La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission africaine), réunie en sa 67èmeSession ordinaire, tenue virtuellement du 13 novembre au 03 décembre 2020 :
Rappelantson mandat de promotion et de protection des droits de l'homme en Afrique en vertu de l'article 45 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine) ;
Soulignantque la liberté d'expression et l'accès à l'information sont des droits fondamentaux de l'homme garantis par l'article 9 de la Charte africaine, et par d'autres traités régionaux et internationaux relatifs aux droits de l'homme ;
Réaffirmantl'engagement de la Commission africaine à promouvoir et à protéger le droit à la liberté d'expression et à l'accès à l'information, mais aussi à surveiller la mise en œuvre de la Déclaration de principes sur la liberté d'expression et l'accès à l'information en Afrique (la Déclaration) par les États parties ;
Soulignantle Principe 19 de la Déclaration qui stipule que le droit de s'exprimer à travers les médias ne doit pas faire l'objet de restrictions légales injustifiées ;
Soulignant en outrele Principe 20 de la Déclaration qui appelle les États parties à garantir la sécurité des journalistes et autres professionnels des médias, et à prendre des mesures juridiques et autres efficaces pour initier des enquêtes et des poursuites et sanctionner les auteurs d'actes d'agression contre les journalistes et autres professionnels des médias et veiller à̀ ce que les victimes aient accès à des voies de recours efficaces ;
Rappelantles Résolutions CADHP/Res.54(XXIX)01 sur la liberté d'expression, CADHP/Res.169 (XLVIII)10 sur l'abrogation des lois pénalisant la diffamation en Afrique et CADHP/Res.185. (XLIX)2011 sur la sécurité des journalistes et des professionnels des médias en Afrique ;
Considérantle rôle essentiel que jouent les médias et autres moyens de communication pour garantir le plein respect de la liberté d'expression, pour promouvoir la libre circulation de l'information et des idées, pour aider les personnes à prendre des décisions en connaissance de cause et pour faciliter et renforcer la démocratie ;
Soulignantque les lois pénalisant la diffamation constituent une grave entrave à la liberté d'expression, ce qui peut empêcher les journalistes et autres professionnels des médias d'exercer leur profession sans crainte ;
Profondément préoccupée par la détérioration de la situation des journalistes et autres professionnels des médias en Afrique, en particulier les agressions dont ils sont l'objet, en particuliers celles physiques et les atteintes au droit à la vie ; les enlèvements, les menaces et les intimidations ; les arrestations arbitraires et les détentions provisoires prolongées, les attaques contre les locaux des médias entraînant la perte de matériel, entre autres ;
Préoccupée en outrepar les agressions dont sont victimes les journalistes et autres professionnels des médias lors de manifestations, de protestations ou de rassemblements, en violation du droit à la liberté de réunion tel que stipulé dans les Lignes directrices sur la liberté d'association et de réunion de la Commission ;
Alarméepar les informations de plus en plus nombreuses faisant état d'attaques contre des journalistes et de restrictions à leur travail, notamment la fermeture de maisons et d'organes de presse, depuis le début de la pandémie de coronavirus ;
La Commission africaine engage les États parties à :
1. Prendre toutes les mesures nécessaires pour honorer les obligations qui leur incombent en vertu de la Charte africaine et des autres instruments internationaux et régionaux garantissant le droit à la liberté d'expression et à l'accès à l'information, et appliquer les principes énoncés dans la Déclaration ;
2. Garantir la sécurité des journalistes et autres professionnels des médias, et créer un environnement propice à l'exercice de leur profession ;
3. Assurer que les journalistes et autres professionnels des médias bénéficient de protection lorsqu'ils couvrent des manifestations et des rassemblements de masse et veiller à ce que les responsables de la sécurité soient formés à cet effet ;
4. Abroger les lois pénalisant la diffamation ou l'injure qui entravent la liberté d'expression ;
5. Réviser les lois relatives à la garantie de la liberté d'expression pour assurer qu'elles sont conformes aux normes régionales et internationales en matière de liberté d'expression ;
6. Veiller à ce que le droit de s'exprimer par le biais des médias ne soit pas soumis à des restrictions légales injustifiées ;
7. S'abstenir de fermer les organes de presse, conformément au Principe 9 de la Déclaration sur les restrictions justifiables à la liberté d'expression ;
8. Veiller à ce que les journalistes puissent avoir accès à l'information et rendre compte librement et avec précision des mesures prises par les pouvoirs publics contre les effets et la propagation du coronavirus ;
9. Enquêter sur les actes d'agression à l'encontre des journalistes et autres professionnels des médias, poursuivre et en punir les auteurs, veiller à ce que les victimes aient accès à des recours efficaces et prendre des mesures spécifiques pour assurer la sécurité des femmes journalistes et professionnelles des médias en tenant compte des problèmes de sécurité propres à chaque sexe.
Fait virtuellement, le 03 décembre 2020