Observations finales et recommandations - Nigéria : 6e rapport périodique, 2015 - 2016

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I.Introduction

1.La République fédérale du Nigeria (Nigeria) est un État partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte africaine), qu'elle a ratifiée le 22 juin 1983.

2.Le Nigeria a soumis son 5ème rapport périodique à la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission) en septembre 2013, puis l'a mis à jour en juillet 2014. Ce rapport a été examiné par la Commission lors de sa 56ème session ordinaire qui s'est tenue du 21 avril au 7 mai 2015 à Banjul, en Gambie.

3.Le 6ème rapport périodique, en cours d'examen, a été envoyé au Secrétariat de la Commission en novembre 2017 et couvre la période 2015-2016. Le rapport a été examiné lors de la 62ème session ordinaire de la Commission, qui s'est tenue du 25 avril au 9 mai 2018 à Nouakchott, en Mauritanie. 

4.La Commission se félicite de la présentation de ce rapport, qui met le Nigeria à jour de ses obligations en matière d'établissement de rapport conformément à l'Article 62 de la Charte africaine.

5.Le rapport souligne les évolutions survenues au Nigeria dans les domaines de la promotion et de la protection des droits de l'homme, ainsi que les mesures législatives, administratives et judiciaires mises en place pour se conformer à ses obligations en vertu de la Charte africaine.  

6.Alors que la partie A du rapport traite des obligations du Nigeria en vertu de la Charte africaine, notamment en fournissant des informations relatives à la mise en œuvre des observations finales adoptées par la Commission en 2015, la partie B du rapport couvre le deuxième rapport du Nigeria en vertu du Protocole à la Charte africaine sur la Droits de la femme en Afrique (Protocole de Maputo). À cet égard, la Commission tient à féliciter le Nigeria d'avoir honoré les obligations lui incombant en vertu de la Charte africaine et du Protocole de Maputo, en lui permettant de dialoguer avec lui sur la situation des droits de l'homme au moment de la rédaction du rapport.

7.Les présentes observations finales et recommandations décrivent les éléments positifs, les facteurs limitant la jouissance des droits de l'homme et les sujets de préoccupation concernant l'exercice des droits de l'homme au Nigeria.  Les observations finales couvrent également certains aspects relatifs au Protocole de Maputo. 

8.En conclusion, la Commission adresse des recommandations au Gouvernement nigérian sur les mesures pouvant renforcer la jouissance des droits de l’homme et des peuples tels que garantis par la Charte africaine, le Protocole de Maputo ainsi que d’autres instruments régionaux et internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme.  

PARTIE A :    Observations finales et recommandations sur le 6ème rapport périodique de la République fédérale du Nigeria au titre de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

II.Éléments positifs 

9.La Commission note un certain nombre d’éléments positifs relativement aux efforts réalisés par le Nigeria pour s’acquitter de ses obligations en vertu de la Charte africaine :

Obligation en matière d'établissement de rapports et de coopération avec la Commission

10.La Commission : 
i.Accueille avec satisfaction les efforts déployés par le Nigeria pour préparer et présenter son rapport et le félicite d'être à jour de ses obligations au regard de l'Article 62 de la Charte africaine ;
ii.Félicite le Département de Droit comparé et international du Ministère fédéral de la Justice pour avoir coordonné l’établissement du 6ème rapport périodique ;
iii.Se félicite des efforts déployés par le Nigeria pour s'assurer du caractère participatif et transparent du processus préparatoire du rapport périodique et de l'implication des représentants d'organisations de la société civile (OSC) œuvrant dans le domaine des droits de l'homme au Nigeria ;
iv.Félicite le Nigeria d’avoir mis en œuvre certaines des recommandations de la Commission dans ses Observations finales sur le 5ème rapport périodique du Nigeria.

Ratification des instruments régionaux et internationaux sur les droits de l'homme

11.La Commission félicite le Nigeria d’avoir mis en place un groupe de travail national interministériel chargé d’accélérer le processus de ratification des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme en vue de renforcer le cadre pour la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples, notamment :
i.La Charte africaine des valeurs et principes de la Fonction publique et de l'Administration ; 
ii.Le Protocole sur le statut de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme ; 
iii.Le Protocole à la Convention de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme ; 
iv.Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; 
v.Le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et visant à abolir la peine de mort ;
vi.Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; et 
vii.Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, sur une procédure de communication. 

12.La Commission se félicite en outre des mesures prises en vue de la ratification du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, relative aux droits des personnes âgées en Afrique, l’approbation du Cabinet fédéral n’ayant pas encore été obtenue.

Adoption de lois et de politiques nationales garantissant les droits de l'homme

13.La Commission félicite le Nigeria d'avoir adopté les lois et politiques nationales suivantes garantissant les droits de l'homme et promouvant la paix et le développement :

Législation
i.Loi d'interdiction de 2018 sur la discrimination à l'égard des personnes handicapées ;
ii.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur la prévention de la criminalité ;
iii.Loi d'enregistrement de 2016 portant modification de la Loi sur les variétés végétales et les races d'animaux d'élevage ;
iv.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur les espèces en voie de disparition (contrôle du commerce et de la circulation internationales) ;
v.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur les télécommunications et les infractions postales ; 
vi.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'Office national de développement des terres agricoles ;
vii.Loi de 2016 portant modification de la Procédure d'application des normes d'exportation ;
viii.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur les instituts de formation en gestion agricole et rurale ;
ix.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur les ressources hydrauliques ;
x.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'Institut national de magistrature ;
xi.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'enregistrement des praticiens de la publicité ;
xii.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur le Commission de facturation des services publics ;
xiii.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'enregistrement des inspecteurs de la qualité ;
xiv.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'Agence pour le développement des petites et moyennes industries ;
xv.Loi de 2016 portant modification du Traité pour la création de la Communauté économique africaine relative au Parlement panafricain (adhésion et juridiction) ;
xvi.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'Université d'Abuja ;
xvii.Loi de 2016 portant modification de la Loi sur l'Institut agréé des courtiers en valeurs mobilières.

Stratégies
i.Politique nationale des migrations 2015 ;
ii.Politique nationale de l'environnement, 2016 ;
iii.Politique nationale de promotion de l'agriculture 2016-2020 ;
iv.Politique nationale du genre dans l'agriculture, 2016 ;
v.Politique et stratégie nationales d'irrigation et de drainage, 2016 ;
vi.Stratégie nationale de lutte contre le terrorisme (NACTEST), 2016 révisée ;
vii.Politique nationale relative aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDIP) 2017.

Mesures institutionnelles en faveur des droits de l'homme

14.La Commission félicite le Nigeria d'avoir mis en place les mesures institutionnelles ci-après relatives à la promotion et à la protection des droits de l'homme :
i.La Cellule des litiges d'intérêt public ;
ii.Le Groupe de travail national sur l'établissement de rapports sur les traités relatifs aux droits de l'homme ;
iii.Le Conseil d'assistance judiciaire ;
iv.Le Programme de conseils juridiques gratuits dans les commissariats de police.

Autres initiatives 

i.Directives nationales et normes de référence sur la violence sexo-spécifique au Nigeria, 2014-2015 ;
ii.Normes nationales visant à améliorer la qualité de vie des enfants vulnérables au Nigeria, 2014-2015 ;
iii.Stratégie nationale visant à mettre fin au mariage des enfants au Nigeria 2016-2021 ;
iv.Plan d'action de la Commission nationale des droits de l'homme pour la promotion et la protection des droits de l'homme au Nigeria 2017-2021.

Droits civils et politiques

Peine de mort

15.La Commission félicite le Nigeria d'avoir examiné le rapport national d'étude sur la revue du Ministère fédéral de la Justice relative à la peine de mort et au moratoire.

Interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants

16.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La promulgation en décembre 2017 de la Loi contre la torture, qui punit la torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants, prescrit une peine pouvant aller jusqu’à 25 ans d’emprisonnement pour les auteurs de torture et introduit plusieurs mesure de protection contre la torture ;
ii.La formation d'officiers aux droits de l'homme et à la torture par toutes les écoles ou instituts de la police, de la sécurité et des services de renseignement ;
iii.Les cinq procès et condamnation d’agents de sécurité reconnus coupables de violations graves des droits de l’homme, notamment de torture, de meurtre, de viol, d’enlèvement et de voies de fait.

Conditions de détention

17.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.L'adoption en 2015 de la Loi sur l'administration de la justice pénale, qui devrait permettre de réduire considérablement la population carcérale et d'éviter le surpeuplement ;
ii.L'inclusion des directives de la Commission sur les conditions d’arrestation, de garde à vue et de détention provisoire (Directives de Luanda) dans le manuel de formation de la police sur les droits de l’homme dans les académies et collèges de police ;
iii.Le rôle joué par le pouvoir judiciaire nigérian pour faire en sorte que les délais prévus par la Constitution pour les renvois en garde à vue et en détention provisoire soient respectés ;
iv.Les réformes en cours visant à garantir la séparation des mineurs et des adultes incarcérés et à veiller à ce que les détenus en attente de procès soient séparés des prisonniers purgeant leur peine ;
v.Les initiatives en cours dans le cadre de la réforme du système pénal et pénitentiaire visant à intensifier les activités de rattrapage scolaire et de formation professionnelle en cours dans les prisons afin de faciliter la réinsertion sociale des détenus après leur libération ;
vi.La mise en place du système de juristes de police, qui s'inscrit toujours dans le cadre du projet de détention provisoire du Conseil d’aide judiciaire du Nigeria ; 
vii.La construction de nouveaux hôpitaux dans des prisons afin de moderniser les installations médicales des services pénitentiaires nigérians, notamment à Kuje, Owerri, Makurdi et Port-Harcourt ;
viii.La collaboration entre les services pénitentiaires nigérians et le Comité national d’action contre le SIDA, qui a débouché sur une stratégie de gestion du VIH/SIDA ; 
ix.La fourniture par les services pénitentiaires nigérians d'un programme d'éducation de rattrapage pour adultes, qui permet aux détenus intéressés de poursuivre leurs études.

Droit à la liberté d'expression et accès à l'information 

18.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :

Accès à l'information 
i.La poursuite de la mise en œuvre de la Loi de 2011 sur l'accès à l'information, qui remplace la Loi sur les secrets officiels, et permet à quiconque de demander des informations à des agents de l'État ;
ii.Les efforts actuellement réalisés par le Comité national de coordination pour la réforme du secteur de la justice et par la Commission de réforme du droit au Nigeria en vue de modifier les lois limitant l'accès à l'information, afin de les rendre conformes à la Loi sur l'accès à l'information ;
iii.Les efforts en cours du Ministère de l’information et de la culture en collaboration avec les parties prenantes concernées visant à intensifier la formation du personnel de tous les bureaux d’information nommés dans tous ses ministères, départements et agences, sur la mise en place et le fonctionnement de régimes d’accès effectif à l’information.

Réfugiés, PDIP et travailleurs migrants

19.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.L'adoption de la Politique nationale de 2017 sur les personnes déplacées, qui a été élaborée dans le but de guider les différents niveaux et branches du gouvernement nigérian en matière de protection des personnes pour éviter leur déplacement, d'une part, et, de l'autre, pour faciliter leur protection en cas de déplacement ;
ii.Les activités de la Commission nationale pour les réfugiés en matière de protection et de gestion des réfugiés et demandeurs d’asile et de gestion des personnes déplacées au Nigeria ;
iii.La formation et l'autonomisation des 8.800 PDIP (femmes et jeunes) de retour par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, avant le 15 février 2017, en matière d'agriculture irriguée en saison sèche dans trois zones administratives locales de l'État de Borno ;
iv.La décision de la Haute Cour fédérale d’Abuja qui a conclu que l’expulsion de 47 réfugiés camerounais du Nigeria violait les obligations juridiques du pays, ainsi que l’ordonnance visant à garantir leur retour au Nigeria et leur indemnisation.

Participation

20.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La création d'un espace ouvert permettant aux Nigérians de former et d'adhérer à différents partis politiques et OSC, ce qui a fourni un espace civique à 63 partis politiques officiels et à plus de 500 ONG enregistrées au Nigeria ;
ii.La promulgation de la loi de 2015 portant modification de la Loi électorale, qui établit la Commission électorale nationale indépendante, chargée de mener des élections libres et équitables, d'enregistrer les partis politiques et de contrôler leur respect de la loi électorale ;
iii.L’adoption du Code de déontologie des partis politiques (2013-2015), qui repose notamment sur le respect de l’état de droit, la démocratie au sein des partis et le respect de la réglementation en matière de financement de campagne et d’élections.

Droits économiques, sociaux et culturels

21.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :

Droit au logement
i.Le lancement du nouveau programme de logements sociaux en 2016, qui a permis la mise en place du Fonds pour logements de famille doté de 100 milliards de nairas au titre du budget 2017, le reste du financement provenant du secteur privé ;
ii.L'établissement du Programme fédéral intégré de logement pour le personnel, qui est une initiative stratégique pour une fourniture massive de logements au bénéfice des fonctionnaires fédéraux.

Droit à l'emploi

22.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La ratification et la transposition des huit normes fondamentales du travail définies par l’Organisation internationale du Travail, qui consacrent les droits de l’homme et des peuples dans le monde du travail, et la protection continue de ces droits par les agents du travail du Ministère du Travail à travers diverses formes d’intervention ;
ii.L'amendement de l'Article 2 de la Loi sur les normes du travail afin d'inclure les enfants artisans indépendants au sens de la Convention 138 et d’abolir l'utilisation d'enfants pour accomplir les travaux manuels pénibles ; 
iii.L’amendement de la Loi nigériane sur les fonds d’assurance sociale afin de l’aligner sur la Loi d’indemnisation des employés.

VIH/SIDA

23.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La création du Comité national d’action contre le SIDA et la mise en place d’autres organes d’intervention de premier plan pour coordonner la mise en œuvre des programmes de lutte contre la pandémie au Nigeria ;
ii.La formulation de la Politique nationale en matière de VIH/SIDA sur le lieu de travail et d'un manuel de mise en œuvre de la politique par le Ministère du Travail, qui fournissent des lignes directrices au gouvernement, au patronat, aux travailleurs et aux autres parties prenantes sur le lieu de travail, et identifient des stratégies et des programmes de protection des droits et de la dignité des travailleurs vivant avec le VIH.

Droit à l'éducation

24.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La mise en œuvre du programme de redynamisation de l'alphabétisation des adultes et des jeunes afin de réduire le taux d'analphabétisme et de constituer une masse critique de formateurs en alphabétisation et pour l'acquisition de compétences fondamentales ;
ii.Le lancement du projet d’investissement dans le Programme éducatif de l’État et du Projet de partenariat pour l’éducation au Nigeria, un projet mené en partenariat entre le Ministère fédéral de l’éducation et la Banque mondiale, qui vise à remédier à la faible qualité de l’éducation découlant de la difficulté à déployer des enseignants dans les zones critiques ;
iii.La fourniture de manuels scolaires, d’équipements sportifs et d’ordinateurs à 20 États du pays ;
iv.La mise en œuvre d’un programme d’alimentation en milieu scolaire dans 7 États pilotes en 2017, dont l'objectif est de nourrir plus d’un million d’élèves du primaire et d'accroître le taux de scolarisation, de rétention et d’achèvement des élèves ;
v.L’institutionnalisation du programme de tutorat, de mentorat et de conseil des élèves afin de veiller à ce que ces derniers soient inscrits dans les écoles, y restent et que le processus d’enseignement et d’apprentissage devienne attrayant et enrichissant à la fois pour l’enseignant et pour les élèves.

Droit à l'eau

25.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La réalisation de progrès appréciables dans l’amélioration de l’accès des ménages à une eau potable saine avec un taux d'accès final de 67% en 2015 ;
ii.La mise en œuvre du Programme de subventions conditionnelles comme principal moteur des actions politiques visant à fournir de l'eau potable de qualité, en particulier dans les zones rurales ;
iii.Les rôles joués par le Ministère fédéral des Ressources hydrauliques et ses organismes parapublics, ainsi que par le Ministère fédéral des Territoires, du Logement et du Développement Urbain dans la fourniture d'eau potable aux Nigérians.

Droit à l'alimentation

26.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.L'adoption de la Politique et de la Stratégie nationales en matière d'irrigation et de drainage de 2016, visant à repositionner le sous-secteur et à élargir l'espace d'investissement pour une agriculture irriguée intensifiée et diversifiée au Nigeria ;
ii.L'adoption de la Politique nationale de promotion de l'agriculture (2016-2020) mise en œuvre par le Ministère fédéral de l'agriculture et du développement rural, visant à améliorer la production d'aliments de qualité suffisante pour les besoins de la consommation locale et de l'exportation.

Droits des personnes handicapées

27.La Commission félicite le Nigeria d'avoir présenté le Projet de loi de 2016 sur l'interdiction de la discrimination à l'égard des personnes handicapées, qui fut adopté par la législature nationale le 13 juillet 2016. L'objectif du projet de loi est de fournir une protection sociale aux personnes handicapées et des garanties contre la discrimination. La Commission se félicite également du fait que le projet de loi institue une commission nationale chargée de veiller au respect de leurs droits à l'éducation et à la santé, ainsi que des autres droits sociaux et économiques énoncés dans la Constitution de 1999 et contenus dans les autres traités pertinents auxquels le Nigeria est partie.

Industries extractives et environnement

28.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La révision de la Politique nationale sur l'environnement en 2016 et le lancement d'autres programmes et politiques visant à renforcer la protection de l'environnement et à assurer la transparence dans la gestion des ressources naturelles ;
ii.L'adoption et la mise en œuvre ultérieure du plan de nettoyage d'OGONILAND en 2016, à la suite d'une contamination à grande échelle de l'environnement suite aux activités d'extraction de pétrole pendant des décennies dans le Delta du Niger ;
iii.Le Ministère fédéral de l'Environnement a lancé un programme sur les énergies renouvelables conformément aux obligations incombant à la République fédérale du Nigeria en vertu de la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique.

Paix et sécurité

29.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.Les efforts déployés par l’armée nigériane pour s’acquitter de sa responsabilité première qui est de protéger et de défendre le Nigeria et ses citoyens face aux nombreux problèmes de sécurité auxquels le pays est confronté ;
ii.L’adoption du Plan d’action national destiné à la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies et des résolutions connexes au Nigeria, ce qui traduit l’engagement du Gouvernement ainsi que la responsabilité qu'il assume à garantir la sécurité des femmes et des filles pendant les conflits armés ;
iii.La mise en œuvre de la Politique nationale de paix, qui comprend la philosophie sous-jacente, un ensemble d'objectifs et de principes fondamentaux, ainsi que des stratégies de mise en œuvre et d'évaluation de toutes les activités liées à la paix par les parties prenantes nigérianes ;
iv.La révision en 2017 des Règles d'engagement adressées aux agences de sécurité, à la suite du bombardement par inadvertance d'installations civiles et la décision prise par le Gouvernement de mettre en œuvre de nouvelles réformes dans le secteur de la sécurité conformément aux recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme.

Démocratie et gouvernance

30.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La tenue d'élections libres et régulières qui se sont déroulées en 2015 et le 23 février 2019 ;
ii.La Loi portant modification de la loi électorale de 2015, telle qu'amendée, a institué la Commission électorale nationale indépendante (CENI), chargée notamment de la tenue d'élections libres et équitables, de l'enregistrement des partis politiques et du suivi de leur respect de la loi électorale. 

III.Facteurs limitant la jouissance des droits de l'homme garantis par la Charte africaine

31.Méconnaissance par la majorité de la population des instruments régionaux et internationaux des droits de l'homme ratifiés par le Nigeria, ce qui limite l'exercice effectif des droits de l'homme dans le pays.

IV.Sources d'inquiétude

32.Tout en reconnaissant les efforts importants déployés par le Gouvernement du Nigeria pour promouvoir et protéger les droits de l'homme, la Commission s'inquiète des points suivants :

Obligations en matière d'établissement de rapport et de coopération avec la Commission

33.La Commission se félicite de la prise en compte par le Nigeria de ses recommandations sur le 5ème rapport périodique. Il note toutefois que le présent rapport ne fournit pas de réponses spécifiques et complètes à certaines des recommandations, questions et problèmes évoqués par la Commission dans ses observations finales sur le 5ème rapport périodique.

Ratification des instruments régionaux des droits de l'homme

34.La Commission s'estime préoccupée par l’absence de calendrier définitif et de la prolongation des procédures de ratification et de transposition en droit des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme au Nigeria.

35.En particulier, dans ses Observations finales et recommandations de 2015 sur le 5ème rapport périodique du Nigeria, la Commission a recommandé au Nigeria d’accélérer le processus de ratification de certains instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme en suspens, notamment : 
i.La Charte africaine des valeurs et principes de la Fonction publique et de l'Administration ; 
ii.Le Protocole sur le statut de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme ; 
iii.Le Protocole à la Convention de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme ; 
iv.Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
v.Le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et visant à abolir la peine de mort ; 
vi.Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, relativement à une procédure de communication.

36.La Commission a également invité le Gouvernement à accélérer le processus engagé afin d’effectuer la déclaration prévue à l’Article 34.6 du Protocole sur la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples visant à permettre aux particuliers et aux ONG de saisir directement la Cour africaine.

37.Dans son 6ème rapport périodique, le Gouvernement a indiqué qu’un groupe de travail national interministériel « tentait d'accélérer le processus de ratification des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme en suspens ». Bien que cette évolution soit bienvenue, la Commission s’inquiète du peu de progrès réalisé au cours de la période de référence.

38.La Commission s'estime également préoccupée par l’absence de rapport détaillé sur les travaux du Groupe de travail interministériel national et par l'insuffisance des progrès réalisés dans la ratification des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme recommandés. Le rapport ne fournit pas non plus de calendrier définitif sur la ratification et la transposition en droit des instruments en suspens. 

Droits civils et politiques

Peine de mort

39.La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.L'absence de moratoire officiel sur les exécutions au Nigeria ;
ii.Le fait que la peine de mort soit obligatoire pour le meurtre, le vol à main armée et certains cas de trahison ;
iii.L'absence d'action de la part du Gouvernement nigérian permettant de modifier ses lois relatives à la peine de mort, de les mettre en conformité avec les meilleures pratiques internationales et d'abolir la peine de mort.

Interdiction de la torture et des mauvais traitements

40.La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.Le rapport ne contient pas d'informations sur les mesures que le Gouvernement met en place pour sensibiliser les membres du pouvoir judiciaire à leur obligation d'ouvrir des enquêtes sur les allégations de torture ou de mauvais traitements, en particulier lorsqu'elles ont été soulevées au cours d'un procès ;
ii.Le rapport ne dit rien sur les recours dont peuvent bénéficier les suspects qui ont été condamnés alors qu'ils allèguent que leurs aveux ont été obtenus sous la torture ;
iii.Le manque d'informations sur les mesures mises en place pour doter le Comité national contre la torture de ressources suffisantes pour l'exécution correcte de son mandat ;
iv.Le manque d'informations sur le travail de l'Office de traitement des plaintes à la Direction générale de la police, qui a été mis en place pour mener des audiences disciplinaires à l'encontre d'agents faisant l'objet de plaintes ;
v.Les allégations de torture à l'encontre de l'armée dans le cadre de sa lutte contre l'insurrection et les allégations de torture à l'encontre de la police qui l'utiliserait pour obtenir des aveux des suspects ;
vi.La mesure dans laquelle la loi anti-torture prévoit la réhabilitation des victimes de torture et la possibilité de leur offrir une assistance juridique ;
vii.L'absence de rapport détaillé sur le travail du Comité national sur la torture depuis 2009 ;
viii.Les allégations de torture contre la Brigade spéciale anti-vol.

Conditions de détention
 
41.La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.Le manque d'informations sur la quantité et la fréquence quotidiennes de repas et de nourriture dans les centres pénitentiaires 
ii.Le manque d'informations concernant une base de données sur les plaintes liées à la torture dans les commissariats de police ;
iii.Des informations faisant état de personnes qui sont toujours détenues au secret par l'armée, sans avoir accès à un avocat, à leur famille ou à un tribunal et qui, par conséquent, ne peuvent pas demander la protection de leurs droits par la justice ;
iv.L'arriéré de suspects en garde à vue ou en prison, détenus sans procès ;
v.Les rapports des officiers de la brigade spéciale anti-vol qui omettent régulièrement de traduire les suspects devant un tribunal dans les 24 à 48 heures prévues par la Constitution ;
vi.Les décès de personnes en détention et dans des centres de détention militaires, en particulier le centre de détention militaire de la caserne de Giwa ;
vii.Les informations faisant état d'arrestations et de détentions arbitraires d'enfants, de femmes et de civils en général, dont certains sont soupçonnés d'appartenir à Boko Haram, sans aucun contrôle par les tribunaux.

Droit à la liberté d'expression et accès à l'information

42.La Commission est préoccupée par les points suivants :

Liberté d'expression

i.Les rapports faisant état d'instances de menaces, d'arrestations et de détentions de journalistes, de blogueurs et de défenseurs des droits de l'homme par les forces de sécurité, parfois sans procès, pour avoir formulé des critiques dans les médias conventionnels ou sur les réseaux sociaux ;
ii.L'adoption de la loi sur la cybercriminalité en mai 2015, qui impose aux fournisseurs d'accès Internet de conserver pendant deux ans toutes les données des abonnés relatives au trafic entre autres, et de mettre ces données à la disposition des agences chargées de l'application de la loi sur demande, sans décision de justice et l'impact de l'application de cette loi sur la liberté d'expression et les autres libertés civiles.

Accès à l'information

i.Le manque de sensibilisation du public sur son droit d'accès à l'information ;
ii.La non-familiarisation des institutions publiques avec leur devoir de promouvoir le droit d'accès à l'information, ce qui limite l'application effective de la Loi sur l'accès à l'information ;
iii.Le manque de détails concernant les efforts déployés par le Ministère de l'Information et de la Culture pour intensifier la formation (contenu, durée et nombre de stagiaires) du personnel de tous les bureaux d'information désignés dans tous ses ministères, départements et agences, en vue de l'établissement et du fonctionnement d’un accès effectif aux régimes d’information. 

Droit à la liberté de rassemblement et d'association

43. La Commission est préoccupée par des informations faisant état d'interventions répressives contre les mouvements de protestation organisés par le Mouvement islamique au Nigeria, qui furent interdits par le Gouvernement de l'État de Kaduna en 2016, ainsi que ceux organisés par les groupes pro-Biafrans, y compris les Peuples autochtones du Biafra (IPOB), qui furent interdits en 2017. Ces mesures ont été décrites comme étant brutales et ont fait plusieurs victimes.

44.La Commission s'inquiète également de l'impact qu'aura sur la liberté d'association et d'expression et l'indépendance des défenseurs des droits de l'homme le Projet de loi sur les ONG, qui établira la Commission de réglementation des ONG.

Réfugiés, PDIP et travailleurs migrants

45.La Commission est préoccupée par les points suivants :

i.Les conditions de vie des personnes vivant dans des camps situés dans les « territoires inaccessibles » de l’État de Borno et la question de leur accès à l’aide humanitaire, en particulier à une nourriture, de l’eau et des soins médicaux suffisants ;
ii.Le manque d'informations concernant les décès de personnes dans les camps de personnes déplacées ainsi que les causes de décès ;
iii.L'incapacité du gouvernement nigérian à respecter la procédure régulière pour expulser 47 réfugiés camerounais qui s'étaient rendus au Nigeria en raison de la crise au Cameroun, violation qui a ensuite été reconnue par les tribunaux nigérians. 

Participation

46.La Commission s'inquiète du manque d'informations dans le rapport concernant les mesures prises par le Nigeria au titre de l'Article 25 de la Charte en vue de sensibiliser la population à ses droits, aux procédures judiciaires et aux recours disponibles en ce qui concerne leurs droits civils et politiques.

Paix et sécurité

47.La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.Manque d'informations dans le rapport sur les attaques violentes persistantes perpétrées par le groupe armé Boko Haram ;  
ii.Des affrontements violents entre éleveurs nomades et agriculteurs locaux, souvent suivis de meurtres commis en représailles, qui ont entraîné des centaines de morts dans tout le pays ;
iii.Les informations insuffisantes sur les efforts du gouvernement visant à poursuivre les auteurs présumés de ces attaques.
iv.Le recours excessif à la force par les forces de sécurité dans le cadre d'opérations de maintien de l'ordre, d'opérations anti-terroristes ou de combat, et d'actes allégués de participation à des violations, notamment des abus sexuels ; 
v.L'absence de mécanisme permettant de signaler les violations commises par les forces de sécurité et l'insuffisance d'informations sur les enquêtes et les mesures de redevabilité prises. 

Droits économiques, sociaux et culturels

Droit au logement

48.La Commission est gravement préoccupée par les informations selon lesquelles, entre 2015 et 2017, les autorités nigérianes auraient procédé à des expulsions à grande échelle et à la démolition des maisons de milliers de personnes dans les États de Kaduna, Lagos et Rivers sans aucune garantie juridique et procédurale, notamment de véritables consultations, un préavis suffisant, l'accès à des voies de droit et la mise à disposition d’une indemnisation et d’un logement de remplacement adéquats.

Droit à l'emploi

49.Bien que le droit à l'emploi soit garanti par la Constitution et que diverses mesures aient été adoptées pour élargir les possibilités d'emploi, la Commission s'inquiète de l'absence de statistiques sur l'emploi des jeunes et la répartition géographique des problèmes posés par le chômage.

VIH/SIDA

50.La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.Il n’existe aucune information sur les mesures que le Gouvernement nigérian met en place pour prendre en compte les informations relatives à la prévention et au traitement du VIH/SIDA dans le système éducatif nigérian ;
ii.Le rapport n'indique pas les mesures mises en place par l'État pour aider les enfants orphelins et les autres enfants vulnérables touchés par le VIH/SIDA ;
iii.Le manque de détails dans le rapport concernant les mesures prises par le gouvernement nigérian pour assurer l'accès des minorités sexuelles aux services de prévention, de traitement et de prise en charge du VIH ;
iv.Le manque de détails concernant les mesures prises par le Nigeria pour prévenir la transmission du VIH de la mère à l'enfant et réduire le pourcentage d'enfants vivant avec le VIH.

Personnes âgées 

51. La Commission est préoccupée par le manque d'informations spécifiques dans le rapport concernant les droits des personnes âgées. 

Industries extractives et environnement

52.La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.Les marées noires qui continuent de se produire dans le Delta du Niger et qui causent de graves problèmes de contamination et de dégradation de l’environnement ;
ii.L'absence de redevabilité des acteurs de l'industrie pétrolière vis-à-vis des impacts de leurs opérations sur les droits de l'homme dans le Delta du Niger et du non-respect des normes applicables, notamment la diligence raisonnable et les mesures de précaution ;
iii.Le manque d'informations dans le rapport concernant les travaux de l'Agence nationale de détection et d'intervention en cas de marée noire dans l'exécution de son mandat ;
iv.Le manque d'informations sur la participation et la responsabilité des entreprises pétrolières dans le soutien des efforts d'assainissement et de réhabilitation de l'environnement dans le Delta du Niger, compte tenu surtout de l'ampleur de l'impact de leurs activités ;
v.Les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Plan de nettoyage d'OGONILAND de 2016 et l'indemnisation des familles touchées ; 
vi.Le manque de clarté sur la disponibilité de mécanismes de règlement des griefs et l'accès aux recours judiciaires pour les communautés touchées par les activités des industries extractives ; 
vii.Le manque d'informations détaillées et de statistiques sur les mesures prises en vue d'assurer la transparence et la redevabilité financières en ce qui concerne les bénéfices réalisés par les industries extractives et l'acquittement de leurs obligations financières, ainsi que sur la collecte et l'utilisation transparente des recettes perçues par le Gouvernement auprès des entreprises extractives.    

Droits des populations indigènes et des minorités 

53. La Commission est préoccupée par les points suivants :
i.La non-identification et la non- reconnaissance officielles des minorités et des peuples autochtones au Nigeria ;
ii.Les rapports faisant état de l'interdiction de l'organisation dénommée IPOB et de l'usage de la force contre des manifestants et des sympathisants non violents de l'organisation ;
iii.Les allégations d'assassinats extrajudiciaires, d'arrestations arbitraires et de tortures par l'armée à l'encontre des groupes pro-Biafrans ;
iv.Le manque d'informations sur les mesures adoptées en vue d'assurer la protection et la promotion des droits fondamentaux des peuples autochtones et leur inclusion dans les processus de prise de décisions.

V.Recommandations

54.Compte tenu de ce qui précède, la Commission adresse au Gouvernement de la République fédérale du Nigeria les recommandations suivantes :

Obligations en matière d'établissement de rapport 

55.Le Nigeria est invité à s'assurer de respecter ses obligations en vertu de l'Article 62 de la Charte africaine en mettant en œuvre les recommandations ci-après et de fournir des informations dans le cadre de son prochain rapport sur les mesures prises afin de mettre en œuvre ces recommandations.

Ratification des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l'homme
56.Le Nigeria est invité à prendre des mesures en vue de faire une déclaration en vertu de l’Article 34.6 du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

57.Le Nigeria est invité à accélérer le processus de ratification et de transposition des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l'homme en suspens et à présenter des informations détaillées à ce sujet dans le prochain rapport périodique, en précisant notamment le processus et le calendrier d'examen et de ratification des instruments énumérés dans ces observations finales.

Droits civils et politiques

Peine de mort

58.Le Nigeria est invité à :
i.Ratifier  le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et visant à abolir la peine de mort ; 
ii.Aligner le recours à la peine de mort sur le droit international, notamment en veillant à ce que tous les condamnés à mort aient épuisé leur droit de faire appel, à ce que personne ne soit condamné à mort pour un délit commis avant l'âge de 18 ans ni pour des crimes ne constituant pas un homicide volontaire ; 
iii.Fournir d'avantage d'informations sur l'examen du Rapport d'étude nationale du Ministère fédéral de la Justice sur la peine de mort et le moratoire, qui est envisagé ;
iv.Adopter un moratoire officiel sur la peine de mort, comme étape vers l'abolition définitive de la peine de mort, afin de protéger le droit à la vie.

Interdiction de la torture et des mauvais traitements

59.Lors de sa prochaine période d'examen, le Nigeria est invité à :
i.Fournir des informations sur les mesures que le Gouvernement met en place pour sensibiliser les membres du pouvoir judiciaire à leur obligation d'ouvrir des enquêtes sur les allégations de torture ou de mauvais traitements, en particulier lorsqu'elles ont été soulevées au cours d'un procès ;
ii.Inclure des données et statistiques relatives à la prévalence de la torture dans le pays, ainsi que des informations sur les plaintes reçues et la manière dont elles ont été traitées ;
iii.Fournir des informations sur les recours dont peuvent bénéficier les suspects qui ont été condamnés alors qu'ils allèguent que leurs aveux ont été obtenus sous la torture ;
iv.Veiller à ce que la Loi contre la torture soit mise en œuvre pleinement et de manière effective dans tout le pays ;
v.Veiller à ce que toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements, y compris de violences sexuelles, fassent rapidement l'objet d'enquêtes impartiales et efficaces menées par un organe indépendant des auteurs présumés, et à ce que les personnes soupçonnées de responsabilité pénale pour torture et mauvais traitements soient traduites en justice sans possibilité de recours à la peine de mort ;
vi.Veiller à ce que les aveux, les reconnaissances de fait et toute autre preuve obtenue sous la torture ou sous d'autres formes de mauvais traitements ne puissent pas être admis comme pièces à conviction par les tribunaux ; 
vii.Veiller à ce que les victimes de torture et de mauvais traitements puissent obtenir de l'État une réparation rapide et adéquate, notamment une restitution, une indemnisation financière juste et adéquate ainsi que des soins médicaux, des services de santé et une réadaptation appropriés.

Conditions de détention 

60.Le Nigeria est invité à :
i.Fermer tous les lieux de détention non répertoriés, y compris le centre de détention militaire de la caserne de Giwa, et veiller à ce que tous les condamnés soient détenus dans des conditions juridiques, sanitaires et humaines qui respectent le Recueil de principes pour la protection de toutes les personnes, quelle que soit leur forme de détention ou d'emprisonnement ;
ii.Créer une base de données sur les plaintes liées à la torture afin de déterminer la prévalence de la torture dans les postes de police ;
iii.Veiller à la mise en œuvre effective des lois et politiques nationales sur la mise en liberté sous caution, le cautionnement et la condamnation afin de réduire la surpopulation carcérale et les problèmes de violence et conséquences néfastes pour la santé qui en résultent ;
iv.Garantir l'introduction de procédures rapides dans le système judiciaire et la prise de mesures appropriées pour assurer le strict respect de la durée de la garde à vue de 48 heures tout en respectant les Lignes directrices de Luanda ; 
v.Utiliser les lignes directrices de Luanda tout en formant la police à ces directives et en adoptant les lois et politiques pertinentes ; 
vi.Mettre en œuvre des garanties contre les violations des droits de l'homme par les forces de sécurité, notamment les arrestations arbitraires, les détentions au secret et les détentions illégales ;
vii.Fournir des données et statistiques complètes sur toutes les personnes détenues au cours de la période considérée dans tous les lieux de détention militaires et policiers, ainsi que les raisons de leur arrestation et de leur maintien en détention ;
viii.Ouvrir rapidement des enquêtes indépendantes, impartiales et efficaces sur les décès de personnes dans les centres de détention militaires.
ix.Résoudre le problème des détenus en détention préventive prolongée en finalisant la réforme du système de justice pénale. 

Droit à la liberté d'expression et accès à l'information

Liberté d'expression

61.Le Nigeria est invité à :
i.Prendre des mesures efficaces pour empêcher et/ou mettre fin à la pratique des arrestations arbitraires, du harcèlement et des menaces à l'encontre de journalistes, blogueurs et autres pour avoir exercé leur liberté d'expression ;
ii.Enquêter sur les informations faisant état de harcèlement ou d'attaques contre des journalistes, des blogueurs et des défenseurs des droits de l'homme et prendre les mesures administratives et/ou pénales appropriées pour responsabiliser les auteurs ; 
iii.Modifier la loi sur la cybercriminalité conformément aux normes internationales relatives aux droits de l'homme du point de vue du droit à la vie privée et à la liberté d'expression, y compris la Convention de l'UA sur la cybersécurité et la protection des données à caractère personnel, ainsi que sur la ratification de ladite convention.

Accès à l'information

62.Le Nigeria est invité à :
i.Prendre les mesures nécessaires pour que les institutions publiques soient investies du devoir de promouvoir le droit d'accès à l'information par la formation, le plaidoyer, ainsi que par des ressources matérielles et financières suffisantes ;
ii.Veiller à ce que le public connaisse ses droits en matière d'accès à l'information grâce à des programmes de renforcement des capacités ;
iii.Prendre les mesures nécessaires en vue d'accélérer le processus de révision et de modification des lois limitant l'accès à l'information, afin de les mettre en conformité avec les champs et l'esprit de la Loi sur l'accès à l'information et fournir des détails sur l'état d'avancement de ce processus.

Droit à la liberté de rassemblement et d'association

63.Le Nigeria est invité à :
i.Fournir d'avantage d'informations sur les droits susmentionnés au cours de la prochaine période de référence ;
ii.Prendre des mesures législatives et autres afin de protéger et de promouvoir les droits de l'homme conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l'homme, la Charte africaine, la Déclaration de Kigali et d'autres instruments régionaux et internationaux des droits de l'homme garantissant le droit à la liberté d'association et de réunion ; 
iii.Fournir des informations adéquates relativement aux droits sur lesquels le rapport ne fournit aucune information quant aux mesures prises pour en assurer le respect ;
iv.Interdire le déploiement de forces militaires dans les situations liées à l’ordre public et veiller à ce que les forces de police disposent de ressources suffisantes pour assurer la surveillance de manifestations et de contre-manifestations à grande échelle ou hostiles ;
iv.Enquêter rapidement et de manière approfondie et impartiale sur toutes les allégations d'abus de la force lors de manifestations de l'armée et de la police et veiller à ce que leurs auteurs soient traduits en justice.

Réfugiés, PDIP et travailleurs migrants

64.Le Nigeria est invité à :
i.Inclure dans son prochain rapport les mesures prises en vue de ratifier et de mettre en œuvre la Convention de Kampala et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ;
ii.Fournir des informations sur la situation des migrants au Nigeria ;
iii.Fournir des informations sur le statut des 47 réfugiés camerounais expulsés du Nigeria et sur l'application de l'ordonnance de la Haute Cour fédérale sur leur retour au Nigeria et les indemnités dues ;
iv.Promouvoir et protéger les droits des PDIP, y compris les femmes et les filles, actuellement déplacées et veiller à ce que le montant de l'aide alimentaire fournie, le type d'assistance fourni et les mécanismes de distribution utilisés soient appropriés et accessibles ;
v.Veiller à ce que les restrictions de déplacement imposées aux PDIP dans les camps soient raisonnables, nécessaires, proportionnées, non discriminatoires et prévues par la loi ;
vi.Veiller à ce que les personnes hébergées dans les camps de PDIP aient accès à une nourriture et à des soins de santé adéquats ;
vii.Rendre compte sur le retour volontaire des PDIP à leur lieu de résidence, sur le soutien qui leur a été fourni pour reconstruire leur vie et sur les mesures prises pour protéger les civils des déplacements forcés ; 
viii.Prendre des mesures pour promouvoir et protéger les droits des femmes et des enfants dans les camps de PDIP, et veiller à ce qu’ils ne subissent aucun type de violence, notamment la violence sexuelle.

Participation

65.Le Nigeria est invité à inclure dans son prochain rapport des informations sur les procédures judiciaires et les recours disponibles relativement aux droits civils et politiques de la population et à inclure également l'éducation civique dans les programmes scolaires, si cela n'a pas déjà été fait, conformément à l'Article 25 de la Charte.

Droits économiques, sociaux et culturels

Droit au logement

66.La Commission exhorte le Nigeria à :
i.Instituer un moratoire sur les expulsions massives jusqu'à ce que des garanties juridiques et procédurales adéquates soient mises en place afin de garantir que toutes les expulsions soient conformes aux normes internationales sur les droits de l'homme, notamment en adoptant une législation interdisant formellement les expulsions forcées ;
ii.Rendre compte à la Commission sur les circonstances ayant conduit à l'expulsion massive de dizaines de milliers de Nigérians dans diverses régions du Nigeria, notamment à Lagos, et sur la situation actuelle des personnes expulsées ; ainsi que  
iii.prévoir des recours efficaces, notamment un logement de remplacement adéquat, et une indemnisation pour toute perte ou tout dommage aux biens des personnes ayant été expulsées de force ;
iv.Enquêter immédiatement sur les expulsions forcées dans les États de Lagos, Kaduna et Rivers.

Droit à l'emploi

67.La Commission exhorte le Gouvernement du Nigeria à :
i.Inclure dans son prochain rapport des informations sur l'emploi des jeunes au Nigeria ;
ii.Élargir les possibilités d’emploi des jeunes et rendre compte des progrès accomplis dans ce sens ;
iii.Promouvoir les compétences et l’innovation pour de nouveaux types d’emplois afin de fournir des opportunités d’emploi aux jeunes.
VIH/SIDA

68.Le Nigeria est invité à :
i.S'assurer que le prochain rapport comporte des informations sur les mesures que le Gouvernement nigérian met en place pour prendre en compte les informations relatives à la prévention et au traitement du VIH/SIDA dans le système éducatif nigérian ; 
ii.Inclure dans son prochain rapport des informations et des statistiques sur les enfants orphelins du VIH/SIDA et les autres enfants vulnérables touchés par le VIH/SIDA, ainsi que sur les mesures prises pour les aider ;
iii.Adopter des mesures visant à assurer l'accès des minorités sexuelles aux services de prévention, de traitement et de soins du VIH ;
iv.Réviser la Loi sur l'interdiction du mariage entre personnes du même sexe afin d'interdire la violence et la discrimination et l'aligner sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme protégeant les droits des minorités sexuelles.
Personnes âgées 

69. Dans son prochain rapport, le Nigeria est invité à fournir d'avantage d'informations sur les droits des personnes âgées.

Industries extractives et environnement

70.Le Nigeria est invité à :
i.Enquêter sur tous les crimes contre l'environnement à des fins de poursuites judiciaires ;
ii.Veiller à ce que toutes les entreprises locales et internationales des industries extractives dont les activités ont entraîné des violations des droits de l'homme en soient tenues pour responsables ;
iii.Accélérer la mise en œuvre du Plan de nettoyage d'OGONILAND de 2016 et l'indemnisation des familles affectées ;
iv.Veiller à ce que l'Agence nationale de détection et d'intervention en cas de marée noire dispose des ressources nécessaires pour enquêter sur les marées noires, de manière indépendante des sociétés pétrolières ;
v.Prendre les mesures nécessaires pour remédier aux impacts négatifs de la pollution aux hydrocarbures sur l’environnement et les droits de l’homme, y compris la surveillance de la santé des communautés touchées, l’amélioration des installations de soins de santé et les études sur la qualité de l’eau potable et des aliments en cas de contamination aux hydrocarbures ;
vi.Veiller à ce que toutes les communautés soient consultées sur les questions relatives à leur environnement et à leurs ressources naturelles.

Paix et sécurité

71.Le Nigeria est invité à :
i.Prendre toutes les mesures légales nécessaires pour garantir la sûreté, la sécurité et la protection des civils et de leurs biens contre les attaques du groupe armé Boko Haram ; 
ii.Prendre toutes les mesures légales nécessaires pour assurer la sûreté et la sécurité et protéger la vie et les biens des personnes contre les attaques de communautés rivales, notamment en prenant toutes les mesures nécessaires pour détecter les premiers signes d'une attaque ; 
iii.Ouvrir rapidement des enquêtes indépendantes, impartiales et efficaces sur toutes les allégations de violations commises par des membres du groupe armé Boko Haram ;
iv.Mettre en place les mesures législatives et institutionnelles nécessaires à la conduite d'une enquête indépendante sur les violations des droits de l'homme et des normes du droit international humanitaire commises par les forces de sécurité ; 
v.Ouvrir une enquête indépendante, impartiale et efficace sur le conflit entre agriculteurs et éleveurs afin d'identifier les causes du conflit et d'apporter les mesures nécessaires à la résolution des conflits et à la prévention de leur renouvellement ;
vi.Fournir dans son prochain rapport des statistiques sur toutes les enquêtes et poursuites abouties concernant les personnes soupçonnées d'appartenir au groupe armé Boko Haram ou de soutenir celui-ci, ou soupçonnées d'autres crimes commis en tant que membres ou partisans de Boko Haram. 
Populations indigènes et minorités

72.La Commission demande instamment au Gouvernement de la République fédérale du Nigeria :
i.De reconnaître les communautés indigènes et de promouvoir leurs cultures, leurs traditions et leurs modes de vie afin de garantir une véritable unité et harmonie ;
ii.De rendre compte des mesures prises pour protéger les droits des minorités ethniques et religieuses au Nigeria, notamment des minorités résidant dans des régions autres que leur lieu d'origine ; 
iii.D'indiquer dans le prochain rapport périodique les mesures prises pour que les peuples indigènes soient inclus dans les processus de prise de décision sur les questions qui les concernent et aient le droit d'être entendus.

Coopération avec la Commission

73.La République fédérale du Nigeria est invitée à :
i.Maintenir le niveau de qualité élevé démontré dans son dernier rapport et la régularité de soumission de ses rapports périodiques sur la mise en œuvre de la Charte africaine, conformément à l'Article 62 de la Charte africaine ;
ii.Inviter la Commission et ses mécanismes spéciaux à entreprendre une mission de promotion dans le pays ;
iii.Fournir, dans son prochain rapport périodique, des statistiques et des données à jour sur tous les secteurs concernés ainsi que sur les activités des institutions dotées d'un mandat en matière de droits de l'homme ; et 
iv.Informer la Commission, dans son prochain rapport périodique, des mesures prises pour remédier aux problèmes susmentionnés et pour assurer la mise en œuvre effective des recommandations contenues dans les présentes observations finales relatives à la Charte africaine.

 

PARTIE B : PROTOCOLE DE MAPUTO 

74.Concernant la mise en œuvre du Protocole de Maputo, la Commission souligne les éléments positifs suivants :
 
I- ÉLÉMENTS POSITIFS

75.La Commission note qu'il existe de nombreux éléments positifs concernant le respect par le Nigeria de ses obligations en vertu du protocole de Maputo.

Obligation en matière d'établissement de rapport et de coopération avec la Commission

76.La Commission félicite la République du Nigeria d'avoir présenté son rapport périodique conformément à l'Article 26 du Protocole de Maputo. 

Cadre juridique pour la promotion des droits de la femme au Nigeria

77. La Commission félicite le Nigeria d’avoir pris les mesures législatives et politiques suivantes au cours de la période examinée :
i.L'examen du Projet de loi sur le genre et l'égalité des chances de 2016 par l'Assemblée législative nationale, qui intègrera dans le droit le Protocole de Maputo et la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) ;
ii.La Loi de 2015 sur l'interdiction de la violence envers les personnes, qui vise à éliminer la violence dans les sphères privée et publique, à interdire toutes les formes de violence, y compris la violence physique, sexuelle, psychologique et conjugale, les pratiques traditionnelles néfastes et la discrimination à l'égard des personnes et à assurer une protection maximale et des recours effectifs pour les victimes, tout en infligeant des sanctions aux contrevenants ;
iii.La Stratégie nationale visant à mettre fin au mariage des enfants au Nigeria 2016-2021 ;

Mesures prises en vue de la mise en œuvre du Protocole de Maputo

i.Les mesures prises par le Gouvernement nigérian afin de renforcer le nombre d'interventions politiques majeures en vue d’améliorer le statut social des femmes et de renforcer leur assise économique en leur accordant des prêts bancaires spéciaux par le biais de la Banque centrale du Nigeria, de la Banque des infrastructures du Nigeria, de la Banque agricole et de la Banque de l'industrie ; d’assurer une augmentation du niveau d'instruction des filles et de décourager les mariages précoces des filles ;
ii.Efforts visant à accroître la représentation et la participation des femmes aux postes électifs ou nominatifs dans le pays grâce à la mise en œuvre de la politique nationale sur l’égalité des sexes ainsi que d’autres programmes ;
iii.Mesures visant à accroître les possibilités d’emploi des femmes dans les secteurs de la police, de l’armée, de la justice et du secteur privé ;
iv.Mesures visant à mettre un terme à la violence sexiste et aux autres formes de violence à l'égard des femmes et des enfants ;
v.Mesures visant à accélérer l'égalité entre hommes et femmes ;
vi.Toutes les politiques et mesures prises par le Gouvernement pour promouvoir et protéger les droits des femmes ;
vii.Mesures prises par la Commission de réforme du droit au Nigeria pour apporter des réformes approfondies au Code de la famille nigériane, au droit relatif au viol et aux autres infractions sexuelles ainsi qu'aux lois sur le mariage ;
viii.Mesures prises par le Gouvernement pour éliminer les rôles sexospécifiques et les stéréotypes à l’égard des femmes et des enfants ;
ix.Le lancement du programme G-WIN (Développement des filles et des femmes au Nigeria), programme novateur qui relie les processus de budgétisation du Gouvernement à des objectifs spécifiques visant à améliorer la vie des filles et des femmes défavorisées au Nigeria.

MISE EN OEUVRE DES DROITS SPECIFIQUES CONTENUS DANS LE PROTOCOLE DE MAPUTO

Article 2 : Élimination de la discrimination envers les femmes

78.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes : 
i.Son engagement en faveur de la promotion et de la protection des droits des femmes par la promulgation d’un certain nombre de lois progressistes visant à revenir sur les lois, normes et pratiques qui étaient auparavant discriminatoires dans le pays ;
ii.Les dispositions constitutionnelles interdisant la discrimination fondée sur le sexe et promouvant l'égalité ;
iii.Le Projet de loi sur le genre et l'égalité des chances, 2016, qui est une législation positive permettant d'intégrer le Protocole de Maputo et la CEDEF des Nations Unies, ainsi que d'autres problématiques connexes.
iv.Les politiques et programmes adoptés par le Ministère fédéral de la justice et par d’autres organismes compétents, tels que la Commission nationale des droits de l’homme, la Commission de réforme du droit, le Conseil d'assistance juridique, l’Institut nigérian de hautes études juridiques, l’Agence nationale de prévention de la traite des personnes et la Commission sur le caractère fédéral, afin de débarrasser le pays de la discrimination fondée sur le sexe ;
v.Divers arrêts de la Cour suprême et de la Haute Cour fédérale du Nigeria protégeant les femmes de la discrimination et promouvant l'égalité des sexes ;
vi.L’adoption de la Politique nationale en matière d’égalité des sexes dans l’éducation de base, qui constitue une réponse aux défis posés par l’égalité des sexes dans l’éducation, tels qu’énoncés dans la Constitution de 1999 de la République fédérale du Nigeria ;
vii.L'adoption par la police nigériane d'un nouveau manuel de formation aux droits de l'homme, qui intègre l'égalité des sexes. 

Article 3 : Droit à la dignité

79.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.Les initiatives lancées par le Ministère fédéral de la santé en matière de violence sexiste, notamment l’élaboration d’un Projet de directive pour la gestion et le contrôle de la violence sexiste à l’intention des agents de santé, des agents de la force publique et du pouvoir judiciaire ;
ii.Les directives nationales et normes de référence sur la violence sexiste 2014/15, qui fournissent une feuille de route à toutes les parties prenantes afin qu'elles travaillent ensemble dans la prévention et la réponse à la violence sexiste au Nigeria ;
iii.La disponibilité de numéros verts ou de lignes d'assistance établis par les agences de l'Etat et les organisations de la société civile pour les victimes de violence sexiste, dont la plupart sont gratuits et disponibles 24h/24 ;
iv.La disponibilité de services de conseil et de soins médicaux pour les victimes de violences sexuelles et physiques ;
v.La formation ciblée des professionnels qui interagissent avec les personnes touchées par la violence basée sur le genre, tels que les infirmiers, les travailleurs sociaux et les officiers de police, a constitué un aspect essentiel des efforts déployés pour lutter contre le problème de la violence sexiste et du VIH.

Article 4 : Les droits à la vie, à l'intégrité et à la sécurité de la personne

80.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.L'adoption du Plan d'action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 et d’autres résolutions connexes au Nigeria afin de garantir l'inclusion des femmes aux processus de consolidation de la paix, de maintien de la paix, de résolution et de gestion des conflits au Nigeria ;
ii.Les mesures prises en vue d'assurer une plus grande sécurité aux élèves et aux étudiants et de les doter de personnel de sécurité, notamment par la mise à disposition d'installations scolaires destinées à garantir un environnement sûr, sécurisé et favorable à l'apprentissage ; 
iii.Les efforts de secours et de réhabilitation des victimes de Boko Haram.

Article 5 : Élimination des pratiques néfastes

81.La Commission note avec satisfaction :
i.Que plusieurs États du Sud-Est participent maintenant à la réunion annuelle du Women's Mass Home Coming, autrement connue sous le nom de réunion d’août, en l’utilisant comme plate-forme de sensibilisation au niveau rural sur la nécessité d’abroger les pratiques traditionnelles néfastes ; 
ii.La Loi de 2003 sur les pratiques traditionnelles déshumanisantes et nuisibles de l’État de Rivers ; 
iii.La législation de l'État de Cross River interdisant les mariages entre filles et la circoncision génitale féminine ou mutilation génitale féminine (MGF) dans l'État de Cross River ;
iv.La Loi de l'État d'Edo sur les mutilations génitales féminines qui interdit la pratique des MGF et prévoit comme sanction une amende de 1000 nairas ou de six mois d'emprisonnement en cas d'infraction ;
v.L’interdiction du mariage et des fiançailles d’enfants en vertu des Articles 21 et 22 de la Loi sur les droits de l’enfant ;
vi.L'adoption de la stratégie nationale 2016-2021 visant à mettre fin au mariage des enfants au Nigeria ;
vii.L’interdiction des tatouages ​​et du marquage de la peau en vertu de l’Article 24 de la Loi sur les droits de l’enfant ;
viii.La sensibilisation massive des citoyens sur l'impact négatif des pratiques traditionnelles néfastes empêchant les femmes de participer à la vie politique. 

Article 6 : Mariage

82.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.Les mesures prises en vue de modifier la disposition constitutionnelle interdisant à une Nigériane mariée à un étranger de transmettre la citoyenneté à son époux en vertu de leur mariage ;
ii.La promulgation de la Loi sur les droits de l’enfant, qui stipule que l’âge minimum du mariage et des fiançailles est de 18 ans et interdit la fixation arbitraire de l’âge du mariage en vertu de pratiques coutumières et traditionnelles ;
iii.Les décisions de la Cour suprême et de la Haute Cour fédérale qui soutiennent l'égalité dans le mariage.

Article 8 : Accès à la justice et protection égale devant la loi

83.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.L’exercice de réforme législative et judiciaire en cours dont l'objectif est de modifier les lois en vigueur afin de garantir une promotion et une protection efficaces des droits de l’homme, l’accès à la justice, ainsi que la sécurité et la sûreté au Nigeria ; et 
ii.Le travail du Conseil d’assistance juridique du Nigeria visant à garantir que les Nigérians démunis aient accès à la justice.

Article 9 :     Droit de participation au processus politique et à la prise de décision

84.La Commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.La nomination de femmes à 30% des postes de décision politique au plus haut niveau au cours de ces dernières années ;
ii.Le redoublement d’efforts visant à accroître la représentation et la participation des femmes aux postes électifs et nominatifs dans le pays en insistant d'avantage sur la mise en œuvre des dispositions de la Politique nationale en matière d’égalité des sexes ;
iii.Le Fonds d'affectation spéciale mis en place par le Ministère fédéral de la condition féminine et du développement social conjointement avec ONU-Femmes et d'autres partenaires au développement pour aider les femmes politiciennes à se porter candidates aux postes électifs.

Article 12 : Droit à l'éducation et à la formation

85.La Commission félicite le Nigeria d'avoir créé le Centre national pour le développement de la femme, qui responsabilise les femmes socialement et économiquement, notamment en leur proposant une formation professionnelle.

Article 13 : Droits au bien-être économique et social

86.La Commission félicite le Gouvernement du Nigeria d'avoir :
i.Lancé de nombreux programmes visant à renforcer l'autonomisation économique des femmes en soutenant les femmes entrepreneurs et en améliorant leur sécurité sociale ;
ii.Mis en place de nombreux autres programmes stimulant l’économie et liés au genre, notamment : le Programme de réinvestissement des subventions et d'autonomisation ; YOU-Win ; G-Win ; le Programme de développement des compétences techniques et entrepreneuriales du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD)/SMEDAN.

Article 14 : Santé sexuelle et reproductive

87.La Commission note avec satisfaction les éléments suivants :
i.Les politiques adoptées pour protéger les droits des femmes en matière de santé sexuelle et reproductive ;
ii.La mise en place du régime national d’assurance maladie qui vise à garantir à chaque Nigérian l’accès à de bons services de soins de santé et à une répartition équitable des coûts des soins de santé entre les différents groupes de revenus.

Article 16 : Droit à un logement convenable
 
88.La commission félicite le Nigeria d'avoir pris les mesures suivantes :
i.Les dispositions constitutionnelles obligeant le Gouvernement à orienter sa politique en vue de fournir un logement convenable et adéquat à tous ses citoyens ;
ii.L’approbation de la Politique nationale du logement et de la Politique nationale de développement urbain garantissant que tous les Nigérians, hommes et femmes, possèdent ou aient accès à des logements décents, sûrs et salubres dans des conditions d’occupation sûres.

Article 24 : Protection spéciale des femmes en situation de détresse

89.La Commission se félicite du soin particulier accordé aux femmes en situation de détresse, par exemple les femmes victimes de violence qui bénéficient d'une protection particulière, notamment d'une assistance psychosociale, juridique et médicale fournie par des agences gouvernementales.
 
I.       FACTEURS LIMITANT LA JOUISSANCE DES DROITS GARANTIS DANS LE PROTOCOLE DE MAPUTO

90.La méconnaissance des résultats du Protocole de Maputo qui a eu pour effet de ralentir la mise en œuvre du Protocole.

III.SOURCES D'INQUIETUDE

91.Malgré les efforts du Gouvernement visant à promouvoir et à protéger les droits des femmes, la Commission se sent préoccupée par les points suivants :

Obligation en matière d'établissement de rapport et de coopération avec la Commission

92.La Commission s'estime satisfaite des réponses détaillées fournies par le Nigeria aux diverses questions relatives à la mise en œuvre du protocole de Maputo. Toutefois, la Commission souhaiterait recevoir de plus amples informations sur les préoccupations exprimées ci-après.

Informations supplémentaires manquantes

93.La Commission est préoccupée par le fait que, suite à l'engagement pris par la Délégation de fournir des informations supplémentaires à la Commission sur les points soulevés lors de la présentation du rapport, aucune information n'a été fournie, notamment les données ventilées par sexe et les statistiques sur la violence sexiste et les MGF, ce qui a également une incidence sur le fond des présentes observations finales.

Article 4 : Les droits à la vie, à l'intégrité et à la sécurité de la personne

94.La Commission s'estime préoccupée par l'insuffisance d'informations sur l'état et la sécurité des filles de Chibok toujours aux mains de Boko Haram, ainsi que sur la réhabilitation et la réintégration sociales de celles qui ont été libérées.

95.La Commission est préoccupée par les incidents de conflit au Nigeria et par leurs conséquences, ainsi que par les réactions impliquant un usage excessif de la force par les forces de sécurité sur le droit à la vie, en particulier des femmes ; 

96.La Commission est préoccupée par le manque d'informations sur la disponibilité de mécanismes institutionnels permettant la détection précoce et la prévention d'événements de conflit ; 

Article 5 : Élimination des pratiques néfastes

97.La Commission s'estime préoccupée par le fait que le rapport ne contient aucune information sur les autres formes de pratiques culturelles néfastes existant au Nigeria.

Article 6 : Mariage

98.La Commission est préoccupée par le fait que le rapport ne détaille pas les efforts actuellement menés pour faire en sorte que les 14 États restants du Nigeria adoptent la Loi sur les droits de l'enfant, qui stipule que l'âge du mariage est fixé à dix-huit ans (18).

Article 8 : Accès à la justice et protection égale devant la loi

99.La Commission est préoccupée par le manque d'informations sur l'état d'avancement de la promulgation du Projet de loi sur l'égalité des sexes et l'égalité des chances, l'applicabilité de la Loi de 2015 sur la prévention de la violence à l'égard des personnes, et l'accès à la justice et la protection égale des femmes dans les zones rurales.

Article 13 : Droit au bien-être économique et social

100.La Commission est préoccupée par le manque d'informations sur les lois relatives au régime matrimonial.

101. Le rapport ne comporte pas non plus d'information sur si les lois interdisant la discrimination au Nigeria abordent ou interdisent expressément les pratiques discriminatoires courantes relevant du droit coutumier en ce qui concerne l'héritage.

Article 22 : Protection spéciale des femmes âgées

102.La Commission est préoccupée par le manque d'informations sur les mesures prises par le Nigeria pour assurer la protection des femmes âgées.

Article 23 : Protection spéciale des femmes handicapées

103.La Commission est préoccupée par le manque d'informations sur les mesures prises par le Nigeria pour assurer la protection des femmes handicapées.

V - RECOMMANDATIONS 

104.Compte tenu de ce qui précède, la Commission adresse au Gouvernement fédéral de la République du Nigeria les recommandations suivantes :

Obligation en matière d'établissement de rapport

105.Le Gouvernement est invité à continuer de présenter régulièrement son rapport afin de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de l’Article 26 du Protocole de Maputo, et à mettre en œuvre les recommandations de la Commission. 

106.La Commission demande instamment au Nigeria de soumettre le prochain rapport périodique avec les informations demandées et cela conformément aux directives concernant les rapports étatiques au titre du Protocole de Maputo.

Article 4 : Les droits à la vie, à l'intégrité et à la sécurité de la personne

107.Dans le prochain rapport périodique du Nigeria, la Commission espère recevoir des informations sur l'état des dernières filles de Chibok enlevées par Boko Haram en 2014, sur les mesures prises par le Gouvernement afin de veiller à ce que les filles soient non seulement libérées et rendues à leurs familles, mais également réhabilitées et réintégrées dans la société. 

108.La Commission espère également recevoir des informations sur les conflits et leur impact sur le droit à la vie et à la sécurité de la personne, ainsi que sur les mesures prises pour prévenir et réprimer le recours excessif à la force par les forces de sécurité lors d'interventions dans des situations de conflit ou d'opérations de maintien de l'ordre. 

Article 5 : Élimination des pratiques néfastes

109.Dans le prochain rapport périodique du Nigeria, la Commission espère recevoir d'avantage d'informations sur les autres formes de pratiques culturelles néfastes existant au Nigeria.

Article 6 : Mariage

110.Le prochain rapport devrait inclure des informations sur l'état d'application de la Loi sur les droits de l'enfant par les 14 États restants du Nigeria.

Article 8 : Accès à la justice et protection égale devant la loi

111.Dans son prochain rapport, le Nigeria est invité à fournir les informations suivantes :
i.L'état d'avancement de la promulgation du Projet de loi sur l'égalité des sexes et l'égalité des chances ;
ii.La mesure dans laquelle la Loi de 2015 sur l'interdiction de la violence à l'égard des personnes est applicable et appliquée dans tout le pays ;
iii.L'accès à la justice et la protection égale des femmes dans les zones rurales.

Article 22 : Protection spéciale des femmes âgées

112.Le prochain rapport devrait contenir des informations sur les mesures prises par le Nigeria pour protéger les femmes âgées.

Article 23 : Protection spéciale des femmes handicapées

113.Le prochain rapport devrait également inclure des informations sur les mesures prises par le Nigeria pour protéger les femmes handicapées.

Coopération avec la Commission 

114. La Commission invite instamment le Nigeria à fournir dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les mesures prises pour répondre aux préoccupations exprimées et pour assurer la mise en œuvre effective des recommandations formulées dans les présentes observations finales relativement au protocole de Maputo.

Adopté par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples lors de la 65ème session ordinaire qui s'est tenue du 21 octobre au 10 novembre 2019 à Banjul, en Gambie.