La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission), réunie en sa 63ème Session ordinaire, à Banjul, en Gambie, du 24 octobre au 13 novembre 2018 ;
Rappelant les fonctions de la Commission au titre de l’article 45 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples («Charte africaine» ou «Charte»), qui prévoit les mandats de protection, de promotion et d’interprétation de la Commission ;
Rappelant les engagements et obligations de tous les États parties d'assurer la protection de tous les droits garantis par la Charte africaine, et notant le rôle central que la Commission, créée en vertu de l’article 30 de la Charte africaine, joue pour assurer le respect ainsi que le plein exercice et la protection des droits de l’homme et des peuples sur le continent;
Consciente que la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement a montré son attachement aux droits de l'homme et des peuples en déclarant 2017-2027 «Décennie des droits de l'homme et des peuples en Afrique» ;
Rappelant que l'article 2 du Protocole à la Charte africaine portant création d'une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (le Protocole relatif à la Cour) établit la relation entre la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (la Cour) et la Commission africaine en disposant, entre autres, que la Cour complète la mission de protection de cette dernière;
Rappelant en outre l’harmonisation des dispositions du Règlement intérieur 2010 de la Commission avec celles du Règlement de la Cour, pour donner effet à cette complémentarité;
Confirmant que l'article 4 du Protocole sur les amendements du Protocole portant statut de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme (Protocole de Malabo) réaffirme la complémentarité de la Cour par rapport au mandat de protection de la Commission;
Rappelant en outre que les mandats de promotion et de protection de la Commission impliquent l’interprétation des dispositions de la Charte africaine, notamment par la formulation de principes et de règles permettant de résoudre les problèmes de nature juridique ayant trait aux droits de l’homme et des peuples;
Soulignant que le mandat de protection de la Commission comporte un volet, aussi bien contentieux que non contentieux, ainsi qu’une procédure de Communications et des mécanismes d'intervention urgente permettant de répondre en permanence aux plaintes et aux situations émergentes en matière de droits de l'homme par le biais d'appels urgents et de missions d’établissement des faits;
Gardant à l’esprit que le volet contentieux du mandat de protection de la Commission, qui implique la soumission et l’examen de Communications, offre un accès à la justice aux citoyens des 54 États parties à la Charte, et qu’aucune autre institution africaine ne fournit un tel accès à la justice à l’échelle du continent;
Se félicitant du processus de réforme interne de l’Union africaine (Union) en cours, qui vise à améliorer l’efficacité globale de l’Union et de ses Organes;
Demeurant profondément préoccupée par la décision DOC.EX.CL/1089(XXXIII) du Conseil exécutif sur le Rapport de la Retraite conjointe du Comité des représentants permanents et de la Commission africaine, qui demande aux États parties de procéder à un examen analytique du mandat d'interprétation de la Commission au regard du mandat similaire qu’exerce la Cour africaine et du risque de contradictions de jurisprudence;
Convaincue que le processus de réforme interne de l’Union et les décisions des Organes délibérants de l’Union peuvent renforcer les fonctions de protection et d’interprétation de la Commission, mais aussi le cadre général des droits de l’homme et de la gouvernance sur le continent;
La Commission :
1. Rappelle aux États parties l'obligation qui leur incombe, en vertu de la Charte africaine, de donner effet aux droits, libertés et devoirs consacrés par la Charte africaine;
2. Réitère que sa fonction d'interprétation est inhérente à ses mandats de promotion et de protection, tels que définis par la Charte;
3. Réitère en outre que le mandat de protection de la Commission s'applique sur tout le continent, et comporte des aspects contentieux et non contentieux;
4. Appelle les États parties et les Organes délibérants de l'Union à continuer à soutenir les relations de complémentarité entre la Commission et la Cour africaine envisagées par le Protocole de la Cour et le Protocole de Malabo, afin de garantir le plein accès des Africains à la justice;
5. Exhorte les États parties à respecter les normes et les cadres institutionnels établis par la Charte, notamment en soutenant la Commission créée pour assurer la promotion, la protection et l'interprétation des droits inscrits dans la Charte;
6. Demande aux États parties et aux Organes délibérants de l'Union, de veiller à ce que le processus de réforme de l'Union en cours préserve et renforce les mandats indépendants, distincts et spécialisés de chaque Organe, tout en créant des cadres propres à améliorer leur collaboration et leur efficacité, afin de renforcer le cadre général des droits de l'homme et de la gouvernance sur le continent; et
7. Décide de poursuivre ses engagements avec tous les États parties et les Organes délibérants de l’Union en appui à ses mandats de protection et d’interprétation.
Fait lors de la 63ème Session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, tenue du 24 au 13 novembre 2018, à Banjul, en Gambie.