Résolution portant sur le droit à l’alimentation et sur l’insécurité alimentaire en Afrique - CADHP/Rés.374(LX)2017

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La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission africaine), réunie en sa 60e Session ordinaire tenue du 8 au 22 mai 2017 à Niamey, au Niger ;

Rappelant le mandat de promotion et de protection des droits de l’homme de la Commission africaine, en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte africaine) ;

Rappelant que la Charte Africaine garantit les droits économiques, sociaux et culturels, en particulier en ses Articles 14, 15, 16, 17, 18, 21 et 22 ;

Rappelant sa Résolution ACHPR/Res.73 (XXXVI) 04 sur les droits économiques, sociaux et culturels en Afrique, adoptée lors de sa 36e Session ordinaire tenue du 23 novembre au 7 décembre 2004 à Dakar, au Sénégal, portant création du mandat du Groupe de travail sur les droits économiques, sociaux et culturels en Afrique, et ayant adopté la Déclaration de Pretoria sur les droits économiques, sociaux et culturels en Afrique (la Déclaration) ;

Rappelant en outre les Principes et Lignes directrices sur la Mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (les Lignes directrices de Nairobi) adoptés par la Commission lors de sa 48e Session ordinaire tenue du 10 au 24 novembre 2010 à Banjul, en Gambie et qui aident les États parties à s’acquitter de leurs obligations ;

Reconnaissant que, comme souligné dans la Déclaration et les Lignes directrices de Nairobi, le droit à l’alimentation est inhérent à la protection des droits à la vie, à la santé et au développement économique, social et culturel garantis par la Charte ; et que ce droit est réalisé lorsque tout le monde, à tout moment, a un accès physique, social et économique à une alimentation suffisante ou à des moyens pour s’en procurer et est à l’abri de la faim, même lors de catastrophes naturelles ou autres ;

Notant que lesdites Résolution, Lignes directrices et Déclaration ont énoncé que les instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme mettent l’accent sur l’indivisibilité, l’interdépendance et l’universalité de tous les droits humains, notamment la Charte africaine, la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique, la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Déclaration sur le droit au développement, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.;

Notant avec satisfaction les efforts déployés en ce moment en vue de garantir le droit à l’alimentation dans un certain nombre de pays, et en particulier l’expérience du Niger qui a présenté son initiative « 3 N » au cours de la 60e Session ordinaire ;

Préoccupée par le fait que, actuellement, l’insécurité alimentaire menace gravement le droit à l’alimentation de plus de 20 millions de personnes à travers le monde, notamment dans certains pays africains, et surtout dans certaines parties du Soudan du Sud, de la Somalie et du Nigéria, et d’autres pays du continent ;

Également préoccupée par le fait que les groupes les plus vulnérables, notamment les enfants, les femmes, les personnes âgées, les personnes handicapées, les réfugiés, les migrants et les personnes déplacées internes sont les plus touchés par l’insécurité alimentaire ; 

Notant que l’insécurité alimentaire et la famine dans ces pays sont dues à des crises politiques, à des conflits, à l’augmentation des prix des denrées alimentaires, à la dégradation de l’environnement et au phénomène naturel provoqué par les changements climatiques, et c’est encore le résultat de l’action humaine ;

La Commission :

1.       Exhorte les États Parties à :

a.     prendre les mesures législatives, administratives et autres mesures nécessaires pour garantir le droit de chacun de ne pas souffrir de la faim, de l’atténuer et de l’alléger, même lors de catastrophes naturelles ou autres ;

b.    mettre immédiatement un terme aux situations d’insécurité et aux conflits dans les pays concernés et qui affectent gravement les droits humains fondamentaux de leurs populations, en particulier le droit à l’alimentation;

c.     garantir l’accès sans entrave de la distribution de l’aide humanitaire aux personnes les plus vulnérables en raison de la précarité des conditions de sécurité dans lesquelles elles vivent ;

d.    garantir l’accessibilité à la nourriture par les membres des groupes vulnérables et défavorisés, grâce à des programmes spéciaux ;

e.     accorder la priorité et appuyer la gestion et l’utilisation la plus durable des ressources naturelles et autres pour l’alimentation aux niveaux national, local et domestique ;

f.     Participer à des efforts de coopération internationale et régionale et à des projets visant à garantir le droit de toute personne d’être à l’abri de la faim, notamment par une répartition équitable des vivres en fonction des besoins et des personnes vivant dans des situations d’insécurité ;

2.     Exhorte les États parties, l’Union africaine et les Communautés économiques régionales, à opérationnaliser et à mettre en œuvre, sans délai, tous les plans et stratégies visant à répondre aux urgences et aux besoins humanitaires des populations touchées par l’insécurité alimentaire et la famine ; y compris la Déclaration de Malabo sur la Croissance et la Transformation accélérées de l’Agriculture en Afrique pour une Prospérité partagée et de Meilleures Conditions de Vie, sa Stratégie de mise en œuvre et sa Feuille de route, ainsi que le Centre des meilleures pratiques pour la sécurité alimentaire de l’Union africaine ;

3.     Exhorte la Communauté internationale, en particulier le système des Nations Unies, à poursuivre ses efforts visant à fournir une assistance aux populations touchées par l’insécurité alimentaire ; et

4.     Appelle les acteurs non étatiques impliqués dans des conflits, à faciliter un accès sans entrave aux organisations humanitaires pour leur permettre d’apporter secours et aide alimentaire aux populations touchées.

Fait à Niamey, République du Niger, le 22 mai 2017