La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, réunie en sa 60ème Session ordinaire tenue à Niamey, Niger, du 8 au 22 mai 2017 ;
Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l’homme en Afrique, en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine) ;
Gardant à l’esprit sa Résolution CADHP/Rés.69(XXXV) 04 sur l’établissement du mandat du Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’homme en Afrique, et ses Résolutions CADHP/Rés.119 (XXXXII) 07, CADHP/Rés.196 (L) 11 et CADHP/Rés.273 (LV) 2014 et CADHP/Rés.336 (XIX) 2016, sur la situation des défenseurs des droits de l’homme en Afrique ;
Considérant la Résolution CADHP/Rés.196 (L) 11 qui reconnaît l'environnement difficile dans lequel les défenseurs des droits de l'homme en Afrique opèrent ;
Considérant la Résolution CADHP/Rés.245 (LIV) 13 relative aux défis auxquels les femmes défenseurs restent confrontées sur le continent africain eu égard à la reconnaissance, l’exercice et la jouissance de leurs droits ;
Considérant en outre les obligations des États parties en vertu de l'article 1 de la Charte africaine et des dispositions pertinentes découlant des instruments régionaux et internationaux des droits de l’homme, notamment celle de garantir la sécurité des personnes vivant sur leurs territoires, ainsi que les libertés de réunion, d’association, d’expression et d’accès à l’information des défenseurs des droits de l’homme et leur droit de prendre part à la gestion et à la conduite des affaires de leurs pays ;
Ayant à l'esprit les instruments de protection des défenseurs des droits de l’homme, en particulier la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, des groupes et des organes de la société dans la promotion et la protection des droits humains et libertés fondamentaux universellement reconnus (Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme des Nations Unies de 1998), la Déclaration et le Plan d'action de Grand Baie de 1999 et la Déclaration de Kigali de 2003 ;
Reconnaissant l’importance de la contribution des défenseurs des droits de l’homme à la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples, la démocratie, l’Etat de droit, la consolidation de la paix, le développement durable ;
Profondément préoccupée par la situation des défenseurs des droits de l’homme en Afrique et de leur famille, qui en raison de leurs activités, sont victimes des multiples violations, caractérisées entre autres par les arrestations arbitraires, des détentions illégales, des actes de torture, des traitements inhumains et dégradants, des exécutions extrajudiciaires et sommaires, des assassinats, des disparitions forcées, le refus du droit à un procès équitable, et l’accès aux soins médicaux, à l’alimentation, durant leur détention; et des contraintes à l’exil ;
Egalement préoccupée par la persistance des représailles perpétrées à l’encontre des Défenseurs qui collaborent avec les mécanismes des droits de l’homme ;
Notant avec satisfaction, l’initiative prise par certains Etat partie d’adopter des lois spécifiques de protection des défenseurs des droits de l’homme conforment aux standards régionaux et internationaux et des mesures pour leurs mise en œuvre ;
Rappelant que les Etats parties ont reconnu dans la Déclaration de Kigali de 2003 “le rôle important que jouent les défenseurs des droits de l’homme dans la promotion et la protection des droits de l’homme en Afrique”;
Consciente du fait que depuis la mise en place du mandat du Rapporteur Spécial sur les défenseurs des droits de l’homme en Afrique, de nombreuses avancées ont été constatées notamment ; la mise en place des réseaux sous régionaux des défenseurs des droits humains, l’adoption du rapport sur les femmes défenseures et l’étude sur la liberté d’association ;
Préoccupée par les nouveaux défis, notamment l’intensification des menaces contre les défenseurs travaillant sur des thématiques, entre autre le droit à la santé, la lutte contre le VIH/SIDA, la santé de la reproduction, les questions liées à l’orientation sexuelle et l’identité du genre, les industries extractives, la promotion de la démocratie et de la paix, les femmes défenseures quelque soit leur domaine d’activités ;
Préoccupée par la restriction de l’espace civique du fait de l’adoption ou de la révision des lois dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, particulièrement en ce qui concerne la liberté d’association; de manifestations, d’expression et d’accès à l’information, piliers fondamentaux du travail des défenseurs des droits de l’homme ;
Convaincu que les femmes défenseures des droits de l’homme font face à des obstacles et risques particuliers dans la conduite de leurs activités de défense des droits humains ;
Consciente que la Déclaration de Grand Baie de 1999, demande aux Etats parties de “prendre les dispositions nécessaires pour assurer la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’homme en Afrique” ;
Notant la Déclaration de Cotonou issue du 2ème Colloque International sur la situation des Défenseurs des Droits de l’Homme en Afrique de mars 2017 ;
La Commission exhorte tous les Etats parties à :
1. S’acquitter de leurs obligations telles que stipulées dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et dans tous les instruments pertinents des droits de l’homme qu’ils ont ratifiés ;
2. Prendre toutes les mesures nécessaires en vue d’assurer à tous les défenseurs des droits de l’homme un environnement propice à l’exercice de leurs activités sans crainte d’actes de violence, de menaces, d’intimidation et de représailles, de discrimination, d’oppression de harcèlement de la part d’acteurs étatiques ou non étatiques ;
3. Prendre des mesures législatives spécifiques visant à reconnaître le statut
du défenseur des droits de l’homme, protéger leurs droits, ceux de leurs collaborateurs, proches et familles, y compris les femmes défenseurs des droits de l’homme, les défenseurs travaillant sur les questions liées aux industries extractives, la santé et le VIH /SIDA, la santé de la reproduction, l’orientation sexuelle et l’identité du genre, la promotion de la paix et de la démocratie, la lutte contre le terrorisme et le respect des droits humains ;
4. S’abstenir d’utiliser la lutte antiterroriste comme prétexte pour restreindre les libertés fondamentales, notamment la liberté de religion et de conscience, d’expression, d’association, de réunion et de mouvement ;
5. Adopter des lois spécifiques conformément à la déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’homme, du plan d’action de la Grande Baie et de Kigali et prendre des mesures nécessaires à leur mise en œuvre.
Fait à Niamey, République du Niger, le 22 Mai 2017