Résolution sur la situation des droits de l’homme en République Démocratique du Congo - CADHP/Rés. 393 (LXII) 2018

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La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Commission), réunie à l’occasion de sa 23ème Session extraordinaire tenue du 13 au 22 février 2018 à Banjul, Gambie :

 

Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples en vertu de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine) ;

 

Rappelant en outre les obligations de la République Démocratique du Congo (RDC) en tant qu'Etat membre de l'Union africaine, Etat partie à la Charte africaine, à la Charte africaine sur la démocratie, les élections et la gouvernance et aux autres instruments régionaux et internationaux pertinents des droits de l'homme ;

 

Rappelant les dispositions des Articles 3 (2), 4 et 23 de la Charte africaine relatives aux  obligations des Etats parties à protéger la vie des populations et à garantir la paix et la sécurité sur leurs territoires ;

 

Rappelant en outre l’importance de la promotion et la  protection des droits de l’homme, de la démocratie, de l’Etat de droit et de la consolidation de la paix sur le Continent ;

 

Gardant à l'esprit ses résolutions CADHP/Rés.90 XXXVIII) 05 ; CADHP/Rés.103 (XXXX) 06 ; CADHP/Rés.139 XXXXIV) 08 ; CADHP/Rés.173 (XLVIII) 10 ; CADHP/Rés.241(EXT.OS/XIV) 13 ; CADHP/Rés.284(LV) 14 et CADHP/Rés.358 (LIX) 16 sur la situation des droits de l’homme en République Démocratique du Congo  ainsi que le Communiqué de presse sur la situation des droits de l’homme en RDC publié en date 8 Janvier 2018;

 

Rappelant que le rôle principal des forces de l’ordre et de défense y compris l'armée congolaise (FARDC), la police nationale du Congo (PNC) ainsi que leurs auxiliaires est de garantir la protection des populations et leurs biens;

 

Préoccupée par la détérioration continue de la situation politique, sécuritaire, humanitaire et des droits de l'homme en République démocratique du Congo;

 

Préoccupée par les allégations de violations graves et massives des droits de l’homme perpétrées contre les populations civiles et consécutives aux affrontements violents entre la milice Kamwina Nsapu et les forces de défense et de sécurité congolaises dans les provinces du Kasaï ; 

 

Profondément préoccupée notamment par les morts d’hommes, les exécutions sommaires, les actes de torture, les mutilations, les violences sexuelles, les arrestations et les détentions arbitraires, les déplacements massifs et forcés des populations, les actes de pillages et de destructions des biens survenus dans le territoires de Kamonia à la suite de la mort du chef coutumier Jean-Prince Mpandi, alias "Kamwina Nsapu" tué dans un assaut militaire le 12 août 2016 ;

 

Profondément préoccupée en outre par les allégations de violations graves et massives des droits de l'homme, notamment les pertes en vies humaines, les blessés graves, les arrestations et les détentions arbitraires ainsi que la répression des défenseurs des droits humains, activistes, journalistes et opposants au régime en place à la suite des manifestations pacifiques organisées depuis le 31 décembre 2017 par des groupes de citoyens, pour protester contre le refus de l’alternance politique et le report incessant des élections présidentielles ;

 

Notant l’absence d’enquêtes sur ces allégations de violations des droits de l’homme et l’impunité dont peuvent jouir les auteurs de ces faits;

 

Condamne fermement les violations graves et massives des droits de l’homme intervenues dans les différentes provinces de la République Démocratique du Congo ainsi que l’impunité qui les couvre;

 

Condamne en outre l'usage abusif et disproportionné de la force et toutes les autres violations des droits de l'homme contre des manifestants pacifiques ;

 

Exhorte les autorités de la République Démocratique du Congo à :

 

-           Prendre toutes les mesures appropriées en vue de mettre un terme à toute situation de violations des droits de l’homme en cours dans les différentes provinces et villes du pays, plus particulièrement au Kassaï;

 

 

 

-          mettre un terme aux arrestations et détentions arbitraires et libérer immédiatement les manifestants, les opposants politiques, les journalistes, et les défenseurs des droits de l’homme détenus arbitrairement, mener des enquêtes effectives, indépendantes et impartiales pour faire la lumière sur les différentes  violations des droits de l’homme commises sur le territoire en vue de poursuivre et de juger les présumés auteurs  et leur garantir le droit à un procès équitable ;

 

 

 

-          Coopérer avec la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples en autorisant une mission d’établissement des faits en vue d’enquêter, entre autres, sur les allégations des violations des droits de l’homme perpétrées dans le pays ;

 

 

 

-          Coopérer pleinement avec les experts internationaux nommés par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies pour établir les faits et les circonstances des violations perpétrées dans le Kassaï depuis août 2016, notamment en leur donnant accès aux zones et villages touchés par la violence et en leur permettant de parler aux victimes en toute sécurité et confidentialité ;

 

 

 

Exhorte enfin la classe politique congolaise à respecter et à mettre effectivement en œuvre l’Accord politique de la Saint Sylvestre du 31 décembre 2016 et invite les différentes parties prenantes à prendre toutes les mesures idoines en vue de préserver la paix sociale en privilégiant le dialogue et le consensus. 

 

 Fait à Banjul, Gambie, le 22 février 2018