La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission) a tenu sa 27e Session Extraordinaire du 19 février au 04 mars 2020 à Banjul, en Gambie :
Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples conformément à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine) ;
Rappelant les dispositions des Articles 13 et 23 de la Charte africaine, qui prévoit le droit de tous les peuples à la paix et à la sécurité ;
Considérant la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance (Charte africaine de la démocratie) en ses Articles 3, 4 et 17 (1), (2) et (4), qui soulignent l'importance de la consolidation de la culture politique de changement de pouvoir sur le continent, fondée sur la tenue d'élections régulières, libres, justes et transparentes, conduites par des organes électoraux nationaux compétents, indépendants et impartiaux ;
Considérant l'importance d'élections et de référendums pacifiques, libres et transparents, et du respect des résultats électoraux pour le maintien de la paix et de la sécurité dans la région en particulier et sur le continent en général ;
Considérant la situation d’instabilité politique que connaît la République de Guinée-Bissau découlant de la contestation des résultats du 2e tour des élections présidentielles ;
Rappelant que la détérioration de la situation politique du pays se reflète dans le fonctionnement inadéquat des institutions de l'État et, plus directement, dans la jouissance des droits, des libertés et garanties par les citoyens, ainsi qu’un recul de la démocratie ;
Préoccupée par l’insécurité qui s’installe progressivement depuis décembre 2019 et qui s'est aggravée au cours du dernier week-end du mois de février 2020 ;
Profondément préoccupée par l’intervention des Forces Armées qui occupent les bâtiments des institutions de l’Etat et du Gouvernement, ce qui pourrait compromettre le fonctionnement régulier de ces institutions et avoir des conséquences sur l’exercice des droits et libertés des citoyens ;
Rappelant les décisions et communiqués pertinents adoptés par la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement d'Afrique, en ce qui concerne le respect des résultats des élections ;
Rappelant les recommandations dans les communiqués de presse et les appels lancés par le Conseil de Paix et de Sécurité, la CEDEAO, la Communautédes pays de langue portugaise (CPLP), ainsi que celles adoptées par les organes des Nations Unies, sur la nécessité du respect des institutions étatiques ;
Rappelant la Résolution ACHPR/Res.32(XXIV)98 sur le Processus de Paix en Guinée-Bissau ;
La Commission :
appelle les institutions souveraines de la Guinée-Bissau à respecter leurs obligations au titre de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, de l'Acte Constitutif de l'Union africaine et des autres instruments pertinents auxquels le pays est partie et :
demande instamment à tous les acteurs politiques de prendre toutes les mesures nécessaires pour s'abstenir de toute action qui pourrait compromettre l'achèvement de ce processus ;
demande en outre le respect des institutions étatiques qui sont les garantes des droits et libertés fondamentaux inscrits dans la Constitution de la République de Guinée-Bissau et dans les instruments régionaux et internationaux auxquels elle est partie ;
condamne les actions des forces militaires dans le pays qui interfèrent avec le fonctionnement normal des institutions étatiques ;
invite instamment tous les acteurs internationaux , régionaux et nationaux concernés à mettre leurs bons offices au service du peuple de Guinée-Bissau, afin que la crise qui s'est installée puisse être résolue et que la population puisse jouir de son droit à la paix et à la sécurité, qui sont extrêmement importants pour son développement économique, social et culturel ;
lance un appel à l'Union africaine, à la CEDEAO, à la CPLP, à la Pays Africains de Langue Officielle Portugaise (PALOP) et aux Nations unies pour qu'ils engagent un processus de stabilisation et de résolution pacifique de la crise.
La Commission suivra de près la situation des droits de l'homme dans le pays.
Fait à Banjul, République de Gambie, le 04 mars 2020