Seminaire Continental De Haut Niveau Sur Le Droit A La Sante Et A Une Protection Sociale En Afrique - Principales Conclusions Et Recommandations

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CONSIDÉRANT que le Groupe de travail sur les droits économiques, sociaux et culturels et la Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples ont organisé conjointement un séminaire continental de haut niveau sur le droit à la santé et à une protection sociale en Afrique, dont l'objectif principal était de : 

Sensibiliser les États parties à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine) et leur rappeler leurs obligations en vertu de la Charte, du Protocole de Maputo et d'autres instruments pertinents eu égard à la fourniture de soins de santé et de services de protection sociale adéquats et abordables de s'engager à donner la priorité aux soins de santé et à une protection sociale en prenant des mesures concrètes, législatives et autres, y compris des réformes de leurs secteurs de la santé.

CONSIDÉRANT que les objectifs spécifiques étaient de : 

i. Comprendre les obligations des États parties en vertu de la Charte africaine, du Protocole de Maputo et d'autres instruments pertinents concernant le droit à des soins de santé et à des services de santé et à une protection sociale ;

ii. Identifier les lacunes des systèmes de soins de santé et du secteur de la protection sociale dans les États membres de l'UA ainsi qu'aux niveaux régional et continental ;

iii. Sensibiliser/traiter la question des systèmes de soins de santé déficients et de la couverture/mise en œuvre insuffisante d’une protection sociale ;

iv. Recueillir des données sur la qualité des services sanitaires et sociaux à des fins de documentation et de recherche ;

v. Partager les meilleures pratiques en matière de systèmes de soins de santé et de protection sociale dans les États parties ;

vi. Formuler des recommandations essentielles pour traiter les questions spécifiques au contexte africain à cet égard, en vue de leur mise en œuvre par les différentes parties prenantes, à savoir les États parties, les INDH, les ONG et d’autres partenaires ; et

vii. Sensibiliser au projet de Protocole sur les droits des citoyens à la protection sociale et à la sécurité sociale ;

CONSIDÉRANT que les participants au Séminaire étaient des membres de la Commission, des experts du Groupe de travail sur les droits économiques, sociaux et culturels, 11 délégués de 9 États parties à la Charte africaine, représentant l’Afrique de l'Est, de l'Ouest, du Centre, du Sud et du Nord, 1 parlementaire, des représentants de 5 Institutions nationales des droits de l'homme, 3 universitaires, des représentants de 12 ONG et 4 participants locaux d'organisations internationales basées à Dakar, Sénégal ;

CONSIDÉRANT que des présentations ont été faites sur diverses questions thématiques liées au droit à la santé et à la protection sociale, suivies d'échanges fructueux au cours desquels les participants ont exprimé leurs préoccupations, partagé leurs expériences, les défis et les meilleures pratiques pour une promotion et une protection efficaces de ces droits en Afrique ;

 

PAR CONSÉQUENT, adressons les recommandations suivantes aux parties prenantes suivantes :

  • Aux Etats parties

1. Domestiquer les instruments régionaux et internationaux relatifs au droit à la santé et à la protection sociale ratifiés ;

2. Mobiliser des ressources pour investir dans les secteurs de la santé publique, cibler les groupes défavorisés dans la fourniture de services médicaux, afin de mettre fin aux inégalités et de réduire les dépenses personnelles des ménages, en particulier des ménages pauvres et défavorisés ;

3. Donner aux organisations de la société civile les moyens de jouer leur rôle dans les communautés dans le cadre de partenariats entre le gouvernement et la société civile pour s'occuper des pauvres et de ceux qui ne peuvent pas accéder facilement à des services de santé de qualité ;

4. Créer un environnement propice à la croissance et à l'efficacité des sociétés pharmaceutiques locales émergentes et des fabricants d'équipements médicaux ;

5. Promulguer des lois qui encouragent l'investissement local dans les secteurs de la santé et de la protection sociale ; et mobiliser davantage de ressources budgétaires par le biais, entre autres, de systèmes de paiement d’impôts innovants et efficaces ;

6. Eradiquer la corruption qui entrave la fourniture de soins de santé et de services sociaux efficaces et éviter une forte dépendance à l'égard des fournitures/équipements médicaux importés en créant/mettant en place des mécanismes nationaux, régionaux et continentaux efficaces pour répondre rapidement aux urgences sanitaires ; 

7. Utiliser les partenariats existants/disponibles avec les organisations internationales, notamment l'ONUSIDA, pour investir durablement dans la santé et la protection sociale ;

8. Faire preuve d'une volonté politique suffisante pour remplir leur obligation de protéger les droits sanitaires et sociaux de leurs citoyens, conformément aux traités relatifs aux droits de l'homme auxquels ils sont parties ;

9. Réduire les dépenses de santé en donnant la priorité au système public de soins de santé primaires ; 

10. Réglementer les activités des acteurs non étatiques / acteurs privés fournissant des services socio-économiques ;

11. Adopter des lois de protection sociale complètes, inclusives et fondées sur les droits de l'homme, conformément aux normes internationales ; renforcer le cadre législatif de la protection sociale et sa mise en œuvre au niveau national ; 

12. Assurer la mise en œuvre effective de politiques et stratégies de protection sociale en instituant un certain nombre de mesures d'accompagnement visant à soutenir et renforcer les actions prioritaires entreprises ; notamment le renforcement des capacités techniques ; le renforcement des bases de données analytiques, des mesures de communication et de mobilisation sociale, et des partenariats en matière de protection sociale pour promouvoir la coordination des approches et l'efficacité des programmes ;

13. Elaborer des mécanismes financiers internes pour financer les projets de santé et de protection sociale et leur allouer un budget suffisant, afin d’assurer la gratuité des soins de santé, notamment pour les personnes vulnérables telles que les femmes enceintes, les enfants, les personnes âgées, les migrants et les personnes déplacées internes ;

14. Envisager la mise en place d'unités proposant des médecines traditionnelles dans les hôpitaux et faire officialiser les solutions autochtones, par exemple les médicaments à base de plantes ;

15. Donner accès à des informations adéquates et opportunes sur la santé et la protection sociale à l'ensemble de la population ;

16. Promulguer une législation donnant effet au protocole de Maputo ;

17. Mettre en place un bureau de l'égalité des sexes pour signaler les cas de violence à l'égard des femmes et l'accès à la justice, et former la police à la gestion de la violence basée sur le genre ; 

18. Impliquer les jeunes dans les discussions, les campagnes et les activités de sensibilisation contre la violence et l'injustice, afin d'assurer une plus grande couverture et publicité de ces violations ;

19. Les parents africains devraient s'impliquer en apprenant à leurs enfants comment se comporter, et en préparant du matériel de formation pour les jeunes, ceci est nécessaire pour réduire la violence basée sur le genre ;

20. Les États doivent soumettre régulièrement à la Commission des rapports sur la mise en œuvre du Protocole de Maputo et l'UA doit envisager de réserver des budgets pour aider les États qui en ont besoin à préparer et présenter leur rapport ;

 

  • A la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

1. Envisager d'utiliser les médias locaux dans les pays comme un moyen possible de sensibiliser les États à soumettre leurs rapports périodiques conformément à l'Article 62 de la Charte ;

2. Collaborer avec les médias sociaux dans le cadre des règles/ autant que les règles/politiques de l'UA le permettent ;

3. Entreprendre une étude complète sur la COVID-19, notamment les meilleures pratiques en matière de santé, et faire des recommandations aux États en élaborant des commentaires généraux susceptibles de guider les États sur les normes minimales de protection des droits de leurs citoyens ;

 

  • Aux INDH

1. Jouer un rôle consultatif auprès des États dans l'élaboration des politiques et la mise en place d'un cadre juridique solide pour la réalisation du droit à la santé et à la protection sociale ;

2.  Jouer un rôle de premier plan dans l'évaluation du niveau de conformité et de mise en œuvre des instruments ratifiés par les États ;

3. S'assurer que les INDH aient un mandat quasi-judiciaire pour leur permettre de traiter et d'offrir une réparation aux plaintes pour des violations des droits de l'homme ;

 

  • Aux OSC

1. Puiser des ressources pour les soins de santé et la protection sociale auprès de partenaires internationaux et, si possible, du gouvernement ; et faire preuve de transparence dans la gestion des ressources reçues de ces partenaires ; 

2. S'attaquer au défi de la suspicion mutuelle entre les gouvernements et les ONG qui pourrait entraver les efforts des ONG dans la fourniture de services de protection sociale dans les communautés ;

3. Renforcer la capacité des médias/journalistes à rendre compte des questions de santé et de protection sociale ;

4. Mettre en place des réseaux de journalistes rendant compte des questions relatives à la santé et à la protection sociale ;

 

Fait à Dakar, Sénégal, le 10 décembre 2021.