La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, réunie en sa 62ème Session ordinaire tenue à Nouakchott, République Islamique de Mauritanie du 25 avril au 9 mai 2018 ;
Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples en Afrique en application de l’article 45 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine) ;
Gardant à l'esprit les obligations de la République du Togo en tant qu'Etat membre de l'Union africaine et Etat partie à la Charte africaine, à la Charte africaine sur la démocratie, les élections et la gouvernance et aux autres instruments régionaux des droits de l'homme ;
Considérant les Principes m et n de l’Acte Constitutif de l’Union africaine; sur le respect des principes démocratiques, des droits de l’homme, de l’état de droit et de la bonne gouvernance, la promotion de la justice sociale pour assurer le développement économique équilibré;
Considérant les dispositions de la Charte africaine de la démocratie, des élections, et de la gouvernance, notamment en ses articles 3 (1), 13 et 32.8, sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques, l’obligation des Etats parties de prendre des mesures pour établir et maintenir un dialogue politique et social, ainsi que la transparence et la confiance entre les dirigeants politiques et les populations en vue de consolider la démocratie et la paix, le renforcement et le respect du principe de l’État de droit ;
Rappelant en outre les articles 4, 6, 9, 11,13 et 23 de la Charte africaine qui garantissent le droit à la vie et à l’intégrité physique, à la liberté et à la sécurité de sa personne, le droit à la liberté d’expression, le droit de réunion et de manifestation pacifique, de participer à la gestion des affaires publiques de l’Etat ainsi que le droit à la paix et la sécurité sont garantis par la Charte africaine ;
Gravement préoccupée par la situation qui prévaut depuis le 19 août 2017 au Togo, suite aux multiples manifestations pour réclamer des réformes constitutionnelles et institutionnelles dont le vote des togolais de la diaspora ainsi que la limitation des mandats présidentiels, caractérisée par des atteintes à la liberté d’expression, d’opinion et de manifestation, des atteintes à la vie, à l’intégrité de la personne humaine, à la propriété privée et publique, à la liberté de mouvement, l’usage disproportionnée de la force envers les manifestants et d’autres formes de violence ayant occasionnée plusieurs déplacements internes des populations;
Prenant note de la rencontre entre le gouvernement et les différents partis organisateurs des manifestations le 19 février 2018, en vue de rechercher une solution pacifique à la crise actuelle ;
Se réjouissant, de la désignation des chefs d’Etats de la CEDEAO, des présidents Ghanéen et Guinéen, leurs Excellences Nana Addo Dankwa Akufo-Addo et, le Professeur Alpha Condé, comme facilitateurs de la crise togolaise au cours de leur rencontre extraordinaire à Lomé, le 14 Avril 2018 ;
Reconnaissant l’importance de la protection et la promotion des droits de l’homme, de la démocratie, de l’Etat de droit et de la consolidation de la paix sur le Continent ;
Rappelant la responsabilité première de l’Etat à garantir le respect et la protection effective des droits conformément à la Charte africaine et des autres instruments pertinents des droits de l’homme ratifiés par le Togo ;
Rappelant également la responsabilité des chefs des partis d’opposition à s’assurer que leurs militants respectent la loi et ne posent aucun acte susceptible de violer l’ordre public et la sécurité nationale.
La Commission :
1. Condamne fermement toutes les violations de droits de l’homme ayant eu lieu et appelle le Gouvernement togolais à y mettre un terme, particulièrement les arrestations, tortures, détentions arbitraires et autres.
2. Demande que des enquêtes impartiales et indépendantes en vue d’identifier les auteurs présumés de ces violations, afin qu’ils soient jugés dans le respect de la loi, soient menées.
3. Exhorte les autorités togolaises à poursuivre le processus de dialogue avec toutes les parties prenantes pour la préservation de la paix et de la sécurité au Togo.
4. Exhorte également les partis de l’opposition à privilégier le dialogue et à s’abstenir de tout acte de violence ;
5. Demande aux différentes parties de privilégier l’entente et l’unité nationales et de s’abstenir de toute initiative susceptible de rompre les grands équilibres sur lesquels le Togo est bâti.
6. Décide d’effectuer une mission générale de promotion des droits de l’homme au Togo en collaboration avec les autorités gouvernementales.
Adoptée lors de la 62ème Session ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples tenue à Nouakchott, République Islamique de Mauritanie, du 25 avril au 9 mai 2018