La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission), réunie en sa 58ème Session ordinaire tenue du 6 au 20 avril 2016 à Banjul, République islamique de Gambie ;
Considérant que l’Article 17 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples garantit le droit à l’éducation et que les Etats doivent veiller à ce que tout un chacun ait accès à l’éducation ;
Considérant que l’Article 12 du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique garantit également l’égalité d’accès et de chances des femmes et des filles à l’éducation et à la formation et que les Etats doivent veiller à ce que ce droit soit exercé sans aucune discrimination ;
Considérant que l’Article 11 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant garantit le droit à l’éducation de tous les enfants en Afrique ;
Considérant également que le droit à l’éducation est également garanti par l’Article 13 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
Rappelant les Lignes directrices de Nairobi et de Tunis qui reconnaissent que l’accès à une éducation de qualité pour tous, à la formation professionnelle et à l’enseignement est une condition préalable au développement durable;
Rappelant également que l’Objectif 4 des Objectifs de développement durable vise à « garantir une éducation de qualité et des possibilités d’apprentissage tout au long de la vie pour tous » ;
Notant que les engagements pris par les Etats dans « l’Agenda de développement de l’après 2015 » confirment leur obligation de veiller au respect du droit à l’éducation ;
Préoccupée de constater que, malgré le cadre juridique existant en matière de protection du droit à l’éducation, de nombreux enfants, en particulier les filles, les enfants vulnérables tels que les enfants handicapés, les enfants réfugiés, les enfants migrants, les enfants de la rue, les enfants déplacés, les filles déscolarisées suite à des grossesses, et les enfants des communautés marginalisées ne jouissent pas à égalité avec les autres enfants du droit à l’éducation et ne bénéficient pas des mêmes opportunités ;
Préoccupée par le fait que les lois, les politiques ainsi que la persistance de certaines pratiques sociales et culturelles néfastes y compris, mais non exclusivement, le mariage précoce ou forcé et la préférence pour la scolarisation des garçons constitue encore de nos jours, des facteurs d’exclusion sociale, économique et politique;
Préoccupée par le fait que la prévalence de conflits internes, de crises et d’instabilité politiques dans certains pays africains a un impact négatif sur la réalisation du droit à l’éducation en Afrique, en particulier pour les enfants ;
Egalement préoccupée par le fait que des ressources suffisantes n’ont pas été allouées par les Etats dans leurs budgets pour réaliser le droit à l’éducation, y compris l’égalité d’accès et de chances à l’éducation ;
La Commission :
i. Exhorte les Etats parties à garantir dans toute sa portée, le droit à l’éducation, notamment :
- L’opportunité pour tous les enfants de profiter d’un enseignement primaire obligatoire et gratuit, sans distinction aucune, en allouant progressivement suffisamment de ressources financières et autres dans le budget alloué au secteur de l’éducation ;
- Un enseignement préscolaire, primaire, secondaire, tertiaire et l’éducation des adultes ainsi que la formation professionnelle ;
- La garantie de l’égalité des chances et de l’accessibilité globale, aussi bien physique qu’économique, pour toutes les personnes, sans discrimination aucune ;
- Des programmes d’enseignement appropriés et de qualité, qui répondent aux besoins spécifiques de toutes les couches de la société, en particulier les filles, les enfants vulnérables tels que les enfants handicapés, les enfants réfugiés, les enfants migrants, les enfants de la rue, les enfants déplacés, les petites filles enceintes et les enfants des communautés marginalisées ;
- L’adoption de mesures pour l’hébergement des enfants handicapés, en particulier les filles handicapées, afin de garantir une éducation de qualité égale à celle offerte aux autres membres de leurs communautés, conformément à l’objectif visé, à savoir leur intégration totale ;
- veiller à ce que la privatisation de l’éducation n’exacerbe pas la discrimination à l’égard des enfants, dans l’accès à une éducation de qualité, en particulier les fillettes, les enfants vulnérables et marginalisés ;
ii. Exhorte les Etats parties à s’acquitter de leurs obligations en matière d’accès à l’éducation, en particulier :
- lutter contre les pratiques sociales et culturelles qui entravent la jouissance égale des fillettes au droit à l’éducation ;
- veiller à ce que les enfants qui abandonnent l’école, en particulier les petites filles enceintes, aient la possibilité de terminer leurs études ;
- interdire et prévenir toutes les formes de discrimination dans l’éducation contre les enfants vivant avec le VIH / SIDA, sur la base de leur état réel ou perçu ;
- fournir à toutes les personnes un environnement propice à l’éducation, mais aussi assurer la sécurité des écoles pour tous les enfants.
- adopter toutes les mesures nécessaires et idoines, en fonction de leurs ressources disponibles, en vue de promouvoir, de fournir et de faciliter un accès à l’éducation pour tous en Afrique.
Fait à Banjul, République Islamique de Gambie, le 20 avril 2016