RESOLUTION SUR LE VOTE BIANNUEL DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES APPELANT A UN MORATOIRE SUR L'APPLICATION DE LA PEINE DE MORT. CADHP/Res.614 (LXXXI) 2024

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La Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (la Commission), réunie lors de sa 81e session ordinaire du 17 octobre au 6 novembre 2024 à Banjul, en Gambie ;

Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples en Afrique en vertu de l'article 45 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine); 

Considérant les articles 4 et 5 de la Charte africaine qui consacrent respectivement le droit à la vie et le droit à la dignité;

Considérant l'article 4(2)(j) du Protocole à la Charte africaine sur les droits de la femme en Afrique appelant les Etats à s'engager à « s’assurer que, dans les pays où elle existe encore, la peine de mort n’est pas exécutée à la femme enceinte ou allaitante » ; et l'article 5 (3) de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, stipulant que « la peine de mort n’est pas prononcée pour les crimes commis par des enfants ». 

Considérant en outre les résolutions CADHP/Res.42 (XXVI)99, CADHP/Res.136 (XXXXIV)08, CADHP/Res. 375 (LX) 2017 et CADHP/Res. 483 (XXXI1I) 2021 exhortant les États parties à la Charte africaine, entre autres, à envisager d'imposer un moratoire sur la peine de mort et à ratifier le Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort ;

Considérant la Déclaration de Cotonou, adoptée en 2014 par la Commission africaine, appelant « les parlementaires en Afrique à réviser leurs lois nationales, à adopter une législation sur l’abolition de la peine de mort et [...] à voter en faveur des futures résolutions de l'AGNU sur un moratoire sur la peine de mort ».

Rappelant l'adoption du projet de protocole à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatif à l'abolition de la peine de mort en Afrique par la Commission africaine lors de sa 56e session ordinaire, en 2015 ;

Ayant à l’esprit l'Observation générale n° 3 sur la Charte africaine relative au droit à la vie (article 4) et l'Observation générale n° 36 (2018) sur l'article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques concernant le droit à la vie ;

Notant que depuis 2007, l’Assemblée générale des Nations unies vote régulièrement une résolution appelant à observer un moratoire sur l’exécution de la peine de mort ;Que les neuf résolutions adoptées à cet égard  ont reçu un soutien croissant de la part des États membres de l'Union africaine, passant de 17 États ayant voté favorablement  en 2007 à 29 en 2022  et que dans la même période, le nombre d'États parties  s'y opposant est passé de 12 à 6  , tandis que le nombre d'abstentions est passé de 20 à 13 ; 

Considérant qu'en décembre 2024, lors de la 79e session de l'Assemblée générale des Nations Unies (ONU), les États membres de l'ONU seront appelés à voter la 10ème résolution intitulée Moratoire sur l'application de la peine de mort ;

Convaincue qu'un moratoire sur l'application de la peine de mort contribue au respect de la dignité humaine ainsi qu'au renforcement et au développement progressif des droits de l'homme, et considérant qu'il n'existe aucune preuve concluante de la valeur dissuasive de la peine de mort ; 

Se félicitant de l'évolution considérable vers l'abolition de la peine de mort sur le continent africain et du fait que de nombreux États ayant des systèmes juridiques, des traditions, des cultures et des contextes religieux différents appliquent un moratoire, y compris des moratoires de longue date, en droit ou en pratique, sur l'application de la peine de mort.

La Commission :

1. Exhorte les États africains à voter en faveur de la résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies appelant à un moratoire universel sur l'application de la peine de mort ;
2. Appelle les États africains qui maintiennent la peine de mort à :  
a.    établir ou maintenir un moratoire officiel et de partager leur expérience à cet égard ;
b.    adopter des réformes législatives visant à réduire le nombre de crimes passibles de la peine de mort aux crimes les plus graves ;
c.    veiller à ce que les personnes passibles de la peine de mort puissent exercer leur droit de demander la grâce ou la commutation de leur peine de mort ;
d.    envisager la possibilité d'abolir la peine de mort.  

Fait à Banjul, Gambie, le 6 novembre 2024