Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l'action policière en Afrique - 77OS

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RAPPORT D'ACTIVITÉS D’INTERSESSION
DE LA COMMISSAIRE MARIA TERESA MANUELA 
En tant que 

I.Membre de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples et Rapporteure pour le Cabo-Verde, la Guinée équatoriale, la Guinée-Bissau, le Mozambique et São Tomé-et-Príncipe ;
II.Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l’action policière en Afrique  ;
III.Membre du Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées en Afrique  ;
IV.    Membre du Groupe de travail sur les Communications ; et
IV.Membre du Comité pour la Prévention de la Torture en Afrique 

77ème Session ordinaire
20 octobre – 09 novembre 2023
Session en présentiel

SOMMAIRE
SECTION I: Introduction
SECTION II: Activités menées pendant la période d’intersession en tant que : 
I.Membre de la Commission ; 
II.Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l’action policière en Afrique
III.Rapporteure pays pour le Cabo-Verde, la Guinée équatoriale, la Guinée-Bissau, le Mozambique et São Tomé et Príncipe ;
IV.Membre du Groupe de travail sur les Communications ;
V.Membre du Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées en Afrique  ;

SECTION III : Défis
SECTION IV : Conclusions et recommandations 

 
SECTION I - INTRODUCTION
1.Le présent rapport est soumis conformément aux règles 23 (3) et 72 du Règlement intérieur 2020 de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission).  Il couvre les activités menées entre les 76ème et 77ème Sessions ordinaires, comme indiqué dans la Matrice des objectifs du Plan annuel, qui découle du Plan stratégique 2021-2025.

2. Le rapport couvre les activités entreprises en ma qualité de Membre de la Commission, de Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l’action policière en Afrique, de membre du Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées en Afrique, et de membre du Groupe de travail sur les Communications, ainsi que de Rapporteur pays pour le Cabo-Verde, la Guinée équatoriale, la Guinée-Bissau, le Mozambique et São Tomé-et-Príncipe.

3.Le rapport comprend quatre  (4) parties : Introduction ; activités menées pendant l'intersession ; défis rencontrés au cours de mon mandat  de Rapporteure spéciale et de membre de la Commission ; et Recommandations et conclusions.

SECTION II – ACTIVITÉS MENEES PENDANT L’INTERSESSION

I - ACTIVITÉS ENTREPRISES EN MA QUALITÉ DE MEMBRE DE LA COMMISSION

A.Réunions statutaires

4.Les 19 juin et 6 juillet, j'ai participé à des réunions avec le COREP pour discuter de questions liées à la réforme institutionnelle de l'UA, en particulier la CADHP, le Comité des enfants et la Cour africaine.

5.Les 6 et 7 juillet, j'ai pris part à un webinaire organisé par la Commissaire Janet Sallah-Njie, Rapporteure spéciale sur les droits de la femme.  L'événement était axé sur la vulgarisation des Observations générales n° 6 et n°14, de l'Observation générale conjointe sur les MGF, des lignes directrices et d'autres instruments.  L'objectif était de sensibiliser aux instruments juridiques non contraignants relatifs aux droits des femmes et des filles en Afrique, ainsi qu'à leur incorporation dans le droit interne et à leur mise en œuvre. Le webinaire a mis en exergue la contribution de ces instruments non contraignants au respect des droits des femmes en Afrique et la responsabilité de la société civile à cet égard. Un engagement a également été pris de vulgariser ces instruments dans les pays lusophones en mobilisant les ONG travaillant sur les droits des femmes.  Pour plus de détails, voir le rapport du mécanisme concerné.

6.Du 13 au 16 juillet, j'ai assisté à la 43ème Session ordinaire du Conseil exécutif de l'UA et à la 5ème Réunion de coordination semestrielle entre l'UA et les CER/MR à Nairobi, au Kenya.

7.Du 19 juillet au 2 août, j'ai participé à la 76ème Session ordinaire de la Commission.  La session a examiné un certain nombre de questions liées aux activités de la Commission, en particulier la situation des droits de l'homme sur le continent, ce qui a conduit à l'adoption de plusieurs résolutions, de décisions sur diverses communications et d'un examen du droit humanitaire.

Le 7 août, j'ai participé à la deuxième réunion d'experts sur l'Étude relative à l'impact de l'application de la loi sur les droits de l'homme des demandeurs d'asile, des réfugiés et des migrants en Afrique.  Cette réunion faisait suite à l'étude pilote menée dans la région du Niger. Trois membres de la Commission et des experts du HCDH, du CICR, de l'IDDH et de l'APCOF, entre autres, ont participé à la réunion, qui a examiné les moyens d'améliorer l'étude, en tenant compte des développements survenus depuis le projet précédent. Le dernier projet du texte sera disponible dans les langues de travail de la Commission pour consultation publique et contribution, et sera soumis à la Commission pour examen en temps voulu. Pour plus de renseignements, veuillez consulter le rapport du Rapporteur spécial sur les réfugiés, demandeurs d'asile, personnes déplacées internes et les migrants en Afrique. 
II - ACTIVITÉS ENTREPRISES EN TANT QUE RAPPORTEURE SPÉCIALE SUR LES PRISONS, LES CONDITIONS DE DÉTENTION ET L’ACTION POLICIERE EN AFRIQUE
8.À Genève, le 26 mai, j'ai participé à un événement parallèle en marge de la session annuelle de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale. Le thème de l'événement était la surpopulation carcérale.  A cette occasion, j’ai fait une présentation axée sur la surpopulation carcérale en Afrique et sur le travail de la Commission pour aider à réorienter les politiques pénitentiaires sur le continent conformément aux instruments existants, y compris la Déclaration de Ouagadougou. Ces instruments appellent à davantage d'alternatives à l'emprisonnement.

9.Le 11 juillet, j'ai participé à la dernière réunion organisée avec les experts impliqués dans la rédaction de l'étude sur l'usage de la force, après la clôture de la période de consultation publique. Le Commissaire Hatem Essaiem a pris part à la réunion.  Les participants à la réunion ont discuté des aspects de l'étude et des questions qui avaient été soulevées et ajoutées par la suite à l'étude.  Après harmonisation, l'étude a été présentée à la Commission lors de sa réunion de juillet.

10.La Commission a commémoré la Journée Nelson Mandela le 18 juillet.  Cette date est également appelée « Journée africaine des prisons ».  Bien que cette journée soit commémorée dans le monde entier depuis 2010, c'était la première fois que la Commission participait à sa célébration. L'initiative vise à honorer l'héritage de Nelson Mandela, défenseur des droits de l'homme et des peuples, en particulier sa lutte contre l'apartheid et le racisme Le thème de l'édition de cette année est "Climat, alimentation et solidarité". Ce thème souligne l'urgence du changement climatique, qui affecte de manière disproportionnée les populations les plus démunies d'Afrique, dont beaucoup vivent en dessous du seuil de pauvreté.  L'événement vise également à promouvoir les politiques de sécurité alimentaire et la solidarité avec les communautés vulnérables.

11.La Commission a exhorté les États parties à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples à adopter des mesures visant à relever ces défis, tout en encourageant les institutions nationales des droits de l'homme et les organisations internationales à s'engager dans la quête de la justice sociale et climatique. Elle a également exhorté les défenseurs des droits de l'homme à participer activement à la 28ème Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP 28) et à faire pression sur les gouvernements pour une utilisation durable des vastes terres arables du continent afin de garantir l'autosuffisance alimentaire.

12.Le 20 septembre, j'ai présidé le Débat régional sur les alternatives à l'emprisonnement.  Cette activité faisait suite aux discussions sur la surpopulation carcérale tenues lors de la Conférence sur la situation des droits de l'homme dans les prisons en Afrique, organisée du 20 au 23 avril.  Une trentaine de délégués, représentant des institutions publiques, des institutions nationales de défense des droits de l'homme, des chercheurs indépendants et des ONG directement concernées par ces questions, y ont participé. Les travaux comprenaient deux panels, le premier sur l'utilisation excessive des peines d'emprisonnement conduisant à la surpopulation carcérale, et le second sur l'e recours aux alternatives à l'emprisonnement, leurs objectifs et les expériences en place.  Les débats ont été fructueux et alimenteront le travail de la Commission et de ses partenaires pour sensibiliser les acteurs concernés aux changements dans l'approche de l'emprisonnement.

13.Les discussions s'articulaient autour de l'étude sur les alternatives existantes à l'emprisonnement, en mettant l'accent sur les programmes de justice réparatrice.  En déplaçant l'accent de la punition vers la prévention, la réhabilitation et la réinsertion, les alternatives à l'emprisonnement visent à réduire la récidive, à promouvoir la sécurité de la communauté et à remédier aux causes sous-jacentes du comportement criminel.

14.Plus précisément, la discussion avait les objectifs suivants : partager des informations et des stratégies pour alimenter une étude de la Commission africaine sur les alternatives à l'emprisonnement dans le système de justice pénale ; sensibiliser à l'accès aux prisons ; partager des informations sur l'impact des approches actuelles de l’incarcération, de la détention provisoire/préventive et de la condamnation et comprendre les limites et les impacts négatifs du point de vue des droits de l'homme ; discuter des stratégies émergentes pour réduire le nombre de suspects entrant dans le système de justice pénale, y compris la prévention du crime ; aborder la question de la surincrimination des groupes marginalisés ; et réduire la détention arbitraire et la détention provisoire.

15.Le 28 septembre, j'ai présidé une réunion au cours de laquelle l'Étude sur l’usage de la force par les responsables de l’application des lois a été présentée. Le lancement de l'étude est prévu lors de la présente session. La réunion a rassemblé 32 (c'est le nombre ???) participants, dont des représentants d'institutions étatiques, d'INDH et d'ONG. Elle a permis de faire comprendre à toutes les parties intéressées le résultat du travail initié il y a trois (3) ans et auquel chacun a contribué de manière désintéressée. Une fois de plus, les experts ont présenté les principales étapes de leur travail et leur pertinence, en particulier dans la phase postpandémique.

16.L’étude a été menée en collaboration avec le Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées en Afrique ; et le Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l'homme et Point focal sur les représailles en Afrique. La résolution invitait les organisations gouvernementales et non gouvernementales à apporter leur concours à l'étude.

17.L'étude a porté principalement sur les cadres juridiques pertinents et les méthodes permettant de s'assurer que les systèmes juridiques nationaux respectent les normes internationales relatives aux circonstances dans lesquelles la force peut être utilisée, ainsi que sur les mécanismes de responsabilité permettant d'assurer le respect de ces normes.

18.La finalisation et la publication de cette étude permettront d'améliorer les cadres juridiques des États africains en ce qui concerne l’usage de la force dans les interactions quotidiennes avec les citoyens.  À terme, il sera plus facile pour les responsables de l'application de la loi de se conformer aux normes internationales en matière de droits de l'homme.

19.J'ai engagé les actions nécessaires pour faire avancer l'étude sur la situation des prisons en Afrique, conformément à la résolution CADHP/Res.557 (LXXV) 2023, en organisant des réunions avec des partenaires et d'autres parties intéressées à comprendre la situation et à participer à la recherche de solutions.

III - ACTIVITES ENTREPRISES EN TANT QUE RAPPORTEUR POUR LE CABO-VERDE, LA GUINEE EQUATORIALE, LA GUINEE-BISSAU, LE MOZAMBIQUE ET SÃO TOMÉ E PRÍNCIPE

A.ACTIVITÉS SPÉCIFIQUES

20.Du 13 au 15 juin, j'ai participé à un cours de formation sur les rapports alternatifs à l’intention des ONG membres du Réseau lusophone des droits de l'homme. Le cours était organisé par le Centre africain d'études sur la démocratie et les droits de l'homme et conformément aux lignes directrices sur les rapports alternatifs de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples adoptées le  ((date à vérifier). L'objectif du cours était de renforcer la coopération avec la Commission et de donner une plus grande visibilité à son travail.  Le réseau comprend des ONG d'Angola, du Cabo-Verde, de Guinée-Bissau, de Guinée équatoriale, du Mozambique et de São Tomé-et-Príncipe.  Au total, 20 participants représentant les six (6) pays ont assisté à la formation.  Ils sont censés dispenser des sessions de formation dans leurs pays respectifs et partager les connaissances et les compétences acquises dans le cadre du cours. La formation a commencé par un échange d'informations sur la mise en œuvre de la Charte africaine et d'autres instruments régionaux dans chaque pays, suivi d'une formation plus spécifique axée sur : a) le système africain des droits de l'homme ; b) la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ; c) le Protocole à la Charte africaine des droits de la femme ; et d) la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant.  L'objectif ultime est d'assurer la participation de la société civile aux travaux de la Commission et sa contribution lorsque les États soumettent des rapports en vertu de l'article 62 de la Charte, de l'article 26 du Protocole de Maputo et de l'article 43 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant.

21.J'ai maintenu des contacts avec les points focaux dans les pays sous ma responsabilité afin de renforcer l'interaction avec la Commission et de les sensibiliser à la nécessité de soumettre des rapports sur la mise en œuvre de la Charte et d'autres instruments pertinents ou encore de participer plus activement aux activités programmées par celle-ci.

22.Une Note verbale a été envoyée au gouvernement de la République du Cabo-Verde réitérant la demande d’autorisation de la Commission à entreprendre une mission de promotion dans le pays.

B.QUESTIONS PERTINENTES EN MATIERE DE DROITS DE L'HOMME DANS LES PAYS LUSOPHONES

Mozambique

23.Au cours des derniers mois, j'ai suivi la situation des droits de l'homme au Mozambique.  Certaines situations sont source de préoccupation pour la Commission, en particulier la brutalité de la police, des prisons et de l'armée, où des atteintes à la vie et à l'intégrité physique des citoyens ont été enregistrées.

Droit à la vie et à l'intégrité morale et physique

24.Des cas de violations graves des droits de l'homme par les Forces de défense et de sécurité (FDS), en particulier l'Unité d'intervention rapide (UIR), ont été enregistrés à Cabo Delgado, où trois civils auraient été exécutés à bout portant.  A Mocímboa da Praia, les habitants s'inquiètent du manque de sécurité et ont à plusieurs reprises exprimé leur sympathie à l’égard des troupes rwandaises.

25.Un cas de brutalité policière a été observé : un jeune homme aurait été battu à mort dans les cellules du 7e poste de police dans le but d'obtenir des éléments de preuve pour une affaire criminelle.

26.Des policiers ont également été filmés en train de torturer un citoyen sans défense dont les mains étaient attachées à l'arrière d'un véhicule de police.  La vidéo, qui a circulé sur les médias sociaux, montre clairement les agents tentant de l'assassiner en plein jour dans une rue très fréquentée.

27.Le Secrétariat a également été informé de la mort d'un jeune homme dans les cellules de la PRM dans la ville de Maputo, qui a été torturé après avoir été détenu illégalement.  Aucun agent d’application de la loi n'a été tenu pour responsable de ces actes.

28.Il y a également eu le cas d'un homme de 21 ans qui a été brutalement agressé par la police municipale à Angoche.  L'incident s'est produit lorsque trois policiers municipaux ont interrogé le jeune homme, qui travaillait comme conducteur de mototaxi.

29.Le 2 juillet, le commandant de district de la PRM à Mogovolas, dans la province de Nampula, a abattu quatre mineurs alors qu'il tentait de disperser un groupe de citoyens qui protestaient pour la restitution de motos confisquées par la police. Les motos avaient été confisquées afin d'empêcher une course prévue pour célébrer l'anniversaire du siège du district de Nametil.

30.Le Secrétariat a reçu des informations faisant état de violations de la liberté d'expression et de détentions illégales.

31.Le Secrétariat a reçu des informations selon lesquelles sept personnes avaient été arrêtées à Marracuene pour avoir prétendument agressé des policiers lors d'une manifestation contre la fermeture d'un réseau électrique.  Ils ont toutefois été libérés après trois nuits de détention illégale.

Guinée-Bissau
32.En ce qui concerne la Guinée-Bissau, les aspects suivants peuvent être soulignés  :

Droits des personnes âgées

33.Les personnes âgées sont confrontées à des défis importants et l'absence de mesures de protection spécifiques et de législation nationale traitant de la situation des personnes âgées contribue à la persistance des violations de leurs droits.  La violence à l'encontre des personnes âgées est souvent liée à des accusations de sorcellerie.  Dans les communautés où elles vivent, les personnes âgées sont souvent victimes de mauvais traitements, notamment d'agressions physiques et d'autres formes d'abus.  L'impunité est un problème et il y a eu des cas de lynchages à mort comme celui d'une femme âgée dans le village de Suzana, dans le nord de la Guinée-Bissau. Accusée de sorcellerie, elle a été sauvagement battue à mort.

34.Le manque de structures d'accueil adéquates et l'absence de statistiques officielles rendent difficile l'évaluation complète de l'ampleur du problème.  Les organisations de défense des droits de l'homme, telles que la Ligue guinéenne des droits de l'homme, ont souligné la nécessité urgente de redoubler d'efforts et de créer des organisations œuvrant pour la protection et la promotion des droits des personnes âgées.

Traite d’êtres humains
35.Selon les normes minimales établies pour l'évaluation de la lutte contre la traite des personnes, la Guinée-Bissau reste au niveau 3.  Le gouvernement n'a pas fait d'efforts significatifs pour éradiquer la traite des personnes, même en tenant compte de l'impact de la pandémie de Covid-19.  Bien que certaines mesures aient été prises, telles que l'orientation des enfants victimes de la traite vers des organisations de la société civile et la formation des fonctionnaires chargés de l'immigration à la prévention de la traite, le gouvernement n'a pas engagé de poursuites judiciaires contre les trafiquants et n'a jamais condamné un trafiquant en vertu de ses lois anti-traite.  L'identification des victimes et les services qui leur sont fournis sont également inadéquats, et le comité interministériel n'a pas pris de mesures efficaces pour lutter contre la traite.

Cabo Verde
36.Au fil des ans, le Cabo-Verde a fait preuve d'un engagement fort en faveur de la protection et de la promotion des droits de l'homme et a généralement figuré parmi les pays les plus performants.

Promotion des droits humains 

37.Le Premier ministre du Cabo-Verde, Ulisses Correia e Silva, a réaffirmé l'attachement du pays au respect et à la mise en œuvre des conventions internationales en matière de droits de l'homme.  Le Cabo-Verde envisage de présenter sa candidature à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies pour le mandat 2025-2027 afin d'améliorer son bilan en matière de droits de l'homme.  Le gouvernement du Cabo-Verde est attaché à la protection des droits de l'enfant, l'élimination de la discrimination, la promotion de l'égalité des sexes, la garantie des droits des travailleurs migrants et la lutte contre la torture et la discrimination raciale.

38.Le 23 août 2023, la Commission nationale des droits de l'homme et de la citoyenneté (CNDHC) a lancé le concours pour le « Prix national des droits de l'homme 2023 » afin de récompenser les personnes, les études ou les institutions qui ont contribué à la promotion, à la réflexion et à la défense des droits de l'homme et de la citoyenneté au Cab-Verde.  Les catégories de prix sont les suivantes : activiste social, article scientifique, ONG, rapport médiatique et école respectueuse des droits de l'homme.

39.En outre, la Commission nationale des droits de l'homme et de la citoyenneté (CNDHC) et l'association Zé Moniz ont signé un protocole de coopération d'une durée d'un an, renouvelable annuellement.  L'accord vise à promouvoir et à défendre les droits de l'homme au Cabo-Verde. Le partenariat doit contribuer à la réduction de l'exclusion sociale, à la promotion des droits de l'homme et à la lutte contre les violations de ces droits.  L'association Zé Moniz s'engage à soutenir les actions de lutte contre l'extrême pauvreté et à renforcer les synergies entre les deux organisations.  L'accord énonce des directives applicables à la coopération mutuelle, y compris le renforcement des capacités au niveau communautaire et la promotion de stratégies de communication sur les droits de l'homme.  Les deux organisations s'engagent à soutenir la mise en œuvre de politiques publiques axées sur la promotion des droits de l'homme et de la citoyenneté au Cab-Verde.

40.En collaboration avec le Réseau cap-verdien des défenseurs des droits de l'homme, une équipe technique a organisé une réunion avec des représentants d'institutions de défense des droits de l'homme au Cabo-Verde.  L'objectif de cette rencontre était de discuter de la situation des défenseurs des droits de l'homme dans le pays, d'identifier les risques auxquels ils sont exposés et d'analyser leurs besoins de protection. La réunion s’inscrit dans le cadre d'un projet de recherche qui sera également mené sur les îles de Santiago, São Vicente et Sal, dans le but de comprendre comment les défenseurs des droits de l'homme mènent leurs activités, d'identifier les obstacles à la promotion des droits et de déterminer les moyens d'améliorer la situation.

41.Cependant, malgré les efforts du pays visant à défendre et respecter les droits de l'homme, de nombreuses violations persistent et méritent l'attention de la Rapporteure.

Droits des migrants
42.Les organisations de défense des droits de l'homme au Cabo-Verde ont intensifié leurs appels au gouvernement du pays pour qu'il renforce les mécanismes de coordination et crée les conditions propices à l'accueil des migrants fuyant la violence et la pauvreté.  Les organisations affirment qu'il est essentiel d'améliorer la préparation du pays à fournir une assistance aux migrants en situation de vulnérabilité.

São Tomé-et-Príncipe
43.Des progrès significatifs ont été réalisés à São Tomé-et-Príncipe dans le cadre des efforts déployés par le gouvernement pour placer les droits de l'homme au premier rang des priorités nationales.

Promotion des droits humains 
44.Dans le souci de renforcer la protection et d’assurer la pleine mise en œuvre des droits de l'homme dans le pays, le gouvernement de São Tomé-et-Príncipe a annoncé son intention de créer une institution nationale indépendante chargée de la promotion des droits de l'homme.  La création d’une telle institution vise à améliorer la qualité de vie des citoyens, à renforcer les droits de l'homme et les mécanismes connexes et à améliorer la capacité des institutions publiques.

Droits des femmes
45.En partenariat avec les Nations Unies, les autorités de São Tomé-et-Príncipe ont pris l'initiative d’éliminer les différentes dimensions de la violence basée sur le genre dans le pays d'ici 2027.  Ce plan stratégique implique le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) et d'autres agences des Nations unies, et comprend des activités dans les écoles et les clubs de jeunes, où des centaines d'apprenants participent à des débats sur des questions telles que la sexualité, l'égalité des sexes et les droits de l'homme.  La violence basée sur le genre est un problème majeur à São Tomé-et-Príncipe, touchant 13 % des femmes âgées de 15 à 49 ans, et englobant différents types de violence, tels que la violence émotionnelle, physique et sexuelle.

46.La coopération avec les Nations Unies vise à influencer les ménages en étendant ses activités à d'autres domaines et secteurs, y compris les institutions fournissant des services publics.  En outre, le soutien des Nations Unies est axé sur quatre domaines principaux : la coordination inter-agences, le soutien aux victimes, le renforcement des capacités institutionnelles et la production de données statistiques fiables. L'autonomisation des filles est une priorité absolue, plus de 16 100 élèves bénéficiant d'initiatives telles que la production de manuels, la formation des enseignants et l'amélioration des installations scolaires.  Ce partenariat entre les Nations unies et São Tomé-et-Príncipe s'inscrit dans le nouveau cadre de coopération entre le gouvernement et les Nations Unies pour la période 2023-2027.

47.Il est toutefois important de noter que tous les droits n'ont pas reçu la même attention.

Liberté d’expression
48.Le gouvernement de São Tomé-et-Príncipe a imposé une interdiction de 15 jours sur toutes les manifestations, invoquant la nécessité de maintenir la paix et l'ordre pendant les préparatifs du XIVe Sommet de la CPLP, prévu pour le 27 août.  Les autorités affirment que les forces de sécurité sont occupées à assurer des opérations de sécurisation de la ville en vue du sommet et qu'elles ne seraient pas en mesure de garantir la sécurité en cas de manifestations avant l'événement. Cette mesure a été annoncée après que les proches de Lucas Lima, seul survivant d'un groupe de cinq hommes qui auraient été torturés par l'armée après une tentative de coup d'État en novembre 2022, ont planifié une manifestation pour demander que justice soit faite dans cette affaire. Face à cette interdiction du gouvernement, les proches ont décidé d'annuler la manifestation.  L'opposition, menée par le MLSTP-PSD, a également dénoncé l'interdiction, arguant que le sommet de la CPLP ne devrait pas être utilisé pour justifier les violations des droits de l'homme et la suppression des principes démocratiques.  Un analyste politique a fait remarquer que cette décision ternissait l'image du gouvernement et qu'elle était juridiquement contestable, sapant le respect des normes et des meilleures pratiques associées aux gouvernements démocratiques.

Guinée équatoriale

Protection et promotion des droits de l’homme

49.M. Simeon Oyono Esono Angue, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale de la Guinée équatoriale, a réaffirmé l'engagement de son pays à défendre les droits de l'homme. Il s'exprimait lors de la 77ème session de l'Assemblée générale des Nations Unies à New York.  Il a mentionné les stratégies mises en œuvre pour renforcer les droits des enfants, des personnes handicapées et l'accès à l’alimentation, aux vaccins et au logement.  Il a également fait part de son inquiétude face à la piraterie maritime dans la région du golfe de Guinée et a salué la résolution du Conseil de sécurité qualifiant la piraterie de crime.  Il a également appelé à l'organisation d'un sommet sur le Golfe de Guinée pour lutter contre le terrorisme et développer la région.  M. Esono Angue a appelé à une réforme du système des Nations unies, y compris du Conseil de sécurité, tout en soulignant la nécessité d'une plus grande représentation de l’Afrique au sein de cet organe.  Il a rappelé que l'Afrique réclamait de telles réformes depuis plus de 15 ans.  La Guinée équatoriale, dirigée par Teodoro Obiang depuis 43 ans, a été accusée de violations des droits de l'homme, bien qu'elle ait aboli la peine de mort en septembre 2022, sous la pression internationale.

IV.ACTIVITÉS ENTREPRISES EN TANT QUE MEMBRE DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LES COMMUNICATIONS

50.Au cours de la période considérée, et en ma qualité de Vice-présidente de ce Groupe, j'ai participé à la réunion du 4 juillet, au cours de laquelle diverses questions ont été examinées, y compris 4 (quatre) communications reçues au cours de la période précédente, des rapports et d'autres documents. Les recommandations formulées à cette occasion seront présentées à la plénière.
 
51.Le Groupe de travail n'a pas pu se réunir en raison de contraintes de temps dues aux vacances et à la participation des membres à d'autres activités, mais j'ai assisté à une réunion en septembre au cours de laquelle quatre (4) autres communications ont été examinées, comme indiqué dans le rapport du mécanisme.

V.ACTIVITÉS ENTREPRISES EN TANT QUE MEMBRE DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PEINE DE MORT, LES EXÉCUTIONS EXTRAJUDICIAIRES, SOMMAIRES OU ARBITRAIRES ET LES DISPARITIONS FORCÉES EN AFRIQUE

52.Le 15 juin, j'ai pris part à une réunion sur l'accueil des nouveaux membres, la préparation du plan de travail conformément aux règles de la CADHP et la répartition des tâches afin que les activités soient synchronisées et que tout le monde soit conscient du travail à faire. Des informations générales ont été fournies sur la création, le fonctionnement, le mandat, les travaux passés et les projets en cours du Groupe, avec la participation de Madame Sylvie Kaytesi, Rapporteure du Groupe dans d'autres mandats.  Pour plus de détails, voir le rapport du mécanisme.    

SECTION III - DÉFIS 
DÉFIS RENCONTRÉS EN TANT QUE RAPPORTEURE SPÉCIALE ET MEMBRE DE LA CADHP

53.Dans cette section, il est nécessaire de souligner les principaux défis auxquels la Commission est confrontée dans l'exercice de ses activités, en vue de trouver des solutions appropriées. Dans l'accomplissement de ses tâches, la Commission fait face à diverses difficultés, notamment le manque de ressources, qui l'a amenée à recourir à des réunions virtuelles, autrefois exceptionnelles en raison de la pandémie, mais aujourd'hui devenues habituelles.  Cependant, d'autres activités, comme celles du Mécanisme sur les prisons, sont trop sensibles pour être menées sous ce format.

54.Les réunions avec les organes gouvernementaux sur les questions d'application de la loi et de sécurité publique sont incompatibles avec ce format virtuel.  Il s’agit là d’un sujet de préoccupation pour le mécanisme et cela ne lui permet pas de s’acquitter de son mandat efficacement.

55.Les États ne répondent toujours pas positivement aux lettres des mécanismes demandant des visites, en particulier de ce mécanisme. Ces visites constitueraient la base d'une plus grande confiance, qui permettrait l'échange d'informations et de meilleures pratiques.

56.Le budget de la Commission pour les visites de promotion des droits de l'homme en Afrique a été réduit de manière drastique, ce qui affecte à la fois la composition des délégations et l'efficacité des visites selon les critères en vigueur à la Commission.

SECTION IV -  RECOMMANDATIONS ET CONCLUSIONS

RECOMMANDATIONS

États parties

57.Les États parties à la Charte africaine et les acteurs clés de la mise en œuvre et du respect des droits des détenus, responsables de l'ordre public et des forces de sécurité, sont invités à :

i.Participer activement à l'étude en cours sur les conditions carcérales en Afrique, faciliter l'accès aux informations nécessaires et identifier les points focaux avec lesquels la Commission pourra travailler ;
ii.Fournir des fonds aux autorités responsables des prisons et autres lieux de détention pour permettre la rénovation et/ou la construction de nouvelles installations conformément à l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (Règles Mandela), améliorant ainsi les conditions de détention ;
iii.Autoriser les missions de promotion et les visites de prisons demandées par le Rapporteur spécial aux États membres ;
iv.Commencer à réviser les réglementations internes (lois, règlements et autres instruments) qui permettent l'emprisonnement de personnes ayant commis des délits mineurs, en remplaçant l'emprisonnement par des peines alternatives, que presque tous les pays ont dans leur législation et/ou qui sont incluses dans les instruments régionaux et internationaux en la matière, afin de réduire la surpopulation carcérale ;
v.Veiller à ce que la formation initiale et continue des responsables de l'application des lois comprenne des modules sur le respect des droits de l'homme de toutes les personnes, y compris des détenus ;
vi.S’approprier les différentes études adoptées par la Commission, y compris l'étude récemment lancée sur l'usage (excessif) de la force par les responsables de l'application des lois ; et
vii.Faciliter la mise en place d'organismes indépendants (de l'État ou de la société civile) ayant pour mandat d'effectuer des visites régulières dans les prisons et autres lieux de détention, de recevoir et de traiter les plaintes relatives aux décès en détention, aux mauvais traitements ou à la détention excessive pour tout motif extrajudiciaire.
Institutions nationales des droits de l'homme et autres institutions spécialisées

58.Les INDH et autres institutions spécialisées qui travaillent en partenariat avec la Commission sont invitées à coopérer plus étroitement avec cette dernière, notamment par les moyens suivants :

i.Aider la Commission, et en particulier le Mécanisme, à vulgariser les informations et les outils pertinents sur le respect des droits des prisonniers en Afrique ;
ii.Partager des informations sur la torture et dénoncer les cas de torture sous forme de surpopulation dans les prisons et autres lieux de détention en Afrique, et aider la Commission à vulgariser les bonnes pratiques en matière de gestion des prisons contenues dans la Déclaration d'Arusha et la Déclaration de Kadoma, vieille de 20 ans, sur l'utilisation d'alternatives à l'emprisonnement ;
iii.Promouvoir la vulgarisation des instruments adoptés par la Commission ces dernières années, en particulier l'étude sur l'usage (excessif) de la force par les responsables de l'application des lois ; et
iv.Participer activement aux activités en cours, en particulier l'étude sur l'état des prisons en Afrique et la vulgarisation de la Déclaration d'Arusha sur les bonnes pratiques pénitentiaires  et de la Déclaration de Kadoma sur les alternatives à l'emprisonnement, qui sont importantes pour réduire la surpopulation carcérale actuelle.
Organisations non gouvernementales

59.Les ONG, qui sont des partenaires essentiels de la Commission dans le suivi de l'état de la mise en œuvre des droits de l'homme sur le continent, sont invitées à :

i.En tant qu'organisations ayant le statut d'observateur auprès de la CADHP, s’acquitter de leur mandat en participant à des activités qui contribuent à la vulgarisation des instruments pertinents sur les droits des prisonniers et à la surveillance des prisons et autres lieux de détention  ;
ii.Coopérer avec la Commission et les États parties en signalant les violations des droits de l'homme et les abus et en fournissant des données crédibles afin que des enquêtes puissent être menées et que les auteurs de tels actes soient à terme tenus de rendre des comptes ;
iii.Contribuer à la formation et à d'autres formes de soutien nécessaires pour que les efforts conjoints puissent contribuer davantage à la promotion et à la protection des droits de l'homme ; et
iv.Aider et encourager d'autres organisations qui ne coopèrent pas encore avec la CADHP à envisager la possibilité de le faire.

Donateurs et Partenaires

60.Les donateurs et les partenaires sont des acteurs importants dans le travail de la Commission et nous comptons sur eux pour combler le manque de moyens financiers évoqué ci-dessus.  Nous les exhortons à :

i.Faciliter l'impression et la diffusion des instruments pertinents du Mécanisme, en particulier l'étude sur l'usage (excessif) de la force par les responsables de l'application des lois et autres, dans les langues de travail de la Commission ;
ii.Renouveler leurs efforts pour s'assurer que le  bulletin d'information Police et Droits d l’homme en Afrique continue d'être produit et atteint les publics visés ; et
iii.Continuer à soutenir le Mécanisme dans le domaine de la formation, à la fois pour les forces de l'ordre et de sécurité et pour d'autres acteurs clés identifiés dans les études réalisées et dans les travaux en cours.

B – CONCLUSION:
En conclusion, je voudrais saisir cette occasion pour exprimer ma gratitude pour avoir été réélue par les États parties et pour la confiance que mes collègues ont placée en moi pour continuer à diriger le Mécanisme.
Mes remerciements vont bien sûr aussi aux partenaires de cette aventure, car notre travail est vaste et remonte à loin, et j'espère que nous resterons fidèles à notre objectif : faire des prisons un lieu où les droits de l'homme peuvent être promus et respectés, à la fois pour les prisonniers et pour le personnel qui y travaille. 
Je tiens à remercier ceux qui ont participé au projet d'étude sur l'état des prisons en Afrique, tout en espérant que nos efforts ne seront pas vains.
En collaboration avec les États parties, les INDH et d'autres institutions, les ONG et d'autres partenaires, nous nous efforcerons d'organiser des sessions de formation en personne pour vulgariser les publications de la Commission sur le respect des droits de l'homme, en particulier celles liées à notre mécanisme.

Luanda, 2 octobre 2023.

Maria Teresa Manuela