La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Commission) a appris avec consternation le massacre d’au moins 48 civils parmi les manifestants contre la Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation en République Démocratique du Congo (MONUSCO), ce mardi 30 août 2023 à Goma en République Démocratique du Congo (RDC). Il est rapporté qu’un policier aurait également perdu la vie au cours de ces évènements. De nombreux blessés sont à déplorer et des arrestations de dizaines de personnes effectuées.
La narration de ces malheureux faits, suppose, selon plusieurs sources concordantes, qu’à l’initiative de la secte « Foi naturelle judaïque et messianique vers les nations », une manifestation contre la présence de la MONUSCO dans la veine de précédentes actions similaires, aurait été interdite et que les autorités sécuritaires auraient ordonné aux forces de l’ordre de garantir cette interdiction. Il s’en serait suivi une répression dont le bilan humain est ci-dessus indiqué.
La Commission s’associe au deuil des familles éplorées à qui elle présente ses condoléances les plus sincères. Elle souhaite prompt rétablissement aux blessés.
Le lourd bilan humain en cause peut être qualifié valablement d’atteinte grave et massive aux droits les plus fondamentaux protégés par la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, dont la Commission est la garante. Le droit à la vie et à l’intégrité physique et morale.
La Commission dénonce et condamne fermement en conséquence toutes les circonstances factuelles et juridiques ayant abouti à ces violations. Elle prend acte de la réaction du Gouvernement de la RDC relativement à ces événements ; notamment, l'enquête dite ouverte sur les faits en question à l'Auditorat Militaire de la garnison de Goma. Elle rappelle à ce propos, l’obligation d’assurer la jouissance des droits en question à ses populations, qui pèse sur l'État, conformément à ses engagements internationaux.
En outre, elle en appelle au traitement des personnes détenues selon les standards internationaux applicables, notamment les Lignes directrices de la Commission sur les conditions d’arrestation, de garde à vue et de détention provisoire en Afrique (2015) et l’Ensemble de principes de la Commission pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement (2012).
Par ailleurs et afin d’éviter la répétition de tels faits, la Commission invite le Gouvernement de la RDC à se conformer à ses Lignes directrices pour le maintien de l’ordre par les agents chargés de l’application des lois lors des réunions en Afrique (2017), et à ses Principes de base sur le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois (2012). Le Gouvernement de la RDC est appelé dans la même veine, à se référer et mettre strictement en œuvre les recommandations contenues dans l’Étude de la Commission sur l’usage de la force par les responsables de l’application des lois en Afrique, de même que dans les Principes de base des Nations Unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois.
Le Commissaire Rapporteur-pays demeure saisi de l’évolution de ce cas et de la situation générale des Droits de l’Homme dans le pays.
Fait à Banjul le 1er septembre 2023
Honorable Marie Louise Abomo
Rapporteur-Pays sur la situation des droits de l’homme en République Démocratique du Congo
Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.