rites d’initiation. Ces traditions et pratiques culturelles profondément ancrées sont d'importants obstacles au bien-être physique et psychologique des filles enlevées qui subissent une initiation forcée. De telles pratiques perpétuent des normes sexistes néfastes et violent de manière flagrante les droits humains fondamentaux de ces filles, entraînant des dommages physiques et psychologiques durables.

Soudan

44.Le conflit au Soudan accentue continûment la vulnérabilité des femmes soudanaises aux violences sexuelles liées aux conflits. Fait troublant, des rapports indiquent que le viol est considéré comme une tactique de guerre dans le conflit au Soudan, où d’innombrables femmes et filles sont victimes de ce crime odieux. Non seulement ces actes violent les droits fondamentaux et la dignité des femmes, mais ils compromettent aussi les perspectives de paix et de stabilité au Soudan. 

Maroc

45.Il est encourageant de constater que le processus de révision du Code de la famille marocain, qui régit des questions telles que les unions matrimoniales, la dissolution du mariage, la tutelle et d’autres aspects du droit de la famille, a démarré. On espère que grâce à cette révision, les femmes marocaines jouiront de droits conformes aux normes internationales. Je profite également de cette occasion pour encourager le Maroc à ratifier le Protocole de Maputo afin de renforcer la protection des femmes dans le pays. 

Zimbabwe

46.Au Zimbabwe, les élections de l’année 2023 ont révélé une baisse de la participation des femmes aux processus électoraux. On comptait une seule femme sur les 11 candidats à l’élection présidentielle. De même, s’agissant du scrutin direct, le nombre de candidates investies par les principaux partis politiques avait chuté.[ https://theconversation.com/zimbabwes-election-was-a-fight-between-men-…]

Somalie

47.Pendant de nombreuses années, le conflit en Somalie a eu un impact profond sur la vie des femmes et des filles, mais leurs souffrances passent souvent inaperçues en raison de la nature prolongée du conflit. Dans ce contexte, les violations des droits de l’homme sont fréquentes, la violence sexuelle et les pratiques traditionnelles néfastes étant particulièrement répandues, ce qui prive un nombre important de victimes de l’accès à la justice. Malgré la récurrence alarmante des violations des droits des femmes, la Somalie fait partie des dix pays qui n’ont pas encore ratifié le Protocole de Maputo. La non-ratification du Protocole prive de nombreuses femmes et filles d’une protection efficace. Je voudrais profiter de cette occasion pour exhorter la Somalie à ratifier le Protocole de Maputo, car cette action renforcerait considérablement la protection des droits des femmes dans le pays.

Ratification, transposition dans le droit interne, mise en œuvre du Protocole de Maputo et établissement de rapports en application de ce dernier

48.Je constate, avec plaisir, que le Botswana est devenu le 48ème État partie au Protocole de Maputo. Cela signifie que seuls dix pays n’ont pas encore ratifié cet instrument. Je profite de l'occasion pour encourager ces derniers à prendre en considération la valeur ajoutée que représente cet instrument pour les femmes, dans leurs pays respectifs, et, en conséquence, à le ratifier et à l'intégrer dans leur droit interne. Les pays concernés sont : le Burundi, la République centrafricaine, le Tchad, l'Égypte, l'Érythrée, Madagascar, le Maroc, le Niger, la Somalie et le Soudan. 

49.En ce qui concerne la soumission des rapports d'État en application du Protocole de Maputo, si la situation s’améliore, elle est loin d’être parfaite. Je saisis l’occasion pour rappeler sans équivoque aux États qu’en devenant partie au Protocole de Maputo, ils s’astreignent, en vertu de l’article 26 de cet instrument, à une obligation de présenter un rapport périodique. Certains États membres choisissent toujours de soumettre des rapports ne rendant compte que de la mise en œuvre de la Charte africaine et d'ignorer le Protocole de Maputo. Ces rapports sont incomplets. Ainsi, l’un des trois rapports examinés au cours de la présente Session de la Commission africaine ne rend pas compte de l’application du Protocole de Maputo. Il devient donc difficile, pour la Commission et le mandat, d’avoir un dialogue constructif avec les États membres sur les progrès réalisés et les défis rencontrés dans la mise en œuvre des dispositions du Protocole de Maputo et la protection des droits des femmes. En outre, certains États membres n’ont déposé aucun rapport sur le Protocole de Maputo, alors qu’ils ont pourtant ratifié cet instrument depuis plusieurs années. 

50.Dans ces circonstances, j’exhorte les États parties au Protocole à soumettre rapidement leurs rapports périodiques en vertu du Protocole de Maputo en se conformant aux Lignes directrices relatives à l'établissement des rapports d'État. Ce faisant, les États pourront participer activement à des échanges constructifs avec la Commission, identifier les domaines dans lesquels des améliorations seraient souhaitables et tirer parti des observations finales de la Commission pour faire progresser davantage les droits des femmes.

CHAPITRE V :   CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

RECOMMANDATIONS

Aux États membres organisant des élections en 2024

51.2024 est une année électorale pour plusieurs États africains. Par conséquent, je recommande aux pays qui organisent des élections cette année de veiller à se doter du cadre politique et législatif adéquat pour permettre une participation égale et significative des femmes aux processus électoraux. 

52.Ils devront, en outre, s’assurer, tant pendant les campagnes que durant le scrutin lui-même, que l’environnement politique est propice à la participation des femmes. Cela ne pourra se faire qu'en endiguant la violence contre les candidates, qu'elle soit en ligne ou hors ligne, en imposant des sanctions pénales dissuasives, en menant des enquêtes et en ouvrant des poursuites dans de tels cas. 

Aux gouvernements du Soudan, de la RDC et de la Région du Sahel central

53.J’exhorte ces pays à :
Prendre des mesures relatives aux droits des femmes en situation de conflit. Les femmes devraient participer aux processus de maintien de la paix mis en œuvre dans ces pays et être autorisées à participer de manière significative ;
Instruire les allégations de violence à l'égard des femmes, en particulier en cas de violences sexuelles liées aux conflits et, éventuellement, lancer des poursuites ;
Tenir les auteurs responsables de leurs actes ;
Assurer l’accès à des services humanitaires essentiels, tels que les produits de santé sexuelle et de la reproduction, et d’autres services utiles aux femmes et aux filles, qui sont les franges de la population les plus vulnérables dans les situations de conflit, et aux personnes déplacées.

Au gouvernement du Royaume d’Eswatini

54.J’exhorte le gouvernement du Royaume d’Eswatini à :
Mettre en œuvre les mesures requises pour protéger Mme Tanele Maseko contre les actes d’intimidation et de harcèlement qu’elle subirait actuellement ; et
Garantir la protection et la promotion des droits humains des individus qui plaident ouvertement pour les droits de l’homme.

Au gouvernement éthiopien

55.J’exhorte le gouvernement éthiopien à :
Traiter et prévenir rapidement et résolument les cas de violence sexuelle dans les zones de conflit de la région d’Amhara ;
Demander des comptes aux auteurs de ces actes et fournir un soutien et une assistance suffisants aux survivants ; et
Appliquer des mesures globales pour prévenir d’autres atrocités ciblant les femmes et les filles en Éthiopie.

Au gouvernement de la Gambie

56.J’appelle le gouvernement de la Gambie à :
Veiller à ce que les avancées réalisées en ce qui concerne les droits des femmes, ne soient pas remises en cause ;
Décourager le processus en cours qui menace d’aboutir à l’abolition de la loi contre les MGF ; et
Mener des campagnes intensives de sensibilisation auprès des franges de la population qui reconnaissent et pratiquent encore les MGF afin de limiter la résistance à la mise en œuvre de la loi telle qu’elle existe. 

Au gouvernement du Kenya

57.Je recommande au gouvernement du Kenya :
De prendre au sérieux la hausse des cas de féminicide dans le pays en enquêtant sur les causes profondes de ce phénomène et en s’y attaquant ;
 D’enquêter et d’ouvrir des poursuites avec diligence sur les cas signalés, de manière à rendre justice et à dissuader tout délinquant potentiel.  

Au gouvernement du Soudan

58.J’exhorte le gouvernement du Soudan à :
Intervenir rapidement et de façon décisive pour empêcher que des cas de violence sexuelle liée au conflit ne se produisent contre les femmes et les filles ;
Mener des enquêtes approfondies sur les cas de violence sexuelle, en veillant à ce que les auteurs soient traduits en justice et tenus responsables de leurs actes répréhensibles ; et
Appliquer des mesures globales pour prévenir d’autres atrocités ciblant les femmes et les filles au Soudan.

Au gouvernement de la Sierra Leone

59.J’exhorte le gouvernement de la Sierra Leone à :

Enquêter sur les auteurs présumés de l’enlèvement et de l’initiation forcée de filles dans la Forêt Sande et les tenir responsables de leurs actes :
Veiller à ce que la culture ne soit pas utilisée comme justification pour légitimer des pratiques traditionnelles néfastes qui nuisent au bien-être des femmes et des filles en Sierra Leone ; et
Veiller à ce que les filles en Sierra Leone soient protégées des MGF.

Au gouvernement de Somalie

60.J’exhorte le gouvernement somalien à :
Garantir, dans le pays, la protection des femmes et des filles contre la violence, notamment la violence liée aux conflits ; et
Prendre les mesures nécessaires pour ratifier le Protocole de Maputo.

CONCLUSION

61.Le présent rapport inter-session donne un aperçu des activités menées pendant mon mandat en tant que SRRWA et en tant que Commissaire rapporteure pour différents pays. Il souligne également les défis persistants auxquels sont confrontées les femmes et les filles à travers l’Afrique.

62.Malgré les progrès notables notés dans la promotion et la sauvegarde des droits des femmes au sein des États membres, comme en témoigne la ratification d’instruments cruciaux comme le Protocole de Maputo, la réalisation pratique de ces droits reste difficile. Un fossé important existe entre les cadres juridiques et leur mise en œuvre effective, souvent en raison d’obstacles systémiques tels qu’un déficit de volonté politique et des normes culturelles profondément ancrées qui perpétuent les inégalités et la discrimination entre les sexes.

63.En outre, les femmes et les filles continuent de souffrir, de manière disproportionnée, des conséquences des conflits, notamment d'une vulnérabilité accrue aux violences fondées sur le sexe, aux déplacements et à un accès limité aux services essentiels comme les soins de santé et l’éducation. L’utilisation du viol et de la violence sexuelle comme armes de guerre aggrave encore leurs souffrances, laissant des cicatrices durables sur les individus et les communautés. Les pratiques néfastes telles que les MGF, souvent justifiées par des croyances religieuses et traditionnelles, ont également des répercussions profondes sur les femmes africaines, laissant les survivantes sans possibilité de recours à la justice.

64.Des efforts concertés à divers niveaux sont nécessaires, si l’on veut relever ces défis. Les États membres doivent accorder la priorité à la protection et à l’autonomisation des femmes, tant en temps de paix qu’en situation de conflit. Les OSC jouent également un rôle crucial dans la défense des droits des femmes et dans la responsabilisation des gouvernements vis-à-vis de leurs engagements juridiques internationaux. En outre, la communauté internationale devrait continuer à soutenir les initiatives visant à promouvoir l’égalité hommes/femmes et l’autonomisation des femmes en Afrique grâce à un financement ciblé, au renforcement des capacités et à l’assistance technique.

65.La SRRWA reste déterminée à remplir ses mandats et à faire progresser les objectifs fondamentaux du Mécanisme. Dans le cadre de nos efforts continus visant à promouvoir et protéger les droits des femmes, il est essentiel de reconnaître le rôle central joué par les organisations partenaires en facilitant ces efforts. Par conséquent, je remercie sincèrement ces précieux partenaires pour leur soutien financier et technique indéfectible, qui renforce considérablement le succès de nos initiatives.

66.Pour conclure, deux décennies après l’adoption du Protocole de Maputo et un quart de siècle après l’établissement du mandat de la SRRWA, j’espère sincèrement que notre continent est parvenu à un consensus sur l’importance cruciale des droits des femmes pour le développement de notre nation. Les femmes méritent de vivre dans la dignité, à l’abri de la discrimination. Ce consensus doit se traduire par la mise en œuvre de lois, de politiques, de mesures administratives et autres initiatives visant à lutter contre les inégalités de genre, prises par les gouvernements pour promouvoir le bien-être de leurs citoyens.

67.Mon mandat a pour mission première d’aider les Etats membres à réaliser cet objectif. Par conséquent, je tends à nouveau la main à tous les États membres, en les exhortant à s’engager activement auprès du mandat et à élaborer des stratégies sur les approches les plus efficaces pour le réaliser. J’insiste sur la valeur que le mandat et la Commission accordent aux partenariats stratégiques dans cette oeuvre vitale. Travaillons tous ensemble à l'atteinte d'un objectif commun, celui de faire en sorte que les femmes d’Afrique puissent réaliser pleinement leur potentiel.