La Rapporteure Spéciale sur les Défenseurs des Droits de l’Homme en Afrique (la Rapporteure Spéciale) exprime sa préoccupation suite à la condamnation, par défaut, de 25 manifestants dont Ahmed Abdel Rahman, Wael Metwally, et le défenseur des droits humains et bloggeur Alaa Abd El Fattah, à 15 ans de prison et à une amande ainsi qu’à une surveillance policière de cinq ans à compter de leur future libération.
D’après les informations concordantes de sources fiables, les manifestants auraient été condamnés de façon abusive du chef de blocage de la route, de rassemblement illégal, de manifestation avec armes, d’attaque contre un fonctionnaire public et de vol de son modem.
La Rapporteure Spéciale est préoccupée par la multiplication des arrestations de manifestants dès l’entrée en vigueur de la loi sur les manifestations publiques en novembre 2013 ainsi que l’application de lourdes peines à l’encontre des manifestants.
La Rapporteure Spéciale déplore le fait que cette loi exige des organisateurs d’une manifestation publique l’obtention d’une autorisation préalable et leur enjoint de faire connaître aux autorités publiques les slogans qui seront scandés. Ce qui donne un pouvoir discrétionnaire à l’autorité de décider du sort des manifestants pacifiques, et ceci en violation des normes internationales en matière de liberté de manifestation.
La Rapporteure Spéciale rappelle aux autorités égyptiennes qu’aux termes de l’article 11 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, les restrictions au libre rassemblement doivent cumulativement être nécessaires, édictées par la loi et viser entre autres la protection de la sécurité nationale, la sureté d’autrui, de la santé ou des droits et libertés des personnes.
La Rapporteure Spéciale rappelle en outre le contenu de la Résolution CADHP/Rés.28(LV) 2014 de la Commission africaine sur le droit à la manifestation pacifique qui appelle les Etats parties à veiller à ce que les législations régissant l'exercice des droits fondamentaux de l’homme soient en pleine conformité avec les normes régionales et internationales pertinentes.
La Rapporteure Spéciale observe que le pouvoir discrétionnaire confiée à l’autorité administrative en cette espèce est contraire aux normes internationales et appelle le gouvernement égyptien à revoir ces restrictions en vue de se conformer à ses engagements internationaux.
La Rapporteure demande aux autorités égyptiennes de s’assurer que toutes les personnes inculpées en vertu de la loi précitée bénéficient du droit à un procès équitable et que les personnes condamnées en violation des engagements internationaux pris par la République Arabe d’Egypte soient remises en liberté.
La Rapporteure Spéciale appelle en outre le Gouvernement de la République Arabe d’Egypte à prendre les mesures idoines et urgentes en vue de la protection des défenseurs des droits de l’homme et de faire respecter le droit de réunion et de manifestation.
La Rapporteure Spéciale exprime enfin sa constante disponibilité et affirme son engagement à travailler avec le Gouvernement de la République Arabe d’Egypte et les autres parties prenantes sur toute question relative aux droits des défenseurs des droits de l’homme.
Banjul, 20 juin 2014