Communiqué Final de la 11ème Session Ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples

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1. La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples a tenu sa 11ème session ordinaire du 2 au 9 mars 1992 à Tunis, en Tunisie, à l’invitation du Gouvernement tunisien, sous la Présidence du Dr Ibrahim Ali Badawi El-Sheikh

2. Cette session, qui se tient à la veille de la Conférence Africaine préparatoire sur les Droits de l’Homme organisée par les Nations Unies, et prévues à Tunis en novembre 1992, a été précédée par la réunion d’un atelier de travail organisé dans la capitale tunisienne du 29 février au 1er Mars 1992 par la Commission Internationale de Juristes, sur le thème : participation des organisations non-gouvernementales aux travaux de la Commission.

3. Au moment où l’Afrique se félicite d’avoir un de ses illustres fils, à la tête du secrétariat général de l’Organisation des Nations-Unies, au moment où un vent de démocratisation souffle sur l’ensemble du continent et où l’Afrique vient d’entamer le processus de démantèlement du système d’apartheid en vigueur en Afrique du Sud, la Commission a adopté un programme d’action détaillé et réaffirmé sa détermination à assurer la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples en Afrique.

4. Ont pris part à cette session les Commissaires ci-après :

  • Dr Ibrahim A. Badawi EL-SHEIKH
  • M. Alioune Blondin Bèye
  • M. Ali Mahmoud Buhedma
  • M. Sourahata B.S. Janneh, vice-président
  • M. Robert H. Kisanga
  • M. Moleleki D. Mokama
  • M. Youssoupha Ndiaye
  • M. Isaac Nguema
  • Prof. U.O. Umozurike

5. La Commission a salué la mémoire de feu le commissaire Mubanga-Chipoya et a observé une minute de silence.

6. La séance d’ouverture s’est déroulée en présence de Son Excellence le Dr Hamed Karoui, premier Ministre, représentant le Président de la République de Tunisie, Monsieur Zine El Abidine Ben Ali ainsi que des personnalités suivantes :

  • Des Ministres et dignitaires de l’Etat hôte
  • Des membres de la Commission
  • Des ambassadeurs et Chefs des missions diplomatiques
  • L’ambassadeur Ahmed Haggag, Secrétaire Général Adjoint de l’OUA
  • Des représentants d’ONG internationales et africaines
  • Des représentants de la presse et des invités.

7. Dans son allocution de bienvenue, le Dr Badawi El-Sheikh, après avoir rendu hommage à la Tunisie pour sa politique soutenue en matière de droits de l’homme a donné un aperçu des activités de la Commission et mis en relief l’importance de cette rencontre dont l’ordre du jour comporte notamment l’examen des rapports périodiques de l’Egypte, du Togo, de la Tanzanie et du Nigeria, d’une part, l’étude du droit à la liberté d’association et du droit au recours à la justice d’autre part. Dans son discours d’ouverture des travaux de la 11ème session, le Premier Ministre, Monsieur Hamed Karoui a souligné d’une part, l’engagement de l’ère nouvelle au profit des droits de l’homme, des aspirations et les justes causes africaines , d’autre part, la nécessité de mettre en place un nouvel ordre économique international fondé sur la justice, l’égalité entre les peuples et l’entraide multiforme entre pays africains, enfin l’intensité des efforts accomplis par le gouvernement en faveur de la promotion et la protection des droits de l’homme

8. La Commission a élu le commissaire Sourahata Baboucar Semega Janneh en qualité de vice-président de la Commission en remplacement de feu le Commissaire Mubanga-Chipoya.

9. Les travaux de la Commission ont été consacrés notamment aux quatre principales questions suivantes :
a) Adoption d’un programme de promotion
b) Examen des rapports périodiques
c) Examen des plaintes
d) Etudes de deux articles de la Charte, à savoir le droit à la liberté d’association et le droit aux voies de recours (art. 7-10)

10. Au début de ses travaux, la Commission a enregistré, d’une part, un certain nombre de déclarations, d’autres part, les conclusions de l’atelier organisé par le forum des ONG

11. Dans leurs interventions, les représentants des organisations gouvernementales et non gouvernementales ont mis l’accent sur la volonté de leurs organisations d’apporter leur soutien et leur aide au fonctionnement de la Commission pour la promotion et la protection des Droits de l’Homme en Afrique. Telles ont été le sens et la signification des déclarations faites notamment par :
- M. Falk, représentant du Secrétaire Général des Nations Unies chargé des Droits de l’Homme
- Mademoiselle Catherine Cissé, pour le compte de la Commission des Communautés Européennes
- Le représentant du gouvernement suédois
- Monsieur Nasr S.N. Ramadan, représentant le gouvernement tunisien
- Monsieur Farouk Abu Eissa, Président de l’Union des Avocats Arabes
- Monsieur Philip Amoah, représentant de la Commission Internationale des Juristes
- Monsieur Christopher Hall, représentant de l’association Amnesty International
- Monsieur Fayek, secrétaire général de l’Organisation Arabe pour les Droits de l’Homme.
- Monsieur Zouhir Chelli, délégué honoraire pour la Tunisie du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés.

12. En présentant le rapport de l’atelier de travail organisé par la Commission Internationale de Juriste, Madame Mona ABDALLAH RISHMAWI a tout d’abord réitéré les conclusions et recommandations issues de l’atelier organisé du 5 au 7 octobre 1992 à Banjul (Gambie) concernant l’organisation et le fonctionnement de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, avant de faire des Recommandations sur le contenu du droit à la liberté d’association et du droit de recours à la justice, prévus aux articles 10 et 7 de la Charte Africaine des droits de l’Homme. Selon Madame Mona Abdalla Rishmawi, l’atelier a examiné les dispositions de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et notamment celles des articles susvisés concernant le droit à la liberté d’association et le droit de recours à la justice afin que le contenu de ces droits soit conforme aux autres instruments internationaux.

13. Abordant son programme d’action et de nouvelles méthodes de travail, la Commission a établi un calendrier de séminaire et de colloques qu’elle se propose d’organiser, soit en coopération avec d’autres organisations internationales, soit seule. C’est ainsi que la Commission a réitéré sa volonté d’organiser :

  • un séminaire sur la mise en œuvre de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples dans les législations africaines (Banjul).
  • un séminaire sur les réfugiés et les personnes déplacées en coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés.
  • un séminaire sur le rôle des femmes dans le développement.
  • un séminaire sur l’éducation informelle et la participation populaire (en coopération avec l’UNESCO et la Commission Economique pour l’Afrique)
  • un séminaire sur l’Afrique de Sud post-apartheid (en coopération avec l’UNESCO)

S’agissant des méthodes de travail, la Commission a décidé de :

  • la création d’un centre d’Information et de Documentation au sein du Secrétariat de la Commission ;
  • l’adoption d’un organigramme des services du Secrétariat et la nécessité de procéder au recrutement du personnel correspondant ;
  • la publication d’un bulletin de presse concernant les activités de la Commission des Droits de l’homme en Afrique ;
  • la publication des rapports annuels et autres documents de la Commission y compris les rapports périodiques.

14. Au cours de ses délibérations, la Commission a eu à examiner les rapports initiaux soumis par la République Arabe d’Egypte et la République de Tanzanie. L’examen de ces rapports a pour objet d’apprécier les mesures d’ordre législatifs ou autres, prises par les Etats en vue de donner effet aux droits et libertés reconnus et garantis par la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

15. La Commission s’est félicité de l’utilité et de l’opportunité du dialogue constructif qui s’est établi entre la Commission et les Etats concernés, et a remercié les Gouvernements de la République Arabe d’Egypte et de la République de Tanzanie pour leurs rapports et pour leur volonté de coopérer avec la Commission.

16. Elle a lancé un appel aux Etats n’ayant pas encore soumis leurs rapports à le faire dans les plus brefs délais.

17. Au chapitre des plaintes concernant l’allégation de violation des droits de l’homme dans quelques pays africains, la Commission a enregistré cinq communications nouvelles, tandis que 22 communications sont encore pendantes à la date de la session. La Commission , après avoir pris les décisions appropriées dans chaque cas, a regretté la lenteur administrative qui retarde dans nombre de cas la procédure d’instruction des affaires.

18. Au titre des activités de promotion, outre celles qui figurent dans le programme d’action adopté par la Commission, celle-ci soumettra à la conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OUA qui se tiendra à Dakar en Juin-Juillet 1992 un certain nombre de projets de résolutions concernant notamment la ratification de la Charte, l’action de promotion et les rapports des Etats. En outre, la Commission a adopté deux résolutions, l’une sur le droit à la liberté d’association, l’autre sur le droit de recours. En ce qui concerne le droit de recours à la justice, la Commission a lancé un appel aux Etats pour qu’ils donnent effet à l’exercice de ce droit qui comprend :

  • le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements et coutumes en vigueur ;
  • le droit à la présomption d’innocence jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie par une juridiction compétente ;
  • le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix
  • le droit d’être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale.

19. Au cours de cette session, la Commission a accordé le statut d’observateur aux organisations non gouvernementales suivantes :

  • Institut des Droits de l’Homme de L’Université Catholique de Lyon
  • Ligue Bissao-Guineenne des Droits de l’Homme
  • International Society for Human Rights – The Gambia Group
  • Syndicat National de la Presse Marocaine
  • Lawyers for Human Rights
  • Observatoire Panafricain de la Democratie
  • International Centre Against Censorship
  • Comite National des Droits de l’Homme (Congo)
  • Commission Beninoise des Droits de l’Homme
  • Federation des Juristes Africaines
  • International Centre for Human Rights and Democratic Development

20. Elle a accordé aussi le statut d’observateur au Comité International de la Croix Rouge

21. Avant de terminer l’examen de son ordre du jour, la Commission a adopté le projet de son 5ème rapport annuel qui sera soumis à la prochaine session de la conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OUA.

22. La Commission a enregistré avec satisfaction l’invitation que le gouvernement de la République du Mali lui a adressée pour assister, en qualité d’observateur, aux élections présidentielles du 12 avril et 26 avril 1992.

23. La Commission a exprimé ses chaleureux remerciements à Son Excellence Monsieur Zine El Abidine Ben Ali Président de la République de Tunisie, au Gouvernement et au peuple tunisien de l’accueil et de l’hospitalité qui lui ont été réservés et pour l’appui donné au travail de la Commission, appui qui a permis le succès des travaux.

24. La prochaine session se tiendra du 12 au 21 octobre 1992.

Fait à Tunis, le 9 mars 1992.