La Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples réunie en sa 48ème Session ordinaire, organisée à Banjul, Gambie, du 10 au 24 novembre 2010 ;
Réaffirmant son mandat de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples en vertu de la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Charte africaine) ;
Constatant que la liberté d’expression est un droit de l’homme fondamental garanti par les instruments régionaux et internationaux, notamment par l’article 9 de la Charte africaine, l’article 19 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (DUDH) et du Pacte international relatif aux Droits civils et politiques (PIDCP), l’article 13 de la Convention américaine des Droits de l’Homme (la Convention américaine) et l’article 10 de la Convention européenne des Droits de l’Homme (la Convention européenne) ;
Rappelant la Résolution sur la Liberté d’Expression adoptée au cours de sa 29ème Session, qui s’était tenue du 23 avril au 7 mai 2001 à Tripoli, en Libye, et prévoyant la création d’un mécanisme chargé d’évaluer et de contrôler le respect des normes de la liberté d’expression, d’enquêter sur les violations et de faire les recommandations appropriées ;
Consciente de la Résolution CADHP/Res.62(XXXII)02 sur la Déclaration de Principes sur la Liberté d’Expression en Afrique de 2002 (la Déclaration) qui précise la portée de l’article 9 de la Charte africaine et en particulier le principe II (1) qui stipule que « aucun individu ne doit faire l’objet d’une ingérence arbitraire à sa liberté d’expression; »
Prenant note du Préambule de la Déclaration qui souligne, entre autres, « le rôle crucial des médias et des autres moyens de communication pour garantir le respect total de la liberté d’expression, en favorisant la libre circulation des informations et des idées, en aidant les populations à prendre des décisions en connaissance de cause et en facilitant et renforçant la démocratie » ;
Notant le Principe XII (1) de la Déclaration qui protège la réputation en stipulant que « les Etats doivent s’assurer que leurs lois relatives à la diffamation sont conformes à certains critères, notamment au fait que nul ne doit être puni pour des déclarations exactes, des opinions ou des déclarations concernant des personnalités très connues qu’il était raisonnable de faire dans les circonstances» ;
Rappelant, la Résolution sur le Mandat et la Désignation d’un Rapporteur spécial sur la Liberté d’Expression en Afrique, adoptée à l’occasion de sa 36ème Session ordinaire, tenue du 23 novembre au 7 Décembre 2004, à Dakar, Sénégal ;
Prenant note de la Déclaration de Table Mountain, adoptée en 2007 par l’Association mondiale des Journaux et Editeurs de Médias d’Information et le Forum mondial des Editeurs, qui appelle, notamment « les Etats Parties à abroger les lois réprimant les outrages et la diffamation, afin de promouvoir les normes les plus élevées en matière de liberté de la presse en Afrique » ;
Notant, en outre, la Déclaration d’Addis-Abeba sur la Sécurité et la Protection des Journalistes, adoptée le 3 septembre 2010, par le Séminaire régional sur la Sécurité et la Protection des Journalistes africains ;
Soulignant que les lois pénalisant la diffamation constituent une grave entrave à liberté d’expression et compromettent le rôle de contrôle des médias car remettant en cause le devoir des journalistes et des professionnels des médias de pratiquer leur profession sans crainte et de bonne foi ;
Exprime sa préoccupation devant la dégradation de la liberté de la presse dans certaines parties du continent africain et, en particulier les législations restrictives qui censurent le droit des populations à l’accès à l’information, les agressions directes sur les journalistes, qui se soldent par leur arrestation et leur placement en détention, des agressions physiques et des assassinats, du fait de déclarations ou de documents publiés contre des représentants du gouvernement
Félicite les Etats Parties qui n’ont pas de lois réprimant les outrages et pénalisant la diffamation ou qui ont totalement abrogé ces lois ;
- APPELLE les Etats Parties à abroger les lois, comme celles pénalisant la diffamation ou réprimant les outrages, qui sont conçues pour entraver la liberté d’expression, et à adhérer aux dispositions de la Charte africaine, de la Déclaration et des autres instruments régionaux et internationaux garantissant la liberté d'expression ;
- APPELLE également les Etats Parties à s’abstenir d’imposer des restrictions de portée générale constitutives, en elles-mêmes et par elles-mêmes, de violations de la liberté d’expression ;
- EXHORTE les journalistes et les professionnels des médias à respecter les principes de la déontologie journalistique ainsi que les normes dans la collecte, la diffusion et l’interprétation d’informations correctes, afin de prévenir toute restriction à la liberté d’expression ainsi que les poursuites;
- EXHORTE, en outre, les Etats Parties à mettre en œuvre les recommandations et les appels du/de la Rapporteur(e) spécial(e).