Résolution sur la Coopération entre la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et les ONG ayant le Statut d'Observateur auprès d'Elle - CADHP/Res.30(XXIV)98

partager

EXPOSE DES MOTIFS

1. L’article 45 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples définit le mandat de la Commission comme suit :

  1. Promouvoir les droits de l’homme;
  2. Assurer la protection des droits de l’homme;
  3. Interpréter les dispositions de la Charte;
  4. Exécuter toutes autres tâches qui lui seront confiées par l’OUA.

2. Dans l’accomplissement de sa mission et en vue d’accroître son efficacité, la Charte enjoint aussi à la Commission de coopérer avec d’autres partenaires dans le domaine des droits de l’homme. L’article 45 (1) (c) de la Charte prévoit en effet que la Commission coopère avec les autres institutions africaines et internationales qui s’intéressent à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des peuples. Conformément à l’esprit de cet article, la Commission Africaine a, depuis sa création, octroyé le statut d’observateur à 231 ONG des droits de l’homme.

3. L’octroi du statut d’observateur permet aux ONG de participer directement aux activités de la Commission. Les articles 75 et 76 du Règlement intérieur de la Commission Africaine veillent à leur participation aux sessions de la Commission en demandant au Secrétaire de la Commission d’informer toutes les ONG ayant le statut d’observateur des dates et de l’ordre du jour de la session à venir, au moins quatre semaines avant sa tenue. Ces ONG peuvent alors envoyer des délégués qui participent aux séances publiques de la Commission et de ses organes subsidiaires. Leurs contributions peuvent se faire oralement ou par écrit.

4. Outre la participation aux sessions, le Secrétariat doit envoyer à toutes les ONG ayant le statut d’observateur des documents tel que le Communiqué final des sessions et tous autres documents pertinents.

5. Par ailleurs, les ONG ayant le statut d’observateur auprès de la Commission Africaine peuvent présenter des “contre-rapports” sur la situation des droits de l’homme dans les pays de leur champ d'action, aux fins d'enrichir le dialogue entre la Commission et les représentants des Etats au moment de l’examen des rapports périodiques présentés par les gouvernements.

6. Au cours de sa 11ème session ordinaire tenue à Tunis, Tunisie, la Commission a réitéré sa volonté de collaborer avec les ONG pour la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples sur le continent. En vue d’encourager et de s’assurer de l’engagement réciproque des ONG partenaires, il a été décidé que toutes les ONG ayant le statut d’observateur auprès de la Commission devront présenter un rapport d’activités une fois tous les deux ans, à partir de la date d’octroi dudit statut. 

7. La disponibilité de la Commission à collaborer avec les ONG nationales, régionales et internationales des droits de l’homme a été une fois de plus réitérée et son importance soulignée dans le Plan d’action de Maurice 1996 - 2001, adopté par la 20ème session de la Commission. Ledit Plan propose la création d’un réseau d’échanges et de communications, plus particulièrement en ce qui concerne les ONG oeuvrant en Afrique, en vue d’établir un mécanisme approprié pour la promotion et la protection des droits de l’homme. L’objectif de ce réseau est de renforcer la coopération entre les ONG et la Commission. 

8. L’état actuel de la présentation des rapports d’activités par les ONG, conformément à la décision prise par la 11ème session de la Commission, n'est pas satisfaisant. Des 231 ONG ayant reçu le statut d’observateur jusqu’en octobre 1998, 197 devaient avoir présenté leurs rapports. De ce total, seules environ 26 ONG ont présenté tous leurs rapports à ce jour, 48 quelques rapports et 114 n’ont pas présenté de rapport. Il est donc indiscutable que les ONG ne se sont pas dans leur majorité acquittées de leurs obligations.

9. La Commission ne saurait continuer à octroyer le statut d’observateur aux ONG, sans être suffisamment informée de la nature du travail de certaines d’entre elles au niveau des droits de l’homme, ou de la manière dont elles contribuent à la promotion et à la protection des droits de l’homme en Afrique. L’objectif même d’avoir des ONG comme partenaires dans le développement d’une culture de la reconnaissance et du respect des droits de l’homme sur le continent africain serait par conséquent trahi. 

10. Il convient également de noter qu’il a été constaté que certaines ONG utilisent parfois le statut d’observateur pour collecter des fonds utilisés à des fins autres que la promotion et la protection des droits de l’homme. La crainte que certaines peuvent avoir changé leur mission ou ont choisi de se concentrer sur d’autres questions que les droits de l’homme devient alors légitime.

11. En vue de pallier cette situation, il est nécessaire que la Commission procède à la révision de ses critères d’octroi et de jouissance du statut d’observateur.

12. Lors de sa trente-quatrième session ordinaire, la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) a demandé à la Commission Africaine de revoir ses critères d’octroi et de jouissance du statut d’observateur aux ONG (AHG/Dec. 126(XXXIV) para.3).

En conséquence,

La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, réunie en sa 24ème Session Ordinaire à Banjul, (Gambie), du 22 au 31 octobre 1998,

Rappelant que la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, entrée en vigueur le 21 Octobre 1986, donne mandat à la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, en son article 45 (1) (c) de coopérer avec les autres institutions nationales et internationales s’intéressant à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des peuples;

Rappelant en outre la décision prise lors de sa Seconde Session Ordinaire tenue à Dakar (Sénégal) en février 1988 d’octroyer le statut d’observateur aux ONG travaillant dans le domaine des droits de l’homme en Afrique;

Rappelant également les dispositions des articles 75 et 76 du Règlement Intérieur de la Commission qui précisent les modalités de cette coopération;
Considérant le Plan d’Action de Maurice qui met l’accent sur l’importance de la coopération avec les ONG;

Convaincue que cette coopération offre aux ONG et à la Commission l’opportunité de collaborer étroitement, et reconnaissant le rôle important que celles-ci peuvent jouer dans la promotion et la protection des droits de l’homme en Afrique;

Consciente du fait qu’une bonne coopération requiert un engagement réciproque de la part de toutes les parties prenantes;

Ayant à l’esprit la décision prise à sa 11ème Session Ordinaire demandant à toutes les ONG ayant le statut d’observateur de présenter à la Commission, au moins tous les deux ans, un rapport sur leurs activités;

Convaincue que la présentation des rapports d’activités des ONG constitue un facteur de renforcement de la promotion et de la protection des droits de l’homme ainsi que de la coopération entre la Commission et les ONG;

Parfaitement convaincue que ces mêmes rapports constitueraient de précieux documents, non seulement pour la Commission, mais aussi pour le nombre sans cesse croissant de militants des droits de l’homme à travers le monde;

Considérant la décision de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OUA relative à révision des critères d’octroi du statut d’observateur aux ONG;

EXPRIME sa profonde satisfaction à l’égard des ONG ayant présenté régulièrement leurs rapports, ou assuré avec suivi la coopération avec la Commission ;

REGRETTE CEPENDANT que non seulement la majorité des ONG n’ont pas encore présenté leurs rapports à la date fixée mais ont même rompu tout contact avec la Commission;

DECIDE que les représentants des ONG qui ont présenté leur demande de statut d’observateur devront être présents pour un entretien pendant l’examen de leur demande;

DECIDE EGALEMENT de réviser, conformément à la décision AHG/Dec.126 (XXXIV) de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement, les critères d’obtention et de jouissance du statut d’observateur auprès de la Commission ;

INVITE les ONG qui ont le statut d’observateur auprès de la Commission à régulariser leur situation par la présentation de leurs rapports d’activités avant la 27ème Session Ordinaire de la Commission;

DECIDE ENFIN de retirer le statut d’observateur à toutes les ONG qui n’auront pas présenté leurs rapports d’activités à la 27ème Session Ordinaire de la Commission;

DEMANDE au Secrétaire de la Commission de présenter à chaque Session un rapport sur l’application de la présente résolution.