Communiqué de presse sur les violences policières survenues dernièrement en République du Sénégal

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Communiqué de presse sur les violences policières survenues dernièrement en République du Senegal

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission africaine) suit avec une vive préoccupation les informations faisant état d’une intensification des violences policières au Sénégal, marquée notamment par un usage excessif de la force par les agents de sécurité, ayant entraîné la mort de trois personnes à Rosso et à Dakar.

Selon les données reçues, un jeune homme est décédé à la fin du mois de juin à Rosso, dans le nord du pays, à la suite d’une opération menée par les forces de sécurité. Quelques jours plus tard, dans le quartier de Cambérène à Dakar, deux autres jeunes ont également perdu la vie dans des circonstances similaires. Bien que les faits demeurent encore partiellement éclaircis, les premiers éléments semblent mettre directement en cause l’intervention des forces de l’ordre.

La Commission condamne fermement tout recours abusif à la force, qu’elle considère comme une atteinte grave du droit à la vie et à la sécurité des personnes, tels que garantis par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte africaine). Elle exprime ses sincères condoléances aux familles endeuillées.

La Commission déplore également l’usage d’un jeune homme comme bouclier humain par des agents de police lors des affrontements survenus à la suite de ces événements tragiques. 

De tels actes constituent des violations flagrantes de plusieurs dispositions de la Charte africaine, notamment l’article 4, qui consacre le droit à la vie, et l’article 5, qui garantit le respect de la dignité inhérente à la personne humaine, ainsi que l’interdiction de toutes formes d’exploitation et d'avilissement de l'homme.

La Commission africaine salue néanmoins la réaction de Son Excellence Monsieur Bassirou Diomaye Faye, Président de la République du Sénégal, qui a ordonné l’ouverture d’enquêtes approfondies, impartiales et rigoureuses afin de faire la lumière sur ces incidents, d’établir les responsabilités à tous les niveaux, et de garantir l’application de sanctions appropriées.

La Commission soutient cette démarche et rappelle que les Lignes directrices sur les conditions d’arrestation, de garde à vue et de détention provisoire en Afrique (Lignes directrices de Luanda, 2014)  énoncent clairement que le recours à la force et aux armes à feu ne peut être envisagé qu’en dernier recours, dans des conditions strictement nécessaires à une arrestation, et que les États sont tenus d’instaurer des normes de conduite individuelles applicables aux agents, d’assurer leur responsabilité en cas de manquement, et de prévoir des sanctions disciplinaires et pénales conformes aux normes procédurales internationales.

En ce sens, la Commission invite l’État du Sénégal en plus des enquêtes en cours, qu’elle encourage à mener de façon rapide, indépendante, impartiale et effective, de mettre en place des mesures de garanties de non répétition et d’organiser la formation des forces de police et toutes unités de maintien de la l’ordre sur la base des principes énoncés dans des Lignes directrices de Luanda, afin de prévenir la survenance de tels actes dans le futur.

 

https://achpr.au.int/fr/node/853, 22

Banjul le 8 Juillet 2025

Honorable Commissaire Selma SASSI-SAFER
Commissaire en charge de la situation des droits de l’homme en République du Sénégal

Honorable Commissaire Rémy Ngoy Lumbu
 Rapporteur Spécial sur les défenseurs des droits de l’homme et Point focal sur les représailles en Afrique