La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission), à travers Son Rapporteur pays, son Rapporteur Spécial sur les défenseurs des droits de l’homme, son Groupe de Travail sur la Peine de Mort, les Exécutions Extrajudiciaires, Sommaires ou Arbitraires et les Disparitions forcées, son Rapporteur spécial sur les Prisons, les Conditions de Détention et l’Action Policière, est profondément préoccupée par les événements survenus le 20 octobre 2022 à N’Djamena et dans d’autres provinces, en République du Tchad dans le cadre des protestations contre la mesure de prolongation de la période de transition prise par les autorités gouvernementales de ce pays.
La Commission exprime sa profonde consternation suite aux informations concordantes faisant état de la mort de plus de 50 personnes ce 20 octobre 2022 et plusieurs centaines de blessés dans le cadre des manifestations organisées par l’opposition contre la prolongation de la durée de la transition pour une période de deux ans. Elle condamne le recours excessif à la force utilisé par les agents chargés de l’ordre contre les manifestants. La Commission exprime sa solidarité avec les familles des victimes et le peuple tchadien en général et souhaite un prompt rétablissement aux blessés.
La Commission appelle les uns et les autres à la retenue afin d’éviter toute escalade de la situation.
La Commission demande à tous les responsables politiques et tous les acteurs ayant un rôle à jouer dans la transition politique en cours de mettre tout en œuvre pour trouver une solution consensuelle et assurer une transition pacifique en attendant la tenue d’élections libres, équitables et transparentes. Dans cet esprit, la Commission demande à tous les acteurs nationaux et internationaux de mettre en avant l’esprit de dialogue et de concertation dans la recherche des solutions aux préoccupations du peuple tchadien.
La Commission demande aux forces de sécurité tchadiennes de s’abstenir de tout recours à la force létale dans le cadre de la gestion des manifestations publiques.
La Commission demande aux autorités judiciaires tchadiennes d’effectuer une enquête rapide, crédible et indépendante sur les événements du 20 octobre 2022 afin de déterminer les violations commises lors des manifestations de ce jour et d’établir les responsabilités.
La commission rappelle aux autorités et aux forces de sécurité tchadiennes qu’aux termes de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et de la Constitution tchadienne, la personne humaine est inviolable. La Commission africaine demande aux hautes autorités tchadiennes de tout mettre œuvre pour assurer le respect des engagements du Tchad dans le domaine des droits de l’homme notamment la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui garantit à toute personne le droit au respect de sa vie et à l’intégrité physique (article 4), le droit de se réunir librement avec d’autres (article 11) , ainsi que le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de son pays (article 13).
Fait à Banjul, le 21 octobre 2022
Honorable Commissaire Rémy Ngoy Lumbu
Honorable Commissaire Idrissa Sow
Honorable Commissaire Maria Teresa Manuela