La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Commission), réunie à l’occasion de sa 76ème Session Ordinaire, tenue virtuellement du 19 Juillet au 2 août 2023;
Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples en Afrique en application de l’article 45 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Charte Africaine) ;
Ayant à l’esprit les accords nationaux et les engagements internationaux que le Soudan a signé ou ratifié, dont la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, la Charte Africaine de la Démocratie, des Élections et de la Gouvernance, le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, le Pacte International relatif aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels, et l’Accord de Paix de Juba, par lesquels l’État partie s’est engagé à respecter et protéger les droits de l’homme, les principes de la démocratie, de l’état de droit, de culture de la paix, et de bonne gouvernance ;
Rappelant ses résolutions - CADHP / Rés. 444 (LXVI) 2020 sur la situation des droits de l'homme en République du Soudan, CADHP/Rés.516 (LXX) 2022 sur l’aggravation de la situation des Droits de l’Homme au Soudan suite au coup d’Etat du 25 octobre, CADHP/Rés.548 (LXXIII) 2022, sur les coups d'état, les transitions militaires et les violations des droits de l'homme et des peuples qui en découlent au Burkina Faso, en Guinée, au Mali et au Soudan et CADHP/Res.555 (LXXV) 2023 sur la situation des Droits de l’Homme en République du Soudan ;
Fortement préoccupée par le conflit armé qui a débuté depuis le 15 avril entre les Forces armées soudanaises et les Forces de soutien rapide d’une part et d'autre part la persistance des combats même après la Déclaration d’engagement de Djeddah qui engendrent des conséquences dévastatrices dans plusieurs domaines;
Constatant les échecs successifs de toutes les tentatives de médiation internationale malgré les multiples sommets qui peinent à instaurer un cessez- le- feu;
Considérant que les combats en cours ont causé la mort de plus de 3900 civils depuis le début des combats et un peu plus de 5000 blessés ainsi que plus de 1 million de personnes prises au piège à Khartoum, Omdurman et Bahri ;
Considérant en outre les conséquences humanitaires du conflit sur les déplacements forcé de plus de trois millions de personnes en moins de 4 mois dont 2, 2 millions de personnes déplacées internes et 700.000 réfugies dans les pays voisins (Egypte, Tchad, Soudan du Sud, Libye, Ethiopie et République Centrafricaine);
Alarmée par les multiples violations en cours dans le pays qui vont de l’usage excessif de la force, des exécutions extrajudiciaires, arbitraires ou sommaires des homicides illicites, des arrestations et détentions arbitraires, des actes de torture, des mauvais traitements et des disparitions forcées, la violence sexuelle et fondée sur le genre, les violations à la liberté d’opinion et d’expression et à la liberté de réunion pacifique et d’association, des droits économiques et sociaux; ainsi que les violences intercommunautaires et attaques contre des civils qui constituent des violations des droits garantis par la Charte Africaine et les autres instruments internationaux auxquels le Soudan est partie ;
Condamnant les atrocités commises au Darfour, notamment les meurtres, les viols et la destruction des biens et des moyens de subsistance, qui visent en particulier les personnes sur la base de leur appartenance ethnique, principalement les membres du groupe ethnique Maslit ;
La Commission :
1. Condamne vigoureusement:
i.Les violents combats en cours entre les Forces Armées Soudanaises (SAF) et les Forces paramilitaires de Soutien Rapide (RSF);
ii.Les violations des droits humains et de risque de crimes de guerres au Soudan;
2. Demande aux parties belligérantes un cessez-le-feu immédiat et sans conditions, et engager des pourparlers afin de mettre un terme définitif au conflit en cours ;
3. Exhorte les parties en conflits à respecter et protéger les travailleurs humanitaires en assurant la sécurité des couloirs humanitaires et en s’abstenant de poser des actes pouvant porter préjudice aux actions de ces derniers;
4. Demande à l’Union africaine de prendre les mesures urgentes ci-dessous, afin de mettre un terme au conflit au Soudan et restaurer la paix et la stabilité:
i.Poursuivre les négociations entre les différentes parties pour mettre fin au conflit;
ii.Envoyer si nécessaire une mission de rétablissement (peacemaking) et de consolidation de la paix (peacebuilding) si nécessaire afin de rétablir la stabilité et mettre un terme aux violations des droits de l’homme et des crimes de guerre éventuels et humanitaires en cours au Soudan;
iii.Mettre en place une aide humanitaire africaine par le biais de l’Agence Humanitaire Africaine afin d’assister les victimes de guerres au Soudan ainsi que celles ayant trouvé refuge dans les pays voisins;
iv.- Mobiliser ses États membres et les acteurs internationaux pour qu'ils fassent pression sur les parties en conflit, y compris par l'utilisation de sanctions ciblées des leaders des parties à mettre fin immédiatement au conflit;
v.- Mettre en place un mécanisme de surveillance, de documentation et de rapport sur les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international commises par les parties belligérantes, notamment en accordant une attention particulière à la situation au Darfour;
5. Exhorte la Communauté internationale à intensifier les efforts dans la résolution du conflit en étroite collaboration avec l’Union africaine pour mettre un terme au conflit en cours dans les plus brefs délais;
6. Continue de suivre l’évolution de la situation des droits de l’homme au Soudan.
Fait virtuellement, le 2 aout 2023