RAPPORT D’INTERSESSION DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LES POPULATIONS/COMMUNAUTES AUTOCHTONES EN AFRIQUE
Commissaire Soyata Maïga
Présidente du Groupe de travail
54ème Session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples
Banjul, Gambie
22 octobre – 5 novembre 2013
Conformément à l’Article 23(3) du Règlement intérieur de la Commission africaine et en ma qualité de Présidente du Groupe de travail sur les populations /communautés autochtones, nous présentons le rapport sur les activités de promotion menées depuis la 53ème Session ordinaire de la Commission africaine, tenue à Banjul, Gambie, du 9 au 23 avril 2013.
Le rapport couvre également les activités menées par d’autres membres au nom du Groupe de travail.
I – Activités menées en notre qualité de Présidente du Groupe de travail
A. Participation à des séminaires/forums
Du 11 -14 juin 2013
1. La Commissaire Lucy Asuagbor et moi-même, avons pris part à deux ateliers organisés conjointement par le Gouvernement du Cameroun et le Centre sous-régional des Nations Unies pour les droits de l’homme et la démocratie en Afrique centrale à M’Balmayo, (Cameroun). Le premier atelier portait sur la validation d’une étude commanditée par le Ministère des Relations Extérieures sur les éléments d’une définition des peuples autochtones au Cameroun. Différents acteurs ont participé à l’atelier en vue d’apporter des enrichissements au document.
2. Le second atelier portait sur la mise en œuvre des recommandations faites au Cameroun par des organes créés en vertu de traités internationaux et régionaux sur ses obligations envers les populations autochtones.
3. Nous avons fait une présentation sur les critères retenus par la Commission Africaine dans l’identification des populations autochtones en Afrique, le mandat et le travail du Groupe de travail ainsi que les meilleures pratiques, en cours dans certains pays africains relativement à la promotion et à la protection des droits de ces couches marginalisées.
Le 17 septembre 2013
4. Nous avons participé aux échanges organisés en marge de la 24ème Session du Conseil des droits de l’homme à Genève (Suisse) autour des enjeux de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones qui sera organisée par les Nations Unies en Septembre 2014 à New York. En plus de moi-même, le panel était composé de : M. John Henriksen, Co-modérateur du processus préparatoire à la Conférence mondiale sur les peuples autochtones ; M. Raja Devasish Roy, membre de l’Instance permanente sur les questions autochtones; Mme Tania Pariona, Groupe de la coordination mondiale autochtone ; du Chef Wilton Littlechild, Président du Mécanisme d'Experts sur les droits des peuples autochtones.
5. Dans notre présentation, nous avons évoqué les buts et les objectifs de la Conférence mondiale en général et l’importance de la participation inclusive des peuples autochtones dans le processus, conformément à la Résolution A/RES/66/296 de l’Assemblée Générale des Nations Unies.
6. Abordant les différentes questions transversales liées aux droits de l’homme, qui seront discutées, et pour lesquelles, la Conférence devrait trouver des solutions, nous avons insisté sur les défis récurrents, auxquels restent confrontées les populations autochtones en Afrique, eu égard, en particulier, à l’accès à la terre et aux ressources productives ; à la santé, à l’éducation et à la représentation politique.
7. Nous avons également relevé l’importance de la coopération avec le secteur privé dans le contexte africain ainsi que la pertinence d’intégrer les questions relatives aux peuples autochtones dans tous les travaux du système des Nations Unies.
8. Nous avons insisté sur le rôle crucial que les organisations régionales telles que la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et les Bureaux pays des agences spécialisées des Nations Unies pourraient jouer dans l’information des populations autochtones et de leurs organisations sur le processus préparatoire à la Conférence mondiale, mais aussi, quant à la mise en œuvre des futures recommandations qui seront finalement adoptées.
Du 20 - 21 octobre 2013
9. Nous avons présidé la réunion du Groupe de travail qui s’est tenue en prélude aux travaux de la présente session. Les membres du Groupe de travail ont procédé à l’évaluation des activités menées pendant l’intersession et ont identifié celles qui devraient être inscrites à l’agenda de la prochaine période d’intersession. Divers documents ont été examinés et adoptés. Le Groupe de travail a participé aux travaux du Forum des ONGs et a rencontré des représentants de populations autochtones du Kenya et du Cameroun sur la situation des droits de leurs communautés.
B. Notes Verbale/Lettres
10. Le 25 avril 2013, des Notes Verbale ont été envoyées à la République d’Afrique du Sud et à la République du Cameroun pour demander à ces Etats d’autoriser le Groupe de travail à effectuer une visite dans leur pays afin de pouvoir évaluer la situation des populations autochtones sur leur territoire. Le Groupe de travail n’a reçu aucune réponse, à ce jour. Nous saisissons cette occasion pour réitérer notre demande aux deux Etats parties et attendons en retour une réponse diligente et favorable.
Appel urgent au Botswana
11. En juillet 2013, nous avons reçu des plusieurs ONGs des droits de l’homme des allégations concordantes faisant état du fait que, Gordon Bennett, avocat britannique des Basawara et expert sur les questions autochtones, était empêché d’entrer au Botswana où il devait représenter la communauté dans un dossier devant la Haute Cour, contre le Gouvernement du Botswana, le lundi 29 juillet 2013.
12. Suite à ces allégations, nous avons adressé un appel urgent au Président de la République du Botswana, en lui rappelant les obligations qu’a le Botswana, en vertu de la Charte africaine et d’autres instruments régionaux et internationaux pertinents, de garantir le droit à tout citoyen Botswanai à un procès équitable, en particulier le droit d’être représenté par un avocat de son choix. Nous avons également prié instamment le Président de bien vouloir faire préciser par ses services compétents les mesures prises pour résoudre cette situation. Aucune réponse n’a été reçu à ce jour de la part de la Présidence ni des bureaux du gouvernement.
II - Activités menées par les membres experts du Groupe de travail
A. Rapport de la Visite de recherche et d'information en République Unie de Tanzanie
13. Le Groupe de travail a effectué une visite de recherche et d’information du 21 janvier au 6 février 2013 dans ce pays. Le projet de rapport a été examiné et adopté par le Groupe de travail et sera soumis à l’adoption de la Commission africaine lors de sa session privée.
B. Atelier sur l’état de mise en œuvre de la décision de la Commission africaine relative aux Endorois
14. La Commission africaine avait rendu une décision sur le cas Endorois lors de sa 46ème Session ordinaire en novembre 2009 et la décision a été ultérieurement adoptée en février 2010 par les Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’UA avant d’être transmise aux Parties par la suite. Dans cette décision, il était demandé au gouvernement de rendre compte de l’état de la mise en œuvre de la décision dans un délai de trois mois suivant sa notification et la Commission africaine proposait ses bons offices pour aider les Parties à la mettre en œuvre.
15. Au cours de l’audition orale sur la mise en œuvre de la décision, devant la Commission Africaine, lors de la 53ème Session ordinaire, le Gouvernement du Kenya s’etait engagé, à travers ses représentants, à soumettre une feuille de route sur la mise en œuvre dans un délai de quatre vingt dix jours. Or, il n’a pas tenu sa promesse.
16. Pour favoriser le dialogue entre les parties et la satisfaction des droits des Endorois, le Groupe de travail a organisé un atelier le 23 Septembre 2013 à Nairobi, regroupant plusieurs acteurs sur l’état de la mise en œuvre de la décision et la suite à y donner.
17. (45) délégués ont participé aux travaux dudit atelier qui a eu le privilège d’enregistrer la présence du professeur James Anaya, Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones, du Commissaire Pacifique Manirakiza, du Commissaire Rapporteur pour le Kenya et membre du Groupe de travail, ainsi que des représentants de la Commission sur l'Administration de la Justice, de la Commission nationale des droits de l’homme ainsi que la Commission Genre et Egalité. Ont également participé à l’atelier des membres du Groupe de travail, des représentants du Haut Commissariat aux droits de l’homme, de la Commission interaméricaine des droits de l’homme, des représentants d’organisations de la société civile et de la communauté Endorois.
18. Il est regrettable que le Gouvernement du Kenya n’ait envoyé aucun représentant à l’atelier bien que sept invitations lui aient été adressées ainsi qu’aux structures affiliées, bien avant la date de la tenue de l’atelier. Il n’a donc pas été possible de proposer une feuille de route de mise en œuvre de la décision à la fin de l'année, comme initialement prévu.
19. Les participants ont toutefois eu de longues et fructueuses discussions et ont convenu de certaines stratégies pouvant être utilisées pour favoriser la mise en œuvre de la décision. Le Communiqué final de l’atelier est affiché sur le site Web de la Commission africaine.
C. Cours sur les droits des peuples autochtones
20. Le cours de perfectionnement sur les droits des peuples autochtones a été dispensé pour la troisième fois cette année, du 16 au 20 septembre, à l’Université de Pretoria à Pretoria, Afrique du Sud. Le cours est organisé par le Centre for Human Rights de l’Université de Pretoria, en collaboration avec l’OIT, l’IWGIA et le Groupe de travail. Deux membres experts du Groupe de travail, le Dr Melakou Tegegn et le Dr Albert Barume, ainsi que l’Assistant du Groupe de travail, Samuel Tilahun, y ont participé en qualité de personnes ressources.
21. Le cours a réuni des représentants de populations autochtones, des responsables de gouvernements, des ONG, des universitaires et des étudiants en provenance de toute l’Afrique. Nous invitons les représentants d’Etat, d’ONG, d’INDH et d’organisations internationales ici présents et intéressés par la thématique à se rendre disponibles pour suivre les cours prochains et contribuer également à en diffuser le contenu à un public plus élargi. Pour toutes informations complémentaires, vous pouvez visiter le site Web du Centre for Human Rights sur :
http://www1.chr.up.ac.za/index.php/projects/ahrc.html
D. Points focaux
22. En vue de formaliser, renforcer et pérenniser la collaboration entre le Groupe de travail et les organisations de la société civile intervenant sur les questions relatives aux droits des populations autochtones, le Groupe de travail a identifié et pris contact avec 31 ONG basées dans 21 pays africains en leur proposant la qualité de Points focaux. Quinze (15) d’entre elles ont confirmé leur disponibilité et leur intérêt à servir comme point focal.
23. La mission assignée aux Points focaux consistera à:
I. Communiquer régulièrement au Groupe de travail des informations sur la situation des populations autochtones et sur les organisations et les défenseurs de leurs droits dans les pays respectifs;
II. Rendre compte de l’état de mise en œuvre des recommandations du Groupe de travail, des appels urgents ou des décisions, recommandations ou résolutions de la Commission relatives aux droits des populations autochtones;
III. Assister le Groupe de travail et collaborer avec lui dans l’organisation d’activités de promotion telles que : séminaires de sensibilisation, ateliers de formation, conférences etc.. ;
IV. Aider à diffuser et faire circuler largement les informations et les publications qui leur sont envoyées par le Groupe de travail ;
V. Partager toutes autres informations et travailler avec le Groupe de travail dans tous les domaines d’intérêt commun.
4. Les critères/conditions requises auxquels doivent répondre les Points focaux sont les suivants :
I. Jouir du statut d’Observateur/Affilié auprès de la Commission ou s’engager à solliciter le statut d’Observateur/Affilié dans l'année consécutive à la sélection ;
II. Etre basé ou avoir un bureau dans le pays supposé être couvert ;
III. Travailler dans le domaine des droits des populations autochtones ou sur des questions relatives aux droits de l’homme ou au développement.
25. Le Groupe de travail est extrêmement reconnaissant à l’égard des organisations qui ont exprimé leur disposition à collaborer avec lui et continuera à coopérer étroitement avec elles.
E. E-newsletter (Lettre d’information électronique) du Groupe de travail
26. Pendant l’intersession, le Groupe de travail a publié le premier numéro de sa Lettre d’information électronique (E-Newsletter) intitulée « La voix des autochtones ». Cette lettre d’information est publiée deux fois par et a pour but de sensibiliser et de favoriser la conscientisation de tous les acteurs sur la situation et les droits des populations/communautés autochtones en Afrique ainsi que sur le mandat et le travail du Groupe de travail. Elle est publiée en anglais et en français en version électronique uniquement et accessible sur :
http://www.achpr.org/mechanisms/indigenous-populations/
27. Les personnes désireuses de publier des articles, des nouvelles et des informations pertinentes sur la promotion et la protection des droits des populations autochtones en Afrique sont aimablement invitées à prendre contact avec l’assistant du Groupe de travail : Mr. Samuel Tilahun Tessema sur samiazeb2005@yahoo.com
F. Etude sur les industries extractives
28. Conscient de l’impact des industries extractives sur la vie des populations autochtones en Afrique, le Groupe de travail avait décidé lors de sa dernière réunion, de mener une étude intitulée « Etude sur les industries extractives, les droits fonciers et les droits des communautés/populations autochtones en Afrique de l’Est, Centrale et Australe ».
29. L’étude a déjà démarré et devrait être finalisée en octobre 2014. Elle a été confiée à un expert identifié après un processus de consultation entre le Groupe de travail et celui en charge de la thématique des Industries extractives.
III. Recommandations
Aux Etats parties
Les Etats parties sont instamment invités à:
i. Ratifier la Convention 169 de l’OIT et promulguer des législations spécifiques sur les droits des populations autochtones conformes aux principes consacrés par cette Convention et par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones;
ii. S’abstenir de prendre des mesures ayant des conséquences négatives pour les droits des populations autochtones, en particulier, s’agissant de mesures d'expulsion de leurs terres ancestrales;
iii. Répondre positivement et avec diligence aux Appels urgents et aux Notes Verbales du Groupe de travail;
Aux autres acteurs
i. Travailler en étroite collaboration avec le Groupe de travail en vue de soutenir la reconnaissance et la pleine réalisation des droits des populations autochtones.
ii. S’informer et participer activement au processus préparatoire de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones de 2014.