Résolution sur la nécessité d’entreprendre une étude sur le mariage des enfants en Afrique - CADHP/Res.292(EXT.OS/XVI)2014

partager

La Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (la Commission), réunie à l'occasion de sa 16ème Session extraordinaire, dont les travaux se sont tenus du 20 au 29 juillet 2014 à Kigali, en République du Rwanda;

Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme en vertu de la Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (la Charte africaine) ;

Notant qu’au terme de l’article 45(1)(a) de la Charte africaine,  la Commission a entre autres missions de « rassembler de la documentation, faire des études et des recherches sur les problèmes africains dans le domaine des droits de l'homme et des peuples,…… »

Rappelant les obligations des Etats Parties en vertu de la Charte africaine, du Protocole à la Charte africaine sur les Droits  de l'Homme et des Peuples relatif aux Droits de la Femme en Afrique (le Protocole de Maputo) et de la Charte africaine sur les droits  et le Bien-être de l'Enfant de protéger et de promouvoir les droits des enfants et en particulier des filles en Afrique ;

Notant, en particulier,  les dispositions de l'article 6 du Protocole de Maputo, qui demandent aux Etats parties d’adopter les mesures législatives appropriées pour garantir le plein et libre consentement des deux parties au mariage et pour fixer l’âge minimum de mariage pour la fille à dix huit (18) ans;

Préoccupée par le fait, qu’en dépit de la ratification par la majorité des Etats africains de l’ensemble de ces instruments juridiques pertinents, le mariage des enfants demeure une pratique courante dans de nombreux pays, en violation des droits humains et du bien-être des enfants, qu'il prive de leurs droits fondamentaux, notamment le droit  à l'éducation, à la santé, à ne pas être séparé de leurs parents contre leur volonté, à la dignité, à la vie, et à la protection contre toutes les formes d’abus et d'exploitation y compris sexuelle ;

Déplorant le fait que même lorsque l'âge minimum de 18 ans est prévu par la loi nationale, le mariage des enfants continue d'être pratiqué dans plusieurs pays en raison de la persistance de pratiques coutumières et religieuses néfastes ;

 

Rappelant les objectifs de la Campagne lancée par l'Union africaine le 29 mai 2014 à Addis-Abeba, en Ethiopie, pour lutter contre le mariage des enfants, mettant un accent particulier sur les initiatives stratégiques et la sensibilisation à l'échelle du continent, pour une période initiale de deux ans;

Convaincue de la nécessité de renforcer la Campagne de l’Union africaine à travers la réalisation d'une étude qui offrira une vue d'ensemble de la situation dans certains pays, en identifiant notamment, les causes profondes, la prévalence, les us, coutumes et croyances qui contribuent à perpétuer la pratique ; le niveau de respect des obligations internationales et régionales, le cadre législatif et structurel, et le cas échéant les meilleures pratiques en matière de lutte contre le phénomène,  dans les pays qui seront couverts par l’étude ;

Convaincue en outre qu'une telle étude aidera les Etats parties concernés à renforcer les mécanismes de mise en œuvre de leurs législations et à adopter des plans d’action et des stratégies appropriées  pour éradiquer le mariage des enfants et protéger les droits humains des enfants et en particulier des filles;

Rappelant le mandat du mécanisme de la Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique (le Rapporteure spéciale) qui est, entre autres, de  suivre la mise en œuvre de la Charte africaine et du Protocole de Maputo par les Etats Parties ;

La Commission décide de :

 

  1. Entreprendre une étude sur le mariage des enfants en Afrique qui couvrira les pays suivants : Cameroun, République démocratique du Congo, Kenya, Mali, Mauritanie, Malawi, Mozambique, Afrique du Sud, la Gambie et Ouganda;
  2. Donner mandat à la Rapporteure Spéciale pour conduire ladite étude qui lui sera soumise lors de sa 57ème Session ordinaire ;
  3. Demander au Comité africain d’experts sur les droits et le bien –être de l’enfant et au Centre des droits de l’homme de l’Université de Pretoria d’apporter leur appui et leur expertise à la réalisation de ladite étude ; et
  4. Appeler tous les acteurs concernés à soutenir le travail de la Rapporteure spéciale.

 

Adoptée à la 16ème Session extraordinaire de la Commission africaine, tenue du 20 au 29 juillet 2014 à Kigali, en République du Rwanda