85eme SESSION ORDINAIRE DE LA COMMISSION AFRICAINE DES DROITS
DE L’HOMME ET DES PEUPLES
RAPPORT D’INTERSESSIONS
Présenté par
Honorable Commissaire Rémy Ngoy Lumbu
Commissaire et Rapporteur Spécial sur les Défenseurs des Droits de l’Homme
Point Focal sur les Représailles en Afrique
Point Focal sur l’indépendance judiciaire en Afrique
Rapporteur pays : Algérie, Cameroun, Cote d’Ivoire, Mali et Togo.
Banjul, 07 au 30 Octobre 2025
INTRODUCTION
1. Le présent rapport est soumis conformément aux articles 25(3) et 64 du Règlement Intérieur (2020) de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission) et rend compte des activités de promotion et de protection des droits de l’homme entreprises au cours de la période d’intersession, depuis la 83ème Session Ordinaire tenue du 02 au 22 mai 2025 à Banjul, Gambie.
2. Ce rapport est subdivisé en cinq parties essentielles. En la première, il rend compte des activités menées en notre qualité de point focal sur l’indépendance judiciaire, conformément à la Résolution CADHP/Res.570 (LXXVII) 2023 sur la nomination d’un point focal sur l'indépendance judiciaire en Afrique, adoptée par la Commission lors de sa 77ème Session Ordinaire.
3. En la deuxième, il traite des initiatives menées en qualité de Rapporteur pays en charge du suivi de la situation des droits de l’homme en Algérie, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Mali, et au Togo.
4. En la troisième, il indique les activités menées en vertu du mandat de Rapporteur Spécial sur les défenseurs des droits de l’homme et Point focal sur les représailles en Afrique (le Rapporteur spécial) créé par la Résolution CADHP/69(XXXV)04 de la Commission. Ce mandat a été étendu sur la question des représailles par la Résolution CADHP/Res.273 (LV)2014. Il a été renouvelé en vertu des Résolutions CADHP/Rés.83(XXXVIII)05,CADHP/Rés.125(XXXXII)07,CADHP/Rés.149(XLVI)09, CADHP/Rés.202(L)2011, CADHP/Rés.248(LIV)2013, CADHP/Rés.315(LVII)2015, CADHP/Rés.381(LXI)2017, CADHP/Rés.425 (LXV) 2019, CADHP/Rés.451 (LXVI) 2020 et CADHP/Rés.526 (LXXIII) 2022.
5. La quatrième partie présente une brève analyse de la situation des défenseurs des droits de l’homme, de la liberté d’association et de réunion. Il rend également compte de mes activités en qualité de Point Focal sur les représailles en Afrique.
6. La dernière partie comporte des recommandations, à l’endroit des différents acteurs qui interagissent avec le mandat du Rapporteur Spécial.
PARTIE I : ACTIVITES AU TITRE DE POINT FOCAL SUR L’INDEPENDANCE JUDICIAIRE
7. En ma qualité de point focal sur l’indépendance judiciaire, conformément à la Résolution CADHP/Res.570 (LXXVII) 2023 sur la nomination d’un point focal sur l'indépendance judiciaire en Afrique, adoptée par la Commission lors de sa 77ème Session Ordinaire, j’ai suivi avec attention la situation de l’indépendance judiciaire en Afrique. A cet effet, quelques initiatives et activités ont été menées, notamment (A) l’envoi d’appel urgent, et (B) la Réunion de lancement de l'équipe technique chargée de la rédaction d’une observation générale sur l'article 26 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (Charte africaine).. Cette partie présentera également un bref aperçu de la situation de l’indépendance judiciaire en Afrique (C).
A. Lettre d’Appel Urgent sur les allégations concernant la dissolution des syndicats du secteur de la justice et la radiation de deux magistrats dirigeants du Syndicat Autonome des Magistrats au Niger
8. Ensemble avec la Commissaire en charge du suivi de la situation des droits de l’homme au Niger, l’Honorable Commissaire Selma Sassi-Safer, et la Rapporteure spéciale sur la liberté d'expression et l'accès à l'information en Afrique, l’Honorable Commissaire Ourveena Geereesha Topsy-Sonoo, nous avons envoyé le 27 août 2025, une lettre d’appel urgent conjoint aux Hautes autorités du Niger. A cette occasion, nous avons exprimé notre préoccupation sur les rapports relatifs à la dissolution des syndicats du secteur de la justice et la radiation de deux magistrats dirigeants du Syndicat Autonome des Magistrats au Niger (SAMAN).
9. À cet égard, nous avons notamment appelé les autorités nigériennes à prendre toutes les mesures nécessaires afin de garantir pleinement l’indépendance du pouvoir judiciaire, ainsi que la protection effective des syndicalistes, conformément aux obligations régionales en matière de droits de l’homme auxquelles le Niger a souscrit.
B. Réunion de lancement de l'équipe technique chargée de rédiger une observation générale sur l'article 26 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.
10. J’ai participé à la réunion de lancement de l'équipe technique chargée de la rédaction d'une Observation Générale sur l'article 26 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples tenue du 29 au 30 mai 2025 à Dar Es Salaam, Tanzanie.
11. L’objectif principal de cette réunion était de mettre en place une équipe technique chargée d’élaborer l’Observation générale relative à l’article 26 de la Charte, conformément à la Résolution CADHP/Res.618 (LXXXI) 2024, adoptées lors de sa 81ème session ordinaire tenue du 17 octobre au 6 novembre 2025 à Banjul, Gambie. L’équipe est composée de représentants de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, du système des Nations Unies, des organisations intergouvernementales, des juges et magistrats, du Réseau des Institutions nationales des droits de l’homme, de la société civile et des académiciens.
12. Cette Observation visera à fournir des orientations aux États parties afin de mieux comprendre leurs obligations en vertu de cet article, ainsi que les moyens appropriés pour les remplir, en tenant compte de l’évolution des pratiques et des défis émergents, tant en droit qu’en pratique. Par ailleurs, cette Observation Générale permettra de soutenir les États parties dans la mise en œuvre de l’article 26, et de les accompagner dans la préparation de leurs rapports à la CADHP, conformément à l’article 62 de la Charte.
13. Les participants ont échangé sur le plan du projet d’élaboration de ladite observation, notamment de sa portée et de son ébauche. Elle a également permis d’échanger sur la répartition des rôles entre les membres de l’équipe technique, de la feuille de route, de l'analyse des parties prenantes et de la stratégie d'engagement, ainsi que des aspects financiers du projet grâce à une stratégie collaborative de mobilisation des ressources.
14. Au cours de la réunion, les participants ont eu l'occasion de s'entretenir avec Mme Mariya Badeva, Directrice d'Africa LII et du projet Laws Africa qui leur a présenté le projet et son rôle dans la fourniture d'informations juridiques. Elle a proposé d'apporter son soutien au projet de rédaction de l'observation générale en fournissant des recherches, des enquêtes et des données.
15. Je saisie cette occasion pour remercier la GIZ, Bureau de Dar Es Salaam, Tanzanie pour leur appui technique et financier qui ont permis la tenue et le déroulement réussi de la réunion.
C. Situation de l’indépendance judiciaire en Afrique
15. La situation de l’indépendance judiciaire ne cesse de se détériorer dans certains pays du continent. On observe la multiplication des attaques contre l'indépendance des juges qui subissent d'immenses pressions de la part de l'État les contraignant à s'écarter de leurs obligations professionnelles sous peine de licenciement abusif ou de poursuites judiciaires arbitraires. Cette situation a de graves conséquences sur l'État de droit et le droit des populations à un procès équitable.
16. La Commission s’inquiète également des actes d’intimidation, des arrestations et détentions arbitraires des avocats, voire leur assassinat spécialement ceux qui défendent des dossiers sensibles. Ceci constitue un défi majeur empêchant les avocats à travailler de manière indépendante.
17. La Commission a été informée de la situation de confusion en certains pays créant des tensions entre le ministre de la Justice et le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature. De même qu’elle a reçu des rapports sur les tensions entre les Parlements et les plus hautes juridictions, notamment les Cours Constitutionnelles.
18. Divers rapports reçus de sources variées renseignent que dans certains pays, l’Institution d’Ombudsman a le pouvoir de contrôle sur les Cours constitutionnelles et peuvent évaluer leurs performances.
Résultat : Les Etats et les autres parties prenantes ont été alertées sur la situation des droits de l’homme et de l’indépendance judiciaire sur notre continent.
Recommandations : Demande aux Etats de (d’) :
- Observer un strict respect de la séparation des Pouvoirs et garantir l’indépendance judiciaire pour une bonne administration de la justice ;
- Mettre en œuvre les Lignes directrices de la Commission sur le droit à un procès équitable
PARTIE II : ACTIVITES EN QUALITE DE COMMISSAIRE RAPPORTEUR PAYS
19. En ma qualité de Commissaire Rapporteur en charge du suivi de la situation des droits de l’homme dans les Etats parties de l’Algérie, Cameroun, Côte d’Ivoire, Mali et Togo, j’ai pris quelques actions concernant les États parties suivants :
20. Concernant la République Algérienne démocratique et populaire, conjointement avec la Rapporteure spéciale sur la liberté d'expression et l'accès à l'information en Afrique, l’Honorable Commissaire Ourveena Geereesha Topsy-Sonoo, nous avons adressé, en date du 5 juin 2025, une lettre d’appel urgent aux hautes autorités de ce pays. Celle-ci portait sur le blocage du site de Riposte Internationale en Algérie. À cette occasion, nous avons rappelé à l’État algérien l’importance de s’abstenir de toute forme d’ingérence à l’encontre des organisations non gouvernementales œuvrant pour la promotion des droits de l’homme dans le pays.
21. Concernant la République du Cameroun, j’ai adressé, en date du 18 juin 2025, une lettre d’appel urgent aux autorités camerounaises au sujet d’allégations de violations impliquant des actes de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de M. Maurice Kamto, président du parti politique d’opposition Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) et candidat déclaré à l’élection présidentielle de 2025. J’ai saisi cette occasion pour rappeler au Gouvernement son obligation de s’abstenir de toute forme d’intimidation ou de harcèlement à l’égard des membres de l’opposition, et de veiller à ce que ceux-ci puissent exercer leurs activités politiques librement, sans entrave ni crainte de représailles.
22. Concernant la République Togolaise, trois lettres d’appel urgent ont été envoyées aux hautes autorités de ce pays. La première lettre qui a été envoyée le 18 juin 2025 concernait les allégations tels que le harcèlement et la détention arbitraires de Monsieur Tchala Essowè Narcisse, un artiste et activiste togolais. J’ai profité de cette occasion de rappeler au Gouvernement togolais la nécessité de mettre en œuvre des garanties pratiques adéquates permettant d’assurer le respect de tous les droits liés à une procédure équitable, notamment le droit de préparer sa défense et paraitre devant un tribunal indépendant. La deuxième lettre, envoyée le 09 juillet 2025 concernait les allégations tels l’usage létal de la force, les arrestations et les détentions survenues lors des récentes manifestations du mois de juin 2025 ainsi que la détention arbitraire d’autres activistes togolais. A cette occasion, j’ai appelé l’Etat à mettre en place des garanties concrètes et effectives visant à interdire formellement tout acte de torture, qu’elle soit physique ou psychologique, ainsi que tout traitement cruel, inhumain ou dégradant, sur l’ensemble du territoire togolais. La troisième lettre a été envoyée le 15 octobre 2025. Elle concernait les allégations de violations tels que le harcèlement, l’arrestation et la détention arbitraires de Monsieur Foly Satchivi, le leader et porte-parole d’En Aucun Cas, un mouvement de défense des droits de l’homme au Togo. J’ai attiré l’attention du Gouvernement sur la nécessité de mettre en place des garanties concrètes assurant le respect de l’ensemble des droits relatifs à une procédure équitable, notamment le droit à l’assistance d’un avocat pour assurer une défense devant un tribunal impartial et indépendant.
Résultat 2 : Les hautes autorités de ces pays (Algérie, Cameroun, et Togo) ont été alertées et sensibilisées sur les allégations de violations des droits de l’homme les concernant.
Recommandations 2 :
- Demander aux Etats concernés de mener les enquêtes sur violations alléguées ;
- Demander aux Etats de mener les investigations liées aux conditions de détention des manifestants, ainsi que les allégations de mauvais traitement et de torture qui leur ont été infligées et traduire les présumés auteurs devant la justice ;
- S’abstenir de toute forme d’intimidation et de harcèlement, y compris judiciaire, contre les activistes et Défenseurs des droits de l’homme et les leaders des partis politiques de l’opposition et s’assurer qu’ils puissent mener leurs activités de défense des droits de l’homme ou activités politiques sans entrave ni crainte de représailles.
- Adopter une loi spécifique sur la protection des défenseurs des droits de l’homme.
PARTIE III : ACTIVITES AU TITRE DE RAPPORTEUR SPECIAL SUR LES DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME ET POINT FOCAL SUR LES REPRESAILLES EN AFRIQUE
A. ACTIVITES DE PROMOTION.
I. Communiqué de Presse sur les allégations d'usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques en République du Kenya
23. Conjointement avec le Commissaire en charge du suivi de la situation des droits de l’homme en République du Kenya avec d’autres mécanismes spéciaux, nous avons publié, le 26 juin 2025, une déclaration conjointe sur la situation des droits de l’homme au Kenya. Nous avons déploré et condamné l'utilisation de balles réelles par la police ayant occasionnant notamment des pertes en vies humaines.
24. Nous avons également exprimé notre préoccupation concernant notamment le recours excessif à la force par les forces de sécurité, le déploiement arbitraire d'acteurs non étatiques pour perturber les manifestations pacifiques, ainsi que des restrictions imposées aux médias pour empêcher la couverture en direct des manifestations pacifiques organisées par la génération Z dans le quartier central des affaires de Nairobi le 17 juin 2025.
25. A cet effet, nous avons rappelé les obligations des autorités kenyanes en vertu des dispositions pertinentes de la Charte africaine, droits qui demeurent applicables et doivent être respectés, protégés et mis en oeuvre à tout moment, y compris pendant les périodes de contestation politique et de manifestations publiques.
26. Nous avons en outre formulé des recommandations à l’endroit des autorités kenyanes sur une série de mesures à mettre en œuvre pour mettre un terme et remédier à cette situation.
Résultat : Alerte de la communauté internationale sur la situation des droits de l’homme et la restriction du droit à la liberté de réunion et de manifestation pacifique en République du Kenya.
Recommandation : Aux autorités kenyanes de mettre en œuvre les recommandations formulées par la Commission dans cette déclaration.
II. Déclaration conjointe sur la protection des droits à la liberté de réunion pacifique et d'association contre la criminalisation dans un contexte d'intensification des menaces existentielles, 15 septembre 2025
27. Dans le cadre de la commémoration de la journée internationale sur la démocratie célébrée le 15 septembre de chaque année et sur initiative de la Rapporteure spéciale des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion et d'association, nous avons conjointement avec les mécanismes onusiens et interaméricaines, publié une déclaration conjointe visant à protéger et à empêcher la stigmatisation du droit à la liberté d'association face à la propagation de l'expression « agent étranger »/« influence étrangère » et des lois ayant des effets similaires.
28. La déclaration a souligné notamment notre préoccupation sur le fait que, en raison de leur activisme non violent et de leurs expressions protégées, des milliers de défenseurs des droits de l'homme et d’activistes ont été et continuent d'être arbitrairement arrêtés et détenus, condamnés à des peines criminelles sévères et prolongées sans garantie d'une procédure régulière ou d'un procès équitable, et que beaucoup sont expulsés ou menacés d'expulsion, contraints à l'exil, soumis à des sanctions économiques illégales et à une répression transnationale, tandis que de nombreuses associations ont été illégalement dissoutes et privées de financement.
29. A cette occasion, nous avons fermement condamné la stigmatisation généralisée de ceux qui exercent légitimement leurs droits et libertés, qualifiés par certains Etats d'« ennemis », de « traîtres », d'« espions », de « terroristes », de « criminels » ou autres termes similaires. A cet effet, nous avons demandé aux États de mettre fin à la criminalisation répressive et punitive de ceux qui cherchent à exercer leurs droits et libertés, alors que les valeurs qui sous-tendent ces droits sont de plus en plus menacées. Nous avons en outre demandé aux États de s'abstenir de traiter les manifestations pacifiques et la société civile qui cherchent à s'engager dans des débats et des processus démocratiques et dans la protection des droits comme une menace, des ennemis ou des criminels ; et à veiller à ce que les droits de chacun à la liberté de réunion et d'association soient protégés et facilités conformément au droit international des droits de l'homme.
Résultat : Sensibilisation sur les principes généraux applicables dans l’exercice du droit à la liberté d’association et de réunion et sur les obligations des Etats pour leur mise en œuvre effective.
Recommandation : Les Etats doivent prendre toutes les mesures nécessaires en vue la mise en œuvre effective des droits à la liberté d’association et de réunion, conformément aux articles 10 et 11 de la Charte africaine.
III. Elaboration d’une déclaration africaine sur la promotion du rôle des défenseurs des droits de l’homme et leur protection en Afrique
30. Au cours de la période d’intersession, le Rapporteur Spécial a poursuivi avec la rédaction de Déclaration africaine sur la promotion du rôle des défenseurs des droits de l’homme et des peuples et leur protection en Afrique pour son amélioration quantitative et qualitative.
31. Le travail se poursuit normalement et sera très certainement achevé en 2026 permettant ainsi à l’Afrique de se doter d’un outil important aligné avec nos valeurs et traditions. Les consultations en face-to-face commenceront après la 85ème session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.
Résultat : le texte a connu de profonds remaniements.
Recommandation : Soutien et collaboration de toutes les parties prenantes.
B. ACTIVITES DE PROTECTION
I. Appels urgents
32. Au cours de la période sous examen, le mécanisme a reçu de plaintes portant sur des allégations de violations des droits des défenseurs des droits de l’homme, auxquelles il a donné suite selon les besoins spécifiques de chaque cas. Ainsi, au cours de la période sous examen, parfois conjointement avec d’autres mécanismes ou rapporteurs pays, douze (13) lettres d’appel urgent ont été envoyées aux États parties de : Algérie (1), Angola (1), Cameroun (1), Ethiopie (1) Kenya (1), Niger (1), Tanzanie (2), Tchad (1), Togo (3) et Ouganda (1).
33. Ces plaintes concernent des allégations sur les violations des droits de l’homme relatives notamment :
i. Le blocage du site de Riposte Internationale en Algérie ;
ii. Le harcèlement et la détention arbitraires de Monsieur Tchala Essowè Narcisse, un artiste et activiste togolais ;
iii. L’utilisation de la force, les meurtres, les arrestations, et les détentions arbitraires survenus lors des manifestations de juillet 2025 en Angola ;
iv. Les actes de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de l’opposant politique,
Maurice Kamto au Cameroun ;
v. L’arrestation et détention arbitraires de travailleurs de la santé en grève en
République fédérale d’Ethiopie ; vi. Arrestation et poursuites judiciaires visant la militante numérique Mme Rose
Njeri, et menaces contre l’espace civique au Kenya ; vii. La dissolution des syndicats du secteur de la justice et la radiation de deux magistrats dirigeants du Syndicat Autonome des Magistrats au Niger ;
viii. La situation des droits de l’Homme en République Unie de Tanzanie particulièrement l’arrestation et la détention au secret de l’opposant politique
M. Lissu ; ix. L’arrestation, le refus d’entrée en République Unie de Tanzanie, et l’expulsion subséquente des défenseurs des droits de l’Homme ;
x. La déchéance de la nationalité tchadienne des activistes Charfadine Gakmaye
Saleh et N’Guebla Makaila ; xi. Les arrestations et les détentions arbitraires massives survenues lors des manifestations pacifiques organisées au mois de juin au Togo ;
xii. Le harcèlement, l’arrestation et la détention arbitraire de Monsieur Foly
Satchivi, activiste togolais xiii. L’enlèvement de deux défenseurs des droits de l’homme de nationalité kenyane en Ouganda.
34. J’ai également publié un communiqué de presse conjointement avec le Commissaire en charge du suivi de la situation des droits de l’homme en République de Guinée, Honorable Commissaire Idrissa Sow et la Rapporteure spéciale sur la liberté d'expression et l'accès à l'information en Afrique, Honorable Commissaire Ourveena Geereesha Topsy-Sonoo sur la décision annoncée le 22 août 2025 par les autorités guinéennes de suspendre, pendant 90 jours, toute activité, notamment l’organisation des réunions, de manifestations ou de campagne de propagande de trois partis politiques (Ces dernières s’ajoutaient a 28 autres partis politiques qui avaient été suspendus cinq mois plutôt). Nous avons rappelé au Gouvernement guinéen que cette décision est de nature à enfreindre les droits à la liberté d’expression, à la liberté d’association et de réunion ainsi qu’à la participation aux affaires publiques reconnus aux citoyens guinéens. Le contenu de ce communiqué de presse est disponible sur le site web de la Commission.
II. Réponses des États
35. Au cours de l’intersession, le Mécanisme a reçu la réponse des autorités algériennes concernant les allégations relatives au blocage du site de Riposte Internationale. Dans leur réponse, les autorités ont indiqué que l’Algérie dispose d’un cadre législatif national régissant la liberté d’expression et l’accès à l’information. Elles ont également précisé que les autorités compétentes n’ont connaissance d’aucune mesure officielle ou administrative visant à bloquer l’accès à ce site. Par ailleurs, elles ont souligné que le site en question est hébergé dans un pays tiers, ce qui exclut toute compétence de l’État algérien quant à un éventuel blocage de son contenu.
36. Le Mécanisme a également reçu une réponse des autorités algériennes relative à la lettre d’appel urgent envoyée en date du 4 avril 2025, concernant le dossier de M. Boualem Sansal. Les autorités algériennes dans leur lettre confirment que M. Boualem Sansal a fait l’objet de poursuites judiciaires pour différents chefs d’accusation, conformément aux dispositions du Code pénal, avec réquisition de mandat de dépôt. Les autorités algériennes ont également précisé que les principes d’un procès équitable sont déjà consacrés par la législation nationale et ont montré la manière dont lesdits principes ont été respectés à toutes les étapes de cette affaire.
37. En outre, une réponse a été reçue de la part des autorités togolaises à propos des allégations portant sur l’usage létal de la force, ainsi que sur les arrestations et détentions arbitraires survenues lors des manifestations du mois de juin 2025. Leur réponse soulignait l’autorité compétente destinataire de nos lettres d’appel urgents, conformément à la Constitution en vigueur. Des corrections nécessaires ont été effectuées et un nouvel envoi a été fait.
38. Le Mécanisme a également reçu une réponse de la part des autorités éthiopiennes concernant les allégations d’arrestations et de détentions arbitraires de travailleurs du domaine de la santé en grève. Dans leur réponse, les autorités ont indiqué que les faits allégués ne reflètent pas la réalité sur le terrain. Elles ont rappelé que, tout en poursuivant l’harmonisation de son cadre juridique interne en matière de protection des droits de l’homme, l’État doit veiller à ce que l’exercice de ces droits s’effectue dans le respect de la législation en vigueur. Selon les autorités, la grève en question aurait notamment dévié de son objectif initial, perturbé la prestation des soins médicaux et mis certains patients dans des situations critiques.
39. Enfin, le Mécanisme a reçu un accusé de réception des autorités ivoiriennes concernant la lettre en date du 5 mai 2025, relative à la situation de M. Ghislain Assy Guggary.
Résultat 4 : Attirer l’attention des Etats parties concernés en vue l’adoption de mesures adéquates pour remédier aux violations alléguées, si elles s'avéraient exactes.
Recommandation 4 : Répondre aux lettres d’appel urgent envoyées par le Mécanisme, pour ceux qui ne l’ont pas encore fait et prendre des mesures adéquates pour prévenir et lutter contre les violations des droits de l’homme.
PARTIE IV : ANALYSE DE LA SITUATION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME EN AFRIQUE
40. Un cadre juridique national favorable est un élément nécessaire pour garantir un environnement sûr et propice au travail des défenseurs des droits de l'homme, comme nombreux instruments internationaux et régionaux le disposent, notamment l'absence de lois et de pratiques qui restreignent et criminalisent leur travail, ainsi que l'adoption et la mise en œuvre effective de lois et de mesures qui garantissent leur soutien et leur protection.
41. La situation des défenseurs des droits de l’homme a évolué de manière positive dans certains pays tandis que dans d’autres elle ne cesse de se détériorer. Dans les lignes qui suivent, je fais un état des lieux de la situation des défenseurs des droits de l’homme, de la liberté d’association et de réunion, de manifestation et la question des représailles dans quelques pays.
A. LA LIBERTE D’ASSOCIATION ET DE REUNION EN AFRIQUE
42. La liberté d’association, de réunion et de manifestation pacifique sont des droits essentiels à l’expression collective et à la défense de l’ensemble des droits de l’homme.
43. En ce qui concerne les développements positifs, le mécanisme a noté notamment :
- la désignation d’un représentant de la société civile au sein du Comité de
Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme en République de Côte d’Ivoire ;
- La décision du Tribunal administratif du Littoral de Douala, Cameroun rendue le 19 septembre 2025 qui ordonne la main levée des scellés apposés sur les locaux abritant les bureaux du REDHAC depuis le 6 décembre 2024.
44. Au titre des domaines de préoccupation, le mécanisme a relevé notamment les situations suivantes :
- Les restrictions à la liberté de réunion par la suspension de toute activité des partis politiques en République de Guinée ;
- Le recours à l’usage de la force pour réprimer les manifestations, ayant entrainé des pertes en vies humaines, des arrestations et détentions arbitraires de la population civile, notamment au Kenya et en Angola ;
- L’escalade de violations des droits des défenseurs des droits de l'homme marquée par les menaces contre l’espace civique au Kenya ;
- Les arrestations et les détentions arbitraires massives pour réprimer les manifestations pacifiques au Togo ;
- Certains Etats continuent à exiger une autorisation préalable avant toute manifestation, malgré le régime déclaratif en place qui encadre la jouissance de cette liberté ;
- La persistance de cadres législatifs et restrictions juridiques constantes qui entravent fortement le travail des associations et organisations de la société civile dans certains États, et ce malgré l'engagement des Etats parties à respecter et à garantir les droits de l'homme sans discrimination ;
- La politisation des organisations de la société civile et du travail des défenseurs des droits de l’homme ;
- L'absence de lois et autre mécanisme juridique de protection spécifique des défenseurs des droits de l’homme dans la plupart des pays ouvre une grande brèche aux violations des droits des DDH et renforce leur vulnérabilité ;
- L’observation continue par certains États des mesures d’urgence sanitaire ou sécuritaire pour restreindre indûment les droits à la liberté d'association et de réunion, en particulier pour les acteurs politiques de l'opposition, la société civile et les défenseurs des droits de l’homme ;
- La dissolution de deux associations de jeunes, à savoir l’Association des jeunes pour l’animation et le développement rural et la Coordination nationale des jeunes pour la paix et le développement au Tchad ainsi que l’interdiction des activités de Wakit Tamma section politique et du mouvement citoyen Le Temps suite aux décisions du 26 juin 2025, par le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation ;
- Le harcèlement et intimidation dont font l’objet les défenseurs des droits de l’homme travaillant notamment sur des questions sensibles telles que la corruption, les élections, la gouvernance des industries extractives et les droits des minorités sexuelles dans certains pays ;
- L’Arrestation et détention des défenseurs des droits de l’homme à la suite des manifestations pacifiques contre la corruption massive et le pillage des biens de l'État par des agents publics en Gambie ;
- La lenteur dans la mise en œuvre par le Sénégal, de la décision de la Cour de justice de la CEDEAO lui enjoignant de retirer l’arrêté qui interdit toute manifestation sur la voie publique au niveau du centre-ville de Dakar ;
-
L’introduction par le Parlement kenyan d’un projet de loi portant modification de la Loi sur l'ordre public de 2025, portant atteinte au droit à la liberté de réunion pacifique ; et
- L’arrêté interministériel n°0755/MIS/MEMD du 17 octobre 2025 portant interdiction de meetings et manifestations publiques sur toute l’étendue du territoire national à l’exception de ceux relatifs au processus électoral pendant une période de deux mois.
45. La Commission rappelle et encourage l’utilisation de ses Lignes Directrices sur la liberté d'association et de réunion en Afrique qu’elle a adoptées pour aider les Etats, y compris les décideurs politiques, les rédacteurs de lois et les législateurs, en vue de s'assurer que la législation, les politiques et les pratiques administratives sont conformes aux meilleures pratiques et aux normes internationales et que les mesures ne portent pas atteinte de manière injustifiée aux libertés d'association et de réunion.
46. Elle rappelle en outre le rôle important que jouent les tribunaux nationaux pour garantir les libertés d'association et de réunion.
47. Toutefois, le Rapporteur Spécial souhaite attirer l’attention des parties prenantes sur l’urgence qu’il y a maintenant de tenir compte des dernières évolutions dans ce domaine, spécialement de l’importance de ne pas négliger le nouveau phénomène appelé « Gen Z ». A lui seul, ce phénomène démontre le combat que le Rapporteur a porté devant la Commission, sans succès, en prenant appui sur l’une des recommandations du Premier Forum des mécanismes conjoints tenu à Dakar du 24 au 26 avril 2025 à Dakar, Sénégal.
48. Il s’agit de la question de la participation directe des individus (africains) et des communautés africaines à l’agenda 3 des sessions(situation des droits de l’homme en Afrique), sans qu’ils n’aient besoin de passer par la représentation via les ONGs et les INDHs. Il convient de tenir compte du fait que la Charte africaine a été créée d’abord pour protéger les individus et les communautés contre les Etats. Elle n’a pas été créée pour protéger toutes autres catégories d’acteurs. Il est donc anormal qu’ils n’aient pas accès direct à cet agenda moyennant des modalités à déterminer.
49. Le Rapporteur reste convaincu que c’est faute pour la Commission de trouver une solution à cet aspect de choses, que les rues s’expriment désormais sans recourir aux ONGs et d’autres structures similaires.
50. Le Rapporteur pense profondément que les actions menées par Gen Z du Madagascar, du Kenya, de la Tanzanie, du Maroc (Etat non partie à la Charte), du Tchad, de l’Angola et bientôt dans d’autres pays (cela arrivera très certainement) montre l’urgence qu’il y a à se pencher sur cette question.
51. Il y a donc lieu pour le Rapporteur spécial de garder un œil sur cette nouvelle forme d’activisme social menée par une Société civile (au sens de la Société des citoyens) informe et inorganisée, mais néanmoins effective et légitime.
B. LA QUESTION DES REPRESAILLES SUR LE CONTINENT
52. Les actes de représailles, toujours d’actualité, demeurent fortement présents et manifestés sous différentes formes, notamment les meurtres, les assassinats, le harcèlement systématique, les restrictions indues de l'accès aux réunions des organes de droits de l’homme, les menaces diverses, les violences physiques et autres abus, les restrictions injustifiées des activités des organisations de la société civile, l’espionnage, le cambriolage de sièges des Organisations et associations, la diffamation, la suspension des agréments, les arrestations et détentions arbitraires et les procédures judiciaires répétitives.
53. Ces cas de représailles sont pratiquement communs à l’ensemble du continent avec un degré de gravité plus ou moins avancé selon les pays. Je cite notamment :
- La radiation de deux magistrats dirigeants du Syndicat Autonome des Magistrats au Niger ;
- La déportation par les autorités tanzaniennes des défenseurs des droits de l’homme étrangers en séjour régulier dans le pays pour l’observation du procès du leader de l’opposition Mr. Tundu Lissu ;
54. J’invite les États à entreprendre des enquêtes sur les menaces et les actes d'intimidation subis par les défenseurs des droits de l’homme et de veiller à ce que les présumés coupables soient traduits en justice et que les titulaires de droits et les victimes obtiennent justice et réparations adéquates.
55. En vertu du mandat assigné au mécanisme sur les questions des représailles, nos efforts dans le domaine de prévention et de lutte contre les représailles à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme qui collaborent ou tentent de collaborer avec la Commission Africaine se poursuivent.
PARTIES V. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
A. CONCLUSIONS
56. Je continue à déplorer la situation alarmant des défenseurs des droits de l’homme sur le continent. Le nombre de plaintes reçues par le mécanisme demeure stable, cependant certains pays plus que d’autres font l’objet de plaintes régulières dont il s’efforce de vérifier la véracité avant de contacter l’État concerné. A cet effet, je veux souligner que le suivi de nos appels urgents, tant sur la réception effective par les États que sur la mise en œuvre de nos recommandations, demeure toujours un défi majeur.
57. Concernant ses activités, le mandat poursuit sa collaboration avec les États sur différentes questions, notamment :
- La bonne application des normes et des standards des droits de l’homme relatifs aux défenseurs des droits de l’homme notamment par le biais de recommandations sur les rapports des États, de visites de pays, des missions d'enquête, d’appels urgents et autres moyens ;
- L’adoption des lois sur la protection des défenseurs des droits de l’homme et à ce propos il réitère sa disponibilité à les accompagner dans les différentes étapes de l’adoption de ces lois ;
- La mise en œuvre des différentes normes moues relatives à la promotion et la protection des droits des défenseurs des droits de l’homme.
58. Le Mécanisme poursuit l’élaboration de l’étude pour évaluer le niveau de conformité des législations nationales avec les Lignes directrices sur la liberté d’association et de réunion en Afrique. Un rapport détaillé sur les législations et les politiques qui imposent des restrictions aux libertés publiques et réduisent le rôle et l'espace opérationnel des acteurs de la société civile sera présenté au moment opportun.
59. Le mécanisme poursuit également l’amélioration du tracker des libertés d'association et de réunion en Afrique, un outil transparent et objectif qui sera mis à la disposition du public par le Rapporteur spécial grâce à l’appui technique de son Groupe de soutien pour la promotion et le suivi de la mise en œuvre effective des Directives sur la liberté d'association et de réunion en Afrique.
60. Enfin, le mécanisme poursuit en outre son rôle de leadership dans l’élaboration du Projet de Déclaration Africaine sur la promotion du rôle des défenseurs des droits de l’homme et leur protection.
B. RECOMMANDATIONS
61. Les recommandations formulées dans nos précédents rapports restent d’actualité. Le mandat souhaiterait que les États parties et les différents acteurs y compris ceux de la société civile se les approprient et s’attellent à leur mise en œuvre effective.
Aux États Parties :
i. Elaborer, adopter et mettre en œuvre des lois, des politiques et programmes nationaux plus solides et adéquats en matière de protection des défenseur.es des droits de l'homme à l’instar de la Cote d’Ivoire, du Burkina Faso, du Mali et du Niger en Afrique de l’Ouest et de la RDC en Afrique Centrale ;
ii. Vulgariser auprès des autorités administratives, judiciaires et sécuritaires les lois sur les défenseurs des droits de l’homme afin de lever toute forme de restrictions limitant leur travail ;
iii. S’assurer que les mécanismes mis en place pour la protection des défenseurs des droits de l’homme soient inclusifs et comportent des représentants de la société civile, dans leur composition ;
iv. S’assurer que les projets de loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme soient conformes aux normes régionales, internationales et à la loi type pour la reconnaissance et la protection des défenseurs des droits de l’homme afin de créer un environnement juridique favorable à leur travail ;
v. S’assurer que la révision des lois sur la lutte contre le terrorisme réponde aux normes régionaux et internationaux pertinents et aux Principes et lignes directrices sur les droits de l'homme et des peuples dans la lutte contre le terrorisme en Afrique adoptés par la Commission en 2015 ;
vi. S’abstenir d’adopter des lois liberticides tendant à restreindre l’espace civique et les activités légitimes de promotion et de défense des droits de l’homme des défenseurs ;
vii. Adopter des lois spéciales pour prendre en charge la question de la protection des défenseurs des droits environnementaux ou en situation de crise sanitaire et sécuritaire ou d’autres crises continentales ou mondiales ;
viii. Sensibiliser et renforcer les capacités des différents acteurs y compris les défenseurs sur les lois et règlements régissant la promotion et la protection des droits de l’homme ;
ix. Prendre toutes les mesures idoines afin d’assurer que les défenseurs mènent leurs activités dans des conditions de sécurité exempt de toutes menaces pour leur intégrité physique et morale ;
x. Apporter une attention particulière à la situation des femmes défenseures des droits de l’homme qui reste une préoccupation constante pour le mécanisme du Rapporteur spécial ;
xi. S’abstenir de radier les ONGs et organisations de la société qui opèrent dans le domaine de la promotion et la protection des droits de l’homme et renforcer l’espace civique et démocratique en favorisant la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique pour tous les défenseur.es des droits de l’homme ;
xii. S’assurer que les mesures prises par les États pour combattre le terrorisme et la circulation des flux financiers illicites sont en conformité avec la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique de la Commission Africaine et les Principes et directives sur les droits de l’homme et des peuples dans la lutte contre le terrorisme en Afrique ;
xiii. Mettre en place des mécanismes adéquats en vue de la réparation des préjudices subis par les défenseurs des droits de l’homme dans le cadre de leur travail ;
xiv. S'engager dans le dialogue et la consultation avec les défenseurs des droits de l'homme, reconnaître publiquement et soutenir leur travail au moyen de campagnes de communication et d'information ;
xv. Encourager le mouvement associatif et éviter la bureaucratie de l’enregistrement qui freine les citoyens à tirer bénéfice des avantages leur procurés par la Charte Africaine ;
xvi. Encourager et promouvoir l’organisation du travail des défenseurs en réseaux associatifs au niveau national, sous régional et continental ;
xvii. Être plus proactifs dans les réponses apportées à leur attention concernant les allégations de violations des droits de défenseurs par mon mécanisme et les autres mécanismes de la Commission.
A l’Union Africaine et autres organismes régionaux et sous régionaux :
i. Reconnaître le rôle essentiel des défenseurs des droits de l'homme dans la mise en œuvre effective des principes démocratiques, de l'État de droit, de bonne gouvernance et de développement durable en Afrique ;
ii. Encourager les États membres et les organes de l'Union africaine à mener des campagnes de sensibilisation sur le rôle fondamental joué par les défenseurs des droits de l'homme ;
iii. Créer un espace de dialogue entre les États, les défenseurs des droits de l'homme et d'autres acteurs clés sur les défis, les bonnes pratiques et les progrès en matière de protection des défenseurs des droits de l'homme ;
iv. Encourager et soutenir une pleine collaboration entre les mécanismes nationaux, régionaux et internationaux de défense des droits de l'homme.
Aux institutions nationales des droits de l’homme :
i. Exercer pleinement leurs mandats de promotion et de protection afin de tenir les États responsables des violations commises contre les défenseurs des droits de l'homme et intervenir à l'appui des défenseurs victimes de violations des droits de l'homme ;
ii. Établir des mécanismes internes sur la protection des défenseurs des droits de l'homme au sein de l'institution et veiller à ce qu'ils disposent de ressources suffisantes et collaborent activement avec tous les défenseurs des droits de l'homme ;
iii. Diffuser largement les Lignes Directrices sur la liberté d'association et de réunion en Afrique et faire le suivi de leur mise en œuvre et partager les informations y relatives à notre mécanisme. iv. Pérenniser les initiatives relatives à la tenue régulière du Forum des INDH en prélude aux Sessions de la Commission.
Aux organisations de la société civile :
i. Continuer à collaborer avec les mécanismes nationaux, régionaux et onusiens pour la promotion et la protection des droits de l'homme, afin de prévenir et de répondre aux violations des droits de l'homme commises contre les populations et les défenseurs des droits de l'homme ;
ii. Ne pas se focaliser uniquement sur la satisfaction de certains droits de l’homme (droit à la liberté et de réunion par exemple) au détriment d’autres droits (droit à la vie ; droits économiques, sociaux et culturels et les droits collectifs) et de rechercher à maintenir des équilibres nécessaires pour que la satisfaction de certains droits n’aboutisse à la destruction d’autres ;
iii. Mettre en place et renforcer les réseaux de défenseurs nationaux et régionaux afin de promouvoir la collaboration et les approches intersectorielles qui
permettent l’établissement d’alliances avec des groupes divers ;
iv. Développer des approches novatrices pour impliquer le grand public, les acteurs politiques et d'autres leaders d'opinion, y compris les médias, dans le travail des défenseurs des droits de l'homme ;
v. Respecter les lois et les règlements en place et mener leurs activités dans le respect des textes internationaux, régionaux et nationaux consacrés à cet effet ; vi. Éviter l’instrumentalisation politique de leurs activités et contribuer mutuellement au renforcement des capacités des uns et des autres ;
v. Diffuser largement les Lignes Directrices sur la liberté d'association et de réunion en Afrique et faire le suivi de leur mise en œuvre et partager les informations y relatives à notre mécanisme.
vi. Poursuivre leurs activités de promotion et de défense des droits de l’homme et engager un dialogue constructif avec les différents acteurs.
Aux médias
i. S'engager dans le dialogue avec tous les défenseurs des droits de l'homme et soutenir leurs efforts pour faire progresser les droits de l'homme, l’état de droit, le changement social et le développement ;
ii. Travailler solidairement au côté des défenseurs des droits de l’homme en vue de leur permettre de s’informer et d’informer les populations à bon escient.
Aux leaders religieux et traditionnels
i. Œuvrer à l’élimination des obstacles contre le travail des défenseurs des droits de l'homme et des organisations de la société civile, en particulier l'accès aux communautés ;
ii. Travailler pour prévenir les pratiques négatives qui sont sources de discrimination à l'égard des femmes défenseurs et des défenseurs des droits de l'homme travaillant avec des personnes qui sont criminalisées et/ou discriminées, comme les travailleur.es du sexe, les personnes vivant avec le VIH et les personnes aux diverses orientations et identités sexuelles.
Aux partenaires techniques et financiers
i. Tout en les remerciant de leur appui constant, je les encourage à poursuivre leur soutien au mécanisme, aux États parties, aux institutions nationales et à la société civile, dans leurs actions en vue d’une meilleure promotion et protection des droits des défenseurs des droits de l’homme.








