Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique

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INTRODUCTION

1. Conformément aux Règles 25(3) et 64 du Règlement intérieur (2020) de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission) et en accord avec sa Résolution ACHPR/Rés.38 (XXV) 99 du 5 mai 1999, je présente le présent Rapport en ma qualité de Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique (SRRWA).

 

2. Le rapport, qui est présenté en cinq (5) parties, couvre les activités menées pendant la période d'intersession après la 71ème session ordinaire de la Commission, qui s'est tenue virtuellement du 21 avril au 12 mai 2022. La première partie couvre mes activités en tant que SRRWA ; la deuxième partie montre la Lettre de félicitations envoyée à un État partie et le Communiqué de presse publié pendant la période considérée ; la troisième partie présente les événements parallèles auxquels j'ai participé en marge de cette session ; la quatrième partie donne un aperçu du statut des femmes et des filles pendant la période d’intersession ; et enfin, la cinquième partie du rapport met en évidence des conclusions assorties de recommandations.

 

PREMIERE PARTIE : ACTIVITES MENEES EN QUALITE DE RAPPORTEURE SPECIALE SUR LES DROITS DE LA FEMME EN AFRIQUE

A. Réunion sur l'engagement avec les mécanismes régionaux des droits de l'homme pour renforcer la protection : le système africain des droits de l’homme. 
3.Le 18 mai 2022, j'ai participé à cet événement en ligne référencé qui était organisé par les Global Protection Clusters- Human Rights Engagement Team dans le cadre de la Semaine des réseaux et partenariats humanitaires 2022.

 

4. J'ai fait une présentation sur « Les dimensions de genre des crises humanitaires et des déplacements internes : engagement avec le système africain des droits de l'homme » où j'ai déclaré que la montée en puissance de groupes terroristes tels qu'Al-Shabaab et Boko Haram a exacerbé les conflits dans un certain nombre de pays et qu’il émerge de leurs tactiques un double rôle pour les femmes en vertu duquel elles sont utilisées comme armes (comme kamikazes par exemple) et comme cibles spécifiques. J'ai également mentionné le fait qu'au-delà de l'utilisation d'armes, l'escalade des activités terroristes entraîne une augmentation du nombre de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays, dont les femmes et les enfants sont affectés de manière disproportionnée.

 

5. J'ai également souligné le fait que, dans les camps de déplacés, les femmes n'ont pas accès à des soins de santé reproductive, ce qui contribue aux grossesses non planifiées et aux accouchements sans accès à des services de santé. En outre, l'exploitation sexuelle des femmes et des filles est également une caractéristique commune souvent due à l'insécurité des logements et à la détérioration générale des mœurs en temps de crise. Ma présentation a également mis en évidence les raisons pour lesquelles les femmes sont les plus touchées lors de telles crises, notamment le fait que, si les hommes sont susceptibles de migrer facilement pour de meilleures perspectives économiques, les femmes ne sont généralement pas en mesure de migrer facilement en raison de leurs responsabilités en matière de soins, ce qui entraîne une pauvreté et une insécurité alimentaire écrasantes.

 

6. J'ai conclu ma présentation en faisant des propositions sur la façon dont les clusters de protection peuvent interagir avec la Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique (SRRWA) pour mieux protéger les droits des femmes pendant les crises, y compris la collecte de données pour fournir une mine d'informations à la SRRWA lui permettant d’intervenir par le biais de missions d'enquête, de Résolutions, de Lettres d'appel, entre autres stratégies d'interventions. J'ai également fait part aux participants d'autres possibilités d'intervention, notamment les rapports parallèles sur la situation des femmes, qui aideront la SRRWA à poser des questions constructives aux États parties lors de l'examen de leurs rapports d'État et à formuler des recommandations sur la meilleure façon dont ils peuvent protéger les droits des femmes déplacées ou en situation de crise humanitaire.} 

 

B. Mettre fin à la discrimination de genre dans les lois sur la nationalité en Afrique 

7. Le 31 mai 2022, j'ai été invitée à prononcer un discours liminaire lors de cette activité susmentionnée organisée par la Campagne mondiale pour l'égalité des droits en matière de nationalité, une coalition d'organisations nationales et internationales, d'activistes indépendants et d'agences partenaires des Nations Unies œuvrant dans le but de mettre fin à la discrimination de genre dans les lois sur la nationalité. La réunion avait pour objectif de mobiliser un groupe plus large d'organisations de la société civile (OSC) africaines pour collaborer aux efforts visant à obtenir des droits de nationalité égaux pour les hommes et les femmes sur tout le continent, compte tenu du caractère central des droits de nationalité pour le statut des femmes en tant que citoyennes égales et leur égalité dans la famille, ainsi que des liens entre les lois sur la nationalité égale et le développement durable.

 

C. Réunion de consultation virtuelle sur les Lignes directrices relatives aux Rapports parallèles 

8. Au cours de la dernière Session, j'ai indiqué qu’en mars 2020, la Commission a adopté une Résolution CADHP/Rés. 436 (EXT.OS/ XXVI1) 2020 sur la nécessité d'élaborer des Lignes directrices sur les rapports parallèles et trois (3) Mécanismes ont été chargés d'élaborer ces Lignes directrices.

 

9. Le 1er juin 2022, conformément aux directives de la 71ème Session ordinaire de la Commission, une 2ème Consultation sur le projet de Lignes directrices a été convoquée pour permettre aux Mécanismes impliqués dans leur rédaction d'approuver le contenu du projet, en vue de sa finalisation pour présentation à la 72ème Session ordinaire de la Commission.

 

10. Au cours de cette réunion, le projet de Lignes directrices a été validé par les Commissaires responsables des Mécanismes impliqués, et je suis heureuse de vous annoncer que le projet de Lignes directrices a été adopté lors de la 72ème Session ordinaire de la Commission et sera lancé lors de la présente Session.

 

D. Validation du Manuel de formation sur les rapports parallèles/alternatifs des OSC sur les droits de la femme en Afrique

11. Le 2 juin 2022, j'ai été invitée par Equality Now et la Coalition Solidarité pour les droits des femmes africaines (SOAWR), en partenariat avec le PNUD, à assister à la validation virtuelle du Manuel de formation. La réunion était organisée pour partager et discuter du contenu du Manuel ; donner aux parties prenantes l'opportunité d'évaluer le contenu et la structure du Manuel ; recevoir les réactions et les commentaires des parties prenantes pour envisager de les inclure dans le Manuel final et améliorer la qualité du Manuel par une approche participative et un retour constructif sur son contenu.

 

12. J'ai également félicité Equality Now, SOAWR et les partenaires de l'initiative Spotlight pour leur ingéniosité et leur prévoyance pour développer une formation complète et des ressources de référence pour informer les initiatives de renforcement des capacités, ainsi que pour aider les OSC dans la préparation et la soumission de rapports périodiques.  J'ai reconnu le fait qu'il n'existe actuellement aucune directive ou manuel de la société civile sur les rapports parallèles concernant les droits des femmes, d’où un manque d'orientation claire sur la meilleure façon pour les OSC de produire des rapports utiles pour la Commission. Ce Manuel de formation devrait donc avoir une valeur inestimable pour faciliter le rôle des OSC et leur participation effective au processus de préparation des rapports des Etats.

 

13. J'ai également informé les auteurs de l'initiative actuelle de la Commission visant à formuler des Lignes directrices appropriées pour les Rapports parallèles que ces Lignes directrices compléteraient et enrichiraient le Manuel de formation, notamment en ce qui concerne les questions relatives aux droits des femmes en Afrique. Je leur ai également dit que l'objectif des Lignes directrices pour les Rapports parallèles était de donner un aperçu des différents éléments à prendre en compte par la société civile dans l'élaboration des rapports parallèles à soumettre à la Commission. Je leur ai également fait observer que des Lignes directrices standardisées sur les Rapports parallèles en vertu de la Charte africaine, du Protocole de Maputo, du Protocole de Kampala et d'autres traités africains pertinents en matière de droits de l'homme permettront à la Commission d'obtenir une image plus complète de la situation des droits de l'homme dans les États membres examinés.

 

E. onsultation d'experts sur le projet d'Observation générale conjointe sur les mutilations génitales féminines (MGF) par la Commission et le Comité africain d'experts sur les droits et le bien-être de l'enfant (le Comité)

14. Cette réunion s’est tenue les 7 et 8 juin 2022 à Pretoria, Afrique du Sud, dans le but de faciliter la contribution et la consultation d’experts sur le projet d'Observation générale conjointe sur les MGF. La réunion avait pour but d'entreprendre un dialogue constructif avec les représentants de divers secteurs œuvrant pour l'élimination des MGF en Afrique. L'intention était de renforcer et de démocratiser le projet d'Observation générale conjointe avant sa finalisation.

 

15. Dans mes propos de bienvenue à la réunion, j'ai reconnu que l'élaboration de l'Observation générale conjointe était, en soi, une entreprise conjointe. J'ai remercié l'ancienne Commissaire, Lucy Asuagbor pour ses précieuses contributions et son expertise lors de la réunion et j'ai rappelé les instruments pertinents déjà en place qui ont servi de base à la rédaction de l'Observation générale conjointe. J'ai également fait remarquer que l'autonomisation des femmes est la clé de la prospérité de l'Afrique et j'ai reconnu que la réunion était une occasion de réfléchir aux mesures nécessaires à prendre pour assurer la mise en œuvre effective de cette Observation générale conjointe.

 

16. {L’Observation générale conjointe sur les MGF devrait être examinée et adoptée lors de cette session de la Commission ainsi que lors de la session du Comité.}

 

F. Atelier régional sur le renforcement du respect par les États de leurs obligations en matière de rapports à la Commission et sur le Protocole de Maputo 

17. Du 14 au 16 juin 2022, j'ai participé, avec la Commissaire Maria Teresa Manuela, à une formation sur le renforcement des capacités des États membres concernant leurs obligations en matière de rapports à la Commission. Cette formation était organisée conjointement avec le Centre for Human Rights de l'Université de Pretoria. Elle a eu lieu à Maputo, Mozambique, et a attiré des participants de 5 pays lusophones : le Mozambique, l'Angola, la Guinée Bissau, le Cabo Verde et Sao Tomé-et-Principe. L'un des objectifs de la formation était d'encourager ces pays à présenter des rapports, étant donné que certains d'entre eux n’en ont jamais présenté de rapport au titre des Articles 62 de la Charte africaine et 26 du Protocole de Maputo, et que d'autres en ont plusieurs en retard.

 

18. J'ai fait une présentation de la Commission, dans laquelle j'ai cherché à m'assurer que les participants aient une compréhension claire de sa structure de ses Mécanismes spéciaux, de la manière dont les États membres et les parties prenantes peuvent interagir avec la Commission et de la manière dont les rapports des États s'inscrivent dans le mandat de la Commission.

 

19. Ce fut également l'occasion de discuter directement avec les États membres de certains des défis auxquels ils sont confrontés dans la préparation de leurs rapports, qui vont des contraintes en matière de ressources au manque de connaissances techniques, en passant par la tâche ardue de préparer un rapport tous les deux ans. Nous avons réfléchi ensemble à des solutions pour relever certains de ces défis, notamment en tirant parti d'autres processus d'établissement de rapports dans lesquels les États sont déjà engagés, dans le cadre du système des Nations Unies.

 

G. 13ème Réunion de la Plateforme des Mécanismes d'experts indépendants sur la discrimination et la violence à l’égard des femmes (Plateforme EDVAW)

20. Le 17 juin 2022, j'ai participé à la 13ème Plateforme EDVAW qui s'est tenue à Genève du XXX. La réunion a rassemblé des Membres de la Plateforme provenant de différents systèmes de droits de l'homme. Au cours de la réunion, j'ai informé les participants des travaux en cours sur l'Observation générale conjointe sur les MGF, à laquelle les Membres de la Plateforme sont invités à apporter leur contribution. J'ai également mentionné les initiatives actuelles de l'Union africaine visant à élaborer un traité sur la violence à l'égard des femmes, et j'ai indiqué qu'il est prévu que le traité proposé prenne en compte les innovations de la Convention d'Istanbul pertinentes pour le continent africain.

 

21. La réunion a discuté d'autres questions thématiques importantes, notamment : la dimension numérique de la violence à l'égard des femmes – le lien entre les droits des femmes et la cybercriminalité ; le syndrome d'aliénation parentale dans le contexte des repoussoirs sur les droits des femmes ; et un Traité mondial des droits des femmes concernant la violence à leur égard.

 

22. A la fin de la réunion, les membres de la Plateforme ont eu une brève discussion sur une éventuelle déclaration commune pour la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes (25 novembre), et il a été suggéré que le thème soit centré sur « l'accès des femmes à la justice ». 

 

H. Webinaire pour les experts et les parties prenantes sur la décision rendue dans la Pétition constitutionnelle n° 122 de 2013

23. Le 22 juin 2022, j'ai été invitée par Utu Wetu à participer à ce webinaire dont les objectifs étaient de mettre en évidence et de discuter des réalisations et des lacunes dans le jugement rendu en première instance dans la Requête constitutionnelle n° 122 de 2013. La requête visait à faire établir la responsabilisation, la réparation et l'amélioration de la prévention et des réponses à la violence sexuelle et sexiste massive et systématique au cours des périodes de violence liée aux élections au Kenya. Elle visait également à identifier des opportunités stratégiques de litige et de plaidoyer afin de s'appuyer sur les réalisations et de combler les lacunes du jugement du tribunal de première instance, notamment par le biais du cas d'appel n° E645 de 2021, afin de garantir une prévention et des réponses significatives à la sexuelle et basée sur le genre, en particulier dans le contexte des élections générales de 2022 au Kenya.

 

24. À la suite du webinaire, avec l'Honorable Commissaire Dersso, Rapporteur de pays pour le Kenya, nous avons publié un Communiqué de presse conjoint sur la nécessité de prévenir la violence sexuelle et basée sur le genre à l'approche des élections présidentielles d'août 2022 au Kenya (rapporté plus loin).

 

I. Deuxième Séminaire continental conjoint de haut niveau sur le droit à la sante et à la protection sociale en Afrique

25. Du 27 au 29 juin 2022, avec le Mécanisme ECOSOC de la Commission, nous avons organisé ce Séminaire conjoint à Windhoek, Namibie. Le Séminaire était organisé notamment pour permettre aux parties prenantes de comprendre les obligations des États parties en vertu de la Charte africaine, du Protocole de Maputo et d'autres instruments pertinents concernant le droit aux soins de santé, aux services de santé et à la protection sociale ; identifier les lacunes dans les systèmes de soins de santé et le secteur de la protection sociale dans les États membres de l'UA ainsi qu'aux niveaux régional et continental ; sensibiliser/traiter la question des systèmes de soins de santé déficients et de la couverture/mise en œuvre insuffisante de la protection sociale ; et sensibiliser au projet de Protocole sur les droits des citoyens à la protection sociale et à la sécurité sociale.

 

J. Consultation avec la FIDH sur une collaboration dans les activités

26. Le 22 août 2022, j'ai été invitée par la FIDH à une réunion de consultation visant à renouveler leur partenariat avec la SRRWA qui était interrompu depuis un certain temps. Les participants ont discuté de divers domaines de collaboration, tels que la recherche, le soutien technique au Mécanisme et, surtout, la vulgarisation des Lignes directrices sur la lutte contre la violence sexuelle et ses conséquences en Afrique, adoptées par la Commission lors de sa 60ème Session ordinaire tenue à Niamey, Niger, du 8 au 22 mai 2017. 

 

27. La FIDH a convenu de prendre une série de mesures pour renforcer et promouvoir une plus grande collaboration entre l'Organisation et la SRRWA aux niveaux stratégique et opérationnel. La Consultation a été l'occasion pour la SRRWA et la FIDH de développer davantage leurs liens et d'identifier de meilleures façons de travailler ensemble.

 

K. Réunion de validation du Modèle de guide et de lignes directrices pour la protection des femmes défenseurs des droits de l’homme en Afrique}

28.Le 6 septembre 2022, j'ai été invitée par Equality Now, en partenariat avec ONU Femmes, à assister à la Réunion de validation virtuelle du Modèle de guide modèle et de lignes directrices, élaboré de mars à juillet 2022. Ces documents ont été élaborés à la suite d'une étude interne sur le statut des femmes défenseurs des droits de l’homme.

 

29. Le Modèle de guide et de lignes directrices donne des informations et des conseils sur les meilleurs systèmes et protocoles de protection des femmes défenseurs des droits de l’homme et sur la manière dont ils peuvent être adoptés par les États membres de l'UA. Le Modèle et l'évaluation sur laquelle il est basé soulignent en particulier la responsabilité des États de veiller à ce que les femmes défenseurs des droits de l’homme soient protégées contre la violence à l'égard des femmes, y compris contre les exécutions extrajudiciaires et les poursuites.

 

30. Les objectifs de la réunion étaient de partager les conclusions de la situation des femmes défenseurs des droits de l’homme en Afrique ; de partager et de discuter du contenu du Modèle de guide et de directives ; de donner aux parties prenantes l'occasion d'évaluer et de remettre en question le contenu et la structure du Modèle ; d'améliorer la qualité du Modèle par une approche participative et un retour constructif et objectif sur son contenu ; et de recevoir les réactions et les observations des parties prenantes pour les prendre en compte dans la version finale du Modèle de guide et de directives pour les femmes défenseurs des droits de l’homme.

 

31. Dans mes propos, j'ai une fois de plus félicité Equality Now et ses partenaires pour avoir commandité la préparation de ce guide très important, et pour les progrès considérables réalisés jusqu'à son processus de validation.  J'ai déclaré qu’à mon avis, le Modèle était très utile au mandat de la SRRWA car il attire l'attention sur les risques et les défis uniques auxquels sont confrontées les femmes défenseurs à différents niveaux et sur la nécessité de renforcer leur protection. J'ai particulièrement apprécié le fait que le Modèle mette en évidence les différentes possibilités disponibles au niveau de la Commission pour la protection des femmes défenseurs, notamment la procédure de plainte, les Communiqués de presse, les Lettres d'appel urgent et les Résolutions. 

L. Réunion avec Human Rights Watch
32.Le 21 septembre 2021, avec l'Honorable Commissaire Mudford Mwandenga, nous avons participé à une réunion organisée par Human Rights Watch afin de discuter des dernières conclusions et du travail de l'organisation sur les droits des étudiantes enceintes et des mères adolescentes sur le continent africain. . 

 

33. Les participants nous a informés que des rapports sont publiés par Human Rights Watch chaque année, afin de fournir un rapport de situation sur les mesures prises par les États membres sur le sujet et de présenter également une analyse concrète des droits de l'homme sur la façon dont les politiques et les lois des pays respectent ou entravent leurs obligations en matière de droits de l'homme. Les participants ont convenu des prochaines étapes, qui comprennent la collaboration avec mon mandat, celui du Mécanisme ECOSOC de la Commission, ainsi qu'avec le Comité africain d'experts sur les droits et le bien-être de l'enfant.

 

M. Forum des ONG

34.Du 17 au 18 octobre 2022, j'ai participé au Forum des ONG, organisé par le Centre Africain pour la Démocratie et les Droits de l'Homme à Banjul, en Gambie. J'ai pris part au panel sur le thème "Climat et justice reproductive". Mon intervention a mis en évidence le fait qu'en Afrique, les événements climatiques extrêmes tels que les vagues de chaleur, les inondations et la sécheresse ont des effets distincts selon le sexe, et que les femmes en souffrent de manière disproportionnée, en raison de la vulnérabilité découlant de la division du travail selon le sexe et de la répartition du pouvoir au niveau du ménage, du travail et à d'autres niveaux. J'ai également souligné qu'en cas de conditions climatiques difficiles, les risques de violence liée au sexe, y compris la violence, l'exploitation et les abus sexuels, ainsi que la violence entre partenaires intimes, augmentent. 

 

35. J'ai déclaré qu'au fil des ans, mon mandat a joué un rôle essentiel dans le suivi et la définition de normes régionales pour la protection des femmes dans de telles circonstances, notamment en adoptant des résolutions sur la santé et les droits reproductifs des femmes en Afrique, et la Campagne continentale pour la dépénalisation de l'avortement en Afrique, en collaboration avec IPAS.  J'ai également souligné la résolution ACHPR/Res/153(XLVI) 09 de la Commission sur les changements climatiques et les droits de l'homme, qui demande instamment à l'Assemblée des chefs d'État et de gouvernement de veiller à ce que des mesures spéciales de protection des groupes vulnérables tels que les enfants, les femmes, les personnes âgées, les communautés autochtones et les victimes de catastrophes naturelles et de conflits soient incluses dans tout accord ou instrument international sur les changements climatiques.

N. Panel de discussion sur l'obligation pour les Etats de présenter des rapports et les Lignes directrices sur la présentation de rapports en vertu du Protocole de Maputo

36.Le 22 octobre 2022, le Mécanisme a organisé cette discussion de groupe dans le but de souligner à nouveau l'importance de l'obligation pour les États membres de présenter des rapports au titre du Protocole de Maputo afin d'améliorer les droits des femmes en Afrique ; d'examiner les difficultés rencontrées par les États membres et de rechercher conjointement des solutions pour améliorer l'efficacité du processus de présentation de rapports ; d'encourager les États membres à présenter des rapports au titre du Protocole de Maputo ; et d'encourager la participation des parties prenantes et les efforts de sensibilisation pour améliorer la présentation de rapports par les États au titre du Protocole de Maputo. 

 

O. Lancement des Lignes directrices sur les Rapports parallèles

37.Aux paragraphes 8 à 10 du présent Rapport, j'ai rendu compte de la validation et de l'adoption des Lignes directrices de la Commission sur les rapports parallèles. Le 23 octobre 2022, la Commission a lancé ces Lignes directrices référencées qui seront ultérieurement publiées sur le site Internet de la Commission et également largement diffusées. Il est à souhaiter que les Lignes directrices normalisées sur les Rapports parallèles en vertu de la Charte africaine, du Protocole de Maputo et d'autres traités africains pertinents en matière de droits de l'homme permettront à la Commission d'obtenir une image plus complète de la situation des droits de l'homme dans le pays considéré dans le cadre du processus de présentation des rapports des États.

 

Panel sur les Femmes en Prison
    
38. Le 28 octobre 2022, en collaboration avec le Mécanisme sur les Prisons , les Conditions de Détention et le Maintien de l'ordre en Afrique, nous organiserons le Panel susmentionné, dans le cadre du suivi du Webinaire de sensibilisation sur la situation vulnérable des femmes en prison organisé en 2021. 

    
39. Ma contribution a porté sur la violence sexuelle en prison et j'ai également profité de l'occasion pour plaider en faveur des Lignes directrices de la Commission sur la violence sexuelle et ses conséquences préparées en collaboration avec la FIDH, adoptées lors de la 60e session ordinaire de la Commission en avril 2017. J'ai informé les participants que les Directives se concentrent sur les mesures pratiques nécessaires pour prévenir les violences sexuelles et poursuivre avec succès les auteurs de ces violences. Les Lignes directrices se concentrent également sur les moyens pratiques de garantir l'accès à la justice, aux droits sexuels et reproductifs, à la restitution, à la protection et à d'autres services pour les victimes de violences sexuelles, et comprennent des aspects relatifs à la responsabilité des agents de correction/police envers la protection des femmes contre les violences sexuelles, en particulier dans les centres de détention qui, souvent, ont tendance à être des incidents isolés. 

    
40. J'ai déclaré que les Lignes directrices s'alignent sur certaines des normes les plus progressistes en matière de lutte contre la violence sexuelle et ses conséquences, et comprennent des dispositions très progressistes, qui permettront à la Commission de jouer un rôle de pionnier dans la lutte contre la violence sexuelle et ses conséquences en Afrique. La raison d'être de l'adoption des lignes directrices ne peut donc être sous-estimée.

 

DEUXIEME PARTIE : LETTRES DE FELICITATIONS, DE PREOCCUPATION ET COMMUNIQUES DE PRESSE

A. Lettre de félicitations pour la ratification du Protocole de Maputo par la République arabe sahraouie démocratique (RASD)

1. Le 2 juin 2022, suite à la ratification du Protocole de Maputo par la RASD le 29 avril 2022, j'ai envoyé une lettre d'appréciation à S.E. M. Brahim Ghali, Président de la RASD, en ma double qualité de Rapporteure de pays et de SRRWA. Dans cette lettre, je félicitais le Président pour cette avancée louable vers la promotion et la protection des droits fondamentaux des femmes dans la RASD. Je faisais observer que la ratification démontre également l'engagement du pays envers les idéaux des droits de l'homme prévus par la Charte africaine et d'autres instruments pertinents des droits de l'homme. J'invitais le Gouvernement de la RASD à poursuivre cet effort louable en faveur du respect, de la promotion, de la protection et de la réalisation des droits des femmes dans toutes les sphères de la vie, tels que consacrés par le Protocole de Maputo, en mettant effectivement en œuvre ce Protocole.  

 

2. J’informais en outre le Président que les États parties à la Charte africaine et au Protocole de Maputo ont l'obligation de faire rapport à la Commission conformément à l'Article 62 de la Charte africaine, qui exige que les États parties soumettent un rapport tous les deux ans suite à la ratification ou à l'adhésion, détaillant les mesures législatives et institutionnelles prises pour donner effet à la Charte africaine. Dans le cadre de l'Article 62 de la Charte africaine, les États parties sont également tenus de présenter un rapport sur le Protocole de Maputo, conformément à l'Article 26(1). Tout en expliquant les Lignes directrices sur les rapports des Etats en vertu du Protocole de Maputo, j'ai encouragé le gouvernement de la RASD à soumettre son rapport périodique à la Commission (en même temps que le rapport sur le Protocole de Maputo) dans un avenir proche. 

 

B. Lettre de félicitations conjointe pour l'amélioration des soins de santé des femmes en Côte d'Ivoire

3. Le 26 septembre 2022, avec le Président de la Commission, l'Honorable Commissaire Rémy Ngoy Lumbu, Commissaire Rapporteur sur la situation des droits de l'homme dans la République de Côte d'Ivoire, nous avons envoyé une lettre de félicitations conjointe à S. E. M. Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d'Ivoire pour l'amélioration des soins de santé pour les femmes dans le pays. La Commission se félicite de cette initiative et de la déclaration de la Première Dame, Mme Dominique Ouattara, qui encourage les femmes souffrant de fistules obstétricales à profiter des services de santé gratuits disponibles dans les centres de santé et les hôpitaux de Côte d'Ivoire.

 

C. Lettre de félicitations conjointe pour l’avancement de la parité hommes-femmes au Sénégal

4. Le 26 septembre 2022, avec la Commissaire Maya Sahli-Fadel, Commissaire Rapporteur sur la situation des droits de l'homme dans la République du Sénégal, nous avons envoyé une Lettre d'appel conjointe à S. E. M. Macky Sall concernant le nombre de sièges occupés par des femmes au Parlement. Plus précisément, que sur cent soixante-cinq (165) sièges au Parlement du Sénégal, soixante-treize (73) femmes aient été élues lors des élections législatives de juillet 2022, ayant pour effet que Sal les femmes occupent 44 % des sièges parlementaires, poursuivant ainsi la mise en œuvre de la loi sur la parité entre les sexes du Sénégal adoptée en juin 2010. 

 

D. Lettre de préoccupation conjointe sur la situation des droits de l’homme au Soudan

5. Le ...septembre 2022, avec l'Honorable Commissaire Essaiem Hatem, Commissaire Rapporteur sur la situation des droits de l'homme dans la République du Soudan et Président du Comité pour la prévention de la torture, et l’Honorable Commissaire Idrissa Sow, Président du Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées en Afrique, nous avons envoyé une lettre de préoccupation conjointe à S. E. M. Abdel Fattah al-Burhan, Président du Conseil de souveraineté transitoire de la République du Soudan. Cette lettre saluait les mesures positives prises par le Gouvernement soudanais pour améliorer la jouissance des droits de l'homme au Soudan, en particulier le rejet des accusations d'apostasie portées contre quatre (4) hommes : Badar Haroun Abdul-Jabbar, Mohamed Haroun Abdul-Jabbar, Tariq Aref Abdallah et Mortada Ismael Yousef, qui avaient été arrêtés, accusés et poursuivis pour s'être convertis au christianisme. Nous avons également reconnu les divers défis auxquels le pays a été confronté au cours des derniers mois, notamment les inondations qui auraient entraîné le déplacement de familles soudanaises fuyant les conflits tribaux et une insécurité alimentaire aiguë touchant environ 15 millions de personnes. 

 

6. La lettre abordait des rapports alléguant la liberté de conscience et de religion ; et le droit à la vie et à l'intégrité de la personne. Elle alléguait également des violations des droits des femmes, en particulier l'imposition de la peine de mort par lapidation à une femme de 20 ans pour avoir prétendument commis le crime d'adultère à Kotsi, dans l'État du Nil, et le fait que les femmes accusées d'adultère soient constamment menacées de flagellation, d'amputation, d'autres châtiments dégradants et la condamnation à mort par lapidation.

 

7. Nous exhortions conjointement le Gouvernement du Soudan à, notamment, prendre les mesures nécessaires pour garantir le droit à la vie et à l'intégrité physique et morale, pour protéger la vie des personnes sur son territoire contre les exécutions arbitraires, ainsi que leur droit à la liberté et à la sécurité, à la liberté de religion, à la liberté d'opinion et d'expression. Nous demandions également au gouvernement d'inclure une formation sur les droits de l'homme pour son personnel militaire et de sécurité, conformément à l'Article 25 de la Charte africaine et à la Résolution CADHP/Rés.6(XIV)93 de la Commission ; d'éliminer toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, d'adopter des législations et d'autres mesures visant à assurer et à promouvoir le respect des droits des femmes dans le pays.

 

E. Communiqué de presse conjoint sur la nécessité de prévenir la violence sexuelle et sexiste à l'approche des élections présidentielles d'août 2022 au Kenya

8. Le 4 août 2022, avec le Rapporteur de pays pour le Kenya, l'Honorable Commissaire Solomon Ayele Dersso, nous avons publié le Communiqué de presse conjoint précédemment mentionné sur les questions de droits de l'homme liées au processus électoral au Kenya. Dans ce communiqué de presse, nous avons souligné les allégations alarmantes concernant l'augmentation des tensions politiques et les risques et incidents de violence, les discours de haine et la production et la diffusion de contenus incitant à la division et à la violence pendant la campagne électorale.   

 

9. Nous avons souligné particulièrement l'urgence et la nécessité de prévenir l'incidence d’actes de violence sexuelle et sexiste à l'encontre des femmes afin d'éviter la répétition de ces violences signalées lors de précédents conflits électoraux au Kenya. À cet égard, nous avons exhorté le Gouvernement du Kenya et l'opposition, en particulier les candidats à la présidence, à n’encourager aucune forme de violence, à entamer un dialogue et à utiliser les mécanismes établis de règlement des différends en vue de résoudre tout différend ou litige.

 

10. Nous avons également demandé au gouvernement de respecter et de garantir la liberté d'opinion, d'expression, de réunion et de manifestation pacifique, ainsi que les droits civils et politiques de tous les citoyens pendant cette période électorale, conformément à la Constitution du Kenya.

 

11. Le Communiqué de presse est consultable sur le site Web de la Commission sur : https://t.co/gc6vdjoV5F.

 

F. Communiqué de presse pour l’accès à un avortement sûr et légal
12. Le 28 septembre 2022, j'ai publié une déclaration pour commémorer la “Journée d’action mondiale pour l'accès à l'avortement sûr et légal”, reconnaissant et réfléchissant sur le parcours de la réalisation du droit et de l'accès des femmes aux services de santé reproductive et à l'information. La déclaration reconnaît les grandes réalisations du Protocole de Maputo, y compris sa ratification par 43 États membres de l'UA, et souligne également les défis qui persistent et qui empêchent les femmes et les filles de jouir pleinement de leurs droits. La déclaration souligne également que, malgré de nombreuses années de campagnes en Afrique et dans le monde, en faveur du droit à un avortement sûr et légal, la criminalisation de l'avortement se poursuit dans les pays africains, et que la criminalisation de l'avortement viole de nombreux droits humains fondamentaux, y compris le droit à la vie, à la liberté, à la sécurité, à la santé et de ne pas être torturé. 

 

13. Tout en félicitant les pays qui ont adopté des lois, des politiques et d'autres mécanismes institutionnels tout aussi novateurs pour faire progresser les droits fondamentaux des femmes, j'ai appelé les États parties à donner la priorité à la vie et au bien-être des femmes et des filles en intégrant et en appliquant pleinement le Protocole de Maputo. J'’appelais également les États membres à, notamment, dépénaliser l'avortement conformément à la campagne lancée par la Commission en 2016 pour décriminaliser l'avortement en Afrique, et à augmenter l'allocation de ressources pour les services de santé reproductive destinés aux femmes.

 

14. Le communiqué de presse est consultable sur le site internet de la Commission : https://t.co/l9yRHrzk5D.

TROISIEME PARTIE : EVENEMENTS PARALLELES

15.J’ai également participé aux événements parallèles suivants au cours de cette Session :

  • Le 24 octobre 2022, j'ai été invité par Equality Now à participer à un panel sur " l'utilisation de l'approche multisectorielle pour aborder les mutilations génitales féminines : les leçons des acteurs du changement ". Ma présentation a mis en évidence les interventions de la Commission dans la lutte contre les mutilations génitales féminines, y compris sa procédure de présentation de rapports par les États, ses observations finales, ses observations générales, ses missions de promotion et de protection, ses résolutions et ses lettres d'appel, entre autres méthodes.  J'ai déploré le fait que, malgré le développement de normes, de réalisations et d'initiatives en matière de droits de l'homme visant à mettre fin aux MGF et à d'autres pratiques néfastes, des millions de filles et de femmes risquent toujours d'être soumises à de telles pratiques. J'ai souligné l'importance d'une collaboration continue avec les gouvernements, les organisations internationales et régionales, la société civile, les médias, les chefs religieux et traditionnels, les femmes et les filles, les garçons et les hommes pour mettre fin aux MGF sur le continent.
  • Evénement parallèle sur les réparations pour les survivants de violences sexuelles liées à un conflit : statut, défis et opportunités en Afrique, organisé par le Global Survivors' Fund et REDRESS. Cet événement parallèle a permis à la Commission et aux participants d'engager des discussions sur les défis et les opportunités au niveau régional pour assurer la réalisation de réparations pour les survivants de la violence sexuelle liée aux conflits. Ses objectifs étaient de mettre en lumière les défis auxquels les survivants et les victimes de violence liée à un conflit sont confrontés dans la poursuite de leur droit à des réparations adéquates en Afrique ; de créer une plate-forme pour un dialogue positif et des échanges entre les survivants cette violence, les responsables politiques et les décideurs, et la Commission ; et de partager des recommandations politiques pour faire avancer la justice et les réparations pour les survivants de cette forme de violence dans toute l'Afrique.
  •  

QUATRIEME PARTIE : BREF APERÇU DE LA SITUATION DES FEMMES ET DES FILLES EN AFRIQUE

16. Pendant la période d'intersession, j'ai noté les triomphes et les défis suivants concernant la situation des femmes et des filles sur le continent.

Algérie

17. Le niveau de violence à l'égard des femmes en Algérie atteint des taux alarmants, en particulier les meurtres de femmes. Selon les archives de Féminicide Algérie, au cours des seuls mois de mai et juin 2022, 12 femmes sont mortes de mort violente aux mains d'hommes, pour la plupart des membres de leur famille.[ Liste des féminicides en 2022 https://feminicides-dz.com/feminicides/feminicides-2022/liste-des-femin… consulté le 8 septembre 2022.] La majorité de ces femmes ont été tuées par des partenaires intimes, des pères ou des frères, ce qui témoigne de la vulnérabilité des femmes en Algérie dans des espaces censés être sûrs pour elles. Selon Féminicide Algérie, les autorités ne font pas assez d'efforts pour enquêter et poursuivre les auteurs de ces crimes odieux.

 

Tchad

18. Pendant l'intersession, le Conseil supérieur islamique de Mangalme, au Tchad, a décidé que le rejet d'une demande en mariage n'est plus une option et que l'on doit payer une amende si on le fait.[ https://www.news24.com/w24/style/bride/weddings/rejecting-a-marriage-pr… consulté le 7 septembre 2022.]  Les femmes doivent payer une amende beaucoup plus élevée que les hommes et, compte tenu de la société patriarcale, elles sont plus susceptibles d'être les destinataires de la proposition. Il s'agit d'une pratique discriminatoire préoccupante qui risque d'inciter les femmes à ne pas quitter une relation violente. L'idée de ne pas être autorisée à rejeter une demande en mariage équivaut à un mariage forcé et suscite de graves inquiétudes.

 

République Centrafricaine

19. Je constate avec une vive inquiétude qu'en dépit des appels au cessez-le-feu en République Centrafricaine, des violations persistantes du cessez-le-feu se poursuivent.[ Communiqué de presse du HCDH https://www.ohchr.org/en/press-releases/2022/07/central-african-republi… consulté le 7 septembre 2022.] Il est rapporté que les groupes armés et les milices pro-gouvernementales commettent des actes récurrents de violence sexuelle de manière généralisée et systématique. Cette situation est très préoccupante, d'autant plus que les services permettant de répondre à ces agressions n'ont pas été rétablis dans le pays.

 

Côte d’Ivoire

20. Le mandat suit avec intérêt et prudence l'évolution de la situation au Parlement ivoirien, où un projet de loi légalisant la polygamie a été présenté le 30 juin 2022.[5 H Ferdjani « Le projet de loi ivoirien qui légaliserait la polygamie pour les hommes suscite l'ire des associations de femmes, France 24 19 juillet 2022 https://www.france24.com/en/africa/20220719-ivorian-bill-that-would-leg… (consulté le 8 septembre 2022).] Le Protocole de Maputo, en son Article 6(c), indique clairement que la monogamie est le type de mariage préféré mais que, lorsque la polygamie existe, les lois doivent garantir la protection et la promotion des droits de toutes les femmes dans un tel mariage.

 
Kenya

21. Je tiens à féliciter le Kenya pour le nombre record de femmes élues lors des élections qui viennent de s’achever. Il s'agit notamment d'un total de 7 femmes gouverneurs, 3 sénatrices et 26 membres du Parlement. Je constate néanmoins avec une vive inquiétude que la campagne électorale a été marquée par une avalanche d'insultes en ligne à l'encontre des candidates, notamment des propos sexistes agressifs, des stéréotypes sexistes et des invites sexuelles.[ L Madowo et B Feleke « A record number of women are running in Kenya's elections but many face harassment and abuse » CNN, 6 août 2022 https://edition.cnn.com/2022/08/06/africa/kenya-elections-women-candida… (consulté le 8 septembre 2022).
] Il s'agissait de tactiques visant à décourager les femmes de participer et elles doivent être condamnées dans les termes les plus vigoureux. 

 

22. Tout en appréciant le fait que certains États africains, dont le Kenya, ont commencé à légiférer sur les crimes et les violations dans l'espace numérique, par le biais de diverses versions de lois sur la cybercriminalité, je souhaite saisir cette occasion pour sensibiliser à la menace de la violence numérique à l’égard des femmes et des filles.

 

23. Lors de sa 72ème Session ordinaire, la Commission a adopté la Résolution CADHP 522 (LXXII) 2022 sur la protection des femmes contre la violence numérique en Afrique qui appelle notamment les Etats à revoir/adopter une législation visant à combattre toutes les formes de violence numérique à l'égard des femmes. La Résolution est consultable sur le site Web de la Commission et peut être consultée sur https://www.achpr.org/sessions/resolutions?id=558.

 

Lesotho

24. En juillet 2022, le Parlement du Lesotho a adopté à l'unanimité la Loi de 2022 sur l'harmonisation des droits des veuves coutumières avec la capacité juridique des personnes mariées. Je suis encouragée par cette législation innovante qui vise à renforcer le statut économique des veuves coutumières en sécurisant leur statut de propriété. La mise en œuvre effective de cette loi, une fois pleinement promulguée, contribuera grandement à éliminer la discrimination. L'instrument attend maintenant l'approbation du Roi et je prie instamment que ce processus soit accéléré.

 

25. Au cours du même mois de juillet 2022, le Parlement a également adopté la Loi de 2022 sur la lutte contre la violence domestique. Cette loi vise à renforcer les protections contre les abus physiques et économiques des femmes et des enfants.  Elle soutient également les soins de santé, le soutien psychosocial et la justice pour les survivants. J'encourage le Gouvernement du Lesotho et l’exhorte à finaliser le processus législatif et à mettre en œuvre efficacement ces deux textes de loi importants et innovants.[ Millenium Change Corporation https://www.mcc.gov/blog/entry/blog-082522-womens-rights-lesotho (consulté le 8 septembre 2022).]

 

Liberia}

26.L'intercession a vu une amélioration significative des lois et des politiques protégeant les droits des femmes et une évolution supplémentaire peut être observée au Liberia. Le 5 août 2022, le pays a promulgué un amendement à la Loi sur les étrangers et la nationalité, supprimant ainsi les dispositions discriminatoires à l'égard des femmes qui empêchaient les enfants d'acquérir la nationalité de leur mère.[ Communiqué de presse du HCR ‘https://www.unhcr.org/news/press/2022/8/62f500724/unhcr-applauds-liberi…’ (consulté le 8 septembre 2022).]

 

Maroc

27. En juin 2022, le Gouvernement marocain a approuvé un décret portant création de la Commission nationale pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, une évolution bienvenue pour la réalisation de l'égalité des sexes.[ A Benazizi Morocco World News https://www.moroccoworldnews.com/2022/06/349600/morocco-approves-new-co… (consulté le 7 septembre 2022).]

RASD

28. Je saisis cette occasion pour féliciter une fois de plus le Gouvernement de la RASD, qui est devenu le 43ème pays à ratifier le Protocole de Maputo. Entre autres choses mentionnées dans ma Lettre de félicitations précédemment citée, j'encourage l'Etat membre à mettre en place des structures et des financements adéquats pour domestiquer et mettre en œuvre l'instrument afin d'améliorer la situation des femmes dans la République.[ Communiqué de presse de l’UA https://au.int/en/pressreleases/20220504/saharawi-arab-democratic-repub… (consulté le 7 septembre 2022).]

 

Sao Tomé et Principe

29. Le 28 juillet 2022, Sao Tomé-et-Principe a adopté la loi sur la parité politique qui prévoit de réserver aux femmes un minimum de 40 % des sièges dans les organes élus, y compris les postes ministériels. Cette évolution est bienvenue dans un continent où la participation des femmes fait cruellement défaut, et il est à espérer que l'État membre mettra en place l'environnement favorable pour encourager les femmes à participer.[ Groupe des Nations Unies pour le développement durable https://unsdg.un.org/latest/blog/tangible-gains-women-politics-resident… (consulté le 7 septembre 2022). ]

 

Sierra Leone

30. Le mandat souhaite applaudir la Cour de la CEDEAO pour avoir rendu un jugement qui contribuera grandement à affirmer l'accès des femmes à la justice le 13 juillet 2022. Dans l'affaire Adama Vandi c/ Sierra Leone ECW/CCJ/APP/52/21, la Cour de la CEDEAO a accordé des dommages et intérêts d'un montant de 10 000 dollars US à la requérante. Elle avait été violée par un chef suprême de sa communauté. Bien qu'elle ait signalé l'incident et passé plusieurs tests médicaux pour prouver l'agression, il n'y a pas eu d'enquête effective et l'auteur du viol n'a pas été puni. La Cour a estimé notamment les droits de la requérante au titre du Protocole de Maputo avaient été violés.[ IHRDA https://www.ihrda.org/2022/07/ecowas-court-orders-sierra-leone-to-compe… (consulté le 8 septembre 2022).]

 

Afrique du Sud

31. Le mandat se félicite de la décision prise par la Cour constitutionnelle d'Afrique du Sud le 28 juin 2022, dans l'affaire Women's Legal Centre Trust contre le Président de la République d'Afrique du Sud et autres. La Cour, dans cette affaire, a confirmé l'invalidité constitutionnelle des dispositions de la loi sur le mariage et de la loi sur le divorce qui ont été jugées incompatibles avec la Constitution de la République, dans la mesure où elles ne reconnaissent pas les mariages célébrés conformément à la charia, qui n'ont pas été enregistrés comme des mariages civils. La loi sur le divorce a été jugée en outre inconstitutionnelle dans la mesure où elle ne protège pas les droits et les intérêts des enfants mineurs ou à charge nés de mariages musulmans, lors de la dissolution du mariage musulman.[ Cour constitutionnelle de l’Afrique du Sud https://www.concourt.org.za/index.php/judgement/475-women-s-legal-centr…  ( consulté le 8 septembre 2022).]

 

32. Cependant, le niveau de violence à l'égard des femmes en Afrique du Sud reste un sujet de préoccupation majeur. Le 28 juillet 2022, un groupe de mineurs illégaux, connus sous le nom de Zama Zamas, qui étaient armés de fusils, ont violé collectivement 8 femmes à Krugersdorp. L'agression a duré en moyenne 12 heures, laissant les femmes blessées et saignant abondamment. Une épreuve aussi brutale doit être condamnée dans les termes les plus forts et le mandat encourage le gouvernement sud-africain à enquêter sur cette affaire et à poursuivre les auteurs dans toute la mesure permise par la loi.[ https://www.theguardian.com/global-development/2022/aug/03/south-africa… (consulté le 8 septembre 2022).]

 

Ouganda

33. Au cours de l'intercession, la violence sexuelle à l'égard des filles a été un sujet de préoccupation majeur en Ouganda. 

  • Le 8 mai 2022, dans un internat primaire du Conseil municipal de Kiwoko, un directeur d'école de 50 ans a violé une élève.[ Express Staff. “Primary school headteacher on the run after raping 15-year-old pupil.” Daily Express, 25 mai 2022, https://bit.ly/3e0zLJn ( ] Le professeur principal a demandé à l'élève d'apporter quelques manuels à la bibliothèque puis l'a suivie et l'a forcée. Lorsque la victime est retournée au dortoir et a raconté son calvaire à son enseignante principale, celle-ci lui a demandé de ne divulguer cette information à qui que ce soit. Les parents de la victime ont découvert cet horrible incident lorsque les élèves sont sorties de l'internat pour récupérer leurs frais de scolarité.
  • En mai 2022, à Mbale City, des habitants ont surpris un médecin de 45 ans en train de violer une élève de 12 ans dans sa salle de soins.[ Mukiibi, Everest. “Mbale medical doctor caught red handed having sex with 12 year old sick girl in treatment room, arrested.” Watchdog Uganda, 28 mai 2022, https://bit.ly/3Q2gMLO. ] L'élève se sentait malade et a reçu l'autorisation des autorités scolaires d'aller se faire soigner dans un centre de santé voisin. Les habitants du quartier où l'incident s'est produit ont entendu dire, à plusieurs reprises, que le médecin avait l'habitude de violer les patientes qui se présentaient pour être soignées.
  • Le 23 juin 2022, à Nsamizi, dans la municipalité d'Entebbe, une femme de 43 ans aurait été agressée et presque violée par un soldat du Commandement des forces spéciales à côté de la caserne de Nsamizi.[ Achom, Pamela. “43-year-old widow accuses SFC soldiers of assault, attempted rape.” Galaxy FM, 22 août 2022, https://bit.ly/3pXBcLm.] Alors qu'elle s'apprêtait à rejoindre sa maison, le soldat l'a frappée dans le dos avec un bâton, puis lui a tenu les mains jointes en essayant de la déshabiller. La femme a pu crier et alerter les habitants qui sont rapidement venus à son aide et ont trouvé l'agresseur avec son pantalon baissé. Deux soldats auraient sauvé l'agresseur de la foule en colère et informé tout le monde qu'ils allaient emmener l'agresseur et la victime dans un hôpital voisin pour la soigner. Au lieu de se rendre à l'hôpital, les soldats se sont arrêtés à l'entrée de la caserne de Nsamizi et ont continué à battre la femme jusqu'à ce qu'un de leurs collègues les arrête. Ils l'ont ensuite remise dans le véhicule et l'ont conduite au poste de police d'Entebbe où elle a passé une nuit et une journée en détention. <0} Selon les informations recueillies, la femme a du mal à marcher et à s'asseoir en raison de ses graves blessures.
  • Le 8 août 2022, deux suspects ont promis à une femme de 24 ans un emploi de pompiste dans l'une des stations-service de la ville de Mukono. La femme s’est rendue de Libu à Mukono pour rencontrer les deux suspects qui lui ont réservé une chambre dans une pension pour la nuit. Vers 4 heures du matin, l'un des suspects est venu la chercher pour l'emmener à son nouveau travail comme promis, mais au lieu de cela, il l'a chloroformée et l'a traînée dans une plantation de bananes où lui et l'autre suspect l'ont violée collectivement.

 

Ratification et mise en oeuvre du Protocole de Maputole de Maputo

34. Des inquiétudes subsistent quant à la ratification et à la mise en œuvre du Protocole de Maputo. À ce jour, 43 pays ont ratifié le Protocole de Maputo et 12 pays doivent encore s'engager à respecter les dispositions de ce protocole. L'objectif du mandat est de garantir la ratification universelle du Protocole de Maputo par tous les États membres de l'UA. Le rapport sur cette intercession offre un certain encouragement du fait de l'amélioration des lois protégeant les droits des femmes sur tout le continent mais des préoccupations suffisantes demeurent dans la plupart des États qui seraient améliorés par la mise en œuvre du Protocole de Maputo.

 

35. Parmi les pays qui ont ratifié le Protocole de Maputo, 17 d’entre eux se sont pleinement acquittés de leur obligation de présenter des rapports, certains d'entre eux ayant présenté des rapports sur plus d'un cycle. Les rapports des États constituent un élément important pour faire le point sur les stratégies de mise en œuvre employées par les États pour assurer l'efficacité du Protocole de Maputo. 

 

CINQUIEME PARTIE :   CONCLUSIONS ET RECOMMENDATIONS

36. Au vu des développements ci-dessus, je souhaiterais formuler les recommandations suivantes :

Au Gouvernement de l’Algérie

  • Je demande instamment au Gouvernement algérien d'enquêter sur les causes profondes de la violence généralisée des partenaires intimes contre les femmes et du féminicide ; 
  • Je prie en outre instamment le gouvernement d'enquêter de manière approfondie sur les cas signalés, de traduire les auteurs en justice de manière à dissuader d'autres auteurs potentiels ; et
  • J'exhorte également le gouvernement à augmenter les programmes de protection sociale pour les femmes à risque afin qu'elles puissent quitter les relations abusives avant qu'elles n'entraînent des décès.

 

Au Gouvernement du Tchad

  • Je recommande au Gouvernement tchadien d'envisager d'annuler la décision qui oblige effectivement les femmes à rester dans des relations inadaptées et potentiellement abusives en les pénalisant pour avoir rejeté une proposition ; et
  • Je voudrais également saisir cette occasion pour encourager le gouvernement à ratifier le Protocole de Maputo, dont l'Article 6(a) prévoit le consentement libre et entier des deux parties au mariage

Au Gouvernement de la République Centrafricaine 

  • Je saisis cette occasion pour encourager le Gouvernement centrafricain à ratifier le Protocole de Maputo afin de renforcer la protection des droits des femmes sur son territoire.

 

Aux Gouvernements du Lesotho, du Liberia et de Sao Tomé et Principe

  • Je vous félicite une fois encore d'avoir adopté des lois visant à éliminer la discrimination à l'égard des femmes et à protéger leurs droits. J'encourage tous ces États à veiller à ce que les nouvelles lois fassent l'objet d'une large publicité et soient effectivement appliquées afin d'atteindre l'objectif visé.

 

Au Gouvernement de la RASDD

  • J'applaudis la mesure louable prise par le gouvernement pour ratifier le Protocole de Maputo. Je demande instamment à l'État de mettre immédiatement en place des plans d'intégration et de mise en œuvre du traité, d'œuvrer à l'alignement des lois nationales sur les dispositions du protocole et de soumettre un rapport au titre de l'Article 26 du Protocole de Maputo sur la base des directives de la Commission sur les rapports des États au titre du Protocole de Maputo.

 

Aux Gouvernements de la Sierra Leone et de l’Afrique du Sud

  • Je salue une fois de plus les jugements progressistes en matière d'avancement des droits des femmes, tant au niveau national que régional. J'exhorte les gouvernements de la Sierra Leone et de l'Afrique du Sud à respecter l'autorité judiciaire et à mettre en œuvre les décisions rendues respectivement par la Cour de la CEDEAO et la Cour constitutionnelle.

 

Sur la violence sexuelle à l’égard des femmes

  • Je condamne avec la plus grande fermeté la perpétration de violences sexuelles contre les femmes en Afrique du Sud et en Ouganda. J'exhorte les gouvernements de ces deux pays à prendre des mesures sévères pour traduire les auteurs en justice et pour améliorer l'accès à la justice des femmes et des filles victimes de violences sexuelles.

CONCLUSION

37. Depuis sa création, le Mécanisme de SRRWA a travaillé sans relâche pour accomplir son mandat avec efficacité, dévouement et abnégation afin de promouvoir et protéger les droits des femmes.   Aujourd'hui, on peut être fier de la visibilité et de l'importance du Mécanisme des femmes grâce aux efforts combinés et continus des partenaires qui soutiennent le Mécanisme financièrement et techniquement, et pour cela, je dis Merci !