Mozambique: Mission sur Prisons et conditions de détention, 2001

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Dr. Vera Chirwa, Rapporteure Spéciale sur les prisons et conditions de détention en Afrique s'est rendue au Mozambique du 4 au 14 avril 2001, pour y visiter des lieux de détention. Cette mission faisait suite à la première visite effectuée au Mozambique, du 14 au 24 décembre 1997, par le Prof. E.V.O. Dankwa, qui exerçait alors les fonctions de Rapporteur Spécial. 

 

Cette deuxième visite avait pour objectifs :

 

d'évaluer la mise en oeuvre des recommandations qui avaient été présentées par le Rapporteur Spécial en 1997 et les conditions de détention au Mozambique ;

de constater quelles ont été les répercussions des inondations d'avril 2000 sur les conditions de détention au Mozambique ;

d'exprimer la solidarité de la Commission africaine avec le Mozambique après les ravages causés par les inondations, et de promouvoir la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.

La Rapporteure Spéciale était accompagné de: Dr. Alpha Oumar Sankarella Diallo, médecin-chef des services pénitentiaires et de sécurité de Guinée; Audrey Pascaud, assistante, France: et Maria José Anastàcio, interprète, Portugal.

 

Recommendations

 

Recommandations générales

 

La rénovation des établissements pénitentiaires devrait être intensifiée, et la construction de prisons entreprise il y a des années devrait être terminée pour que les détenus puissent être transférés dans des locaux plus humains. Tout doit être mis en oeuvre pour que les détenus soient accueillis dans des locaux prévus à cet effet.

Des mesures visant la séparation des différentes catégories de détenus devraient être prises à mesure que diminue la surpopulation.

Les conditions de couchage devraient être aussi bonnes que possible pour tous les détenus et il faudrait faire en sorte que la literie et les locaux soient protégés et l'humidité.

La quantité et la qualité de la nourriture et des récipients à usage alimentaire devraient être améliorées.

Les douches, toilettes et salles d'eau devraient être remises en état et maintenues dans un état d'hygiène satisfaisant là où des problèmes ont été observés.

Davantage d'efforts devraient être déployés pour augmenter le nombre de lieux de travail et de formation professionnelle.

Une gamme plus vaste d'activités devrait âtre offerte aux personnes placées en détention provisoire pendant une période prolongée.

Davantage d'activités devraient être mises en place au sein des prisons (enseignement, sports et loisirs) à mesure que décroît la surpopulation.

La ventilation devrait être améliorée dans les établissements où des problèmes ont été observés.

Le régime des visites devrait être revu afin de garantir que les détenus peuvent recevoir des visites et que les familles n'ont pas à payer les gardiens.

Dans le cadre de la nouvelle politique pénitentiaire, il faudrait étudier la possibilité d'instaurer un mécanisme national de surveillance, indépendant, extérieur à l'administration pénitentiaire, qui pourrait visiter régulièrement les prisons et faire toutes les recommandations nécessaires.

Recommandations concernant la santé

 

Des médecins devraient être recrutés à plein temps dans les grands établissements pénitentiaires ; le personnel paramédical devrait être plus nombreux afin d'assurer une présence équivalente à celle d'un médecin à plein temps ; il faudrait le concours d'un nombre approprié d'infirmières diplômées ; les détenus devraient pouvoir facilement consulter un dentiste.

Les infras'tructures médicales existantes devraient être étendues ou leur rénovation intensifiée, et les établissements qui en sont dépourvus devraient en être dotés. Ces structures devraient comporter des lits où installer les patients en observation et des chambres d'isolement pour les malades contagieux. Les directeurs de prisons peuvent également donner l'ordre de loger dans une cellule spéciale les détenus atteints d'une maladie infectieuse, ou qui présentent un danger pour eux-mêmes ou pour les autres. Une telle mesure sera suspendue dès que la raison qui aura présidé à son instauration aura disparu. Si cette raison persiste, le détenu doit être transféré dans un hôpital public. Toutes mesures complémentaires doivent être prises de façon à assurer des soins médicaux 24 heures sur 24.

Les programmes d'information sur le sida devraient être développés. En outre, le dépistage volontaire devrait être encouragé chez les détenus, et des mesures appropriées mises en place pour assurer le soutien psychologique et médical des détenus qui décident de passer le test, de ceux qui sont séropositifs au VIH et de ceux qui sont déjà malades du sida.

Un poste de médecin chef des prisons devrait être créé. Il ferait partie intégrante de la direction nationale des établissements pénitentiaires au sein des ministères de la Justice et de l'Intérieur et aurait la responsabilité d'organiser des visites périodiques des prisons pour déterminer si les services médicaux y fonctionnent correctement.

Mineurs

 

Des unités spécialisées devraient être mises en place pour les mineurs ; en attendant il faudrait observer une stricte séparation des adultes et des mineurs.

Les jeunes placés en détention devraient bénéficier d'un régime complet d'activités éducatives, récréatives ou autres activités significatives, dont l'éducation physique constituerait un élément important. En outre, le personnel chargé des mineurs devrait être choisi avec soin et être capables de guider et de motiver des jeunes.

Les délinquants mineurs primaires ou coupables de petits délits devraient pouvoir éviter la prison ; à cette fin, des mesures de déjudiciarisation devraient être appliquées pour leur permettre de poursuivre leur scolarité. Le Mozambique devrait développer des échanges avec le Malawi en matière de justice pour mineurs.

Étrangers

 

Les personnes détenues en vertu de la législation relative aux étrangers devraient être séparées des autres détenus.

Les ambassades devraient être systématiquement informées de la détention d'un ressortissant de leur pays.

Des mesures adéquates devraient être prises pour minimiser les difficultés de communication entre le personnel pénitentiaire et les détenus étrangers. (il faudrait à ce titre rédiger et traduire dans les langues étrangères concernées une brochure décrivant la vie quotidienne et le régime de l'établissement, les droits et les responsabilités des détenus comme du personnel, la procédure permettant de déposer plainte et la procédure disciplinaire ; il faudrait également traduire les expressions les plus couramment utilisées entre détenus et membres du personnel.)

Il faudrait plus systématiquement procéder à l'expulsion ou au transfert des détenus qui acceptent ces mesures.

Femmes

 

Une priorité absolue devrait être accordée au transfèrement des détenus de sexe masculin de la prison pour femmes de Moatize et au transfèrement des détenues non séparées dans d'autres prisons du pays. La séparation des quartiers ou même des établissements devrait être strictement respectée.

Les femmes enceintes et les mères qui allaitent ne devraient pas être envoyées en prison.

Surpopulation

 

Une réelle priorité devrait être accordée aux mesures visant à réduire la surpopulation pénitentiaire au Mozambique.

Il faudrait définir un taux d'occupation maximal pour chaque lieu de détention.

Il faudrait promouvoir et mettre en oeuvre des peines avec sursis, des libérations conditionnelles, des remises de peine et des peines de travail d'intérêt général afin de réduire la population carcérale et de faciliter la réadaptation des délinquants.

La police devrait procéder plus rapidement aux interrogatoires afin que soient libérées de prison les personnes qui n'ont commis aucune infraction.

Il faudrait supprimer la détention provisoire illégale et libérer davantage de détenus sous caution.

Mesures disciplinaires 

Les mesures disciplinaires ne devraient pas constituer un traitement inhumain et dégradant.

 

ONG et autres organisations de la société civile

La collaboration avec la société civile devrait être intensifiée.

 

Personnel

Priorité devrait être accordée à l'éducation aux droits de l'homme pour les responsables et gardiens de tous grades, ainsi qu'à une formation interne pour le personnel pénitentiaire.

 

En outre, il ya quelques recommandations à l'égard des prisons et autres centres de détention spécifiques.