Observations finales et recommandations - Bénin : Rapport périodique combiné du 6 au 10, 2009-2018

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Examen des rapports soumis par les États Parties en vertu de l'Article 62 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples
Observations Finales à la République du Bénin, suite à l’examen de son 6e à 10e Rapport Périodique Combiné sur la mise en oeuvre de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples
Banjul, le 29 Juillet 2022

Introduction:
1. La République du Bénin (le Bénin) est un État Partie à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Charte Africaine), qu’elle a ratifiée le 20 janvier 1986.

2. Conformément aux dispositions de l’Article 62 de la Charte, Le Bénin a présenté son 6e à 10e Rapport Périodique Combiné sur la mise en oeuvre des dispositions de la Charte Africaine (2009-2018), le 27 aout 2020.

3. Le rapport met en exergue les développements enregistrés dans le pays en matière de promotion et de protection des droits de l'Homme et des peuples, ainsi que les mesures législatives, administratives et judiciaires prises dans le cadre de la mise en oeuvre des dispositions de la Charte Africaine, pour la période 2009-2018.

4. L’examen dudit Rapport Périodique Combiné a eu lieu les 19 et 20 novembre 2021, dans le cadre des travaux de la 69e Session Ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (La Commission).

5. Le rapport a été présenté virtuellement devant la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (La Commission) par la délégation béninoise de haut niveau, dirigée par M. Jacques Kodjoh, Secrétaire Général Adjoint du Ministère de la Justice et de la Législation.

6. À noter que le rapport reçu et examiné par la Commission portait uniquement sur la mise en oeuvre des dispositions de la Charte Africaine1.

7. La Commission prend note avec satisfaction de la révision constitutionnelle de 2019 au Bénin, qui a consacré, entre autres, l’abolition de la peine de mort et la promotion de la représentativité des femmes au sein de l’Assemblée Nationale.

8. Au plan normatif, la Commission salue l’adoption de plusieurs textes législatifs ayant trait à la promotion et à la protection des droits de l’Homme par le Gouvernement de la République du Bénin, de 2009 jusqu’à présent.

9. Au plan institutionnel, la Commission prend bonne note de la réforme de la Commission Électorale Autonome, de l’opérationnalisation de la Commission Béninoise des Droits de l’Homme, de l’Institut Nationale de la Femme et de l’Office Central de Protection des Mineurs, de la Famille et de la Répression de la Traite des Êtres Humains.

10. Néanmoins, la Commission demeure préoccupée par un certain nombre de questions, au sujet desquelles elle formule des recommandations à la République du Bénin, s’agissant des mesures nécessaires pour renforcer la jouissance des droits de l'Homme, tels que garantis par la Charte, le Protocole de la Charte Africaine relatif aux Droits des Femmes en Afrique (Le Protocole de Maputo), ainsi que les autres instruments régionaux et internationaux pertinents.

La Charte Africaine

I. Recommandations Générales

- Article 62 : Obligations de présenter des rapports
11. La Commission prend bonne note du 6e au 10e Rapport Périodique Combiné sur la mise en oeuvre des dispositions de la Charte Africaine (2009-2018), présenté par la République du Bénin le 27 aout 2020.

12. L’engagement du Bénin, désormais à jour vis-à-vis de ses obligations sous l’article 62 de la Charte Africaine, est à saluer.

13. Toutefois, la Commission note avec préoccupation que le présent rapport porte uniquement sur la mise en oeuvre de la Charte Africaine.

Recommandation : la République du Bénin devrait inclure dans son prochain rapport périodique, en plus de la partie réservée à la mise en oeuvre des dispositions de la Charte, une deuxième partie dédiée au Protocole de Maputo et une troisième à la Convention de Kampala, ratifiés respectivement le 13 octobre 2005 et le 28 mars 2012.
- Ratifications

14. La Commission prend bonne note de la ratification par le Bénin, durant la période sous examen, de plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme, tant au niveau de l’Union Africaine2, qu’au niveau de l’ONU3.

15. Toutefois, la Commission demeure préoccupée par la non-ratification de plusieurs autres instruments internationaux pertinents.

Recommandations : la République du Bénin devrait :

- Poursuivre les efforts pour la ratification du :
 Protocole à la Charte Africaine sur les Droits des Personnes Handicapées en Afrique,
 Protocole à la Charte Africaine sur le Droit des Citoyens à la Protection Sociale et à la Sécurité Sociale,
 Le Protocole facultatif au Pacte International des Droits Économiques, Sociaux et Culturels.

- Dans le cadre des réformes engagées, reconsidérer sa décision de retirer sa Déclaration au titre de l’article 36(4) du Protocole à la Charte créant la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples.
- Article 1 : mesures législatives pour l’internalisation des dispositions de la Charte Africaine

16. La Commission salue l’adoption de plusieurs textes législatifs ayant trait à la promotion et à la protection des droits de l’Homme par le Gouvernement de la République du Bénin de 2009 jusqu’à présent4.

Recommandation : la République du Bénin devrait poursuivre les efforts visant la domestication des dispositions des instruments internationaux des droits de l’Homme, notamment à travers le parachèvement de l’adoption des lois sur les associations, la traite des personnes et les défenseurs des droits de l’Homme.

- Cooperation avec la Commission

17. La Commission a adopté deux résolutions sur la situation des droits de l’Homme au Bénin, respectivement en 2019 et en 20215, avec des recommandations aux autorités béninoises pour garantir l’application des dispositions de la Charte Africaine dans le cadre de la gestion des manifestations pré et postélectorales qu’a connues le pays entre 2019 et 2021.

18. La Commission enregistre avec préoccupation l’adoption de la loi 2019-39 du 07 novembre 2019, portant amnistie des faits criminels, délictuels et contraventionnels commis lors des élections législatives d’avril 2019.

Recommandations :
- La République du Bénin devrait accorder une plus grande importance à la mise en oeuvre des recommandations de la Commission visant à garantir l’application des garanties de la Charte Africaine en toutes circonstances et éviter notamment l’adoption des lois visant à restreindre leur jouissance.
- Le Bénin devrait accorder des indemnisations aux victimes des faits qualifiés de criminels, délictuels et contraventionnels commis lors des élections législatives d’avril 2019.
- Article 26 : Institution Nationale des Droits de l’Homme (INDH) et autres institutions

19. La Commission félicite La Commission Béninoise des Droits de l’Homme pour l’obtention du statut d’affilié lors de la 69e Session Ordinaire tenue en novembre / décembre 221.

20. La Commission Béninoise des Droits de l’Homme a introduit sa demande d’accréditation auprès de l’Alliance Globale des INDH (GANHRI) en 2021.

Recommandation : la République du Bénin devrait doter la Commission Béninoise des Droits de l’Homme des moyens financiers et humains nécessaires pour remplir pleinement son mandat d’Institution Nationale des Droits de l’Homme.

II. Droits civils et politiques

- Article 2: Droit à la non-discrimination

21. La Commission prend note des efforts visant l’autonomisation des femmes et la promotion de leur représentativité dans les instances élues.

22. Toutefois, la discrimination peut porter sur d’autres facteurs, en addition à celle basée sur le sexe (entre hommes et femmes).

Recommandation : Le Bénin devrait examiner l’adoption d’une loi exhaustive contre la discrimination pour couvrir l’ensemble des facteurs pouvant servir de base à ce phénomène.

Mandat du Rapporteur Spécial sur les Prisons, les Conditions de Détention et l’Action Policière en Afrique

- Article 3: Droit à l’égalité devant la loi et à la protection légale de la loi

- Article 6: Droit à la liberté de sa personne et à la protection contre les arrestations arbitraires

- Article 7: Droit à un procès équitable

23. La Commission prend note de la création de l’Agence Pénitentiaire du Bénin et de l’augmentation du budget annuel qui lui est alloué. Aussi, la Commission prend note de la Politique nationale pour le Développement du Secteur de la Justice lancée en 2014 et de la loi n°2020-08 du 23 avril 2020 portant modernisation de la justice, avec plusieurs innovations : telles que l’installation de certaines nouvelles juridictions, une meilleure observance de la règle du délai raisonnable, l’introduction d’une procédure de règlement des petites créances et la création du bureau d’information au justiciable.

24. En 2009, la Commission avait recommandé au Bénin d’assurer la formation des juges et autres fonctionnaires sur la protection des droits de l’Homme.

25. La Commission a noté dans le rapport soumis et dans l'interaction qui a eu lieu lors de sa présentation, qu’il n'est pas clairement indiqué que l’État Partie dispose d'un programme de formation initiale et continue pour les responsables de l'ordre et de la sécurité. À cette question s'ajoute l'intégration des instruments adoptés par la Commission, notamment les Lignes Directrices de Luanda, les Lignes Directrices sur le Maintien de l’Ordre dans les Rassemblements et les Règles Mandela.

26. La Commission a noté qu'au Bénin, l'âge pénal minimum est de 13 ans, mais qu'il n'existe aucun programme éducatif officiel pour les mineurs en détention, c'est-à-dire les mineurs en conflit avec la loi.

Recommandations : le Bénin devrait :
- Renforcer les garanties du justiciable dans le cadre de la révision du Code de Procédures pénales en cours.
- Poursuivre les efforts visant à améliorer les conditions de détention.
- Renforcer le recours à la libération conditionnelle et des peines alternatives à l’emprisonnement.
- Intégrer des enseignements sur la protection des droits de l'Homme dans les programmes de formation des agents de l'ordre et de la sécurité, plus particulièrement ceux issus des instruments adoptés par la Commission, notamment les Lignes Directrices de Luanda, les Lignes Directrices sur le Maintien de l'Ordre dans les Rassemblements et les Règles Mandela.
- Mettre en pratique dans les institutions pénitentiaires les principes contenus dans les documents régionaux et internationaux sur l'internement des mineurs en conflit avec la loi, plus particulièrement les programmes de formation éducative et professionnelle.
- Assurer la formation des juges et autres fonctionnaires sur la protection des droits de l’Homme.

Mandat du Groupe de Travail sur la Peine de Mort et les Exécutions Extrajudiciaires, Sommaires ou Arbitraires en Afrique

- Article 4: Droit à la vie

27. La Commission réitère ses félicitations au Bénin pour l’abolition de la peine de mort en droit et la ratification du 2e Protocole Facultatif au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques visant à Abolir la Peine de Mort. L’abolition de la peine de mort est désormais un principe constitutionnel consacré par l’article 15 de la Constitution. Le Bénin est l’État champion à l’échelle continentale en matière d’abolition de la peine de mort. C’est le premier pays à accueillir la Première Conférence Continentale sur l’Abolition de la Peine de Mort en 2014. La déclaration ayant sanctionné cette Conférence (Déclaration de Cotonou) a recommandé aux Etats africains, entre autres recommandations, d’appuyer le projet de Protocole à la Charte Africaine sur la peine de mort.

28. à La Commission prend note de la commutation de la peine de mort pour 14 détenus à la prison à perpétuité en 2018.

29. En 2009, la Commission avait recommandé au Bénin de finaliser les étapes visant l’abolition de la peine de mort.

Recommandation :
- En tant qu'État abolitionniste champion, le Bénin est invité à poursuivre sa contribution aux efforts régionaux et internationaux visant l’abolition universelle et effective de la peine de mort, en faisant connaitre et en partageant son expérience nationale en la matière.
- Soutenir le Projet de Protocole à la Charte Africaine sur l’Abolition de la Peine de Mort, conformément à la Déclaration de Cotonou.

Mandat du Comité pour la Prévention de la Torture en Afrique

- Article 5: Interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants

30. La Commission prend note des efforts entrepris par le Gouvernement du Bénin pour lutter contre la torture, en particulier de l’existence d’un Mécanisme national d’Indemnisation des suites des Actes de Torture et Actes Connexes, mais demeure, toutefois, préoccupée par plusieurs carences, notamment par rapport à la définition faite de la torture dans les articles 523 et 465 du Code Pénal et à l’absence d’un Mécanisme national de prévention.

Recommandations : le Bénin devrait :
- Accélérer l’amendement du Code pénal, notamment pour y inclure une définition de la torture.
- Mettre en place un Mécanisme National de Prévention de la Torture.
- Renforcer les capacités du Mécanisme National d’Indemnisation des suites des Actes de Torture et Actes Connexes.

Mandat du Rapporteur Spécial sur la Liberté d'Expression et l'Accès à l'Information en Afrique

- Article 9: Droit de recevoir l’information et liberté d’expression

31. La Commission prend bonne note des informations contenues dans le rapport sur la dépénalisation des délits de presse. Elle prend note aussi de la déclaration du Gouvernement précisant que le Code de l’information et de la communication en vigueur en République du Bénin est aligné sur la loi type de la Commission sur l’Accès à l’Information en Afrique.

32. En 2009, la Commission avait recommandé au Bénin de revoir sa législation pour dépénaliser les délits de presse et assurer une meilleure protection des journalistes contre l’arrestation et la détention arbitraires.

Recommandations : le Bénin devrait :
- Fournir, dans ses prochains rapports, plus de détails sur le paysage médiatique dans le pays (statistiques sur les médias : écrits, audiovisuels, privés, publiques…etc.).
- Assurer la pleine mise en oeuvre des garanties relative à l’accès à l’information, notamment celles incluses dans le Code de l’Information et de la Communication et le Code du Numérique.

Mandat du Rapporteur Spécial sur les Défenseurs des Droits de l'Homme en Afrique et Point Focal sur les Représailles en Afrique
- Article 10: Droit à la liberté d’association
- Article 11: Droit à la liberté d’assemblée

33. La Commission prend note de l’Article 25 de la Constitution béninoise qui consacre la liberté de manifestation et de réunion, aussi bien que de l’existence de projets de loi sur les associations et les défenseurs des droits de l’Homme.

34. Toutefois, la Commission demeure préoccupée par les dispositions de la loi portant « amnistie pour les infractions pénales » commises lors des violences liées aux manifestations qui ont suivi les élections parlementaires.

Recommandations : le Bénin devrait :
- Prendre en considération les standards régionaux et internationaux pertinents, tels que les Lignes Directrices de la Commission sur la Liberté d’Association et de Réunion en Afrique, dans le processus de révision de la loi sur les associations et d’adoption de celle sur les défenseurs des droits de l’Homme.
- Considérer l’application du régime de notification en ce qui concerne la tenue de manifestations pacifiques en lieu et place du régime d’autorisation et la dépénalisation des faits en relation avec « l’organisation ou l’incitation à organiser une manifestation non autorisée ».
- Renforcer la diffusion des Lignes directrices de la Commission sur le maintien de l’ordre par les agents chargés de l’application des lois lors des réunions en Afrique.
- Article 13: Droit de participer à la direction des affaires publiques

35. La Commission prend bonne note de l’adoption des lois n°2019-41 portant Charte des Partis Politiques, de la loi n°2019-43 portant Code Électoral et de l’installation du Conseil National Électoral Permanent.

Recommandation : le Gouvernement béninois devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir un bon déroulement des prochains rendez-vous électoraux, dans un climat pacifique et démocratique.

III. Droits Économiques, Sociaux et Culturels

Mandat du Groupe de travail sur les droits économiques, sociaux et culturels en Afrique

36. La Commission est préoccupée que l’État Partie, à l’occasion de la rédaction du Rapport Périodique sous examen, n’a pas suivi l’ensemble des orientations contenues dans le document : « Directives pour les rapports des États Parties concernant les droits économiques, sociaux et culturels dans la Charte Africaine des droits de l'Homme et des peuples (Directives de Tunis) ».

Recommandation : le Gouvernement béninois est invité à suivre les Directives pour les rapports des États Parties concernant les droits économiques, sociaux et culturels dans la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des peuples (Directives de Tunis), lors de l’élaboration de ses futurs rapports périodiques.

- Article 14: Droit à la propriété

37. La Commission prend note avec satisfaction des initiatives gouvernementales visant à améliorer l'accès à la propriété foncière des communautés rurales par le biais du certificat foncier rural et des dispositions de la loi n° 2013-01 du 14 janvier 2013 portant Code foncier et domanial garantissant à toute personne physique ou morale de nationalité béninoise le droit d’acquérir un immeuble ou des terres en République du Bénin.

Recommandation : le Gouvernement béninois est invité à poursuivre ses efforts pour renforcer l’accès à la propriété, sans discrimination et accélérer la résolution des litiges fonciers.
- Article 15: Droit au travail

38. La Commission se félicite du Programme Emploi Jeune, ayant permis au Gouvernement de toucher 17.000 jeunes, dont au moins 50% de jeunes femmes.

39. Toutefois, la Commission est préoccupée par l’absence d’information sur les restrictions imposées au droit de grève dans certains secteurs jugés sensibles.

Recommandations : le Gouvernement béninois est invité à :
- Poursuivre ses efforts visant la création d’un fonds de soutien au micro et moyennes entreprises et le renforcement de l’entrepreneuriat féminin.
- Assurer la promotion du droit et de l’accès au travail dans le cadre de la révision en cours de la loi 98-004 du 27 janvier 1998 portant Code du travail.
- Garantir le respect du droit à la grève conformément aux standards internationaux pertinents.
- Article 16: Droit à la santé

40. La Commission note que le Bénin a adopté la loi 2020-37 du 03 février 2021 portant protection de la santé et fournit des efforts pour réguler la qualité des soins. La

Commission note l'absence d’informations sur le budget alloué au secteur de la santé et son évolution (positive ou négative).

Recommandations : le Gouvernement béninois est invité à :
- Garantir des moyens humains, matériels et financiers adéquats, pour permettre la mise en oeuvre des différents volets de la politique sanitaire du pays.
- Prendre des mesures nécessaires pour se conformer aux exigences de la Déclaration d’Abuja qui requièrent qu’au moins 15% du budget national soit consacré à la santé.

Poursuivre les efforts visant à améliorer le taux de couverture sanitaire et le taux de fréquentation des établissements de santé.

- Article 17: Droit à l’éducation

41. La Commission prend note des efforts du Gouvernement béninois pour la généralisation de l’enseignement à tous les niveaux, l’amélioration de sa qualité et des conditions scolaires et l’augmentation d’allocation de bourses universitaires.

42. En revanche, la baisse du taux de scolarisation des filles par rapport aux garçons, au cours de la période considérée, constitue une source de préoccupation pour la Commission.

Recommandation : le Gouvernement béninois est invité à poursuivre les efforts et les initiatives visant à combattre les raisons profondes déjà identifiées des déperditions scolaires des filles à tous les niveaux de l’enseignement.

- Article 22: Le droit au Développement Économique, Social et Culturel

43. La Commission a identifié plusieurs initiatives lancées par le Gouvernement béninois, en vue de concrétiser le développement économique, social et culturel de la population, en particulier :
- Le Programme National de Micro Crédit,
- Le Programme National Social,
- L’Assurance pour le Renforcement du Capital Humain (ARCH),
- La construction de 12.000 logements économiques sociaux sur les 20.000 prévus,
- Les efforts visant le renforcement de l’accès à l’eau potable,
- Les efforts visant le renforcement de la sécurité alimentaire et la maitrise des prix des produits alimentaires de grande consommation,
- La mise en place du Fonds d’Aide à la Culture,
- La mise en place du Programme National d’Alimentation Scolaire et l’allocation de ressources additionnelles aux cantines.

44. La préoccupation majeure de la Commission, dans ce registre, est la disponibilité des moyens humains, matériels et financiers pour la mise en oeuvre des engagements susmentionnés.

Recommandation : le Gouvernement béninois devrait s’assurer que les moyens adéquats sont accordés pour assurer la mise en oeuvre effective des initiatives visant à la consolidation du développement économique, social et culturel dans le pays.

V. Droits de la famille et des groupes vulnérables

- Article 18:

Mandat de la Rapporteure Spéciale sur les Droits des Femmes en Afrique

45. La Commission réitère sa préoccupation relative à l’absence d’une partie réservée à la mise en oeuvre des dispositions du Protocole de Maputo dans le Rapport Périodique sous examen.

46. La Commission prend note des efforts du Gouvernement béninois pour promouvoir les droits des femmes, notamment en ce qui concerne la lutte contre les mariages précoces, forcés et les mutilations génitales féminines, la promotion de l’égalité des genres en matière de succession et l’adoption de la loi de 2021 sur les violences faites aux femmes.

47. La persistance de certaines pratiques traditionnelles, telles que le lévirat, les rites de veuvage, les mariages d’échange, constitue un obstacle à la promotion des droits des femmes au Bénin.

48. La Commission prend note des efforts visant l’autonomisation des femmes et la promotion de leur représentativité dans les instances élues. En effet, la faible participation des femmes à la vie publique et politique au Bénin est une autre contre-performance, qu’il convient de souligner.

49. En 2009, la Commission avait recommandé au Bénin de promouvoir la participation de la femme et de combattre la discrimination à son encontre.

Recommandations : le Gouvernement béninois est invité à :
- Inclure dans son prochain Rapport Périodique une troisième partie relative à la mise en oeuvre du Protocole de Maputo.
- Observer lors de l’élaboration de la partie réservée à la mise en oeuvre des dispositions du Protocole de Maputo dans le prochain rapport périodique « Les Lignes Directrices de la Commission pour les rapports des États en vertu du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples relatifs aux Droits des Femmes en Afrique ».
- Poursuivre les efforts visant à assurer la participation effective des femmes à tous les stades de la conception, de la préparation, de la mise en oeuvre et de l'évaluation des politiques et programmes de développement.
- Accentuer les efforts visant le renforcement du leadership féminin et de la participation des femmes à la vie publique et politique.

Mandat du Groupe de Travail sur les Droits des Personnes Âgées et des Personnes Handicapées en Afrique

50. La Commission prend note de la loi de 2017 relative à la protection et à la promotion des droits de personnes handicapées en République du Bénin. Néanmoins, elle demeure préoccupée par l’absence de données statistiques détaillées et à jour sur les personnes handicapées.

Recommandations : le Gouvernement béninois devrait :
- Accélérer la ratification du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples sur les droits des Personnes Handicapées.
- Renforcer l’implication des personnes handicapées et les personnes âgées dans l’élaboration et l’évaluation des politiques et programmes développés à leur profit.
- Renforcer les programmes de prise en charge des personnes âgées.
- Mettre en place des initiatives visant une meilleure intégration des personnes handicapées à la vie publique, notamment en ce qui concerne l’accessibilité.

Mandat du Rapporteur Spécial pour les Réfugiés, Demandeurs d'Asile, Personnes Déplacées internes et les Migrants en Afrique

51. La Commission réitère sa préoccupation relative à l’absence d’une troisième partie dans le présent Rapport Périodique, réservée à la mise en oeuvre des dispositions de la Convention de Kampala, ratifié par le Bénin le 28 mars 2012.

52. La Commission prend note des efforts de l’Agence Béninoise de Gestion Intégrée des Espaces Frontaliers en matière de délivrance de documents d’identité pour lutter contre l’apatridie. Par ailleurs, la Commission est préoccupée par le manque d’information sur le nombre de réfugiés, de demandeurs d’asile et de personnes déplacées internes au Bénin.

Recommandations : le Gouvernement béninois devrait :
- Inclure dans son prochain Rapport Périodique une troisième partie relative à la mise en oeuvre de la Convention de Kampala.
- Fournir des statistiques actualisées sur les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées internes dans le prochain Rapport Périodique.
- Garantir les droits des réfugiés, conformément aux standards internationaux.
- Adopter une politique migratoire, garantissant les droits des migrants, conformément aux standards internationaux.
- Poursuivre les efforts visant à lutter contre l’apatridie.
- Mettre en place des politiques pour la protection des personnes déplacées internes conformément aux dispositions de la Convention de Kampala.
- Mettre en place des mécanismes juridiques et institutionnels, y compris une loi, pour la gestion des personnes déplacées internes.

Mandat du Comité sur la Protection des Personnes vivant avec le VIH et des Personnes à risque, Vulnérables et Affectées par le VIH en Afrique

53. La Commission prend note de la loi n° 2005-31 du 10 avril 2006 portant prévention, prise en charge et contrôle du VIH Sida et du Plan Stratégique National de Lutte contre le VIH/sida et les IST (2015-2017). Elle demeure toutefois préoccupée par la hausse de la prévalence du VIH dans certains Départements, tels le Littoral, l’Atlantique, le Mono et l’Ouémé.

54. En 2009, la Commission avait recommandé au Bénin d’adopter un cadre législatif de protection des personnes atteintes de VIH / SIDA, notamment contre la discrimination.

Recommandations : le Gouvernement béninois devrait :
- Prendre en charge les défis relatifs à la mise en oeuvre de la Loi 2005-31 du 10 avril 2006 portant prévention, prise en charge et contrôle du VIH Sida, notamment en matière de lutte contre la discrimination et la stigmatisation des personnes atteintes de VIH / Sida.
- Accorder une attention particulière et adopter des actions spécifiques en matière de lutte contre le Sida dans les Départements qui enregistrent une hausse de la prévalence de cette maladie.

VI. Droits collectifs / droits des peuples

- Articles 19, 20, 21, 23 et 24:

Mandat du Groupe de travail sur les Industries extractives, l'Environnement et les Violations des Droits de l'Homme en Afrique

55. La Commission prend note de l’adoption du nouveau Code Pétrolier et des informations détaillées fournies par l’État sous examen sur la nature et le cadre juridique de l’exploitation des ressources naturelles dans le pays.

Recommandations : le Bénin devrait
- À l’occasion de l’élaboration de ses prochains rapports, suivre les Principes Directeurs de la Commission pour la soumission de rapports étatiques sur les articles 21 et 24 de la Charte africaine relatifs aux industries extractives, aux droits de l'Homme et à l'environnement.
- Garantir un meilleur respect des normes environnementales, dans le cadre de la mise en oeuvre du nouveau Code Pétrolier.

Mandat du Groupe de Travail sur les Populations / Communautés Autochtones et les Minorités en Afrique

56. La Commission enregistre avec préoccupation que le rapport périodique et les réponses de la délégation ne fournissent pas d’indications quant à l'existence de populations/communautés autochtones en République du Bénin, ainsi que sur le statut des groupes ethniques appelés « Baatonu » et « Fon du Bénin ».

Recommandations : le Bénin devrait
- Mettre en place des lois ou des mesures pour sensibiliser le public et réparer les éventuelles injustices et inégalités qui pourraient toucher les communautés autochtones en République du Bénin.
- Consacrer davantage, dans la loi comme dans la pratique, la reconnaissance des droits des communautés autochtones à posséder, exploiter, contrôler et gérer des terres, territoires et ressources.
***

Conclusion

57. L’examen des rapports périodiques constitue un important volet du mandat de la Commission.

58. L’obligation de soumettre des rapports, qui incombe aux États Parties est, en réalité, un outil efficace pour apprécier la mise en oeuvre des droits de l’Homme consacrés par la Charte Africaine dans le terrain.

59. La Commission tient à féliciter la République du Bénin pour la présentation de son 6e à 10e Rapport Périodique Combiné sur la mise en oeuvre des dispositions de la Charte Africaine (2009-2018).

60. L’engagement constructif des autorités béninoises à l’occasion de l’examen du présent rapport périodique est également à saluer.

Le Bénin est encouragé à poursuivre sa coopération et son engagement constructifs avec la Commission Africaine.

61. La Commission espère que les présentes recommandations seront prises en compte et mises en oeuvre par le Gouvernement du Bénin.

62. Le Bénin est, désormais, à jour vis-à-vis de ses obligations sous l’article 62 de la Charte Africaine.

63. Conformément aux dispositions de la résolution 517, relative à la méthode de computation des délais de présentation des rapports périodiques CADHP/Rés.517 (LXX) :

La Commission invite la République du Bénin à soumettre son prochain rapport périodique (11e Rapport) sur la mise en oeuvre des dispositions de la Charte, du Protocole de Maputo (Rapport initial) et de la Convention de Kampala (Rapport initial) en Aout 2024.
CADHP, 29Juillet 2022

Annexe

Liste de la délégation de l’État partie ayant pris part à l’examen du 6e à 10e Rapport Périodique Combiné, tenu virtuellement les 19 et 20 novembre 2021, dans le cadre des travaux de la 69e Session Ordinaire de la Commission :
- M. Jacques Kodjoh, Secrétaire Général Adjoint, Représentant de Monsieur le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et de la Législation.
- Madame Claudine Afiavi PRUDENCIO, Présidente de l'Institut national de la femme du Bénin ;
- Madame Inès HADONOU-TOFFOUN Directrice des droits humains au Ministère de la Justice et de la Législation (MJL) ;
- Monsieur Franck Armel AFOUKOU, Directeur, des Affaires juridiques au Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération (MAEC) ;
- Monsieur Achille BATONON Conseiller technique juridique du Ministre de la Santé ;
- Monsieur Dieudonné TODJIHOUNDE Chef du Service des Droits humains au MJL ;
- Monsieur Wilfried ACHODE Chef du Service des Droits de l'Homme au MAEC ;
- Madame Léilatou TOKO Inspectrice du Travail au Ministère du Travail et de la
- Fonction publique ;
- Monsieur Abdel-Aziz ISSAKA Représentant le Ministere du Développement et de la Coordination de l’action gouvernementale ;
- Monsieur Salomon A. OGOUMA Assistant du President de la Commission béninoise des Droits de l'Homme.

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