Namibia: Mission Groupe de travail Populations / communautés autochtones, 2005

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Le Groupe de travail de la Commission africaine sur les populations/communautés autochtones (Groupe de travail) a effectué une mission du 26 juillet au 5 août 2005 en République de Namibie. La délégation du Groupe de travail était constituée comme suit : le commissaire Andrew Ranganayi Chigovera, président du Groupe de travail sur les

populations/communautés autochtones;- Dr. Naomi Kipuri, membre du Groupe de travail. La mission était accompagnée par M. Robert Eno, juriste auprès du Secrétariat

de la Commission.

 

Objectif de la mission

 

L’objectif général de la mission était de remplir le mandat du Groupe de travail et de la Commission africaine. Les objectifs spécifiques de la mission étaient notamment les suivants :

rassembler des informations sur la situation des populations autochtones en Namibie;

amener le gouvernement de la République de Namibie à instaurer un dialogue sur la situation des populations autochtones en particulier, et sur ses relations avec la Commission africaine en général;

engager la société civile à remplir son rôle concernant la promotion et la protection des droits des populations autochtones en Namibie;

rendre visite et discuter avec les communautés autochtones pour comprendre les problèmes éventuels qui affectent la jouissance effective de leurs droits humains.

Education

Le gouvernement devrait faire en sorte que la politique d’éducation gratuite pour les élèves san soit respectée et mise en application.

Les enfants san qui échouent aux examens de la 10ème année devraient être soutenus par le gouvernement pour pouvoir redoubler et ceux qui abandonnent l’école devraient être encouragés à y retourner ou bénéficier d’une formation professionnelle répondant aux besoins de développement économique du pays. La formation professionnelle devrait également être introduite pour ceux qui abandonnent l’école en 10ème année et ceux qui ne peuvent continuer en 11ème année, pour éviter le gaspillage de ressources humaines.

Le gouvernement devrait assurer l’éducation en langue maternelle pour tous les élèves san jusqu’à la 3ème classe et former des professeurs san pour leur enseigner. Ceux qui abandonnent en 10ème année pourraient être formés pour être formateurs en langue maternelle dans leurs communautés.

Les plaintes au sujet de la discrimination et des stéréotypes véhiculés sur les San devraient être examinées sérieusement et sanctionnées. Le gouvernement devrait criminaliser la discrimination sous toutes ses formes, et plus particulièrement celle qui est fondée sur la race ou l’appartenance ethnique, conformément à l’article 4 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et à l’article 2 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

Formation

 

Le gouvernement devrait assurer une formation agricole aux San qui souhaitent s’engager dans l’agriculture et/ou l’élevage.

 

Droits fonciers

 

Les communautés san devraient recevoir une terre communautaire qu’elles puissent considérer comme la leur. Accès à la terre et sécurité de la terre sont, pour la population san, les éléments les plus cruciaux auxquels doit faire face le gouvernement de Namibie. La sécurité de la terre faciliterait considérablement les efforts du gouvernement, des ONG, et des communautés elles-mêmes pour surmonter leurs problèmes de santé, de marginalisation éducative et politique, et leurs nombreux problèmes sociaux. La protection et l’expansion des droits à la terre sont les interventions les plus fondamentales qui pourraient être faites au nom des San de Namibie pour assurer la pérennité de leur mode de vie.

 

Autorité traditionnelle et représentation politique

 

Les autorités traditionnelles san devraient également être reconnues par le gouvernement. Le fait de décider qu’un groupe ethnique particulier, tel que les Khwe du Caprivi occidental soit dirigé par un autre groupe ethnique, les Mbukushu, entraîne inévitablement des désordres voire des conflits. Le gouvernement devrait légiférer sur des mesures en faveur de la discrimination positive pour accroître la représentation des San et d’autres communautés autochtones, dans les structures de gestion des affaires publiques, telles que le Parlement, le Conseil national et les structures du gouvernement local. Un système de quota pourrait être adopté pour donner aux communautés autochtones un certain pourcentage de représentation dans ces structures.

 

Santé

 

Le gouvernement devrait créer des centres de santé plus proches des communautés san ou garantir que les centres de santé mobiles leur rendent visites régulièrement.

 

Emploi

 

Le gouvernement devrait encourager le développement des activités génératrices de revenus dans et autour des communautés san et accorder la priorité aux San dans le recrutement pour les postes vacants. Le gouvernement devrait faire en sorte que les lois sur le travail soient respectées afin que les San puissent bénéficier de conditions convenables de travail. 

 

Faim

Les communautés san devraient être encouragées à pratiquer l’agriculture de subsistance. Ceux qui vivent dans des parcs devraient se voir allouer des endroits sûrs où leurs cultures ne seraient pas détruites par les animaux et dans le cas où les cultures sont détruites, les communautés devraient avoir droit à une compensation de la part du gouvernement.

L’aide alimentaire et la lutte contre la sécheresse devraient être contrôlées de façon régulière et les responsables locaux devraient recevoir les moyens adéquats qui leur permettent de distribuer l’aide alimentaire aux communautés. La délégation a été étonnée d’apprendre que des tonnes de maïs avaient pourri dans un entrepôt de Katima Mulilo dans la région de Caprivi alors que les résidants san de la région venaient de passer des mois sans nourriture.

Les San devraient également recevoir des permis spéciaux de chasse qui leur permettent de chasser les animaux spécifiques qui pourraient compléter leur alimentation ou leurs revenus. Le gouvernement devrait considérer notamment l’établissement d’une réserve pour les Khwe de l’Ouest et de l’Est de la Caprivi, où les populations vivent déjà au milieu de la faune sauvage.

Discrimination

 

Le gouvernement devrait faire en sorte que les actes de discrimination raciale soient traités selon les instruments internationalement identifiés tels que la Charte africaine, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le gouvernement devrait également établir des programmes de sensibilisation pour les fonctionnaires sur les questions concernant l’anti-discrimination, en particulier en ce qui concerne les San et tout autre peuple autochtone. 

 

Reconnaissance des peuples autochtones

 

Le gouvernement devrait ratifier la convention 169 de l’OIT sur les peuples autochtones et tribaux. Le gouvernement devrait en plus inclure la reconnaissance et la protection des peuples autochtones dans sa Constitution et dans les politiques nationales qui affectent la vie des San et de tout autre peuple autochtone de Namibie. Si nécessaire, la discrimination positive devrait être considérée.

 

Soumission de rapports

 

La Commission africaine presse le gouvernement d’accélérer la soumission de ses rapports et d’y inclure les différentes questions relatives aux peuples autochtones du pays, ainsi que les mesures prises, ou en train d’être prises, pour mettre en oeuvre ces recommandations.

 

Aux ONG

 

Les ONG devraient continuer et intensifier leur soutien aux communautés autochtones dans le pays. Les ONG devraient également collaborer étroitement avec le gouvernement et les autres institutions pour améliorer le bien-être des communautés autochtones dans le pays.

 

A la communauté internationale

 

La communauté internationale, en particulier les donateurs, devrait soutenir les projets des san, spécialement les réserves, et assister le gouvernement namibien dans la fourniture des services adéquats aux communautés san.