La Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (La Commission), réunie lors de sa 77ème session ordinaire, tenue à Arusha, République Unie de Tanzanie du 20 octobre au 9 novembre 2023. CADHP/Res.570 (LXXVII) 2023.
RAPPELANT son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples en Afrique, en vertu de l'article 45 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (Charte africaine) ;
RAPPELANT ÉGALEMENT l’article 7 de la Charte africaine qui dispose que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par une juridiction compétente, impartiale et indépendante et l’article 26 sur l'obligation des États parties de garantir l’indépendance des tribunaux et l’établissement et le perfectionnement des institutions nationales appropriées chargées de la promotion et de la protection des droits et libertés garantis par la Charte.
CONSIDÉRANT ses Résolutions CADHP/Rés.4 (XI)92 sur le droit à un recours et à un procès équitable; CADHP/Rés.21(XIX)96 sur le respect et le renforcement de l'indépendance de la magistrature et CADHP/Rés.41(XXVI)99 sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique ;
CONSIDÉRANT ÉGALEMENT ses directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire en Afrique, l’appel à leur mise en œuvre, leur incorporation dans les législations nationales des Etats parties à la Charte et au respect scrupuleux de leurs dispositions ;
CONSIDERANT EN OUTRE que l'Agenda 2063 envisage une Afrique dans lequel existe une culture universelle de bonne gouvernance, de valeurs démocratiques, d'égalité entre les genres et du respect des droits de l'homme, de la justice et de l'État de droit ;
NOTANT QUE la Déclaration universelle des droits de l'homme consacre en particulier les principes de l'égalité devant la loi, de la présomption d'innocence et du droit à un procès équitable et public devant un tribunal compétent, indépendant et impartial établi par la loi ;
NOTANT ÉGALEMENT QUE les principes de base des Nations unies relatifs au rôle du barreau protègent le droit des avocats d'exercer leurs fonctions professionnelles en toute indépendance, sans intimidation, entrave, harcèlement ou ingérence indue ;
NOTANT EN OUTRE QUE les Principes des Nations Unies sur l’indépendance de la magistrature adoptées par l’ONU en 1985 indiquent que l’indépendance de la magistrature doit être garantie par les États et énoncée dans les constitutions et lois nationales et qu’il incombe à toutes les institutions gouvernementales et autres de la respecter ;
PRÉOCCUPÉE PAR l’émergence des changements anticonstitutionnels des gouvernements qui sont devenus une menace pour l'indépendance du pouvoir judiciaire, l'espace civique, ainsi que pour les activistes politiques, les Défenseurs des droits de l'homme et même les avocats ;
PRÉOCCUPEE ÉGALEMENT par la récurrence des cas d'utilisation partisane de la justice pour restreindre l'espace civique, exercer des représailles et persécuter des militants, les défenseurs des droits de l'homme, les juges, les avocats et autres acteurs judiciaires ;
CONVAINCU QUE la consolidation de l’Etat de droit et de la démocratie dans les Etats parties à la charte implique le respect de la séparation des pouvoirs et le renforcement de l’indépendance des systèmes judiciaires ;
La Commission décide :
i.De nommer le Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l'homme et point focal sur les représailles comme Point Focal sur l’Indépendance judiciaire en Afrique ;
ii.De lui confier les mandats ci-après :
-Examiner les tendances actuelles qui nuisent à l'indépendance judiciaire et entravent le libre exercice des professions judiciaires sur le continent, en se penchant notamment sur les motivations politiques contre les systèmes judiciaires et la profession judiciaire ; et pratiques administratifs et législatifs limitant l'indépendance du système judiciaire dans le contexte de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ;
-Étudier les questions spécifiques relatives au droit à un procès équitable et à l'indépendance du pouvoir judiciaire sur le continent, ainsi que la structure institutionnelle, dans le but d'élaborer une série d'actions visant à préserver l'indépendance du pouvoir judiciaire et la pratique des professions judiciaires en Afrique.
-Entreprendre une étude sur l’efficacité de l'administration de la justice en Afrique ;
- Informer la Commission sur les pratiques et les modèles qui influencent négativement l'indépendance du pouvoir judiciaire et la pratique de la profession judiciaire ;
-Préparer un rapport complet à présenter à la Commission et, par la suite, des rapports annuels sur l'état de l'indépendance judiciaire et la pratique de la profession judiciaire en Afrique, en mettant l'accent sur les menaces et les représailles à l'encontre des avocats, magistrats et des juges dans l'exercice de leurs fonctions et faire des recommandations appropriées.
iii.Demande au Point Focal de travailler avec les Institutions et Organisations professionnelles des magistrats et des avocats, ainsi que les ONG spécialisées en matière judiciaire.
Fait le 9 novembre 2023 à Arusha, Tanzanie