Résolution sur la Situation des droits de l'homme en République fédérale et démocratique d'Éthiopie - CADHP/Rés.429(LXV)2019

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La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission) réunie à l’occasion de sa 65ème Session ordinaire, qui s’est tenue du 21 octobre au 10 novembre 2019, à Banjul, en Gambie :

 

Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples en Afrique en application de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine) ;

 

Gardant à l’esprit les obligations de la République fédérale et démocratique d’Éthiopie en tant qu'État partie à la Charte africaine ;

 

Considérant l’article 1 de la Charte africaine, qui appelle les États parties à adopter des mesures législatives ou autres pour donner effet aux droits et libertés garantis par ladite Charte ;

 

Considérant également les obligations de l'Éthiopie en vertu de la Charte africaine, notamment de ses articles 2, 3, 4, 5, 8, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 22 et 23 ;

 

Rappelant, en outre, les Résolutions ACHPR/Res.92(XXXVIII)05, ACHPR/Res.218(LI) 2012 et ACHPR/Res. 356(LIX) 2016 sur la situation des droits de l’homme en Éthiopie ;

 

Préoccupée par la détérioration de la situation des droits de l’homme en Éthiopie du fait des conflits politiques ou sociaux ;

 

Également préoccupée par les menaces à la sûreté, à la sécurité, au bien-être et aux moyens d’existence des populations de certaines régions d’Éthiopie ;

 

Préoccupée par le fait que plus d’un million de personnes ont été déplacées en raison des conflits à Gedeo, région de Guji-ouest ; Jijiga, région de Somali ; Qemant, région d’Amhara ; Benishangul, région de Gumuz ; et dans les zones Est et Ouest de Wellega, région d’Oromia ;

 

Reconnaissant les mesures prises par le Gouvernement d’Éthiopie pour garantir le retour volontaire des personnes déplacées afin de favoriser le dialogue et de promouvoir l’unité et la réconciliation et ses efforts pour mettre un terme aux attaques ;

 

Préoccupée par les informations faisant état de l’escalade des tensions ethniques et religieuses et de ce que les acteurs non-étatiques utilisent les médias sociaux pour propager la haine et inciter à la violence ;

 

Vivement préoccupée par les attaques contre des lieux de culte qui ont fait des morts et des blessés parmi les fidèles ;

 

Profondément préoccupée par le fait que des personnes sont prises pour cible et tuées sur la base de leur identité ethnique ou religieuse et par le pillage et la destruction de biens privés et d’infrastructures publiques ; 

 

Insistant sur la nécessité d'une intervention humanitaire coordonnée pour faire en sorte que les personnes déplacées reçoivent une assistance adéquate et puissent, en temps voulu, rentrer chez elles de leur plein gré ou être intégrées dans de nouvelles zones d'installation tout en bénéficiant de l’accès au logement, aux écoles, aux soins de santé et à des moyens de subsistance ; 

 

Se félicitant des mesures positives prises par le Premier ministre S.E. Abiy Ahmed à partir d'avril 2018, notamment la levée de l'état d'urgence, la libération des détenus politiques, le retour des dissidents exilés dans le pays, la révision des principales lois, telles que celles sur les médias et la société civile, la conclusion d'un accord de paix historique avec l’État d'Érythrée et la nomination de femmes à des postes gouvernementaux clés ;

 

La Commission :

 

1.      Condamne la détérioration de la situation des droits de l’homme en Éthiopie, en particulier les conflits ethniques et religieux qui ont fait des morts et des blessés :

2.      Appelle le Gouvernement à :

  1. garantir la protection des droits de l’homme fondamentaux de tous les Éthiopiens, quelle que soit la région dans laquelle ils résident ;
  2. ouvrir des enquêtes promptes, impartiales et efficaces sur les violations des droits de l’homme résultant du conflit et à faire de telle sorte que les auteurs de ces violations répondent de leurs actes et fassent l’objet de sanctions appropriées, conformément aux normes internationales et régionales pertinentes ;
  3. prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sûreté, la sécurité, le bien-être et les moyens d’existence des populations déplacées de toutes les régions du pays ; et
  4. veiller à ce que les victimes des violations et leurs familles obtiennent une réparation complète et adéquate, y compris par la restitution, l'indemnisation, la réhabilitation, la satisfaction et les garanties de non-répétition.

3.      Appelle l’Union africaine et la communauté internationale à apporter son appui aux efforts du Gouvernement dans le domaine de l’assistance humanitaire et pour garantir la sûreté et la sécurité de sa population.

4.      Appelle les acteurs non-étatiques, en particulier les leaders et les membres des partis d'opposition, d'autres parties prenantes et la population en général, à s'abstenir de toute incitation à la violence et de tout acte de violence.

5.      Demande instamment à toutes les parties d’engager le dialogue afin d’instaurer une paix et une sécurité durables en Éthiopie.

 

    Fait à Banjul, Gambie, le 10 novembre 2019.