Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l'action policière en Afrique - 79OS

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RAPPORT D'ACTIVITÉS ENTRE LES SESSIONS
COMMISSAIRE MARIA TERESA MANUELA

En tant que : 
I.Membre de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples et rapporteure pour les pays lusophones;
II.Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l'action policière en Afrique;  
III.Membre du groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées;
IV.Membre du groupe de travail sur les communications ;  
V.Membre du Comité pour la prévention de la torture en Afrique ;

SOMMAIRE
SECTION I : Introduction
SECTION II : Activités réalisées entre les sessions en tant que :     
I.Membre de la Commission
II.Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l'action policière en Afrique et rapporteure pour les pays lusophones 
III.Membre du Comité pour la prévention de la torture en Afrique ;
IV.Membre du groupe de travail sur les communications

SECTION III : Défis
SECTION IV : Recommandations et conclusions

SECTION I – INTRODUCTION

1.Ce rapport est présenté conformément aux Règlements 23 § 3 et 72 du Règlement intérieur de 2020 de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission) et couvre les activités menées entre les 77ème et 79ème sessions ordinaires, conformément aux objectifs prévus dans la matrice d'exécution du plan annuel, qui découle du Plan stratégique 2021-2025. 

2.Il comprend les activités que j'ai menées en tant que membre de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission), Rapporteure spéciale sur les prisons, les conditions de détention et l'action policière en Afrique (Rapporteure spéciale), membre du Groupe de travail sur la peine de mort et membre du Groupe de travail sur les communications. Les activités menées en tant que Rapporteure pour cinq (5) pays lusophones d'Afrique seront également incluses ici.

3.Le rapport est divisé en quatre (4) parties : Introduction; Activités de la période entre sessions; Défis rencontrés dans l'exercice du mandat de rapporteure spéciale et de membre de la CADHP et Recommandations et Conclusions.

SECTION II – ACTIVITÉS DE LA PÉRIODE ENTRE LES SESSIONS

I - ACTIVITÉS EN TANT QUE MEMBRE DE LA COMMISSION

A/Réunions statutaires

4.J'ai participé à la 78ème session ordinaire de la Commission, qui s'est tenue du 23 février au 8 mars, au cours de laquelle diverses questions relatives à l'activité de la Commission ont été analysées, en particulier l'analyse de la situation des droits de l'homme sur le continent, qui a donné lieu à quelques résolutions et à l'examen et à la prise de décision concernant plusieurs communications.

5.J'ai participé au Forum des ONG qui se tient depuis le 11 mai, où la société civile discute de la situation des droits de l'homme sur le continent. Le modèle adopté pour présenter la situation des droits par région est intéressant et nous permet de comprendre ce qui est essentiel dans chacune d'entre elles. Lors de ce forum, la référence aux questions liées aux prisons et à la police est constante, avec des rapports sur des situations de détention irrégulière, la surpopulation carcérale et ses conséquences, qui conduisent à un manque de respect de la dignité des personnes qui y sont détenues.

II - ACTIVITÉS ENTREPRISES EN TANT QUE RAPPORTEURE SPÉCIALE SUR LES PRISONS, LES CONDITIONS DE DÉTENTION ET L’ACTION POLICIÈRE EN AFRIQUE

6.Du 21 au 23 novembre 2023, j'ai assisté à la cinquième réunion du Comité directeur UA/CER sur la RSS à Addis-Abeba. La conférence visait à donner à toutes les parties prenantes l'occasion de faire le point sur les réalisations, les défis et les enseignements tirés du soutien apporté aux États-membres impliqués dans la RSS et, plus particulièrement, de tracer la voie à suivre pour la prochaine décennie (2024-2034).

7.La conférence s'est tenue en même temps que la 5e réunion du Comité directeur de l'UA sur la RSS, qui a analysé le projet de rapport sur la RSS.

8.Dans le même ordre d'idées, le comité directeur de la RSS de l'UA a analysé le projet de note d'orientation opérationnelle (OGN) sur le contrôle et la responsabilité du secteur de la sécurité. La conférence a réuni des participants des États-membres, de la Commission de l'UA et de ses entités compétentes, des communautés économiques régionales (CER) et des mécanismes régionaux de prévention, de gestion et de résolution des conflits, des agences des Nations unies concernées, des groupes de réflexion soutenant la RSS et des partenaires internationaux.

9.Dans ce même cadre, j'ai participé le 29 novembre à la réunion de validation de l'étude sur l'impact de l'application de la loi sur les droits de l'homme des demandeurs d'asile, des réfugiés et des migrants en Afrique, en coordination avec le Mécanisme pour les réfugiés. 

10.Toujours dans le cadre du Mécanisme spécial, j'ai tenu des réunions techniques les 19 et 23 janvier, les 13 et 22 février et le 4 mars 2024, avec différents partenaires, sur l'étude des conditions de détention en Afrique et l'étude des alternatives à la prison. 

11.À cette fin, les réunions ont été organisées dans le but d'établir une feuille de route claire sur l'approche à suivre dans les deux études, de définir le champ d'analyse des études (domaines spécifiques) et de préciser les responsabilités des partenaires en fonction de leurs compétences, d'identifier les chefs de file et les rédacteurs potentiels.

12.L'initiative de ces études est soutenue par la Résolution sur la conduite d'une étude sur les prisons et les conditions de détention en Afrique, ACHPR/Res.557 (LXXV) 2023, adoptée lors de sa 75e session ordinaire, tenue en format hybride à Banjul, Gambie, du 3 au 23 mai 2023, en vue d'identifier les causes profondes des violations des droits de l'homme constatées et de formuler des recommandations de réforme, ainsi que de suggérer l'application d'alternatives à l'emprisonnement effectif.

13.La Commission a tenu son premier forum conjoint des mécanismes spéciaux du 25 au 27 avril 2024, auquel j'ai participé. Ce forum a servi d'incubateur pour des initiatives conjointes et des activités transversales impliquant l'engagement mutuel des parties prenantes sur des questions transversales qui soulignent l'interdépendance de tous les droits de l'homme. Ce faisant, la CADHP approfondirait son approche intersectorielle des droits de l'homme, renforçant la nature indivisible et interconnectée de tous les droits de l'homme, plus en phase avec les meilleures pratiques mondiales en matière de droits de l'homme.

14.Le forum avait pour but de réfléchir à l'état des droits de l'homme sur le continent, de mesurer les progrès réalisés, d'identifier les principaux défis et de définir conjointement comment la CADHP peut contribuer au mieux à la protection et à la promotion des droits de l'homme sur le continent, en particulier dans le contexte de l'agenda de l'Union africaine en matière de droits de l'homme et de gouvernance.

15.Il a également permis d'examiner et de réfléchir aux progrès réalisés par la CADHP dans la défense des droits de l'homme, en reconnaissant les réalisations et en comprenant les obstacles rencontrés par ses mécanismes spéciaux et les stratégies possibles pour une plus grande efficacité.

16.La CADHP peut évaluer de manière critique l'état de la ratification et de l'application des instruments relatifs aux droits de l'homme, en identifiant les lacunes et en catalysant les actions pour une meilleure protection et promotion des droits de l'homme, ainsi qu'en favorisant l'échange d'expériences et en promouvant des partenariats qui comblent le fossé entre les aspirations et les réalités sur le terrain.

17.Pendant le forum et le 27 avril 2024, j'ai tenu une réunion de travail avec les représentants des pays lusophones présents, dont Mr Marcelino Gomes, conseiller juridique à l'ambassade de Guinée-Bissau à Addis Abeba. 

18.Diverses situations ont été discutées et les difficultés rencontrées dans les pays respectifs en ce qui concerne la mise en œuvre des droits de l'homme contenus dans la Charte et d'autres protocoles ont été analysées. L'absence de représentants des pays aux sessions publiques de la Commission ainsi que la non-présentation de rapports par les États ont également fait l'objet d'un examen approfondi. 

19.Cette année marque le 10e anniversaire de l'adoption des lignes directrices de Luanda. Certaines activités seront menées à cet égard et avec les partenaires du mécanisme, y compris un panel lors de la session ordinaire et des activités de formation et de diffusion massive d’instruments juridiques non contraignants dans les pays où le parrainage a été trouvé et déjà identifié.

III - Membre du groupe de travail sur la communication
20.En marge de la 78e session ordinaire de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples qui s'est tenue du 23 février au 8 mars 2024, le groupe de travail s'est réuni avec pour seul point à l'ordre du jour l'analyse de la situation de complémentarité entre la Commission et la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (Cour).

 IV - Membre du Comité pour la prévention de la torture en Afrique
21.Dans le cadre du programme de sensibilisation aux Règles d'Abidjan du Comité, j'ai participé le 19 décembre 2023 à un webinaire de sensibilisation et de formation pour les pays lusophones et francophones. L'accent a été mis sur la formation de toutes les forces susceptibles d'intervenir en cas de torture.

22.Le 21 février 2024, j'ai participé à la réunion d'élaboration du programme de travail du Somite. Le thème de l'éducation a été choisi pour les travaux à mener, compte tenu du thème directeur de l'UA. 

V.Commissaire Rapporteure pour les pays africains de langue portugaise

23.Dans le cadre du processus de suivi du développement des politiques de mise en œuvre des droits de l'homme dans les pays sous sa responsabilité, certaines activités ont été menées, malgré le silence des États face aux demandes de clarifications sur les faits dénoncés.

24.Ces pays ont en commun le fait qu'ils se sont engagés à présenter régulièrement des rapports aux Nations unies dans le cadre du rapport périodique universel. 

Vous trouverez ci-dessous un aperçu général de chacun des pays: 
25.Cabo Verde est un pays reconnu par les nations pour son respect des droits de l'homme et bien plus. La Commission nationale des droits de l'homme et de la citoyenneté (CNDHC) est en train de renouveler son statut pour le mettre en conformité avec les Principes de Paris; cet organe cumule les fonctions du Mécanisme national pour la prévention de la torture.

26.Cependant, au niveau continental, des défis subsistent tels que la présentation des rapports sur les instruments régionaux ratifiés, car le dernier rapport présenté sur la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples remonte à 1996 malgré l'existence d'une Commission interministérielle chargée de préparer les rapports depuis 2017; la ratification de certains instruments régionaux importants pour garantir la jouissance des droits dont ils assurent la protection; le manque de maîtrise des instruments directeurs pour la préparation des rapports pour la CADHP;

27.On observe, depuis quelque temps, une grève des enseignants, dont la fin est incertaine.
28.La visite promotionnelle autorisée du 29 janvier au 2 février n'a pas eu lieu pour des raisons logistiques, compte tenu du délai entre la confirmation et le début de la visite. Un report a été demandé et, à ce jour, aucune réponse n'a été donnée par le gouvernement.

29.Guinée-Bissau: la situation dans ce pays a été suivie avec une certaine attention suite aux développements politiques qui y ont eu lieu en 2022 et 2023, tels que la dissolution de l'Assemblée nationale et, par conséquent, du gouvernement, malgré le maintien en fonction du Premier ministre; le cumul des ministères de l'Intérieur et de la Défense par le Président de la République; 

30.Le pays s'est soumis à l'Examen Périodique Universel en 2020, dont il a reçu plusieurs recommandations; cependant, il n'a pas soumis de rapports d'État à la CADHP depuis 1984; il n'y a pas non plus d'organe au niveau gouvernemental chargé de rédiger des rapports d'État sur la mise en œuvre des droits contenus dans les instruments régionaux. 

31.Cependant, des faits positifs sont à noter au cours de la période considérée, qui sont le résultat des efforts du gouvernement pour améliorer la mise en œuvre des droits de l'homme dans différents domaines.

32.Dans le secteur de la santé: élaboration et mise en œuvre de plans quinquennaux de développement sanitaire; plan stratégique national pour la santé communautaire; garantie de la gratuité des médicaments pour les patients atteints de tuberculose. 

33.Les autres secteurs sociaux auxquels il faut prêter attention sont l'éducation, la protection sociale des travailleurs, la justice et la protection des enfants et des jeunes, la protection des personnes âgées et la traite des êtres humains, où, malgré les efforts du gouvernement, il est nécessaire d'œuvrer pour changer la situation actuelle. Il y a des points positifs et négatifs. Le droit à la terre a également fait l'objet d'une certaine attention, permettant aux occupants traditionnels d'être impliques.

34.Sur une note positive, le gouvernement a reconduit le président de la Commission nationale des droits de l'homme dans ses fonctions, corrigeant ainsi une exonération intervenue avant la fin du mandat. Des efforts devraient être faits pour enregistrer la Commission en tant que membre affilié de la CADHP, car elle a accompli un travail remarquable. 
35.Guinée équatoriale: le pays se présentera à la 47e session de l'examen périodique universel en novembre de cette année.

36.Sur une note positive, le pays a organisé des élections pacifiques en 2022 et, la même année, en septembre, a aboli la peine de mort dans le nouveau code pénal.
37.Cependant, le pays n'a jamais présenté de rapport sur la mise en œuvre de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, 36 ans après avoir ratifié cet instrument; il n'a pas ratifié les trois derniers protocoles de la Charte africaine, relatifs aux personnes âgées, aux personnes handicapées et au droit des citoyens à la protection sociale et à la sécurité sociale.

38.L'INDH du pays n'a pas encore adhéré à la CADHP et il n'a jamais été possible d'effectuer une mission de promotion dans le pays, malgré des demandes d'autorisation constantes et insistantes.

39.La fermeture de l'espace civique dans le pays parce que les ONG ne peuvent pas obtenir un statut légal, ainsi que l'emprisonnement des défenseurs des droits de l'homme et/ou des citoyens qui souhaitent obtenir un statut légal ou exercer une activité civique. La liste des personnes emprisonnées pour cette raison est longue et l'État ne répond pas aux appels régionaux et internationaux à cet égard.

40.Mozambique: après de nombreuses démarches, le pays se présente à cette session pour défendre son rapport consolidé pour la période 2015 – 2021. Il s’agit d’un pas en avant.

41.Le pays a tenu ses élections locales et a connu quelques bouleversements, que nous avons suivi, et après avoir fait des commentaires sur l'usage excessif de la force, nous espérons que la prochaine phase, les élections générales, se déroulera de manière plus pacifique et plus démocratique.

42.À la suite de la ratification des protocoles de la Charte africaine des personnes handicapées et des personnes âgées, une loi sur les personnes handicapées a été adoptée.
43.En ce qui concerne les traités de l'UE, le pays travaille à la ratification de la Convention sur la lutte contre la corruption et de la Convention de Kampala.

44.Les questions liées à la non-application des droits de l'homme seront abordées lors de la présentation et de la défense du rapport pays.

45.Elle n'a pas encore répondu à la demande d'autorisation pour une visite promotionnelle dans le pays.

46.S. Tomé et Príncipe: la dernière visite de promotion a eu lieu en 2019 et depuis lors, il a été difficile d'obtenir des informations sur la mise en œuvre des recommandations et des autres instruments de l'UA.

47.Le pays ne dispose pas d'une Commission nationale des droits de l'homme et, pour défendre la mise en œuvre des droits contenus dans les instruments régionaux et internationaux, il existe le Cabinet du ministre de la Justice, ainsi qu'une Commission interministérielle pour l'élaboration des rapports, qui connaît des difficultés de fonctionnement car les agents qui la composent sont mobiles, ce qui se reflète dans leur performance.

48.En résumé, un intense travail de consultation au niveau ministériel a été mené dans tous les pays afin de sensibiliser la population à la nécessité de participer aux travaux et de maintenir un contact étroit et permanent avec la Commission. En conséquence, la présence de fonctionnaires de différents niveaux dans les pays concernés s'est généralisée et est devenue plus fréquente.

Autres pays 
49.Nous avons suivi de près les rapports sur la surpopulation carcérale à travers le continent et les raisons pour lesquelles tant de personnes sont en prison. Certaines d'entre elles sont détenues alors qu'elles exercent leur droit d'organisation et de réunion, ainsi que leur droit d'expression, ce qui réduit l'espace civique dans la plupart des pays.

50.Les prisons africaines comptent de nombreux militants et défenseurs des droits de l'homme, ainsi que des personnes qui font partie de l'opposition aux gouvernements en place, ce qui crée un groupe différencié.

51.Le droit de circuler librement, dans le cas des migrants internes, a également conduit de nombreuses personnes dans des centres de détention de migrants dans différents pays, créant ainsi des situations de surpeuplement.

52. L'usage excessif de la force par les agents de l'ordre public, de la sécurité et de la tranquillité dans plusieurs pays du continent est un autre aspect que nous suivons avec une certaine inquiétude. 

SECTION III - DÉFIS 

DÉFIS RENCONTRÉS EN TANT QUE RAPPORTEUR SPÉCIAL ET MEMBRE DE LA CADHP

53.Dans cette section, il est nécessaire de mettre l'accent sur les principaux défis auxquels la Commission est confrontée dans l'exercice de ses activités, afin de trouver des solutions appropriées. Dans l'exercice de ses fonctions, la Commission est confrontée à diverses difficultés, telles que l'insuffisance des fonds, qui l'a amenée à recourir à des réunions virtuelles, une méthode autrefois extraordinaire en raison de la pandémie, mais aujourd'hui normalisée. Cependant, d'autres activités, comme celles menées par le mécanisme des prisons, sont trop sensibles pour être menées de cette manière. 

54.Les réunions avec les organes gouvernementaux portant sur des questions liées à l'application de la loi et à la sécurité publique sont incompatibles avec ce mode virtuel. Cela inquiète le mécanisme et l'empêche de remplir efficacement son mandat.

55.Les États ne répondent toujours pas positivement aux lettres de visite des mécanismes, en particulier celui-ci, qui constituerait une base plus fiable pour l'échange d'informations et de bonnes pratiques.

56.Dans le budget de la Commission, les fonds destinés aux visites de promotion des droits de l'homme en Afrique ont été réduits de manière drastique, ce qui affecte à la fois la composition de la délégation et l'efficacité de la visite, selon les critères en vigueur à la Commission.

57.Insister et innover dans la mobilisation et le plaidoyer pour que les institutions des pays lusophones, étatiques, académiques, religieuses et ONG se rapprochent des travaux de la Commission, créant ainsi une synergie qui ne fera que renforcer les liens de coopération entre elles pour le bien de l'Afrique.

58.Suivre de plus près sur le continent le nouveau groupe croissant de prisonniers, dont les causes sont plus politiques que criminelles.

SECTION IV – RECOMMANDATIONS ET CONCLUSION

A – RECOMMANDATIONS 

États parties
59.Les États parties à la Charte africaine et les principaux acteurs de la mise en œuvre et du respect des droits des prisonniers, ainsi que les détenteurs du pouvoir sur les forces de l'ordre et de la sécurité publique, sont invités à :
i.participer activement à l'étude sur les conditions carcérales en Afrique qu'elle a lancée, en facilitant l'accès aux informations nécessaires et en indiquant les points de contact avec lesquels la Commission peut travailler;
ii.allouer des fonds aux organismes responsables des prisons et autres lieux de détention afin de permettre la rénovation et/ou la construction de nouveaux établissements conformément à l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (Règles de Mandela), ce qui permettra d'améliorer les conditions de détention;
iii.autoriser les missions de promotion et les visites de prisons demandées par le rapporteur spécial dans les États-membres;
iv.commencer à réviser les règles internes (lois, règlements et autres) qui permettent d'envoyer en prison des personnes ayant commis des délits mineurs, en remplaçant les peines d'emprisonnement par des peines alternatives, que presque tous les pays ont dans leur législation et/ou qui sont incluses dans les instruments régionaux et internationaux en la matière, afin de ralentir la surpopulation carcérale;
v.Veiller à ce que la formation initiale et continue des agents chargés de l'application de la loi comprenne des sujets relatifs au respect des droits de l'homme de toutes les personnes, y compris les détenus;
vi.se familiariser avec les différentes études adoptées par la Commission, y compris l'étude sur l'usage (excessif) de la force par les forces de l'ordre, qui vient d'être publiée;

vii.faciliter la création d'organismes indépendants (de l'État ou de la société civile) ayant pour mandat d'effectuer des visites régulières dans les prisons et autres lieux de détention, de recevoir et de traiter les plaintes concernant les décès en prison, les mauvais traitements ou l'emprisonnement excessif pour une raison extra-légale;

viii.maintenir une coopération permanente avec la CADHP afin d'améliorer le dialogue qui permet la compréhension entre les institutions.

ix.Dans le cadre de la célébration du 10e anniversaire des lignes directrices de Luanda, inclure une discussion sur le degré de mise en œuvre de l'instrument dans les programmes de formation des forces de l'ordre, de la sécurité et de la tranquillité publiques.

Institutions nationales des droits de l'homme et autres institutions spécialisées 
60.Les INDH et les autres institutions spécialisées partenaires de la Commission sont invitées à coopérer plus activement dans les domaines suivants, mais pas seulement:
i.aider la Commission, et en particulier le mécanisme, à diffuser des informations et des outils pertinents sur le respect des droits des prisonniers en Afrique;
ii.organiser des activités pour commémorer le 10e anniversaire des lignes directrices de Luanda et promouvoir leur application au sein des forces de l'ordre, de la sécurité et de maintien de l’ordre public;
iii. partager et dénoncer la torture, qui prend ici la forme d'une surpopulation dans les prisons et autres lieux de détention en Afrique, et aider la Commission à diffuser les bonnes pratiques en matière de gestion des prisons contenues dans la Déclaration d'Arusha, ainsi que dans la Déclaration de Kadoma;
iv.encourager la diffusion des instruments approuvés par la Commission ces dernières années, en particulier l'étude sur le recours (excessif) à la force par les responsables de l'application des lois;
v.participer activement aux activités en cours, notamment aux études sur l'état des prisons en Afrique et à la diffusion de la déclaration d'Arusha sur la bonne gestion des prisons et de la déclaration de Kadoma sur l'utilisation de peines alternatives à l'emprisonnement, qui sont importantes pour contribuer à ralentir la surpopulation carcérale.

Organisations non gouvernementales 
61.Les ONG, partenaires essentiels de la Commission dans le suivi de l'état de la mise en œuvre des droits de l'homme sur le continent, sont vivement encouragées à:
i.remplir leur mission en coopérant à des activités qui contribuent à la diffusion des instruments pertinents sur les droits des prisonniers et à la surveillance des prisons et autres lieux de détention, en tant que membres observateurs de la CADHP;
ii.coopérer avec la Commission et les États parties, en dénonçant les violations des droits de l'homme et en fournissant des données crédibles, afin que l'enquête puisse être menée et que les agents responsables soient finalement amenés à rendre des comptes;
iii.contribuer à la formation et aux autres formes d'assistance nécessaires pour que la collaboration puisse contribuer davantage à la promotion et à la protection des droits de l'homme;
iv.aider et motiver d'autres organisations qui ne travaillent pas encore avec la CADHP à évaluer la possibilité d'une coopération;
v.organiser une activité pour commémorer le 10e anniversaire des lignes directrices de Luanda et promouvoir leur application. 

Donateurs et partenaires

62.Les donateurs et partenaires sont des acteurs importants dans le travail de la Commission et nous comptons sur eux pour combler les déficits financiers mentionnés ci-dessus. Nous leur demandons de :
i.continuer à fournir une assistance technique et financière afin que le mécanisme puisse entreprendre des activités pertinentes, étant donné qu'il y a deux domaines qui méritent une attention distincte, même s'ils sont complémentaires : les prisons et la police;
ii.faciliter l'impression et la diffusion, dans les langues officielles de la Commission, des instruments pertinents du mécanisme, en particulier l'étude sur le recours (excessif) à la force par les responsables de l'application de la loi et autres;
iii.redoubler leurs efforts pour s'assurer que la lettre d'information sur la police et les droits de l'homme continue d'être produite et qu'elle parvienne à ses véritables destinataires;
iv.continuer à aider le mécanisme en matière de formation, tant pour les forces d'ordre et de sécurité que pour d'autres acteurs importants identifiés au cours des études réalisées et des travaux en cours.

B – CONCLUSION:

En conclusion, je dois remercier mes prédécesseurs pour les efforts qu'ils ont déployés en vue de l'adoption des lignes directrices de Luanda, qui ont 10 ans cette année. Il nous appartient maintenant à tous de veiller à ce qu'elles soient effectivement connues et célébrées et, cette année en particulier, d'évaluer leur degré de mise en œuvre sur le continent.
Je voudrais profiter de cette occasion pour remercier certains États parties pour leur soutien dans la poursuite de cette mission épineuse, car si les droits de l'homme sont déjà un dilemme, les droits humains des prisonniers qui sont invisibles parce qu'ils sont derrière des barreaux représentent une approche encore plus délicate. Cependant, il faut du courage pour lever le voile et parler de ce qui se passe réellement dans les prisons et lieux de détention.
Ma gratitude va également à nos partenaires dans cette aventure, que je n'ai pas besoin d'énumérer car notre travail est vaste et remonte à loin. J'espère que nous resterons fidèles à notre objectif : faire des prisons un lieu où les droits de l'homme peuvent être promus et respectés, à la fois pour les détenus et pour le personnel qui y travaille. 
Merci à ceux qui ont rejoint le projet d'étude sur l'état des prisons en Afrique, en espérant que nos efforts ne seront pas vains.
Ensemble, les États parties, l'INDH et d'autres institutions, y compris des partenaires universitaires, religieux, des ONG et autres, nous nous efforcerons d'organiser des formations physiques pour diffuser les publications de la Commission sur le respect des droits de l'homme, en particulier celles liées à ce mécanisme.

Luanda, 12 mai 2024

Maria Teresa Manuela
Commissaire