Résolution sur la situation des personnes déplacées internes en Afrique - CADHP/Rés.369(LX)2017

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La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, réunie en sa 60ème Session ordinaire tenue à Niamey, Niger, du 8 au 22 mai 2017 ;

Rappelant son mandat de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples en Afrique en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine) ;

 

Rappelant les dispositions de l’article 23 de la Charte africaine qui garantit aux peuples le droit à la paix et à la sécurité tant sur le plan national que sur le plan international, entre autre obligations ;

 

Rappelant en outre les engagements  de mise en œuvre issus de  la 1ère Session de la Conférence des Etats parties à la Convention de Kampala  tenue à Harare, Zimbabwe, en  avril 2017 ;

 

Ayant à l’esprit son rapport de 2016 sur la mission d’établissement des faits au Burundi, et celui de la  Commission d'enquête de l'Union africaine sur le Soudan du Sud de 2015 ;

 

Rappelant en outre sa Résolution CADHP/Rés.335 (EXT.OS/XIX) 2016 sur la situation des personnes déplacées internes en Afrique ;

 

Considérant les dispositions des Principes directeurs des Nations Unies relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays, la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala), particulièrement les dispositions de l’article 3 qui  demandent aux Etats parties de s’abstenir de pratiquer, interdire et de prévenir le déplacement arbitraire des populations ;

 

Rappelant l’engagement des Etats parties contenu dans le préambule de la Convention de Kampala d’apporter des solutions durables aux situations des personnes déplacées internes, par la mise en place d’un cadre juridique approprié pour leur apporter protection et assistance et l’adoption de mesures afin de prévenir et de mettre fin aux déplacements internes, en éradiquant les causes premières, que sont les conflits persistants et récurrents, les déplacements causés par les catastrophes naturelles et les projets de grands développement qui ont un impact dévastateur sur la vie humaine, la paix, la stabilité, la sécurité et le développement ;

 

Profondément préoccupée par le nombre croissant des populations déplacées internes  sur le continent et particulièrement au Soudan du Sud,  au Burundi au Nigéria, au Congo, en République Démocratique du Congo, au Niger et au Cameroun ;

 

Préoccupée par l’aggravation continue de la violence au Soudan du Sud, et le nombre croissant des personnes ayant besoin de protection, d’abris, de soins médicaux et d’autres formes d’assistance ;

 

Inquiète par l’absence d’informations concernant la situation de 3000 déplacés internes sud soudanais  qui manquent toujours sur les  20 000 déplacés internes portés disparus  en février 2017, et par le constant refus des forces gouvernementales de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS) de permettre aux membres de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) d’effectuer des recherches pour les  localiser ;

 

Interpelée par la persistance des violations des droits de l’homme au Burundi, contre les personnes déplacées internes particulièrement par les actes d’intimidations, la dégradation de la situation sécuritaire et socio-économique et la multiplication des actes discriminatoires, particulièrement dans les camps de Ruhororo (Province de Ngozi) et de Mutaho (Province de Gitega).

 

Consternée par le nombre grandissant de déplacés internes au Congo Brazzaville (près de 22 000), suite à l’intensification des combats armés dans la région du Pool et l’absence d’informations concrètes quant à leurs conditions de vies ;

 

Egalement concernée par la situation critique de près de 1 700 000 déplacés internes au Nigeria et l’urgence de leur apporté une aide adéquate, notamment en matière de services sociaux, éducationnels, et sanitaires  et de protection contre les violences sexuelles et basées sur le genre y compris par les forces de sécurité ;

 

Préoccupée par  la situation de plus de 1.000.000  de déplacés internes en République Démocratique du Congo et particulièrement dans la région du Kasai ;

 

Interpellée par la situation des déplacés internes dans la région de Diffa au Niger suite aux activités terroristes de Boko Haram qui ont  causé le déplacement massive de plus de 283 930 personnes  et dont la situation demeure précaire ;

 

Préoccupée en outre par l’augmentation constante du nombre de déplacés interne à l’extrême nord du Cameroun de plus de 222 000 du fait des activités criminelles de Boka Haram, et la nécessité de les assister et d’assurer leur protection ;

 

Rappelant la responsabilité  première des Etats africains  d’apporter protection et assistance humanitaire à leurs ressortissants et particulièrement aux personnes déplacées internes sans discrimination ;

 

Rappelant  en outre la nécessité pour les Etats d’encourager  les rôles des organisations humanitaires internationales qui apportent assistance à leurs ressortissants conformément au droit international ;

 

La Commission :

 

1.     Demande aux autorités des pays en cause de prendre les dispositions nécessaires afin de respecter les droits humains de toutes les personnes déplacées internes et de veiller à ce qu’elles reçoivent toute l’assistance et la protection  adaptées à leur situation ;

 

2.     Demande au Burundi de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des personnes déplacées dans les Camps de Ruhororo (Province de Ngozi) et de Mutaho (Province de Gitega) ;

 

3.     Demande aux forces gouvernementales de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS)  de permettre aux forces de la Mission des Nations Unies en République du Sud Soudan, de conduire des patrouilles pour s’assurer de la sécurité de personnes déplacées internes et  s’informer sur la situation des 3000 déplacés internes qui demeurent introuvable à ce jour ;

 

4.     Demande aux autorités de la République du  Congo d’assurer la protection des populations du Pool et particulièrement les personnes déplacées internes suite aux combats armées en cours dans cette région ;

 

5.     Demande aux autorités de la République Fédérale du Nigeria, de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer la sécurité des personnes déplacées internes, l’accès aux services sociaux et sanitaires et la protection contre les violences sexuelles et basées sur le genre ;

 

6.      Demande à la République Démocratique du Congo de continuer sa collaboration avec les agences des Nations unies pour assurer la protection des déplacés internes, particulièrement dans la région du Kasai ;

 

7.     Encourage la République du Niger à poursuivre l’aide et l’assistance envers les déplacés internes dans la région de Diffa et de prendre les mesures adéquates pour assurer leur protection ;

 

8.     Demande aux autorités de la République du Cameroun de prendre les mesures nécessaires pour assister les personnes déplacées internes suites aux attaques terroristes de Boko Haram et d’assurer leur protection ;

 

9.     Exhorte l’Union africaine à intensifier les efforts de résolutions des conflits,  et la lutte contre les groupes terroristes  dans le respect des droits de l’homme tel que garanti par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples en prêtant assistance aux Etats visés ;

 

10.  Demande aux Etat membres d’accélérer la mise en œuvre de la Politique Africaine  Commune sur l’Efficacité Humanitaire (PAC) en vue d’apporter le soutien nécessaire aux états dans la gestion des déplacements massifs des populations ;

 

11.  Invite la communauté internationale et les organismes humanitaires à renforcer leur aide aux personnes déplacés dans les pays concernés;

 

12.  Invite les autorités du Soudan du Sud, du Burundi, de la République Démocratique du Congo et tous les Etats parties ne l’ayant pas encore fait à ratifier la Convention de Kampala ;

 

13.  Exhorte les Etats parties à la Convention de Kampala à prendre toutes les mesures nécessaires à la protection des populations contre les déplacements forcées quelque qu’en soient les causes.

 

Fait à Niamey, République du Niger, le 22 mai 2017