Communiqué de presse sur le drame des migrants au Royaume du Maroc

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La Commission Africaine des droits de l’homme et des Peuples (la Commission) suit avec intérêt la situation des droits de l’homme sur le continent. Tout en reconnaissant que le Royaume du Maroc n’est pas encore partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ( la Charte), la Commission note avec profonde consternation la mort de plus d’une vingtaine de migrants africains et l’existence d’un grand nombre de blessés, tous ressortissants de pays africains parties à cette Charte, au cours des évènements du 24 juin 2022, lors d’une tentative de passage forcé vers l’enclave Espagnole de Melilla faisant frontière avec la ville de Nador située au nord-est du territoire marocain.

 

La Commission, tout en notant cette tentative de traversée forcée et illégale de la frontière entre le Maroc et l’Espagne, déplore le recours excessif de la force qu’aurait utilisée la police des frontières en vue de repousser ces migrants. Elle est préoccupée par l’arrestation et la détention de nombreux migrants à la suite de cette malheureuse tragédie.

 

La Commission rappelle l’importance de respecter les principes fondamentaux du droit international des droits de l’homme ainsi que les considérations élémentaires d’humanité (l’Ubuntu) qui consacrent le respect, en toute circonstance, de la dignité inhérente à la personne humaine, la prohibition de toute forme de traitements cruels, inhumains ou dégradants et le droit à un procès équitable, notamment lorsqu’il s’agit des migrants exposés à de multiples vulnérabilités, aussi bien sur le territoire des Etats d’accueil ou de transit.   

 

La Commission souligne que la plupart des flux migratoires ont pour cause la mauvaise gouvernance politique, économique, sociale, et le non-respect des droits de l’homme dans les pays d’origine, lesquels poussent les populations africaines à la recherche d’une vie meilleure, souvent au péril de leurs vies. Elle invite à cet effet les Etats membres de l’Union africaine à tout mettre en œuvre pour apporter des solutions pérennes à la situation des migrants en Afrique en vue d’éradiquer le phénomène de l’immigration illégale et irrégulière et ce, conformément au cadre de politique migratoire révisé de l’Union Africaine et son plan d’action (2018-2030).

 

Elle rappelle les engagements pris par les Etats africains conjointement avec les pays de l’Union Européenne, lors des différentes Conférences, notamment la Conférence de Malte de 2015 sur la migration, de renforcer la protection des migrants, de lutter contre le trafic d’être humain et de coopérer sur la question du retour et de la réinstallation des migrants.

 

Elle rappelle également d’autres ressources pertinentes en la matière notamment la Déclaration de New York adoptée à l’unanimité le 19 septembre 2016 par l’Assemblée Générale de l’ONU ainsi que le Pacte Mondial pour les Migrations sûres, ordonnées et régulières dit « Pacte de Marrakech » adopté par la même Assemblée le 19 décembre 2018.

 

La Commission réitère l’importance d’une coopération et d’une solidarité inter-pays entre les pays d’origine, de transit et de destination des migrants dans le strict respect des droits de l’homme.

 

La Commission présente enfin ses sincères condoléances aux familles des victimes et appelle  à l’ouverture d’une enquête nationale indépendante pour faire la lumière sur ces évènements  et établir les responsabilités.

 

Fait à Banjul, en Gambie, le 30 juin 2022

 

Pour la Commission

Honorable Commissaire Rémy Ngoy Lumbu

Président