Généralement un migrant est toute personne qui vit de façon temporaire ou permanente dans un pays dans lequel il n’est pas né et qui a acquis d’importants liens sociaux avec ce pays.[1] Cependant, de nos jours ce terme semble avoir une autre connotation et les personnes ainsi désignées comme telles sont souvent traitées comme des parias, aux mépris du respect de leurs droits fondamentaux. En cette journée internationale des migrants, la Rapporteure Spéciale sur les réfugiés, les demandeurs d’asile, les déplacées internes et les migrants en Afrique, de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission africaine), voudrait rappeler que le migrant est un être humain, qui a droit au respect de sa dignité et à la protection de ses droits comme tout autre individu.
Etre migrant n’est qu’un statut et non ce qui définit la personne, car nous sommes tous ou avons été migrants à un moment ou un autre de notre vie, au sein de nos propres pays, ailleurs, ou tout simplement lorsque nous voyageons.
Depuis quelques années, le déplacement massif des migrants, constitue un défi majeur pour le monde en général et l’Afrique en particulier. Les nombreuses pertes en vies humaines déplorées parmi les migrants en mer méditerranée, l’ampleur que prend ce phénomène, ainsi que les conséquences désastreuses, particulièrement sur les populations africaines, préoccupent grandement la Commission africaine.
Ces deux dernières années l’attention portée aux migrants s’est décuplée avec la vague des migrants syriens qui s’est déversée sur l’Europe remettant en cause la « quiétude » de certains. Cependant, le problème de la migration est vieux comme le monde et toutes les nations en ont fait plus ou moins l’expérience si elles n’en sont pas elles-mêmes issues. Avant l’explosion migratoire venue du moyen orient, l’Afrique fournissait un lot important de migrants vers l’Europe, et même si cette affluence a diminué, le phénomène n’en demeure pas moins présent.
En cette journée dédiée aux migrants, la Rapporteure Spéciale, rappelle les engagements pris par les Etats africains quant à la problématique de la migration et la situation des migrants. En effet, lors du Sommet mondial humanitaire d’Istanbul, tenue cette année, l’Union Africaine à dévoiler la Position Africaine Commune sur l’efficacité humanitaire (PAC), et annoncer la création de l’Agence Humanitaire Africaine qui aura pour charge de mettre en œuvre le programme d’action humanitaire continentale, à l’endroit des déplacements forcés y compris le problème de la migration.
En effet, si la migration sud-nord est sans aucun doute celle ayant les conséquences les plus dramatiques pour les migrants africains, avec les nombreux naufrages en mer que nous avons connu ces dernières années, il n’en demeure pas moins que la migration sud-sud, conséquences des nombreuses crises politiques, conflits armées, crise économique qui agitent le continent, poussant les individus à immigrer dans les pays tiers, représente également un réel défi.
En Septembre 2016, la question des réfugiés et des migrants a fait l’objet d’un Sommet des Nations Unies, tenu à New York, au cours duquel l’accent a été mis sur la réponse essentiellement humanitaire faite aux déplacements de réfugiés et des migrants ainsi que sur la faiblesse de financement à cette réponse. En effet, comme il l’a été rappelé au cours de ce Sommet, « les déplacements massifs de réfugiés et de migrants ont des ramifications politiques, économiques, sociales, développementales, humanitaires et en matière de droits de l’homme qui transcendent toutes les frontières. Il s’agit d’un phénomène mondial appelant des approches et des solutions mondiales ».
Afin de remédier à cette faiblesse et pour une meilleure aide et soutien aux réfugiés, aux migrants, et à ceux qui leur apportent une assistance, à l’exemple des pays et des communautés d'accueil, les Etats se sont engagés à travers l’adoption de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, « à protéger la sécurité, la dignité ainsi que les droits de l’homme et les libertés fondamentales de tous les migrants, indépendamment de leur statut migratoire à quelque moment que ce soit », mais aussi et plus important à coopérer étroitement pour « faciliter et garantir des migrations sûres, ordonnées et régulières, y compris lorsqu’il s’agit de retours et de réadmissions, en tenant compte de la législation nationale ».
La Rapporteure spéciale, tient à rappeler le mandat de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples en Afrique en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte africaine), de la Commission africaine; particulièrement les dispositions de l’article 12 de la Charte africaine, qui garantit à tout individu, le droit de circuler librement, de choisir sa résidence et interdit entre autre l’expulsion collective d’étrangers, les dispositions de la Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique, les dispositions de la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (convention de Kampala), les instruments internationaux sur la protection des réfugiés, ses résolutions CADHP/Res.114 (XXXXII) 07, CADHP/Rés.131(XXXXIII) 08 et CADHP/RES. 333 (EXT.OS/XIX) 16 sur la situation des migrants, ainsi que sa Déclaration sur la détérioration de la situation des migrants en mer méditerranée faite lors de sa 56ème session ordinaire à Banjul en Gambie ;
La Rapporteure spéciale, encourage l’Union Africaine, en particulier les pays pourvoyeurs, de transit, mais également les pays de destination à s’approprier les recommandations de la Déclaration de New York sur les réfugiés et les migrants et de prendre toutes les mesures nécessaires pour sa mise en œuvre en vue d’apporter des solutions concrètes à la situation des migrants en Afrique.
La Rapporteure spéciale, demande à l’Union africaine de mettre en œuvre dans les plus brefs délais la Position Africaine Commune sur l’efficacité humanitaire (PAC), et d’accélérer le processus de création de l’Agence Humanitaire Africaine qui aura pour charge de mettre en œuvre le programme d’action humanitaire continentale en vue d’atteindre les objectifs fixés par l’agenda 2063 de l’Union Africaine.
La Rapporteure spéciale, appelle enfin, toutes les parties prenantes à traiter le migrant avec dignité, car malgré leur statut temporaire ou définitif de migrant, il n’en demeure pas moins des êtres humains dont les droits doivent être respectés comme le garanti la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
Commissaire Maya Sahli Fadel
Rapporteure Spéciale sur les Réfugiés, les demandeurs d’Asile,
les personnes déplacées et les migrants en Afrique
Banjul, le 16 décembre 2016
Pour plus d’informations, veuillez contacter
Le Secrétariat de la Commission
31 Bijilo Annex Lay-out, Kombo North District
Western Region
P. O. Box 673, Banjul, The Gambia
Tél: (+220) 441 05 05 /441 05 06
Fax: (+220) 441 05 04
Courriel : au-banjul@africa-union.org
[1] Définition de l’Organisation mondiale de la migration