La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission), très préoccupée par la détérioration continue de la situation des droits de l’homme en Libye, appelle les Autorités libyennes et toutes les parties prenantes à agir de toute urgence afin de mettre fin aux violations des droits conformément aux obligations contenues dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte).
Plusieurs rapports publiés ces derniers jours font état d’une traite des êtres humains ainsi que de l’esclavage ciblant les populations des migrants africains vendus aux enchères sur les marchés en Libye. Il s’agit d’une violation grave des dispositions, entre autres, des articles 2, 3, 5, 6 et 12 de la Charte, dont la Libye est partie. Plus récemment une vente aux enchères d’êtres humains avait été rapportée par les médias internationaux en Libye, non loin de la capitale, Tripoli. Selon ces informations, les migrants seraient régulièrement vendus par des passeurs ; il s’agirait a priori d’une situation récurrente. Ces différents rapports mettent en lumière les situations d’esclavage auxquelles sont réduits de nombreux migrants qui transitent par la Libye.
La Commission dénonce ce traitement inhumain, cruel et dégradant. Elle prend note des mesures annoncées par les Autorités libyennes pour mener des investigations nécessaires afin d’arrêter et de traduire en justice les auteurs présumés de cette pratique et de tout mettre en œuvre pour assurer un accès équitable des victimes à la justice.
Dans un contexte de dualité des objectifs sécuritaires et humanitaires, les Autorités libyennes doivent veiller au respect des obligations régionales et internationales relatives à la protection des migrants, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des déplacés internes sans aucune forme de discrimination. La Commission rappelle au Gouvernement libyen qu’aucune circonstance ne pourrait justifier des violations continues des droits de l’homme et demande en outre aux Autorités nationales de prendre en urgence toutes les mesures nécessaires pour assurer la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples, conformément aux dispositions de l’article 1er de la Charte. Le Gouvernement Libyen doit également veiller au respect de ses obligations aux titres de la Convention de l’OUA régissant les aspects propres aux problèmes de réfugiés en Afrique, la Convention interdisant le trafic illicite des migrants et les documents de politiques générales de l’Union africaine sur les migrants ainsi que les autres instruments régionaux et internationaux pertinents.
La Commission demande également à l’Union africaine, à l’Union européenne et aux Nations unies de prendre des actions conséquentes pour assurer la sécurité des populations civiles en Libye et de tout mettre en œuvre pour régler de manière durable les questions de paix et de sécurité en Libye, pilier nécessaire pour toute autre action de promotion et de protection des droits de l’homme.
Enfin, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, tout en demandant aux Autorités libyennes de produire un rapport sur cette situation ainsi que sur les mesures prises, se réserve le droit d’entreprendre, en temps opportun, une mission d’établissement des faits en Libye, conformément aux dispositions de la Charte.
Fait à Banjul, le 21 novembre 2017