La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission), réunie en sa 59ème Session ordinaire, tenue à Banjul, République islamique de Gambie, du 21 octobre au 04 novembre 2016 ;
Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples en Afrique conformément à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte africaine);
Réaffirmant le droit fondamental à la liberté d’information et d’expression, inscrit à l’article 9 de la Charte africaine et dans d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme;
Réaffirmant en outre la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique, notamment le Principe I(2) qui dispose que “tout individu doit avoir une chance égale pour exercer le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information, sans discrimination aucune” et le Principe II(2) qui stipule que “toute restriction à la liberté d’expression doit être imposée par la loi, servir un objectif légitime et être nécessaire dans une société démocratique”;
Rappelant la Résolution CADHP/Res.62 (XXXII) 02 portant adoption de la Déclaration de Principes sur la Liberté d’expression en Afrique, qui précise le champ d‘application de l’article 9 de la Charte africaine; la Résolution CADHP/Res.54 (XXIX) 01 sur la Situation de la Liberté d’expression en Afrique; la Résolution CADHP/Res.99 (XXXX) 06 sur la Détérioration de la situation de la Liberté d’expression et de l’Accès à l’Information en Afrique; et la Résolution CADHP Res 350 (EXT.OS/XX) 16 portant révision de la Déclaration de Principes sur la Liberté d’expression en Afrique;
Rappelant également la Résolution HRC/RES/20/8 de 2012 du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies qui reconnaît que « le caractère global et ouvert de l’Internet en fait un moteur du développement sous toutes ses formes », affirme que « les droits dont les personnes jouissent hors ligne doivent être également protégés en ligne, en particulier le droit de toute personne à la liberté d’expression, qui est applicable sans considération de frontières et par le moyen de son choix » et engage tous les États à « promouvoir et faciliter l’accès à l’Internet et la coopération internationale aux fins du développement des médias et des moyens d’information et de communication dans tous les pays »;
Gardant à l’esprit la Déclaration conjointe sur la liberté d’expression et l’Internet, adoptée par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion du droit à la liberté d’opinion et d’expression, le Représentant sur la liberté des médias de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), le Rapporteur spécial sur la liberté d’expression de l‘Organisation des États américains (OEA) et la Rapporteure spéciale sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique de la Commission africaine, le 1er juin 2011, insistant notamment sur la nature évolutive de l’Internet permettant à des milliards de personnes dans le monde de faire entendre leur voix et renforçant considérablement l’accès à l’information, le pluralisme et les rapports;
Consciente de la nécessité de combler la fracture numérique désavantageant considérablement le continent africain ;
Reconnaissant l’importance de l’Internet pour faire avancer les droits de l’homme et des peuples en Afrique, en particulier le droit à la liberté d’information et d’expression ;
Reconnaissant en outre l’importance de la protection de la vie privée sur l'Internet pour la réalisation du droit à la liberté d’expression, d’avoir des opinions sans ingérence et le droit à la liberté de réunion pacifique et d’association ;
Condamnant l’usage de discours haineux sur Internet, notamment toute forme de discours qui dégrade les autres, favorise la haine et encourage la violence contre un groupe, sur la base de la race, de la couleur, de la religion, de l’origine nationale, du sexe, du handicap ou d’autres critères ;
Prenant note de la Déclaration africaine sur les droits et libertés de l’Internet, élaborée par une coalition d’organisations de la société civile africaine et adoptée lors du 9ème Forum sur la gouvernance de l’Internet tenu à Istanbul, Turquie, en septembre 2014, qui développe les principes nécessaires au respect des droits de l’homme et des peuples sur l’Internet et la culture d’un environnement de l’Internet pouvant répondre au mieux aux besoins et aux objectifs en matière de développement social et économique ;
Préoccupée par la pratique émergente des États parties consistant à interrompre ou limiter l’accès aux services de télécommunication comme l’Internet, les médias sociaux et les services de messagerie, particulièrement en période électorale;
Convaincue qu'il est d'une importance capitale que des principes clairs et complets soient établis pour guider la promotion et la protection des droits de l'homme dans l'environnement en ligne ;
La Commission :
1. Engage les États parties à respecter et à prendre des mesures législatives et autres pour garantir, respecter et protéger le droit des citoyens à la liberté d’information et d’expression par l’accès aux services de l’Internet ;
2. Prie instamment les citoyens africains d’exercer leur droit à la liberté d’information et d’expression de manière responsable ;
3. Encourage la Rapporteure spéciale sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique à prendre en considération les développements intervenus dans le domaine de l’Internet lors de la révision de la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique, adoptée par la Commission en 2002 ;
4. Invite les États parties, la société civile et les autres parties prenantes à collaborer avec la Rapporteure spéciale en contribuant au processus de révision de la Déclaration pour prendre en compte les droits relatifs à l’Internet.
Fait à Banjul, République Islamique de Gambie, le 04 novembre 2016